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« l'unicité-universalité » de Jésus-Christ dans la foi chrétienne. Préambule pour une théologie des religions chez Jacques Dupuis

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par Antoine BASUNGA Nzinga,sj
ITCJ - Théologien 2008
  

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3.2. Le rapport avec les autres traditions de l'humanité.

L'on attendrait qu'à ce niveau, le problème soit posé aussi dans le rapport vertical de relation au mystère du Christ présent et à l'oeuvre dans le monde comme c'est le cas dans le rapport oecuménique. Il n'en est point question dans la longue tradition de l'Eglise. On se trouve encore confronté à la question du rapport horizontal des religions au christianisme, au mystère de l'Eglise. C'est le grand débat de « extra ecclesiam nulla salus ». Précisons que cet adage a eu un usage historique bien précis : emprunté à Fulgence de Ruspe, il a d'abord été appliqué aux « païens » et aux juifs. Ensuite, lorsqu'au 13è siècle (1215) l'adage est repris dans le symbole du quatrième concile du Latran et par la bulle Unam Sanctam (1302) de Boniface VIII, il ne vise que de manière particulière ceux qui sont en dehors de l'Eglise de façon volontaire et coupable. Et enfin, on le retrouve encore dans le décret pour les Jacobites (1442) du concile de Florence.

Dans cette dernière apparition, l'intention première de l'adage visait certainement ceux qui se sont séparés de l'Eglise volontairement et ne se sont pas joints à elle avant la fin de leur vie.13(*) Un tel adage lu à la lumière de notre temps étonne sans doute car il est porteur d'une vision exiguë. Une vision qui a « risqué » (car cela n'étant pas possible) d'enfermer le salut dans une perspective centrée sur la primauté ecclésiale. Primauté aujourd'hui seconde et même dérivée de la primauté absolue du mystère de Jésus-Christ. Pour J. Dupuis, la manière positive d'annoncer un tel adage, serait de le centrer sur la perspective christologique. Alors on aurait une tournure telle que «  tout salut est par le Christ ». Cette dernière formule véhicule le mieux le contenu de l'affirmation néo-testamentaire : où Jésus apparaît de manière aussi claire comme le sauveur de l'humanité : Jn 3, 17 ; Ac. 10,44-48 ; 17,24-31.

A ce sujet, J. Dupuis pense qu'il n'est pas aisé de trop s'appuyer sur Vatican II. Car dit-il, le simple fait qu'il a été établi la reconnaissance des valeurs positives au sein des autres traditions par le concile, ne nous permet pas du tout d'en dire plus. S'il est vrai que l'Eglise a opté pour la perspective christocentrique pour le mystère individuel du salut des personnes (GS n°22), il est tout aussi vrai que cette perspective peut s'appliquer lorsqu'il s'agit des traditions religieuses elles-mêmes, prises comme des réalités historiques. A ceci, il sied de souligner l'adéquation de la perspective christocentrique comme voie appropriée pour un oecuménisme et une théologie des religions digne de ce nom. En posant la question du dialogue sur le rapport vertical du mystère christique par rapport aux autres traditions, la perspective christocentrique transcende bien l'approche ecclésiologique quelque peu étriquée. Mais la question du rapport avec les autres traditions de l'humanité ne devrait pas faire fi du débat actuel au centre de la théologie des religions.

En effet certains courants, notamment le théocentrisme, posent l'impossibilité de lier le salut universel « soit à Jésus-Christ confessé explicitement dans l'Eglise instituée par lui (1), soit même au mystère de Jésus-Christ lui-même considéré comme opérant le salut au-delà des limites des communauté chrétiennes (2). »14(*) Au coeur de ce débat, la perspective christocentrique soit-elle inclusive, reste, pour John Hick, comparable au système ptoléméen de l'univers. Elle n'est qu'illusion. Et avec elle, tous les efforts construits tout autour pour le soutenir. Ils ne sont que des « épicycles » qui tôt ou tard finiront par éclater avec elle. La vraie réalité et la vraie clef de la théologie des religions gisent plutôt dans l'univers théocentrique que Hick voit comme le système copernicien.

D'où l'idée d'une « révolution copernicienne » de la christologie. Dieu lui-même est le centre de tout. « Pareil changement de paradigme implique nécessairement l'abandon de toute prétention à une signification privilégiée, soit pour le christianisme, soit pour Jésus-Christ lui-même »15(*). Il faut donc « passer le Rubicon », autrement dit, il faut reconnaître l'authenticité et la valeur égales des différentes religions, et abandonner toute prétention de caractère exclusif ou même normatif pour le christianisme.

A entendre Gavin D'Costa, dans son livre Theology and Religious Pluralism16(*), un tel acharnement de la part de John Hick et de ses disciples n'est que la conséquence d'une interprétation partiale de deux axiomes fondamentaux de la foi chrétienne. Rappelant ces deux axiomes: la volonté salvifique universelle de Dieu et la médiation nécessaire de Jésus-Christ (et le rôle de l'Eglise) en tout mystère du salut. Gavin D'Costa montre que le contraste entre l'exclusivisme (H. Kraemer), l'inclusivisme (K. Rahner) et pluralisme (J. Hick) a son noeud dans une herméneutique fragmentaire de ces deux axiomes. Pour lui, l'exclusivisme s'appuie sur le second axiome et néglige le premier. Tandis que le pluralisme, martèle le premier au détriment du second. Seul l'inclusivisme parvient à rendre compte de deux et les tient ensemble dans « une pensée bien pesée ». Soulignons tout au plus que dans la théologie chrétienne, le théocentrisme n'a jamais été en tension avec le christocentrisme. La théologie chrétienne est théocentrique en étant christocentrique. Il n'est guère question de faire le choix entre deux théologies interchangeables et ouvertes dans leur réalité.

* 13 J. Ratzinger, Le nouveau peuple de Dieu, Paris, Aubier-Montaigne, 1971, p. 145.

* 14 Jacques Dupuis, Op. Cit. , p. 134.

* 15 Ibid. , pp. 138-139.

* 16 Gavin D'Costa, Théology and Religious Pluralism: The Challenge of Other Religions. Oxford, Basil Blackwell, 1986.

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"Ceux qui rêvent de jour ont conscience de bien des choses qui échappent à ceux qui rêvent de nuit"   Edgar Allan Poe