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De nos références communes à nos différences culturelles

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par Emmanuelle DECREAU
IUT B de Tourcoing (Lille 3) - DUT Carrières Sociales option Animation Sociale et Socio-Culturelle 2008
  

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DEUXIÈME PARTIE :

MULTICULTURALISME / INTERCULTURALISME :

DEUX NOTIONS OPPOSÉES ?

Il existe aujourd'hui deux modèles communément reconnus de gestion de la diversité culturelle : le modèle multiculturel anglo-saxon, qui donne la possibilité à tout individu d'appartenir à une communauté autre que celle de l'Etat-Nation ; et l'orientation interculturelle, d'inspiration francophone, qui n'a pas encore donné lieu à des prises de position officielles et stabilisées, ni en politique, ni en éducation, mais qui n'en présente pas moins une alternative forte face au courant multiculturel.

I LE MULTICULTURALISME :
des interprétations différentes selon les pays.

I.1. Définition générale

Pour certains, le terme multiculturalisme n'a qu'une valeur de constat. Il désigne la coexistence de différentes cultures au sein d'un même ensemble (au sein d'un pays par exemple).

« L'adjectif est recensé pour la première fois dans la langue anglaise en 1941 où il désigne une société cosmopolite, composée d'individus sans préjugés ni attaches pour qui les nationalistes d'antan ne signifient plus rien » (Lacorne14(*), 1997).

Pour d'autres, la notion est plus complexe et tous ne s'accordent pas sur son origine : le multiculturalisme, en tant que concept, semble être apparu aux États-Unis dans les années 1960 lorsque les hommes politiques ont commencé à se soucier des problèmes que pouvaient poser les différentes vagues d'immigration au sein du pays, politique migratoire alors caractérisée par l'idéologie du melting-pot15(*). Mais, en 1970, le multiculturalisme désigne aussi en Australie et au Canada les politiques publiques dont le but est de valoriser la diversité culturelle.

De manière générale, il est reconnu que le multiculturalisme à « l'américaine » repose sur les valeurs suivantes : la liberté de chacun et l'égalité de tous. En m'aidant du livre Le multiculturalisme de Milena Doytcheva16(*), je me suis rendu compte que celui-ci repose sur un certain nombre de principes et de postulats :

- La priorité donnée au groupe d'appartenance : l'individu est vu comme faisant partie d'un groupe et c'est l'identité groupale qui prime sur l'identité singulière.

- Le multiculturalisme donne une vision « mosaïque » de la société, chaque groupe étant une composante de cette mosaïque. Chaque groupe est par ailleurs supposé homogène. Les groupes sont officialisés, identifiés, catégorisés, classés voire hiérarchisés de manière implicite ou explicite en fonction d'une norme.

- Une spatialisation des différences. Celle-ci se traduit par exemple par la création de quartiers ethniques avec leurs dérives dans la formation de ghettos.

- Le multiculturalisme crée autant d'espaces publics spécifiques qu'il y a de différences.

- L'expression des différences dans l'espace publique. Chaque institution (écoles, maison de quartiers...) doit reproduire les différences culturelles et les rendre sociologiquement visibles.

- Une juridiction spécifique et complexe qui garantit les droits de chacun. La reconnaissance juridique des minorités (ethniques, sexuelles, religieuses, etc.) implique des droits : politique de quotas, discrimination positive17(*).

En France, c'est dans les années 1975 que l'on commence à parler de multiculturalisme, lorsque Valery Giscard d'Estaing met en place des dispositifs pour renvoyer certaines catégories d'immigrés dans leur pays d'origine (primes de départ) et tente par ailleurs de permettre à la population qui reste sur le territoire de se sentir « intégrée ».

De manière générale en Europe, le terme multiculturalisme est aujourd'hui utilisé lorsque l'on parle des minorités considérées comme ayant pour devoir de s'intégrer. En France, le multiculturalisme est souvent associé au communautarisme18(*) pour cette raison.

* 14 Denis Lacorne est philosophe politique aux Etats-Unis, il a écrit Le multiculturalisme est-il un communautarisme ? en 2004.

* 15 Le terme melting-pot a été emprunté au titre d'une pièce d'Israël Zangwill (1908), l'expression désigne l'intégration des immigrants de toutes provenances et de toutes conditions sociales dans une même culture.

* 16 DOYTCHEVA Milena, Le multiculturalisme, édition La découverte, collection Repères, 2005, 123 pages. Doytcheva est maître de Conférences en sociologie, Université Lille 3.

* 17 La discrimination positive est un ensemble de mesures visant à égaliser les chances de certaines catégories de personnes ayant subi des discriminations systématiques par le passé.

* 18 Le terme « communautarisme » est explicité dans la partie I.4, page 21.

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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon