SS 2 : LES AVARIES COMMUNES
La théorie des avaries communes se
justifie par l'idée de solidarité qui domine le droit maritime,
comme par la considération technique de l'association
d'intérêts qui existe entre armateurs et chargeurs, chacun ayant
intérêt au bon achèvement de l'expédition
maritime.
Avant de procéder à un sacrifice
ou d'engager une dépense, le transporteur doit veiller à ne pas
commettre de faute. S'il veut voir l'avarie- frais ou l'avarie-dommage
être inscrite en avarie commune, il doit veiller à ce que trois
conditions soient remplies. L'avarie doit résulter d'un acte
volontaire ; elle doit être justifiée par le péril
encouru par l'expédition maritime ; enfin, elle doit être
réalisée dans l'intérêt commun.
Cette exigence d'absence de faute est capitale.
En effet, s'il est établi que la dépense est la
conséquence d'une faute du transporteur, les chargeurs qui ont
versé une contribution d'avarie commune peuvent en demander restitution
au transporteur.
SECTION 3 : LE TRANSBORDEMENT POUR DES
RAISONS COMMERCIALES
La convention de Bruxelles ainsi que le
protocole de 68 ne contiennent aucune disposition concernant le transbordement.
En principe le transporteur est supposé
décharger la marchandise au port convenu. Si toutefois il rencontre une
impossibilité de décharger au port de destination initialement
convenu, il doit prouver qu'il ne pouvait pas le faire en raison d'un
événement qui ne lui est pas imputable pour se dégager de
toute responsabilité.
Le transbordement se distingue de la
substitution de transporteur en ce qu'il intervient une fois
l'opération de transport commencée, alors que la substitution de
transporteur s'exerce avant tout commencement d'exécution du
transport.
Le devoir de transborder existe dans tous les
cas d'empêchement de poursuivre le voyage quelqu'en soit la cause. Le
transporteur ne doit jamais laisser la marchandise en souffrance ; il doit
mettre en oeuvre tous les moyens possibles pour acheminer les marchandises
à bon port dans les meilleures conditions qui soient. Il s'agit d'une
obligation de moyens renforcée. S'il n'effectue pas le transbordement,
il sera présumé responsable de négligence. Dans ce cas,
selon RODIERE, c'est au transporteur qu'il incombera de démontrer qu'il
a fait preuve de toute la diligence nécessaire.
Le transporteur peut être tenté de
transborder sa cargaison en vue de rendre disponible son navire afin
d'exécuter un contrat bien plus onéreux. Dans ce cas si
l'expédition arrive à temps et intacte à bon port, on ne
devrait pas pouvoir engager la responsabilité du transporteur du seul
fait d'avoir procédé à une opération que les
clauses de connaissement ne lui interdisaient pas d'effectuer.
En effet, le déroutement du navire et le
transbordement de la marchandise, ne constituent pas en eux même une
faute du transporteur. C'est uniquement lorsque la marchandise subit des
dommages en raison du transbordement que l'on peut relever la faute de
celui-ci.
Cependant il est totalement
compréhensible que la responsabilité du transporteur soit
engagée si les marchandises qu'il a décide de transborder ont
subi des pertes ou avaries ou encore si leur arrivée a fait l'objet d'un
retard déraisonnable en raison du transbordement lui même.
Bien entendu, les frais supplémentaires
occasionnés par un transbordement pour des raisons économiques
(manutention, fret afférant à la seconde partie du voyage)
doivent entièrement être supportes par le transporteur.
CHAPITRE 3 : LES DOMMAGES ENCOURUS EN
DEHORS DE TOUTE FAUTE DU TRANSPORTEUR
Ici, il s'agit de parler en (section 1) du transbordement pour
cause d'impossibilité de continuer le voyage ou de réparation, en
(section 2) la nature particulière de certaines marchandises et les
dommages dus aux autres cas exceptes en (section 3).
