3.3.1- Niveau d'implication des élus dans la
planification locale
Au terme de l'article 84 de la loi N°97-029 portant
organisation des communes,
« La commune élabore et adopte son plan de
développement. Elle veille à son exécution en harmonie
avec les orientations nationales en vue d'assurer les meilleures conditions de
vie à l'ensemble des populations. Dans ce cadre elle élabore les
documents de planification nécessaires..... ».
(Mission de Décentralisation, 2002)
En clair, le Plan de Développement Communal (PDC),
constitue un guide pour les actions de développement de la commune. Il
est un cadre d'orientation stratégique qui traduit la vision, les
attributions, les préférences et la volonté politique du
conseil communal, l'organe chargé de la gestion du développement.
Par rapport à cette mission, les deux Conseils communaux, au lendemain
de leur installation se sont mobilisés pour lancer le processus
d'élaboration des PDC.
Ainsi par arrêté du maire, un comité de
pilotage est mis en place pour conduire le processus depuis la
préparation jusqu'à la réalisation du plan. L'ensemble des
élus, avec à leur tête le maire s'est investi pour avoir
cet outil précieux qui devrait permettre non seulement une orientation
claire du développement de leur commune, mais aussi et surtout de
mobiliser les ressources de l'Etat et des partenaires qui soutiennent la
décentralisation. Dans ce processus ils ont pu mobiliser les ressources
humaines locales (associations, ONG, groupements villageois et population) et
assurer le financement de la logistique (collecte des données,
restauration des participants aux ateliers, rédaction de rapport etc).
et tous sont fiers d'avoir assumé cette tâche aux premières
heures de la décentralisation
En outre dans le cadre de la mise oeuvre de ces PDC, les
élus, dans la concertation et avec l'appui technique des partenaires,
ont pu élaborer des outils devant faciliter leur mise en oeuvre. Il
s'agit du plan annuel d'investissement (PAI), du plan de communication, du
budget communal, de l'amélioration de la qualité du personnel
47
administratif etc.... Mais cette euphorie constatée
autour de l'élaboration de PDC et de sa mise en oeuvre jusqu'en 2004
s'est malheureusement estompée pour plusieurs raisons relevées
lors des entretiens :
· Le mauvais fonctionnement de l'administration de la
mairie du fait de l'insuffisance du personnel, de la faible qualification des
agents ;
· Le recrutement fantaisiste du personnel (souvent des
proches des maires) ;
· L'absence de planification dans la mise en oeuvre des
actions ;
· La non-transparence dans la gestion des finances locales
;
· Les querelles politiques entre les élus ;
· L'ignorance et incompréhension persistante due
à la non-maîtrise des rôles par les élus.
3.3.2- Contribution des OSC locales aux actions de
développement
Selon les résultats de l'enquête, toutes les
catégories d'organisations locales contribuent, à des
degrés divers, aux actions de développement. Le processus
d'élaboration des PDC a été l'événement
majeur qui a pu mobiliser l'ensemble des acteurs de la commune. Malheureusement
l'euphorie suscitée n'a pu continuer lors de la mise en oeuvre des
actions. En effet les ONG, particulièrement, ont aidé les
communes dans la planification locale notamment lors du processus
d'élaboration des PDC et de leur exécution selon l'expertise et
les ressources dont elles disposent. Elles ont contribué surtout
à la phase de diagnostic par la collecte des données dans tous
les villages, et pris part activement aux différents ateliers au niveau
communal. Elles sont souvent présentes à l'élaboration du
plan annuel d'investissement (PAI) et autres documents de projets
initiés par les mairies. Certaines participent aux différents
groupes de réflexion ou comités mis en place dans le cadre de
certaines actions à mettre en oeuvre. C'est le cas de GrADeD-ONG qui est
membre du comité de gestion du fonds de développement
économique mis en place à Boukoumbé avec le soutien de
l'Association des Communes des Pays-Bas pour financer les microprojets
économiques.
Elles contribuent également à travers des
actions d'intermédiation sociales et de sensibilisation, à
l'amélioration du traitement des problématiques féminines
telles que la participation des femmes à la gestion des affaires
publiques, l'élimination des pratiques néfastes à la
santé, ainsi que l'environnement, l'éducation et
l'alphabétisation.
