I.4.
La définition des concepts
La définition des concepts constitue une étape
importante de notre étude. Elle présente leurs différentes
acceptions et précise celle que nous retenons dans le cadre de notre
travail.
Eau potable
L'OMS définit l'eau potable comme étant celle
dont la consommation est sans danger pour la santé. Pour que l'eau soit
qualifiée de potable, elle doit satisfaire à des normes relatives
aux paramètres organoleptiques (couleur, turbidité, odeur,
saveur), physico-chimiques (température, pH, etc.), microbiologiques
(coliformes fécaux et totaux, streptocoques fécaux, etc.) et
à des substances indésirables et toxiques (nitrates, nitrites,
arsenic, plomb, hydrocarbures, etc.). Pour chaque paramètre, des valeurs
limites à ne pas dépasser sont établies. Le fait qu'une
eau soit potable ne signifie pas qu'elle soit exempt d'agents pathogènes
mais que leur teneur a été jugée insuffisante pour
déclencher une maladie. Les normes de potabilité de l'eau
diffèrent d'un pays à l'autre et celles proposées au
Burkina Faso par l'ONEA répondent aux exigences de l'OMS. Dans le cadre
de notre étude, est considérée comme potable, l'eau issue
des canalisations de l'ONEA parce qu'ayant subi des traitements.
L'accessibilité et l'accès à
l'eau potable
L'accessibilité est une notion qui rend compte de la
plus ou moins grande facilité avec laquelle on peut accéder
à un service. Appliquée à l'eau potable, elle se
décline en termes de disponibilité de la ressource, de
permanence, de distance qui sépare le ménage de son point d'eau
et de qualité, En terme de distance, on entend par accessibilité
raisonnable, l'existence d'un point d'eau potable permanent à une
distance inférieure à 200 mètres de la concession (OMS,
2003). En terme de coût, l'accessibilité à l'eau potable
est plus difficilement mesurable puisque le prix de l'eau varie en fonction des
villes, des quartiers, des saisons, du type d'infrastructure, etc.
La notion d'accès à l'eau potable est un
indicateur qui représente la quantité et la qualité de
l'eau dont dispose chaque personne par jour. La norme fréquemment
citée pour la quantité est celle de l'OMS qui s'établit
à 20 litres par personne et par jour pour la satisfaction de tous les
besoins de base (boisson, lessive, vaisselle, douche, etc.). La qualité
de l'eau est d'autant plus importante qu'elle a des implications sur la
santé de la population et particulièrement celle des enfants.
D'une manière générale, l'accès à l'eau
potable est un indicateur de santé très important puisqu'il est
avéré que « plus on dispose d'eau, plus on adopte
facilement des mesures d'hygiène adéquates »
(CURTIS V., 1995 ; SATTERHWAITTE D., 1995).
Dans le cadre de cette étude, nous évoquerons
l'accès à l'eau potable en faisant référence aux
normes ci-dessus précisées.
Le risque
La notion de risque occupant une place non négligeable
dans notre travail, l'acception qu'elle revêt mérite d'être
précisée. BONNARD R. (2001) définit le risque comme
étant le résultat de l'exposition à un
phénomène dangereux ou à un danger, ce danger étant
plus ou moins prévisible selon SEIGNEUR V. (2004). Le lien entre le
risque et le danger est aussi évoqué par BAILLY J.D. (2005), qui
pense que le risque est la probabilité de voir se manifester la
présence d'un danger dans son environnement ou dans son alimentation.
Le risque désigne l'existence des facteurs pouvant
contribuer à faire naître et/ou persister la source du danger et
dont la preuve n'est pas démontrée à travers des tests.
C'est à ce risque que nous intéresserons dans la présente
étude.
La santé
En 1949, l'OMS a défini la santé comme un
« état complet de bien être physique, mental et social
et pas seulement une absence de maladie ou d'infirmité ». Avec
cette définition, la notion de santé passe de
« l'absence de maladie » à un concept plus
vaste, en revêtant du même coup un caractère
multidimensionnel, idéaliste voir utopique. Elle implique que tous les
besoins fondamentaux de la personne soient satisfaits, qu'ils soient affectifs,
sanitaires, nutritionnels, sociaux ou culturels, du stade de l'embryon, voire
des gamètes, à celui de la personne âgée. Cette
définition de l'OMS n'est cependant pas la seule.