SECTION 1: LE TRANSBORDEMENT POUR CAUSE
D'IMPOSSIBILITE DE CONTINUER LE VOYAGE OU DE REPARATION
Aux termes de l'article 40 du décret du
31 déc. 66, « en cas d'interruption du voyage, le transporteur
ou son représentant doit, à peine de dommages
intérêts, faire diligence pour assurer le transbordement de la
marchandise et son déplacement jusqu'au port de destination
prévu. Cette obligation pèse sur le transporteur quelque soit la
cause de l'interruption ».
Précisons tout de même que les
tribunaux exigent que le déroutement, rendu nécessaire par le
transbordement, revêtisse un caractère raisonnable.
En cas de transbordement le transporteur doit
veiller à la propreté des installations destinées à
recueillir sa cargaison ainsi qu'au caractère approprie du mode de
transport qu'il choisit pour réaliser l'acheminement de la marchandise
dont il a la responsabilité.
Les transbordements peuvent, par exemple,
être rendues indispensables en raison d'une grève prolongée
au port de chargement initialement prévu. Dans ce cas les tribunaux ne
manquent pas de rechercher si au moment du chargement, le transporteur avait
eu connaissance ou du moins ne pouvait pas ignorer, en sa qualité de
professionnel, l'état de grève au port de destination. Bien
évidemment le transporteur qui a tout de même pris le risque de
charger la marchandise alors qu'il était au courant qu'il y aurait une
grève le jour du déchargement au port de destination, n'est
certainement pas fondé à invoquer une absence de faute de sa
part.
La jurisprudence va encore plus loin en refusant
d'appliquer la liberty clause aux motifs que la congestion portuaire et
l'encombrement des quais étaient prévisibles et ne constituaient
nullement un événement inopiné.
Lorsque le transbordement était
justifié et que le transporteur a choisi un mode de transport
approprié, celui ne devrait pas pouvoir être tenu pour
directement responsable des dommages subis pendant que la marchandise
était sous la garde et la responsabilité du transporteur
substitué. En effet, le principe veut que chacun des transporteurs
demeure responsable pour la partie du voyage qu'il a lui même
effectué.
Dans le cadre d'un transport successif, le
transporteur voulant se libérer devra attester, par le biais des
réserves qu'il aura prises à l'embarquement, que le dommage s'est
produit au cours du transport précèdent. Il faut quand même
préciser que les parties peuvent expressément ou implicitement
convenir que le premier transporteur sera tenu pour responsable de la
totalité du transport.
De même le premier transporteur est
responsable de l'intégralité du transport lorsque le second
connaissement mentionne ses propres agents comme chargeurs et destinataires.
Lorsque le transporteur s'engage dans le
connaissement à transporter la marchandise de bout en bout, il demeure
responsable, à l'égard des ayants droit, pour
l'intégralité du voyage et par conséquent, des dommages
causés à la marchandise par le fait du transporteur
substitué.
Les clauses de substitution par lesquelles le
transporteur se réserve le droit de se substituer un autre
transporteur, sans pour autant être responsable de ce dernier, ne sont
opposables au chargeur que dans la mesure où il en a eu connaissance et
les a acceptées. Le premier transporteur revêt alors la
qualité de commissionnaire de transport, et à ce titre, il
répond, en principe, de l'intégralité du transport
exécuté par le transporteur substitué. Même si le
droit commun permet au transporteur initial de s'exonérer de cette
responsabilité, ce dernier n'en demeure pas moins, en sa
qualité de commissionnaire de transport, personnellement responsable
des fautes commises dans le choix du transporteur substitué.
Le transporteur a l'obligation de prendre soin
de la marchandise sans relâche pendant les réparations.
SECTION 2 : LA NATURE PARTICULIERE DE
CERTAINES MARCHANDISES
Nous examinerons successivement la freinte de route
(§1) et le vice propre de la marchandise (§2).
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