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Le cinéma d'horreur en France : entre culture et consommation de masse

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par Laure HEMMER
EAC Paris - Master 1 Management de projets culturels 2007
  

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2.1.3.2. Les salles indépendantes : quelle place pour le

fantastique/horreur ?

Dans l'après-guerre, des salles indépendantes étaient spécialisées dans le fantastique et drainaient une foule de gens mondains qui voulaient se faire peur, diffusant surtout des films de la Hammer. On en comptait cinq, toutes situés sur les Grands Boulevards à Paris : le Styx, le Mexico, le Colorado, le Midi-Minuit et le Brady. Les quatre premiers n'ont guère perduré au-delà du milieu des années 1960, les spectateurs se faisant plus rares avec la démocratisation du média télévisuel et la fin des films gothiques anglais. Le public aimant se faire peur avec les montres classiques n'est pas le même que celui qui voit naître le cinéma gore et le giallo : plus jeune, moins riche et recherchant la provocation. Un conflit de génération en somme. Cependant, le Brady était encore dédié au cinéma fantastique jusque dans les années 1970, assure Christophe Lemaire, qui a bien connu l'ambiance de ce lieu mythique, connu dans le monde entier. Mais le cinéma indépendant a été repris par Jean-Pierre Mocky, qui programme toujours des séances fantastique/horreur mais n'en fait plus son fonds de commerce exclusif.4 Une autre salle était également réputée pour ses projections de films d'horreur, il s'agit de l'Orient-Express au forum des Halles à Paris, faisant partie du groupe UGC mais dirigé par une équipe désireuse de concourir à la diffusion du cinéma dans sa diversité. Cette salle est connue de tous les amoureux de cinéma fantastique et des cinémas à l'ancienne

1 idem

2 Voir statistiques du CNC sur fréquentation des salles ; la majorité en sont des clients fidèles

3 Bilan 2007, CNC, chapitre 9

4 Il a frisé la fermeture en 2002, ne bénéficiait pas du statut de salles d'Art et Essai et les aides n'étaient pas suffisantes pour alimenter ses frais de fonctionnement

(les vibrations du métro et l'état de délabrement des sièges l'ont rendue célèbre). Par exemple elle était une des rares salles à projeter en même temps deux films d'horreur la première semaine de mars 2008 : The Mist de Franck Darabont (programmé dans 40 salles la première semaine, 22 la deuxième1) et 2eme sous-sol produit par Alexandre Aja (moins de 60 copies). Mais il semble toutefois que cela constitue une exception au regard de la programmation habituelle, qui reste tout de même similaire à celle des autres cinémas. Force est de constater qu'aujourd'hui, il n'y a plus guère de salles uniquement axées sur le fantastique (et encore moins sur l'horreur).

Cependant, avec la récente polémique autour du manque de visibilité des films de genre, il semblerait que quelques personnes faisant partie du Club du Vendredi 13 songent à un tel projet. Or les salles généralistes on déjà du mal à faire face à la montée du marché DVD, télévisuel et maintenant Internet, qui permet une consommation moins contraignante et perçue comme moins chère aux yeux des consommateurs d'images domestiques. Y'a-t-il une place pour des salles spécialisées dans les films de genre, bis ou fantastique/horreur ? Malgré l'importance relative des films d'horreur au cinéma, la production agréée ne permettrait pas de programmer des salles entièrement avec ces films, puisque dans les meilleurs cas, il y a 2 ou 3 films d'horreur à l'affiche par semaine, guère plus. Etant les partenaires privilégiés des festivals, les cinémas indépendants peuvent diffuser plus de films d'horreur que les circuits, disposant d'une plus grande liberté de programmation. Or à peu près la moitié de celles-ci sont classées Art et Essai, ce qui induit des impératifs de programmation. En effet, le classement des salles pouvant en bénéficier s'effectue sur avis de la commission Art et Essai du CNC, qui procède selon plusieurs critères2. Les films recommandés Art et Essai -dont près de la moitié sont français- pèsent pour près de 75% dans ces salles agréées en 20053, qui peuvent dès lors bénéficier de fonds supplémentaires, pour financer leur fonctionnement quotidien. « EN 2005, l'offre de nouveaux films recommandés Art et Essai se compose de 30,6% de comédies dramatiques et de 27% de drames. Les deux autres genres représentant une part importante des films recommandés nouveaux sont le documentaire et la comédie4. » Il semble dès lors que parmi eux, les films fantastiques, de genre ou d'horreur n'aient pas leur place. Pourtant, les critères définis par décret pour la recommandation de films relevant de cette catégorie pourraient s'appliquer à plus d'un film de genre : « oeuvres cinématographiques ayant un caractère de recherche ou de nouveauté dans le domaine

1 Source CBO- Box Office

2 Dont les principaux sont la proportion de films recommandés Art et Essai et l'importance démographique de l'unité urbaine dans laquelle est situé le lieu de projection.

3 Etude Les salles Art et Essai, CNC, octobre 2006

4 Etude L'exploitation des films recommandés Art et Essai, CNC, octobre 2006

cinématographique ; oeuvres présentant d'incontestables qualités mais n'ayant pas obtenues l'audience qu'elles méritaient ; oeuvres de reprise présentant un intérêt artistique ou historique1». On comprend la logique de cette démarche qui fait primer l'esthétique et le propos, l'apport et l'intérêt pour l'art cinématographique. Or des films qui aujourd'hui sont reconnus comme des monuments de l'histoire du cinéma étaient à leur époque raillés à cause de leur côté trop commercial, comme l'étaient les oeuvres d'Hitchcock.2 Et on ne compte pas l'apport du cinéma fantastique/horreur au 7e art, influençant de nombreux réalisateurs et scénaristes, de Luis Bunuel à David Cronenberg.

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