Pour BERGSON H. (1932), « la santé est la
capacité de s'investir, d'entreprendre ce que l'on a envie de
réaliser ». La santé est aussi la condition
nécessaire pour un individu ou un groupe d'individus, au
développement de ses potentiels de vie (CHOUCKROUN O., 2003). On peut
donc considérer la diarrhée comme un fait de santé qui
empêche l'épanouissement personnel.
Dans le cadre de cette étude, nous adopterons une
définition de la santé correspondant à l'absence de
maladie parce que nous ne saurions prendre en compte les autres dimensions
qu'elle peut revêtir.
La santé publique
Les origines de la santé publique remontent à la
fin du dix neuvième siècle. En découvrant par observation
la notion de contamination, Semmelweiss inaugure la santé publique
(CHOUKROUN O., op. cit.). Mais, c'est sous l'ère de Pasteur que
l'on voit apparaître la notion de santé publique au sens du
dépistage, de la vaccination et de l'organisation sanitaire.
En 1952, l'OMS définit la santé publique comme
étant « l'art et la science de prévenir les maladies,
de prolonger la vie, d'améliorer la santé physique et mentale des
individus par le moyen d'actions collectives pour assainir le milieu, de lutter
contre les épidémies, d'enseigner l'hygiène corporelle,
d'organiser les services médicaux et infirmiers, de faciliter
l'accès aux soins précoces et aux traitements
préventifs ». En 1973, cette définition est
élargie et on parle désormais de santé publique pour
évoquer les problèmes concernant la santé d'une
population, l'état sanitaire d'une collectivité, les services
sanitaires généraux et l'administration des services de soins
(MENGUE G. S., 2006).
C'est à partir de cette époque que la
santé publique devient une discipline autonome qui s'intéresse
à la santé sous tous ses aspects curatifs, préventifs,
éducatifs et sociaux. Selon MALEK K. et al. (1996), cette
discipline se donne pour objet l'amélioration, la préservation,
la restauration et la promotion de l'état de santé de la
population. Dans ce sens, elle fait appel à un ensemble de disciplines
variées et complémentaires : médecine,
épidémiologie, économie, sociologie, géographie,
etc. Selon KHAYAT D. (2003), la plupart des grandes pathologies et des grandes
épidémies a un lien avec l'espace. Il pense notamment que les
maladies infectieuses ont un lien évident avec la géographie. Une
meilleure utilisation de l'information géographique pourrait changer
profondément les méthodes d'alerte précoce en
épidémiologie, mais aussi les modalités de prise en charge
des disparités de santé.
Nous définissons donc la santé publique comme
une science au carrefour de toutes les sciences, s'intéressant aux
facteurs qui conditionnent la santé de la population. De ce fait, elle
n'est pas l'apanage des médecins. Les sciences sociales, notamment la
géographie, apportent leur savoir faire en construisant des indicateurs
de risque de maladies et en proposant éventuellement des solutions
d'aménagement afin de réduire les risques sanitaires.
La géographie de la
santé
Selon Picheral, la géographie de la
santé est « l'étude spatiale de la qualité de la
santé des populations, de leurs comportements et des facteurs de leur
environnement qui concourent à la promotion ou à la
dégradation de leur santé » (SALEM G., 1998). Elle
s'inscrit dans une démarche géographique et considère
l'espace comme un distributeur de facteurs de risques endogènes
(physiques, biologiques, génétiques, etc.) et exogènes
(environnementaux, sociaux, économiques). Elle correspond à la
« medical geography » des pays anglophones et
à la « geomedizin » des germanophones.
