La répression des infractions se rapportant aux violences sexuelles dans le contexte de crise de la Justice congolaise : Cas du Viol( Télécharger le fichier original )par Leslie MOSWA MOMBO Université de Nantes - Diplôme Universitaire de 3ème cycle en Droit Fondamentaux 2007 |
2. Volonté d'extermination du peuple congolaisLes militaires étrangers qui ont combattu sur le sol congolais ont usé d'une cruauté extrême à l'égard des femmes congolaises. Venant pour la plupart du Rwanda, de l'Ouganda et du Burundi, pays connu pour leur forte prévalence du VIH/SIDA, les militaires étrangers ont propagé délibérément le virus à travers la commission de viol massif sur les femmes congolaises. Certaines d'entre elles sont fermement convaincues que « la violence et la cruauté extrêmes dont des éléments des forces combattantes étrangères ont fait preuve à leur encontre, attestent bien l'existence d'un plan de destruction et d'extermination du peuple congolais, ou des communautés auxquelles elles appartiennent »85(*). Le témoignage ci - après d'une victime en dit long à ce sujet : « Ils viennent tuer et détruire, car si c'était seulement pour satisfaire les besoins sexuels, ils ne se mettraient pas à violer des femmes de 86 ans ou des enfants de moins de 11 ans. C'est pour dire qu'ils cherchent à nuire et à détruire»86(*). L'Institut américain pour la Paix (US Institute for Peace) estimait, en 2001, que la prévalence du VIH parmi les combattants de la guerre au Congo était de 60 pour cent87(*). Il est évident que les femmes atteintes par le virus lors du viol affecteront à leur tour les hommes de leur communauté. Certaines victimes pensent que leurs agresseurs ont eu recours au viol pour accomplir le projet de destruction de l'identité des femmes à travers la « purification ethnique », visant ainsi la production des bébés non congolais88(*). 3. Ritualisation du viol pour capter ou neutraliser des forces magiquesLe viol des filles vierges, des femmes enceintes et celles qui allaitent ainsi que des femmes pygmées durant les conflits armés a revêtit une grande importance pour les forces combattantes Maï - Maï. Selon des croyances largement répandues à l'Est de la RDC, le viol de ces catégories de femmes conférerait des pouvoirs magiques et d'invincibilité sur le champ de bataille89(*) tels le fait de transformer les balles de fusil en eau ou le fait de se rendre invisibles sur le champ de bataille. C'est ainsi que les combattants Maï - Maï ont été auteurs de viols massifs des femmes durant les guerres successives. Nous citerons par exemple le viol d'un nombre important de jeunes filles et jeunes femmes de 12 à 18 ans et de 18 à 45 ans dans les villages de Mboko, Basmukuma et Babungwe au Sud - Kivu parce qu'elles étaient soit vierges, soit enceintes, soit qu'elles avaient un bébé au sein, soit qu'elles étaient pygmées et cela en vue de s'assurer la victoire devant leurs ennemis. Outre ces catégories cités, les femmes âgées ont été également la cible de ces atrocités. En effet, d'après un tradition qui remonte au début des années 1960 durant l'époque où la RDC avait connu la rébellion Muléliste, « les vielles femmes seraient les détentrices et les gardiennes des fétiches qui confèrent aux combattants Maï - Maï leur puissance et leur invulnérabilité durant les combats »90(*). Elles étaient réputées posséder des pouvoirs magiques qui leur permettaient de préparer et d'administrer des potions magiques nommées « dawa » et « monganga » destinée à conférer l'invulnérabilité, la force, la protection et la victoire91(*). Violer ces femmes âgées que l'on n'hésitait pas à qualifier de « sorcières » signifiait désacraliser et détruire les pouvoirs magiques des Maï - Maï. Ce sont ces croyances qui expliquent les viols perpétrés contre les femmes âgées par les forces militaires opposées aux Maï Maï, particulièrement par les forces du RCD et l'APR. * 85 Ibidem, p. 48, < http://www.grandslacs.net/doc/4051.pdf> * 86 Réseau des Femmes pour un Développement Associatif, Réseau des Femmes pour la Défense des Droits et la Paix, International Alert, op. cit., p. 48, < http://www.grandslacs.net/doc/4051.pdf> * 87 United States Institute for Peace, "Special Report: AIDS and Violent Conflict in Africa" October 2001, p. 5. * 88 Réseau des Femmes pour un Développement Associatif, Réseau des Femmes pour la Défense des Droits et la Paix, International Alert, op. cit., p. 48, < http://www.grandslacs.net/doc/4051.pdf> * 89 Idem, p. 48, < http://www.grandslacs.net/doc/4051.pdf> * 90 Ibidem, p. 48, < http://www.grandslacs.net/doc/4051.pdf> * 91 Voir VLASSENROOT, K., Violences et constitution des milices dans l'Est du Congo : le cas des Mayis Mayis, « L'Afrique des Grands Lacs », Annuaire 2001-2002, sous la direction de F. Reyntjens et S.Marysse, Centre d'Etudes de la Région des Grands Lacs d'Afrique, Anvers, L'Harmattan, Paris, 2003, pp. 115-152. |
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