WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Gouvernances des établissements secondaires (EPLE) : vers un nouveau modèle public ?

( Télécharger le fichier original )
par Alain VENART
Université du sud Toulon Var - IAE - Master Recherche management, Finance et Contrôle stratégiques 2008
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

2. Gouvernance et pilotage : de l'unique au réseau

Nous retrouvons alors Yvon Pesqueux dans son analyse de l'influence du New Public Management et de l'école pensée « libérale » qui le gouverne. L'EPLE, comme toute organisation publique, est prestataire de services. Le but est la recherche d'une performance accrue, d'une mobilisation optimale des moyens et des acteurs. On va donc privilégier « le client à l'usager et l'usager sur le citoyen » (Pesqueux, 2007). On en viendrait donc à « désinstitutionnaliser » l'institution, à modifier sa dimension et sa nature organisationnelle première. L'objet public EPLE traverse cette phase, avec ses caractéristiques propres.

La charte de Pilotage des Établissements Public Locaux d'Enseignement (février 2007), réorganise leur fonctionnement afin qu'ils appréhendent mieux la réalité de leur terrain d'exercice (création d'unités viables du point de vue fonctionnel). L'EPLE fournit un service partenarial sur la scène éducative publique. Ce service est subordonné à une maîtrise de ses propres indicateurs de performance, à la mesure de

Quelle gouvernance pour l'EPLE : de l'institution à l'organisation, vers un nouveau
modèle public ?

son efficience via le « contrat » qui le lie à l'échelon académique. Bien entendu les marqueurs sont éducatifs (taux de redoublement, réorientations, suivi de cohorte, sorties du système sans qualifications..) mais ils introduisent bien une dimension autre au sein de ces organismes : le territoire, les territoires sur lesquels il opère et qui participent de son évaluation. Les réseaux et acteurs qui l'interpellent, l'évaluent (de façon non institutionnelle), le positionnent sur cette nouvelle scène locale.

Elle demeure publique mais publique au sens du territoire, des acteurs, du service, du service rendu'

Nous sommes donc en présence d'un modèle autre, d'une institution au territoire d'exercice plus complexe. Ce n'est pas la notion de réseau(x) qui est ici nouvelle, c'est la commande politique et sociale qu'ils instituent. Cette dernière engendre un modèle managérial différent ou plutôt conforme à l'analyse que l'on se fait de l'organisation publique locale6 aujourd'hui.

Nous proposerons alors le modèle d'une gouvernance partenariale (Charreaux, 2007) qui, dans un nouveau contexte d'interactions institutionnelles7 , définit l'EPLE comme un espace en construction dont le changement n'est plus un attribut mais devient une fin en soit. La notion de performance8 devient de fait un attribut essentiel de la gouvernance des EPLE.

6 On entendra par échelon Local, le socle juridique et territorial sur lequel repose l'EPLE.

7 La collectivité territoriale de rattachement est un exemple parmi d'autres.

8 On entendra par performance le résultat ultime de l'ensemble des efforts d'une entreprise ou d'une organisation. Ces efforts consistent à faire les bonnes choses, de la bonne façon, rapidement, au bon moment, au moindre coût, pour produire les bons résultats répondant aux besoins et aux attentes des clients, leur donner satisfaction et atteindre les objectifs fixés par l'organisation. Nous voyons alors apparaître les objectifs, et le contrôle des moyens, deux axes porteurs pour notre lecture du concept.

Quelle gouvernance pour l'EPLE : de l'institution à l'organisation, vers un nouveau
modèle public ?

Il nous faut alors expliciter ces analyses en prenant l'exemple du fonctionnement des établissements secondaires et de leurs différentes instances. Trois d'entre elles nous semblent emblématiques de leur fonctionnement : le Chef d'établissement ordonnateur; les instances éducatives et pédagogiques de l'EPLE ; les relations avec les acteurs sociaux et les acteurs territoriaux.

Dans le cadre d'un EPLE, on peut trouver empiriquement quelques éléments de « bonne gouvernance »9 :

· Le conseil d'administration ;

· Les comités spécialisés ;

· La transparence relative des informations.

Dans le modèle organisationnel actuel de l'EPLE, qui avant la phase de décentralisation était contrôlé par une tutelle unique, il nous faut faire un parallèle avec un hybride des modèles shareholder (« porteur de part », fort contrôle par l'État et mise en place d'un contrôle des activités par la collectivité de rattachement) et stakeholder ( « parties prenantes », volonté de prise en compte de toutes les parties , volonté de mettre en oeuvre une démarche participative, coopérative et volonté de favoriser la confiance ).

