TYPOLOGIE DES MODèLES EN
THéORIE DES CONTRATS
correspondent aux situations où le principal a
l'initiative du jeu et où il ne connaît qu'imparfaitement les
actions de l'agent 1M11 71,
q Le quatrième quart, là où l'initiative
appartient à la partie informée et où la partie non-
informée connaît imparfaitement les actions de la partie
informée, « est d'intérêt empirique limité et
n'a pas fait l'objet d'études théoriques » Salanié B.
[1994, p : 5].
Si le modèle de base de l'aléa moral pur se
présente ainsi, :
q
Aléa Moral Pur
Contrat PA
Accepte
Rejette
A
Paresse
Effort
N
N
Mauvais résultat
Mauvais résultat
Bon résultat
Bon résultat
Figure 12
Le principal (P) propose un contrat (avec incitation),
q L'agent (a) décide de l'accepter ou pas,
q S'il l'accepte, et sachant les conditions de l'incitation,
il peut montrer de l'opportunisme et décide de ne pas fournir l'effort
voulu par le principal (objet de l'incitation),
q Souvent, dans les modèles d'aléa moral, la
nature (N) décide (exogènement et souvent aléatoirement)
du résultat de cet effort de l'agent.
Le modèle de base de la sélection adverse pure est
schématisé ainsi (ex : assurances) :
Sélection Adverse Pure
N
Type 2
Type 1
P
P Contrat A
Contrat
A
Rejette
Accepte
Accepte
Rejette
Figure 13
q La nature (N) décide du type ou de la
caractéristique (cachée) de l'agent, l'assuré. (ex :
type 1 est un agent trop risqué...)
q Le principal (P), l'assureur, propose un contrat à
l'agent, tout en étant incapable d'identifier son type, (il a un seul
ensemble d'information --en pointillé- contenant deux noeuds).
q L'agent (A), à son tour, décide d'accepter ce
contrat ou pas.
q Les clauses du contrat doivent maximiser l'utilité
de l'assureur et celle de l'assuré, à travers la
négociation de la « quantité » de risque à
couvrir et à quel coût 1M1172.
1M1171 Le terme « aléa moral » (et
son modèle) a longtemps été confondu au terme «
agence » (agency). Voir, par exemple, Melumad & Thoman 11990, p.77, en
end-note n°11.
1M1172 Ces équilibres se basent sur le
concept de prime équitable de couverture du risque : si le principal
propose 2 types de contrats, à prime
faible et à prime élevée, pour essayer de
distinguer entre les agents, tous choisiront les contrats à prime
faible, y compris les agents de type
« conduite négligée », par exemple, et
l'assureur réalisera des pertes, puisque la prime est trop faible par
rapport à la fréquence ou
probabilité d'occurrence des accidents des conducteurs
négligents. La prime équitable traduit le minimum de perte pour
tous les joueurs.
Qu'en est-il du modèle DA (1999.1 ?
