chapitre II: les contextes politiques interne et
international de la création de l'IER :
l'IER a été créée dans un
contexte politique nouveau caractérisé par un ensemble de
transformations et des réformes touchant plusieurs institutions de
l'Etat, depuis 1990 et ce sont en fait ces réformes qui ont
préparé le terrain au travail de l'IER ( section 1), ensuite
c'est un contexte caractérisé par une régression de
l'usage de la violence ( section 2), enfin c'est un contexte
caractérisé par un engagement du Maroc sur le plan international
à la consécration des droits de l'Homme (section 3) .
Section I : La transition
démocratique :
L'IER a été créée dans une phase
très importante de l'histoire du Maroc contemporain, une phase
caractérisée par plusieurs transformations et plusieurs
réformes touchant tous les domaines.
En fait le Maroc s'est engagé dans la voie de la
consécration de l'Etat de droit depuis 1990, avec les réformes
introduites à l'époque par feu Hassan II.
Dans cette perspective le Maroc a vu naître depuis 1990
de nouvelles institutions consacrées aux droits de l'Homme, pour
consolider les structures judiciaires et administratives déjà
existantes.
Il s'agit du conseil consultatif des droits de l'Homme et du
ministère chargé des droits de l'Homme.
Le CCDH a été crée par le dahir n
1-90-12. Du 20 avril 1990 ; à cette nouvelle institution a
été confié le soin d'aider sa majesté le roi dans
toutes les questions relatives à la défense, la protection et la
promotion des droits de l'Homme, le respect et la garantie de leur plein
exercice.
Alors que le ministère chargé des droits de
l'Homme a été créé le 11 novembre 1993 et le
décret n 2-94-33 du 24 mai 1994 a fixé son organisation et ses
attributions.
La création de ce ministère, après
l'installation du CCDH a constitué un facteur important de l'ouverture
politique par feu sa majesté Hassan II au moment où les
ministères similaires se comptaient sur les doigts.
En dehors de ces institutions et en raison du rôle
particulier que joue la justice administrative dans la préservation des
droits et libertés, feu sa majesté Hassan II a
procédé à l'instauration des tribunaux administratifs par
les dispositions de la loi n 41- 90 promulguée par le dahir n 1- 91-255
du 10 septembre 1993. Cette création a constitué un saut
qualitatif important dans le domaine du contrôle des décisions
administratives par la justice, et par conséquent, dans la
préservation des droits des citoyens contre tout abus ou excès de
pouvoir.
L'ensemble de ces réformes ont constitué les
prémisses d'un processus de réconciliation nationale, ce
processus a été couronné par le vote positif par
l'opposition de la révision constitutionnelle de 1996, la formation du
gouvernement d'alternance et l'adoption d'un certain nombre de lois ayant trait
aux droits de l'Homme et à l'Etat de droit.
Avec l'intronisation de sa majesté Mohamed VI le pays
s'est engagé dans la voie de l'édification d'un Etat
démocratique respectueux des droits de l'Homme.
C'est ainsi que sa majesté a procédé
à la réorganisation du Conseil Consultatif des droits de l'Homme
pour l'harmonisation de ses statuts avec les principes de Paris, la
création de l'Instance indépendante d'arbitrage chargée de
dédommager les victimes de la disparition forcée et de la
détention arbitraire. Ainsi que la création de Diwan al Madhalim
par le dahir n 1-101-298 du 9 décembre 2001, ayant pour objectifs la
consolidation des acquis réalisés pour le triomphe des droits,
l'élimination des injustices et le parachèvement des missions
assumées par l'appareil judiciaire et le conseil consultatif des droits
de l'homme, chacun dans leurs domaines de compétence.
Cette dynamique s'est traduite par des réformes
législatives importantes, à commencer par les dispositions
organisant les libertés publiques, les élections, d'autres
abrogeant des textes datant du protectorat et enfin, le compromis historique
entre les différents acteurs politiques à l'occasion de la
réforme du code de statut personnel.
Ces mutations et réformes ont contribué
à une large prise de conscience quant à l'importance de la
participation des citoyens dans la gestion des affaires publiques, le
renforcement des libertés d'expression d'association et de
réunion.
Grâce à ces évolutions
politiques et institutionnelles également, le débat national sur
les droits de l'Homme a connu un progrès remarquable au niveau
intellectuel, ce qui a amené le mouvement marocain des droits de l'Homme
a s'ouvrir davantage sur les doctrines des nouvelles écoles en
matière de droit international et les expériences de justice
transitionnelle.
Section II : le dépassement de la
violence :
Comme nous l'avons signalé au cours de la section
précédente le progrès du Maroc en matière des
droits humains a commencé dès les dernières années
de règne de Hassan II, ce dernier a procédé A la fin des
années 80, à la libération de la plupart des prisonniers
politiques dont les présumés responsables du coup d'Etat de 1972
détenus depuis des années et bien après avoir accompli
leurs peines de prison dans la célèbre bagne secret de Tazmamart.
Ainsi, en 1991, le roi libère 270 personnes que les services secrets
avaient fait disparaître. En 1994, il amnistie plus de 400 prisonniers
politiques. De nombreuses personnalités de l'opposition rentrent au
Maroc après plusieurs années d'exil, l'un d'entre eux,
Abderahmane youssfi est nommé premier ministre par le roi Hassan II et
accomplit, de 1998 à 2002. En 2000, le roi Mohamed VI libère le
leader du mouvement islamiste non reconnu Justice et bienfaisance,
assigné à résidence depuis plus de dix ans.
En 1993, le Maroc ratifie la convention contre la
torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants.
Après son accès au trône, sa
majesté le roi Mohamed VI a insisté sur une redéfinition
du concept d'autorité.
En fait l'autorité a pendant longtemps
été associée aux abus et à la violence ce qui a
abouti à un sentiment général de méfiance, voire de
rejet de tout ce qui incarne l'autorité.
Le mauvais usage de l'autorité a constitué
un danger pour la démocratie, dans un pays qui se réclame de
l'Etat de droit et du respect des libertés.
Le nouveau concept de l'autorité annoncé
par sa majesté le roi Mohammed VI lors du discours prononcé
à Casablanca le 12 octobre 1999, et réitéré dans le
discours du trône du 30 juillet 2000, exprime la perception royal que
devront désormais assumer les autorités publiques aux
différents échelons de la responsabilité tant national que
territorial.
Cette perception critique de ce qui a fort longtemps
sous-tendu l'action publique dans ses différentes expressions, part
d'une analyse globale ayant débouché sur un diagnostic pertinent
des véritables maux dont souffrent la mise en oeuvre de
l'autorité publique.
La nécessité de respecter
l'autorité eu égard aux données actuelles s'inscrit dans
le cadre d'un processus stratégiques évolutif, dont les
préalables constitués par les mises en place du Conseil
consultatif des droits de l'Homme et la création des tribunaux
administratifs pour réactiver le principe de légalité
conçu comme une limite- garantie.
De ce fait, l'IER en tant que philosophie et en tant que
création s'inscrit dans ce processus de redéfinition du
rôle de l'autorité publique et du dépassement de la
violence.
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