9 Cette mention revient dans les Rapports des Inspections Générales. Elle ne définit pas la nature de la gouvernance mais indique l'orientation qu'elle peut ou pourrait revêtir. Le problème demeurant la qualification exacte que l'on entend par le vocable « bonne »: adéquate ? Dans quel cadre ? Pour quel contrôle ? Il s'agira pour nous d'une forme de gouvernance adaptée au contexte public que nous étudions ; avec les limites inhérentes à cette première définition.

Quelle gouvernance pour l'EPLE : de l'institution à l'organisation, vers un nouveau
modèle public ?

On peut noter des obstacles à la mise en place d' « une bonne gouvernance » :

· La difficulté pour définir les parties prenantes est forte dans le domaine éducatif et d'autant plus problématique que la constitution des parties prenantes est évolutive.

· La transparence « relative10 » (la culture de la rétention de l'information, les codes, les procédures complexes, la terminologie) induisent une asymétrie d'information profitable aux membres de l'EPLE.

La mise en place des contrats d'objectifs dans le cadre de la réforme de l'état, vecteur possible d'un changement avec notamment la « culture du résultat », l'utilisation des indicateurs de performances et d'objectifs globaux, doivent pouvoir assouplir les blocages et favoriser la « bonne gouvernance »11, même si l'on note des difficultés dans la mise en place de la LOLF dans le système éducatif.

Cependant, on passe d'une culture de moyens par chapitre(s) à une culture de moyens par programme(s), limitant encore davantage la fluidité et l'autonomie réelle, en imposant de nouvelles contraintes, comme l'indique le Cercle de la Réforme de l'État dans son mémento : la réforme dont l'État a besoin. De plus, le rapport des Inspections Générales, « mise en oeuvre de la LOLF » de juin 2006, fait apparaître cette situation

10 Notons ici qu'il ne s'agit pas d'une volonté de rétention de d'information mais d'une probable inadéquation du système d'information aux complexités des demandes actuelles de ces mêmes parties prenantes.

11 Rapport sur le pilotage du système éducatif dans les académies à l'épreuve de la LOLF - Mars 2007-IGEN-IGAEN-IGF (site du MEN, publications, rapports)

Quelle gouvernance pour l'EPLE : de l'institution à l'organisation, vers un nouveau
modèle public ?

(« réussite technique.... de la mise en place des BOP/ BOP et pilotage.... des enjeux mal perçus »).

Le pilotage des EPLE est lui une réalité, sans doute limitée au regard des pays voisins, mais il dispose d'un cadre règlementaire (Lois de décentralisation, Lois d'orientation et sur l'avenir de l'école).

Simple exécutant avant les lois de décentralisation et d'orientation de 1989 puis de 2005, le dirigeant de l'EPLE est culturellement dans un cadre où il doit rendre des comptes. Le changement intervenant sur la nature des comptes à rendre.

Dans une première phase de centralisme bureaucratique, la tutelle unique de l'Etat imposait les missions, les objectifs. L'absence d'autonomie dans la mise en oeuvre rendait donc problématique la notion de gouvernance, bien que l'un puisse repérer des plages d'incertitude entre les règles. Ces plages étaient alors une opportunité d'autonomie pour les structures locales.

Les lois de décentralisation, la loi d'orientation de 1989 puis la loi sur l'avenir de l'école de 2005, la loi sur la cohésion sociale ou la Loi du 11 février 2005 relative aux personnes handicapées, ont créé un nouvel « actionnaire », la Collectivité de rattachement, et développé la prise en compte des parties prenantes (usager, environnement économique et local, communautés urbaines).

Quelle gouvernance pour l'EPLE : de l'institution à l'organisation, vers un nouveau
modèle public ?

Le pilotage, relativement autonome, a induit la mise en place de son contrôle par toutes les parties. La notion de gouvernance, ou, plutôt, de « bonne gouvernance », semble ainsi émerger de l'autonomie, certes toujours limitée, de l'EPLE.