Aléa Moral avec Information
Cachée
Contrat PA1
Rejette
Accepte
Type 1 N
Type 2
A2
A2
Paresse
Paresse
Effort
Effort
N
N
N
N
Les jeux à information asymétrique sont
divisés en jeux à aléa moral, où les agents sont
identiques, et en jeux à sélection adverse, où les agents
sont hétérogènes. Mais il existe des jeux à
aléa moral, qui ne sont pas purs, puisqu'ils présentent aussi une
structure similaire à celle de la sélection adverse. Dans ce type
de modèle, les agents présentent une
hétérogénéité de caractères : Ces
modèles sont effectivement des modèles d'aléa moral, mais
qui comportent une information cachée sur le type de l'agent, ou de l'un
des agents. La résolution du eu reste toujours focalisée sur
l'action de l'agent, et non sur son choix du contrat, et l'agent accepte
toujours le contrat, dans ce type de modèle, avant de connaître
l'information. La forme extensive du jeu se présenterait alors comme la
figure 15 ci-contre :
Cette structure de jeu s'applique exactement sur le
modèle DA [1999.1 : En fait, après que le dirigeant ait
accepté son contrat, il s'avère que l'auditeur présente
une hétérogénéité de caractère : il
est soit « strong », professionnellement très diligent,
quelques soient les circonstances, soit « weak », c'est à dire
peu diligent, préférant ne pas, ou peu, recourir à des
tests consistants d'audit, et donc coûteux. En plus cette
hétérogénéité n'est observable ni par le
dirigeant ni par le propriétaire. Ce qui insinuerait une structure de
sélection adverse dans le modèle. Datar et Alles disent bien
à ce sujet :
« 1, auditor type as modeled in this paper is an
exogenously determined but unobservable variable. » 11999,
p.402.1
Mais, une structure de sélection adverse signifie que
d'une part, la nature fixe le type de l'agent avant que le principal n'ait
proposé le contrat, ce qui n'est pas le cas ici, et que d'autre part,
l'issue du jeu soit atteinte par la simple acceptation ou refus du contrat et
non pas par le choix d'actions suite à l'acceptation du contrat, ce qui
n'est pas aussi le cas ici. L'issue du jeu à structure d'aléa
moral impur reste toujours focalisée sur les actions de l'agent et non
sur son acceptation ou refus du (ou des) contrat proposé.
Mais que signifie au juste être un auditeur weak ou un
auditeur strong ? quelle est la différence entre un type et une action :
autrement dit, ne peut-on pas être weak et être tout le temps
diligent ? et pourquoi un auditeur strong ne peut jamais manquer de diligence
?
AUDITEUR « STRONG » : Pour DA [1999, p.408],
un auditeur « strong » est un auditeur honnête et qui fournit
toujours l'effort effectif d'audit. Pour que ce type d'auditeur puisse
conserver cette caractéristique, rester strong, il devrait avoir une
utilité émanant de l'effort supérieure à celle
émanant de la paresse, DA [1999, p.414] :
- en attribuant une importante utilité aux
externalités positives possibles qui émanent de l'exercice
d'audit, telles que une meilleure maîtrise du secteur d'activité
du client audité, ou une meilleure habileté ou savoir-faire en
audit...
- ou en ayant toujours la possibilité financière
d'entretenir un coût adéquat d'audit, au cas ou l'auditeur est
financièrement robuste et dispose d'une gestion intelligente de ses
coûts,
- ou en ayant une logique de long terme, il débourse
le coût adéquat d'audit aujourd'hui, pour mieux rentabiliser (en
minimisant les coûts) d'efforts futurs de conseil en gestion, pour la
même firme ou dans le même secteur d'activité...
En plus, Datar et Alles affirment que l'auditeur, même
s'il est strong, ne recourt pas à des tests consistants d'audit, lorsque
le manager rapporte un résultat indésirable, puisque ce dernier
dit nécessairement la vérité dans ce cas.
Là, la réalité des choses diffère
: Dans la vie des affaires, il est difficile, même pour le
propriétaire d'une firme, de distinguer entre résultat entre
désirable et non désirable EU73 : ce seuil
est trop vague pour être opérationnel. Par conséquent,
l'auditeur strong fournit toujours l'effort dicté par les normes
et l'éthique professionnelles, quelles que soient les circonstances,
quelles que soient les divulgations du manager. Apparemment, DA [1999, p.404,
end-note 5] n'ont pas voulu trop approfondir cette distinction «
désiré -- non désiré » :
« ... Note also, that these outcomes xn and
xd could represent a realization from a set of possible values. This will not
change our results as long as the range of the sets are non-intersecting,
and so it is clear from a realization of xi whether it represents a bad
outcome or a good one. »
À vrai dire, ce n'est pas du tout clair dans leur
modèle comment cette distinction s'opère, entre résultat
réalisé désiré et résultat
réalisé non désiré : Mais il faut noter que pour
utiliser le modèle de Kreps et Wilson [1982a] de la réputation et
de l'équilibre séquentiellement rationnel, il faut disposer de
stratégies discrètes. Si le résultat de la firme aurait
été un continuum, il ne leur aurait pas été
possible de continuer dans cette démarche. DA [p.408] ont aussi
avoué que les actions aussi sont en réalité un continuum,
mais par souci de simplification pour la modélisation, ils ont
73 Surtout s'il s'agit d'un résultat
financier et non de gestion, ou budgétaire ou prévisionnel... une
perte est toujours non désirée, mais il y a des pertes qui sont
plus désirées que d'autres. Pour les bénéfices, ils
sont toujours désirés, mais leur champs du possible est
infini...À vrai dire, la remise en cause de cette hypothèse,
entraîne nécessairement la remise en cause d'une autre : celle que
le manager ne ment pas dans le cas d'un résultat rapporté
indésirable.
