2-La deuxième visite
Quelque soit le résultat de la prestation de son fils,
le père du garçon effectue une seconde visite pour obtenir la
réponse à la question posée lors de la première
rencontre.
a- La réponse
Il est de coutume chez les Antemoro de faire entrer le
visiteur dans la maison avant de le saluer. C'est au visiteur lui même de
dire l'objet de sa présence. Le père du garçon prend la
parole et dit : « je reviens demander la réponse à la
question que je vous avais posé concernant le désir de mon
fils. »103
Le père de la fille est en effet tenu de se prononcer
au cours de cette deuxième visite. Il a d'ailleurs le pouvoir souverain
sur la position qu'il va prendre en tant que père de la fille donc en
tant que personne qui détient l'autorité sur la fille. En fait
cette autorité, il ne la possède pas
102 ABINAL et de LAVAISSIERE, Vingt ans à
Madagascar, 1885, p.179.
exclusivement, mais elle est partagée avec sa femme,
mère de la fille et sa famille. Le père ne fait que
représenter toutes ces entités.
La société n'autorisant plus le rapt, la
réponse négative de sa part n'est pas négociable. Le
projet du garçon ne risque pas de voir le jour. S'il est d'accord, il
dit : « Ma femme et moi, ainsi que ma famille avons pris la
décision de vous offrir notre fille».104
Il ne faut pas se leurrer. Cet accord porte seulement sur le
projet du garçon. Il implique l'ouverture de l'établissement du
consensus entre les deux familles.
DESCHAMPS disait que « jadis les fiançailles
étaient décidées par les deux familles, après qu'on
eût étudié avec l'aide de l'ombiasa les destins des futurs
conjoints et leur degré de parenté » 105
Les deux familles prennent cependant l'affaire en main. Ils
analysent la faisabilité du projet. Ils vont chez l'ombiasa (le
magicien) capable d'interpréter le « vintana » ou destin de
chacun des futurs conjoints.
La décision des deux parents dépend de l'oracle. Si
l'ombiasa est d'accord, les deux parents négocient la compensation
matrimoniale.
b- La confirmation de la réponse
Les parents étant d'accord sur le projet du
garçon, les fiançailles sont conclues. « Les
fiançailles forcées étaient employées en vue de
l'émancipation (...). Il y avait aussi d'autres buts qui subsistent plus
ou moins aujourd'hui : il ne fallait pas morceler l'héritage des
ancêtres, il fallait augmenter le personnel de la famille de
préférence à celui d'une famille
étrangère. » 106
103 ROUHETTE, L'organisation politique et sociale du Royaume
Antemoro, p.71.
104 ROUHETTE, L'organisation politique et sociale du Royaume
Antemoro, p.71.
105 DESCHAMPS, Les malgaches du Sud-Est, p.61.
106 MESSELIERE, Du mariage en Droit malgache,1932, p. 135
Les intérêts mis en cause sont cependant vitaux.
Pour renforcer l'accord, les deux parents vont chez le Loholona.
Le Loholona est le chef du Fatrange107 qui «
détient l'autorité pour tout ce qui concerne la vie
familiale ».108 Le fait même de porter à la
connaissance du Loholona le projet de fiançailles suffit pour les deux
parents de le rendre irrévocable. Et comme c'est le père qui
détient l'autorité sur la fille qui n'est pas encore
mariée, elle est liée aussi par l'accord.
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