48
De manière générale, les
résultats obtenus de la participation des organisations de la
société civile aux actions et programmes de développement
sont significatifs selon les autorités des deux communes, mais ils
restent à être améliorés. Car sur plus d'une dizaine
d'organisations répertoriées par Commune, seules quelques-unes
(moins de 50%) mènent concrètement des activités dans le
sens du développement local. A cet effet, elles doivent
développer en leur sein, des capacités et des expertises qui leur
assurent une connaissance des politiques et programmes de développement
et une analyse critique de ceux-ci. Car, selon le professeur H. AGUESSY, pour
bien jouer leur rôle dans la gestion du développement local, les
OSC doivent se départir de la culture de la recherche de profit facile,
pour s'inscrire plutôt dans une logique de sérieux, de franchise
et de courage dans leur discours, une logique de bâtisseurs et non de
bailleurs, en montrant du respect pour les talents des autres afin de dialoguer
en politique et non d'agresser. La société civile, affirme t-il,
c'est «apprendre à apprendre, à être responsable,
à libérer les idées qui font avancer la
société afin de vaincre les systèmes de
paupérisation généralisée qui s'installe un peu
partout en Afrique.... » (BOKO, 2006 : Rapport de
forum sur les OSC de Houéyogbé)
Il ressort en dernière analyse que les communes de
Boukoumbé et de Cobly ont plus à gagner qu'à perdre en
soutenant la dynamique associative comme partie intégrante de la
société civile émergente au niveau local mais encore
balbutiante, voire quasiment inefficace par rapport à son rôle et
aux nombreux défis à relever en faveur des communautés.
Les OSC doivent développer aussi leur propre vision du
développement en fonction des réalités et c'est sur la
base de cette vision qu'elles peuvent développer des analyses et faire
des propositions pertinentes.
3.3.3- Financement local des actions de
développement
3.3.3.1- Part des OSC et des populations à la
base
La contribution des organisations locales au financement des
actions de développement peut être observée à deux
niveaux, celui de l'élaboration et de la mise en oeuvre des PDC.
49
Lors de l'élaboration des PDC, les organisations
locales se sont fortement mobilisées et ont pris une part active dans le
processus. Bien que n'ayant pas contribué financièrement, les ONG
sont impliquées dans la phase de diagnostic (notamment la collecte des
données) en mettant à la disposition des comités de
pilotage leurs personnels connus pour leur capacité d'animation dans les
villages.
« Nous avons pris de notre temps et mis notre
savoir-faire de terrain au profit de la commune. Au niveau de APAE, je peux
estimer tout ça à au moins 200 mille, Cela vaut autant que le
financement direct..... » (Directeur exécutif
ONG-APAE, 2006)
L'Union pour le Développement Communal de Cobly
(UDCC), a quant à elle contribué financièrement pour un
montant de près de 200 mille FCFA. Enfin l'Union communale des
producteurs de coton (UCPC) a pour sa part contribué
financièrement au processus à hauteur de 300 mille FCFA, puis en
nature à travers les GV qui ont assuré la restauration des
participants lors des ateliers dans les villages et arrondissements. Cette
mobilisation a été plus remarquable à Cobly qu'à
Boukoumbé où le maire a déploré l'inertie de
l'UCPC.
Pour ce qui concerne la mise en oeuvre du PDC, on note aussi
une contribution financière non négligeable des OSC. Ainsi toutes
les organisations identifiées se déclarent disposées
à apporter dans la limite de leur possibilité leur concours
financier pour les réalisations prévues. L'UCPC-Cobly, par
exemple, sur la base d'accord avec la mairie, s'est engagée depuis 2005
à mobiliser au profit de la commune, 1,5 FCFA / kg de coton soit 11 872
000 FCFA (au titre de 2005) et à renforcer l'encadrement des producteurs
en vue de la dynamisation de l'économie locale. Tandis que la
contribution au développement de l'UCPC de Boukoumbé est de 300
mille en 2004 et de 500 mille en 2005. Au regard de ces engagements, les UCPC,
constituent une des forces motrices potentielles du développement avec
lesquelles les élus locaux devront établir de solides relations
de partenariat local pour relever les défis de développement
communal.
L'ADDC accentue son action sur la mobilisation des
ressortissants de Cobly à l'extérieur pour contribuer aux
financements des actions du PDC. En 2006, elle a pu financer la
réalisation de quelques hangars de marché dans le but de
contribuer à améliorer les recettes fiscales de la Commune.