Q 74 Cette remarque, ils l'ont surtout
faite pour les actions de vérification par l'auditeur : « Clearly
in practice, there is a continuum between a thorough audit and a negligent one
». L'audit n'est d'ailleurs pas une seule action à décider,
c'est tout un enchevêtrement d'actions, de décisions, et de
jugements qui génèrent à la fin une opinion d'audit.
Q75 Le manager a la faculté de
découvrir la paresse de l'auditeur, puisqu'il peut observer ses actions,
mais il n'a aucune influence sur ses payoffs positifs (c'est le
propriétaire qui les payent) ni sur ses payoffs négatifs
(l'auditeur doit les payer au propriétaire si ce dernier, et non le
manager, le découvre négligent). Mais le seul effet dû
à cette situation, est que le manager serait plus tenté de
choisir wn et de mentir si (xi=xn). Il faut noter en plus que les
modélisateurs ont exclus de leur modèle toute forme de collusion
entre le manager et l'auditeur.
restreints tout le champs des actions possibles en deux actions
seulement, désirée et non désirée
Q74.
Dans la réalité des choses aussi, si un
auditeur strong fournit toujours un effort consistant quelque soit la
divulgation du dirigeant, un auditeur strong, aussi, peut être
amené à être négligent dans son travail, mais
rarement, suite par exemple à des difficultés financières
passagères, ou à un départ brusque d'un membre pivot de
l'équipe d'audit...
AUDITEUR « VVEAK » : Sommairement selon DA
[1999, p.4141, ce type d'auditeur n'attribue pas une forte utilité
à tout ce qu'intéresse l'auditeur strong :
- Il doit avoir une structure d'utilité qui
privilégie la paresse à toute autre forme d'externalités
positives dues à l'effort...
- C'est un auditeur qui a une structure de croyance
particulière aussi : il n'affecte ni une grande probabilité au
fait de pouvoir être découvert par le propriétaire, ni un
grand coût d'ailleurs (synonyme de l'utilité réduite de la
pénalité) gil75.
Mais l'auditeur weak ne peut pas être tout le temps
négligent : comme disent DA [p.4151, ce type d'auditeur a un double
objectif à réaliser :
1. Il veut encourager le propriétaire à ne jamais
rompre son contrat d'audit,
2. il ne veut pas se laisser découvrir par le manager
pour l'encourager à ne plus mentir, et garantir ainsi un niveau minimal
de coût d'audit à dépenser (consistance des tests à
effectuer).
La stratégie optimale de l'auditeur weak serait, donc,
de fournir l'effort effectif d'audit, en début du jeu, pour donner une
apparence d'auditeur strong. Ainsi, le manager serait poussé à au
moins ne pas mentir (pousser le manager à choisir wd n'est pas un
objectif pour l'auditeur) pour ne pas être découvert par
l'auditeur « apparemment » strong et ne pas risquer le paiement de la
pénalité j9 au propriétaire. Puis, une fois un
semblant de bonne réputation construit, l'auditeur peut «
rentabiliser » sa mission en cessant d'être diligent, et en «
mimant » le rapport du manager, jusqu'à la fin du jeu.
