e 104 à Paris en 2008: Un projet de transversalité artistique et sociale ?( Télécharger le fichier original )par Elsa Gobert Université Paris III - Master 1 2007 |
b : Le 104, espace public ?Avec un espace traversier, « seul lieu d'art où l'on n'est pas obligé de rentrer par le même endroit que là d'où l'on est sorti »69(*), véritable passage public parisien ouvert de 8h à 22, le 104 évolue au-delà de la notion de propriété privative de l'espace de création vers celle d'ouverture, donc de perméabilité au voisinage, au public. C'est un lieu de rassemblement social d'individus, en théorie de classes hétérogènes, un lieu sociologique, un lieu qui s'approche de l'espace public. « C'est ça, la rue ouverte à tous en question, où l'on pourra voir l'art en train de se faire. C'est un chemin de création»70(*) explique Frédéric Fisbach. « Une rue ouverte à tous » c'est donc bien de créer un espace sur le modèle d'un espace public que recherchent les directeurs avec ce lieu. L'espace se présente effectivement comme un long passage couvert d'une verrière, bordé d'ateliers de création et de divers équipements de réalisation artistique, de monstration, ou de services. Il concourt à part entière aux objectifs : L'art en lui-même devient un lieu de transversalité, par la médiation que la forme urbaine impose de fait au public. Il y a un rapport dialectique entre le lieu et la culture. Un désir par les acteurs du « 104 » d'attribution collective d'un lieu au public. Le désir de créer un espace ouvert que la collectivité a en partage. La notion d'espace public n'est jamais évoquée dans les textes qui viennent de l'équipe du 104. C'est une rue qui permet de voir « l'art en train de se faire »71(*) par les artistes, un espace de la création. Un lieu de passage, de rencontre et d'interactions sociales, c'est bien ce à quoi le 104 s'apparente. C'est un espace libre d'accès gratuit et fréquentable par tous. Ce qui reste toujours dans le domaine de l'espace public. Pourtant, s'il se rapproche de la rue, de la vraie voie publique, il n'est pas complètement un espace public. Car un espace public, se référant à la thèse de Jürgen Habermas, philosophe allemand, intitulée L'espace public : archéologie de la publicité comme dimension constitutive de la société bourgeoise et qui date de 1963, est un espace « gouverné par la raison », où la « critique s'exerce contre le pouvoir d'état » 72(*). Or le 104 est un lieu institué, ce qui semble aller contre un espace de la critique du pouvoir d'état. Les premières résidences démontreront si cet espace peut recevoir des artistes qui exercent leur art dans ce registre. Ce passage est fermé la nuit, il n'est pas complètement public car appartenant à la mairie et demandant des normes de sécurité particulières (une caserne avec des pompiers qui travailleront en permanence sur le lieu est construite). Ainsi, ce n'est pas totalement un espace public, et pourtant on en est très proche et les notions d'espace, de temps et de lieu sont donc différentes de celles des lieux conventionnels de l'art. Le 104 représente un effacement progressif de la frontière entre lieu public et lieu privé. Il incarne le refus du cloisonnement, l'espace multiple cité par Jean-François Augoyard : « Il faut concevoir des espaces qui offrent le maximum d'usages possible, qui permettent l'appropriation et sa dynamique »73(*). * 69 FISBACH, Frédérique. op cit. annexe 4. * 70 FISBACH, Frédérique. op cit. annexe 1. * 71 Premier entretien avec Frédéric Fisbach. 28 dec 2007, 11 rue Curial 75019 Paris. Annexe 2. p * 72 HABERMAS, Jürgen. L'espace public : archéologie de la publicité comme dimension constitutive de la société bourgeoise. Paris : Payot. 1997. * 73 AUGOYARD, Jean-François, LEROUX Martine. Médiations Artistiques Urbaines. Grenoble : Cresson, 1999. 207 p. |
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