On revient donc sur cet hybride du modèle shareholder («porteur de part», contrôle par l'Etat et Collectivité de rattachement -- Conseil Général ou Régional) et du modèle stakeholder. On se demandera alors si le contrôle toujours « marqué » de l'Etat, dans le cas de L'EPLE, permet d'envisager une convergence vers un modèle stakeholder, avec ces deux types de parties prenantes :

· En arrière-plan, les parties prenantes contractuelles qui concernent les acteurs en relation directe et déterminée contractuellement avec l'entreprise (par exemple, les clients, les fournisseurs, les salariés, les actionnaires).

· A la périphérie, les parties prenantes « diffuses » qui sont les acteurs situés autour de l'entreprise envers lesquels l'action de cette dernière se trouve impactée mais sans pour autant se trouver en lien contractuel véritable (par exemple, les collectivités locales, les organismes publics, les ONG).

C'est un changement culturel, où l'on évolue d'une situation où seul l'intérêt de l'État (état de fait) compte, à une scène publique partenariale dans laquelle il est impératif de valoriser l'intérêt global des parties prenantes (avec des enjeux parfois contradictoires)12.

12 Le Management dans les organisations publiques, Batoli Annie, Dunod, 2004.

Quelle gouvernance pour l'EPLE : de l'institution à l'organisation, vers un nouveau
modèle public ?

En observant l'Etablissement Public Local d'Enseignement, certains obstacles à la mise en place de cette « bonne gouvernance » apparaissent. Peuvent-ils devenir des points d'appui?

· Le rôle dual du Chef d'Etablissement au conseil d'Administration (représentant l'État, Président - exemple d'hybridation des deux modèles) avec pour l'instant un contrôle certain par la voie hiérarchique, associé à une volonté affichée d'inclure les parties prenantes dans la définition des objectifs, voire même de laisser la porte ouverte à une présidence extérieure.

· La multiplicité des comités spécialisés dans l'EPLE induit de facto une capacité de réflexion et de proposition réelle mais parfois peu audible (par la faible représentativité des membres et par la « toute puissance » de l'injonction hiérarchique).

· La difficulté à définir les parties prenantes dans le domaine
éducatif (de plus la constitution des parties prenantes est évolutive).

· La transparence relative (la culture de la « rétention » de l'information, les codes, les procédures « complexes », les diverses formes de terminologie) induit une asymétrie de l'information profitable aux membres de l'EPLE, alors que la transparence « encourage la bonne gouvernance »13.

· La difficulté pour les services centraux de laisser une réelle autonomie aux Rectorats, et aux EPLE ; le formalisme contractuel, l'incitation (ou l'injonction) à définir la politique de l'EPLE avec les parties prenantes, tout en respectant les objectifs nationaux.

13 Vers un nouveau mode de gestion de l'Education Nationale inspiré des enseignements des théories de l'agence et des parties prenantes. Pupion, Leroux, Latouille, Paumier (2006).

Quelle gouvernance pour l'EPLE : de l'institution à l'organisation, vers un nouveau
modèle public ?

La question étant se savoir si la mise en place des Contrats d'objectifs, dans le cadre de la réforme de l'état, avec notamment une évaluation pluriannuelle, sera un vecteur possible d'un changement avec de nouveaux outils (« culture du résultat » ?). L'utilisation des indicateurs de performances et d'objectifs globaux pourra-t-elle amoindrir les blocages et favoriser la « bonne gouvernance »14 en s'appuyant sur des démarches d'expérimentation ? On note déjà quelques difficultés et des résistances dans la mise en place de la LOLF dans le système éducatif15. La notion de « bonnes pratiques » se substitue souvent à celle de gouvernance pour l'EPLE. Pourquoi ce changement de terme ? Cela viendrait confirmer l'analyse selon laquelle le terme même est problématique car porteur d'une lecture politique et managériale encore excentrée par rapport à la notion de Service public.

Enfin, la place des attentes (institutionnelles ?) concernant la « performance » dans la gestion quotidienne des EPLE, est une des caractéristiques de sa gouvernance.

Sans remonter à la mise en place de la RCB (Rationalisation des Choix budgétaires), la performance, l'efficience et l'efficacité de la fonction publique sont une préoccupation permanente depuis la deuxième partie du XXème siècle.

14 Voir à ce sujet la place « institutionnelle » du travail des Commission à l'Assemblée Nationale dans l'article de Daniel HOCHEDEZ : La mission d'évaluation et de contrôle (MEC) - Une volonté de retour aux sources du Parlement : la défense du citoyen -- contribuable, n° 68 de la Revue Française de Finances Publiques -- Décembre 1999.