Sommairement, cette distinction du type de l'auditeur
paraît très vulnérable, elle semble n'être
qu'un artefact, nécessité pour les besoins de la
modélisation, afin de générer endogènement le
concept de réputation : Elle repose sur des hypothèses qui
sont elles-mêmes fortement discutables, et soumises à des
valeurs de jugement personnelles de la part du manager, du propriétaire,
et de l'auditeur lui-même :
H si l'auditeur choisit id pour une période
donnée, DA supposent qu'il saura avec certitude le
résultat réel de la firme xi , il éliminera
ainsi tout risque de détection : Or, un risque ne peut jamais
être nul, et un auditeur, même le plus performant, ne peut jamais
être certain de connaître le résultat d'une firme,
il peut l'approcher mais pas avec exactitude,
H si l'auditeur choisit l'action in , DA supposent qu'il
ne peut catégoriquement pas découvrir le
résultat réel de la firme pour une période donnée :
Or l'audit est une activité basée sur les tests, faits
par échantillonnage essentiellement, le hasard peut jouer alors des
mauvais tours au bon auditeur et peut porter chance au mauvais
auditeur. Ce qui est sûr, c'est que plus un auditeur est
diligent, plus il a de chances de découvrir la réalité.
S'il est négligent, cette chance, pourtant, ne peut pas lui
être nulle,
H les actions id et in de l'auditeur (qui
différencient entre les deux types d'auditeurs, selon
l'histoire du jeu) sont supposées par DA distinctes
(discrètes) : Or, DA eux-mêmes avouent que l'audit, en
réalité, est un continuum d'actions (voir note n°
Q61) et qu'il s'agit là surtout d'une simplification pour
des fins d'aise en modélisation,
H enfin, le fait de rapporter un résultat mensonger
indique un résultat supérieur ou inférieur au
résultat réel, l'indice d et n devraient être
explicités dans ce sens. DA ont seulement indiqués que
xd et xn , ne doivent être considérés que comme une
réalisation parmi un ensemble de valeurs possibles, l'important
est que ces ensembles n'aient pas d'intersections non vides
entre-eux...
En bref, cette première critique à la
mécanicisité du modèle DA [1999] se résume dans le
fait qu'il est difficile de distinguer entre les deux types
d'auditeurs, bien que cette distinction s'avère centrale pour
la formation de la réputation de l'auditeur. La réputation, en
elle-même, est une notion vague, ambiguë. C'est un concept
qu'on ne peut qu'apprécier globalement et non mesurer
exactement.
Une seconde critique, dans ce même cadre, est faite
à la nature de la rationalité des joueurs de ce
modèle et à la nature de leur opportunisme :
CONTRIBUTION DE ~A T~i ORIE DES COÛTS DE TRANSACTION
~
e'ME CRITIQUE RATIONAITi ET OPPORTUNISME
Entre la théorie des contrats et la théorie des
coûts de transaction, il y a désaccord sur la limitation de la
rationalité, sur sa dynamique et sur l'opportunisme de l'agent :
Williamson O.E., « fondateur » de la théorie des coûts
de transaction, regroupe ces points dans ce qu'il appelle les « attributs
» de la transaction touchant aux « capacités cognitives »
des agents Q76 : Examinons d'abord si la rationalité dans la
théorie des contrats est limitée ou pas et est dynamique ou pas.
Ensuite, examinons si l'opportunisme de l'agent dans la théorie des
contrats est systématique ou conjectural : la réponse à
ces questions nous aiderait à accentuer ou à nuancer notre
critique contre la mécanicisité de la modélisation en
audit.
RATIONA~ITi DES JOUEURS ~
Dans presque toute relation économique, il existe de
l'imprécision et/ou de l'incertitude sur ce que ferait l'Autre
vis-à-vis de nous. Pour contourner cet aspect, il faut recourir à
créer un « système garde-fous » qui puisse
rétablir la confiance dans la relation économique
(vis-à-vis des individus et des aléas de la nature) et faire
converger les comportements des individus vers une situation
d'équilibre. Une clause incitative, à titre d'exemple, dans un
contrat quelconque, constitue bien un système « garde-fous
».