Selon SALEM G. (op. cit.), il s'agit de montrer les
combinaisons de facteurs qui exposent différentiellement des populations
à certains risques sanitaires dans un espace donné. Dans ce sens,
la géographie de la santé s'intéresse aux
disparités spatiales qui génèrent des faits de
santé, par exemple l'insalubrité de l'environnement,
l'accès à l'eau potable ou aux soins. C'est SNOW J. (1855) qui
démontra le premier que la répartition des cas de choléra
lors de l'épidémie de Londres de 1849 était liée
à celle des bornes fontaines publiques.
Nous considérons la géographie de la
santé comme la science qui s'attelle à la description de
l'environnement sur le plan sanitaire, à la localisation des maladies et
l'explication de leur répartition spatiale.
L'hygiène
Le mot dérive du nom de la déesse grecque
Hygie, qui était la déesse de la santé et de la
propreté. Fille d'Asclépios, dieu de la médecine,
Hygie symbolise la prévention.
LE PETIT LAROUSSE (1998) considère l'hygiène
comme la partie de la médecine s'intéressant aux moyens
individuels et collectifs, aux principes et pratiques visant à
préserver et favoriser la santé.
Nous retiendrons de cette définition toute mesure
permettant d'éviter la pollution de l'eau de boisson. Il s'agit dans ce
cas principalement du lavage des mains au savon avant les repas, après
être allé aux toilettes ou avoir accompagné un enfant aux
toilettes, et du lavage des récipients de stockage de l'eau de
boisson.
L'assainissement
C'est un processus par lequel des personnes peuvent vivre dans
un environnement plus sain. Pour cela, des moyens physiques, institutionnels et
sociaux sont mis en oeuvre dans différents domaines tels que
l'évacuation des eaux usées et celle des déchets solides,
l'évacuation des excréta et le traitement de tous ces
éléments. L'assainissement est fortement lié à la
santé publique en raison des nombreuses maladies qui peuvent être
dues à un mauvais assainissement : maladies à transmission
fécale et orale telles que les maladies diarrhéiques. En ville,
il devrait être inclus dès la planification des nouveaux
quartiers.
Au cours de notre recherche, nous emploierons surtout la
notion d'assainissement pour évoquer le manque de latrines et les
mauvaises conditions d'évacuation des eaux usées et des
déchets.
Les quartiers irréguliers
Les quartiers irréguliers
sont le fruit d'une croissance urbaine incontrôlée, d'une
installation anarchique de populations d'origines diverses à la limite
de la zone régulière. Cette croissance incontrôlée
contribue selon les régions et les pays, de 20 à 80% de la
croissance urbaine et concerne entre 15 et 70% des citadins dans les pays en
développement, les moyennes se situant aux alentours de 40%
(DURAND-LASSERVE A., 1996).
La notion de quartier irrégulier recouvre une
diversité de situations locales qu'il convient de préciser. Elle
désigne généralement des quartiers
périphériques non reconnus par les autorités et de ce
fait, non équipés. C'est le cas des quartiers irréguliers
de Ouagadougou. Elle peut aussi désigner des zones d'habitat
bénéficiant d'une existence juridique qui trouve des formes de
reconnaissance allant jusqu'à l'installation d'équipement
collectifs : électricité, bornes fontaines. C'est le cas de
l'ancienne zone irrégulière de Pikine (ville située
à une douzaine de kilomètres de Dakar au Sénégal)
qui disposait en 1987 de 219 bornes fontaines publiques sur les 387 que
comptait toute la ville (SALEM G., 1992).
L'expression la plus courante à Ouagadougou pour désigner ces
espaces irréguliers est celle de « non loti »
qui regroupe tous les espaces de la ville n'appartenant pas aux espaces lotis.
A travers la photo 1, on constate que la zone irrégulière (en
bas) se distingue bien de la zone dite régulière (en haut) par
son aspect plus désordonné.
Photo 1 : Vue
aérienne de la partie ouest de la ville en limite d'urbanisation
régulière (Cliché ONEA, 2003)
Formés d'habitat édifié en dehors de
toute norme et évoluant de manière anarchique, les quartiers
irréguliers présentent une physionomie disparate avec de fortes
proportions de constructions en matériaux précaires,
contrairement aux quartiers réguliers qui se mettent en place selon un
cadre planifié et un plan en damier.
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