B- Le décès de la femme
Quand une femme est morte, chez le peuple indigène, le
drame est immense. Une mère d'enfants a quitté le monde, donc
elle ne pourra plus donner d'enfants. La rareté de la femme à
l'époque accentue l'émotion. Pour éviter
l'éclatement des conflits familiaux ou tribaux, la coutume écarte
la présomption de culpabilité de l'homme, au contraire, elle
soutient le veuf.
1- La présomption d'irresponsabilité du
veuf
La permanence de la guerre dans les tribus de l'époque,
conduit les hommes à être violents. Cette violence est
nécessaire pour la protection des autres membres du groupe, notamment
les vieillards, les femmes et les enfants. Tous les hommes sont censés
protéger leur prochain, sous peine d'être inutile pour la
société.
Les hommes sont par conséquent conditionnés
à être violents. Un acte pouvant aller jusqu'à donner la
mort à leur femme, aussi précieuse soit elle pour sa famille, est
excusé par toute la société. Le veuf va
bénéficier d'une présomption d'irresponsabilité en
cas de décès de sa femme. « On suppose que le veuf a agi
imprudemment sans doute, en commettant un « acte déterminant
», mais par le fait même on l'excuse. » 75 Cette
indulgence à la violence des hommes est en l'occurrence utile pour les
encourager à être de bons guerriers. Les sanctionner affaiblit la
morale des hommes donc ce sera préjudiciable pour la
société.
C'est l'autorité du père sur la femme
transférée au mari qui peut expliquer cette coutume. Le
décès de la femme, à partir de là n'oblige pas le
mari à montrer à sa belle famille la profondeur de son chagrin.
D'ailleurs, il a enlevé sa femme avant de l'épouser.
A côté de cette coutume, il y a aussi l'ancrage de
la superstition dans les moeurs.
Dans le subconscient collectif de ce peuple, on croit que
certains actes peuvent entraîner la mort de l'époux ou de
l'épouse sans que rien puisse l'empêcher de se réaliser, ce
sera par exemple « le fait (...) de présenter un plat
à quelqu'un en lui tournant le dos. Dans tous ces cas76,
que l'acte ait été commis sciemment ou imprudemment, ce sera
le veuvage à bref délai. » 77
Cette croyance renforce l'autorité de chaque
époux dans la famille. C'est souvent la femme qui en subit les
conséquences dans la mesure où elle est tenue de rendre compte
aux parents de l'homme de l'événement qui aurait tué son
mari. Mais l'homme est excusé d'avance.
Bien entendu, ce n'est pas pour se faire tuer par leur mari
que les femmes se marient, et inversement l'homme ne cherche pas à tuer
sa femme dès que l'occasion se présente. Au contraire, l'objectif
commun est de procréer, augmenter le nombre de la famille pour avoir de
la main d'oeuvre et de l'autorité politique. Il ne faut pas non plus
oublier que la femme peut mourir de façon naturelle.
Quelque soit les circonstances de la mort de la femme, les
familles des deux époux continuent leur amitié. Et pour prouver
sa bonne foi, la famille de la fille propose au veuf l'une de ses soeurs de la
défunte.
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