50
Quant aux ONG, elles assurent principalement le rôle
d'intermédiation sociale dans le cadre des projets initiés pour
la plupart par les partenaires externes. Quant aux populations à la
base, elles ont contribué à la mise en oeuvre du PAI en 2005
à Cobly à hauteur de plus de 12 millions, soit 3,5% de
l'investissement total. A Boukombé avec l'institution de la
`'Contribution au Développement» qui est une sorte de taxe
de développement local, fixée à 1000 FCFA pour les hommes
et à 500 FCFA pour les femmes, la Commune a pu mobiliser en 2005 moins
d'un million contre trois millions en 2004 (l'année de mise en oeuvre de
la décision). Malheureusement cette mobilisation n'a pu continuer les
années suivantes à cause de la faible stratégie de
mobilisation sociale au niveau de la mairie et surtout des critiques de plus en
plus exprimées contre la `'mauvaise gestion» de l'équipe
dirigeante.
Tableau n° 08 : Synthèse de la
contribution des OSC au développement dès 2003
Source : SAF de Cobly et de Boukoumbé
« Un regard sur les finances d'une commune typique
montre, d'une part, les ressources et les capacités financières
des communes et, d'autre part, les dysfonctionnements de la gestion des
finances locales. Les ressources propres représentent 90% du montant
total des recettes, les subventions reçues (dotations de l'Etat) n'en
représentent donc que 10%. Les dépenses essentielles de
fonctionnement, sont constituées des dépenses salariales (60%) et
des dépenses d'acquisition de matériels et de fournitures (30%),
les
52
montants consacrés à l'entretien des
infrastructures et des équipements sont insignifiants. Et
l'investissement presque inexistant ». (CEDA ,
2004)
Ce constat confirme bien notre observation et la situation
semble plus grave dans les communes en question. Pourtant la loi recommande la
création d'une taxe de développement local reposant sur les
richesses locales potentielles. Les budgets sont généralement
faibles et insuffisants pour administrer la commune, assumer les nouvelles
compétences et réaliser des investissements.
De manière globale, la gestion financière des
communes se heurte à plusieurs difficultés majeures à
savoir :
· le manque de qualification et l'insuffisance du personnel
au niveau des services financiers des mairies;
· l'insuffisance du personnel des services fiscaux pour
appuyer les communes;
· l'absence d'un cadre budgétaire et comptable
transparent et la faiblesse; malgré les potentialités, des
ressources financières ;
· les maires n'ont globalement pas souvent une vue
d'ensemble de la situation de leur commune, de ses atouts et
potentialités de développement ;
· le retard dans l'émission des titres de
recouvrement ;
· les agents collecteurs des communes, peu performants et
corrompus ;
· l'absence d'un mode de gestion fiable des marchés
communaux ;
· la lenteur dans la rentrée (pas de
trésorerie disponible) ;
· le manque d'information des maires sur la situation
réelle de leur trésorerie ;
· le retard dans la prise de décision de certains
maires.
Néanmoins, une étude sur l'inventaire du
gisement fiscal (GTZ & SNV , 2006), montre d'énormes
potentialités inexploitées dans les deux communes. Le niveau
assez bas des ressources locales et la faiblesse actuelle de la gestion
financière constituent un problème majeur pour les
autorités locales. Sur au moins 5 marchés recensés dans
chacune des communes, la capacité moyenne de recouvrement des droits de
places est estimée à 40% (tableau n°1 1). Ce qui semble
dérisoire d'autant que les marchés sont les principales sources
des ressources communales en dehors de l'appui de l'Etat. Il y a donc lieu de
redoubler d'effort pour maximiser le potentiel des services marchands.
53
Les maires reconnaissent cependant que la cause de leur
problème est à la fois d'ordre organisationnel et institutionnel.
Un des problèmes de fond est l'accompagnement par les services fiscaux.
Ainsi le système mis en place pour la perception des taxes pèche
par l'incompétence des personnes chargées de faire le travail.
Aucune des deux communes ne dispose de recettes perception, ni de recette des
impôts sur son territoire. Ce sont celle de Tanguiéta qui couvre
Cobly et celle de Natitingou qui appuie Boukoumbé. Ce qui pose
régulièrement le problème de disponibilité desdits
services à répondre promptement aux besoins des communes dont ils
ont la charge. A titre de comparaison, la situation financière d'une
commune voisine comme Tanguiéta semble meilleure à cause de la
présence des deux services techniques sur son territoire
Tableau n°10 : Niveau des recettes
perçues en 2006 sur les principaux marchés