a) L'approche d'aléa moral
Cette approche, soutenue par Krugman (1998) et
Corsetti, Pesenti et Roubini (1999), introduit une définition
générale de l'aléa de moralité ou de risque moral.
Celui-ci se caractérise par le fait que les agents aient la
possibilité de prendre des décisions risquées, car ils ne
subiront aucune perte en cas de problème, dans la mesure où le
gouvernement leur fournit des garanties plus ou moins explicites. Ainsi, les
intermédiaires asiatiques ont la possibilité d'emprunter aux
banques étrangères car leur passif est garanti par le
système en cas de retraits des clients ou de faillite personnelle de la
banque.
Krugman (1998) défend la thèse des politiques
économiques et monétaires insoutenables et de la
responsabilité des fondamentaux dégradés de la panique
financière. C'est le cas de la crise asiatique, croit-il. La
dégradation des fondamentaux asiatiques ainsi que les politiques
inappropriées (crazy policies), tels que les garanties, les soutiens et
la socialisation ou l'indemnisation des dettes et les actes des agents des
autorités monétaires, sont responsables de la crise. Il
considère que les banques, par la constitution d'un stock excessif
d'investissement et d'emprunt bancaires, ont fait déclencher la crise
asiatique à travers le rôle du risque moral dans le gonflement de
la bulle sur les prix des actifs, ainsi que dans son profitabilité. Cela
a engendré, dans une première phase, appelait « la
phase euphorique », un boom d'activité et des augmentations de
réserves voire des bulles sur le taux de change.
Puis, dans une deuxième phase, appelait « la
phase neurasthénique », tout est inversé. Il y aurait
une détérioration de la situation financière des
entreprises, une dégradation des bilans bancaires, un sous
investissement, un ralentissement de l'activité, des pertes massives de
réserves, une chute des cours boursiers, des faillites bancaires, une
crise réelle, une diffusion de la panique, une attaque
spéculative, des sorties massives des capitaux. En d'autre terme une
crise financière totale qui est due au risque moral.
Le risque moral se situe à trois niveaux. Le premier
concerne les entreprises. Les investisseurs, optimistes, croyant qu'ils ne
pouvaient pas subir de perte en cas de chocs négatifs, ont pris des
risques démesurés et ont même adopté certains
projets dont la profitabilité est faible. Le deuxième qui est
financier implique les banques qui ont massivement accordé des
prêts aux investisseurs nationaux dont plusieurs projets ainsi
financés sont souvent douteux. Elles estimaient que les emprunteurs
capables de rembourses leurs crédits. Par la suite, elles pouvaient
elles-mêmes rembourser leurs dettes extérieures. Cependant, aucune
banque ne consacrait des mécanismes de contrôle et de supervision
pour les activités de leurs clients, de sélection des projets,
des normes et des ratios prudentiels et de mesure de risque, ce qui a conduit
forcement à des non remboursements.
Le troisième niveau est international et implique les
banques étrangères qui ont accordé des crédits aux
économies asiatiques, à la garantie des gouvernements locaux ou
du FMI. Ainsi, ces anticipations ont poussé les acteurs à prendre
des risques excessifs même dans le cas des situations défavorables
dans l'économie.
Dooley (1997) soutient le problème se situe au niveau
de l'action du gouvernement. D'une part, il a essayé d'acquérir
des réserves de change, par les entrées des capitaux
étrangers, dont le but est de constituer une assurance en cas de choc
extérieur. D'autre part, il a assuré une bonne santé du
système bancaire et un remboursement en cas de retraits et ce
grâce aux réserves. Cette garantie a incité les
investisseurs aux retraits, s'ils estiment optimal, et de ce fait à
puiser dans les réserves de change.
Berger et De Young (1997) ont démontré
l'existence d'une relation de causalité au sens de Granger entre la
faiblesse des fonds propres des banques américaines et l'apparition de
créances douteuses. En testant l'hypothèse du risque moral, ils
ont conclu que les banques à faibles fonds propres augmentent le risque
de leur actif en octroyant beaucoup de prêts, ce qui provoquera le
développement des prêts non performants.
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