15 Voir à ce sujet Réforme des finances publiques, démocratie et bonne gouvernance, Actes de l'Université de Finances publiques du Groupe Européen de Recherche en Finances Publiques, Michel Bouvier (Dir). Novembre 2004, L.G.D.J.

Quelle gouvernance pour l'EPLE : de l'institution à l'organisation, vers un nouveau
modèle public ?

Pour les favoriser, trois étapes (déconcentration, décentralisation, contractualisation) se sont succédées et sont en phase d'évaluation (Debene, 200616). La LOLF, qui en est la structure la plus aboutie, tout en refondant l'essentiel des modes d'évaluation des politiques publiques, positionne aujourd'hui l'EPLE comme un acteur central de la mise en place de cette réforme.

Cependant, le cadre de cette « performance » n'est pas le encore résultat d'un dialogue assumé entre les parties prenantes (« contractuelles ou diffuses »), mais bien, la définition par l'État (par un processus vertical), d'indicateurs (indicateurs académiques et indicateurs nationaux...). On peut néanmoins parler de nouvelles « bases » pour un pilotage multi référencé et multidimensionnel au sein de la sphère publique (voir le dialogue de gestion avec les services académiques).

La nature même de la responsabilité de l'acteur (qui doit être un élément fondateur dans le dialogue de gestion), sur le terrain, n'est pas précisée.

Si on s'attache plus précisément aux 629 objectifs, aux 1284 indicateurs (Rapport sur Le pilotage du système éducatif dans les académies à l'épreuve de la LOLF), on peut s'interroger sur :


· la pertinence des objectifs (attentes sociales plutôt que priorité assignée aux responsables).

16 Debène, Marc, Économie et management : la lolf et l'éducation nationale, juin 2006.

Quelle gouvernance pour l'EPLE : de l'institution à l'organisation, vers un nouveau
modèle public ?

· la pertinence des indicateurs (sont-ils vérifiables ? solides ? pertinent17 ?)

· la réalité et la nature profonde de cette « culture » d'évaluation.

Pour sortir de l'approche « réponse à la demande sociétale », le rapport nous propose plusieurs axes et quelques pistes :

· Evaluer : taux de remplacement,

· Contrôler : taux de rendement des remplacements, part du potentiel enseignant consacré à la classe, effectif des classes,

· Positionner : stabilité des enseignants en ZEP,

· Diriger : définir un nombre limité d'objectifs,

· Piloter18 : construire un tableau de bord unique et transparent du contrôle de gestion.

Cependant, l'absence d'outils de pilotage avérés, l'inadaptation du système d'information des EPLE, la confusion dans les concepts utilisés et la mise à l'écart du dialogue de gestion rendent difficile la mise en place de la mesure de la performance attendue par les parties prenantes.

17 La question n'est pas seulement une question de forme. Il faut s'interroger sur la nature des indicateurs tels que définis dans les différents Contrats d'objectifs. Le problème posé est bien la référence, le référent (organisationnel, culturel, institutionnel ?). Comment une structure qui commence à se construire comme organisation à part entière sur la scène économique et sociale peut-elle trouver un référent viable pour accroître sa propre efficience et apprendre de ses changements ?

18 Chacun de ses items reprend les fonctions des Personnels de Direction (texte cadre de 2001). La lecture induite de la gouvernance serait la suivante : la gouvernance de l'EPLE est (indirectement ou directement) celle de son premier Représentant, Le Chef d'Etablissement. La question de la représentation, abordée en deuxième partie de ce Mémoire, est bien un aspect central de ce mode de gouvernance.

Quelle gouvernance pour l'EPLE : de l'institution à l'organisation, vers un nouveau
modèle public ?

C'est bien le concept de pilotage qui retient notre attention à l'issue cette première analyse contrastée de la gouvernance de l'EPLE : pilotage par objectifs, pilotage «partagé » et pilotage partenarial. Ce dernier aspect nous semble être une des « entrées » possible dans la « sphère publique », tant sur le plan conceptuel que sur le plan managérial. Ce sont moins les modalités de la gouvernance publique que sa nature même qui apparaissent et qui nous permettront de questionner la place et le rôle des acteurs dans sa mise en oeuvre ainsi que les (en)jeux de pouvoir(s) mis en oeuvre dans cette nouvelle scène publique.

Quelle gouvernance pour l'EPLE : de l'institution à l'organisation, vers un nouveau
modèle public ?

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Nous voulons explorer la bonté contrée énorme où tout se tait"   Appolinaire