Le principal, dans une relation économique, n'a pour
rôle que de créer un système garde-fou, qui essaye de lui
garantir un certain comportement de la part de l'agent avec lequel il est en
relation. Selon Shackle G.L.S., Créer veut dire avoir de
l'intuition et de la logique. Pour que ce principal crée un
système efficace, il doit avoir donc de l'intuition et de la logique.
Commençons par le point sur la logique, la discussion sur l'intuition
suivra :
Q76 Selon Missonier-Piera Frank 119971, la
théorie des coûts de transaction, initié par Coase R. (en
1937) ensuite développée par Williamson O.E. (en 1975),
s'intéresse exclusivement à la transaction, elle avance les
postulats suivants :
q le fonctionnement du marché a un coût :
l'information n'est ni homogène ni gratuite, il faudrait faire un
choix entre internaliser une transaction dans la firme (substitution du
marché par la firme) ou la laisser au marché, ce choix est
basé sur l'importance du coût de l'internalisation par rapport au
coût du marché,
q l'incertitude fait qu'il est impossible d'avoir des
contrats complets, et surtout si la transaction s'étale dans le temps,
puisque les capacités cognitives des agents sont limitées :
rationalité limitée, et tendance vers l'opportunisme
ou « hold-up behavior » (et non pas agent systématiquement
opportuniste comme suggère la théorie des contrats et la
théorie néoclassique), l'opportunisme ex-ante ici conduit
à la sélection adverse et l'opportunisme ex-post à
l'aléa moral (contractualisation dynamique),
q les dimensions de la transaction, sont l'incertitude
(=> contrats incomplets), la fréquence (concerne les
événements non probabilisables) et les actifs
spécifiques (influencent le « hasard contractuel ») qui
induisent un processus dynamique de contractualisation. Ces dimensions
concourent pour réaliser la « transformation fondamentale » de
Williamson.
Mémoire de DEA-Comptabilité - ISCAE -
Décembre 2001 Analyse Critique de la Modélisation en Audit
Chapitre II - page : 66
La logique, elle, dicte de lier le bonheur de l'Agent au
bonheur du Principal : Si cette liaison est, en plus, automatique, le
comportement voulu de la part de l'Agent serait garantit. Le contrat
peut-être conçu, alors, comme une matérialisation de cette
logique mécanique, mathématisée abstraite. Du coup, le
degré de finesse des clauses (incitatives et autres) du contrat
traduirait le niveau de « prévention » de ces
imprécisions et incertitudes inhérentes à toute relation
économique.
Par cette analyse logique, la théorie des contrats
réussit à appliquer, d'une certaine façon, le concept de
« rationalité illimitée » des
néo-classiques : une rationalité d'un décideur qui sait
où il est ( toutes les informations concernant les joueurs, les
stratégies, et les aléas : en somme les règles du jeu ) et
qui sait où il veut aboutir ( les effets sur son utilité propre
et les situations d'équilibre possibles ).
Selon J-P. Chambon [1995, p.], cette situation est très
bien décrite par Simon Herbert A., dès 1945. Il décrit la
rationalité illimitée, qu'il appelle « substantive »,
comme simple, parfaite, objective, et applicable nécessairement par
rapport à un objectif donné, et dans un environnement
certain et parfait traduit par un système de contraintes.
La recherche du meilleur choix, pour décider l'action à
entreprendre, est réduite à un simple calcul maximisateur.
Mais dès 1945 aussi, il commence à critiquer cette
rationalité substantive suivant trois axes importants :
1. « l'individu est incapable de dresser la liste des
toutes les décisions possibles et l'est d'autant moins que l'incertitude
est grande, (capacités informationnelles)
2. il est incapable d'évaluer correctement les
conséquences de chacune d'entre-elles, ce qui est d'autant plus
improbable que les alternatives sont complexes et nombreuses, (capacités
de traitement de l'information),
3. et est incapable de choisir les meilleures décisions,
c'est à dire de maximiser son utilité ou son profit. »
(seuil de satisfaction) J-P. Chambon 11995, p.441.
À partir de ces trois axes critiques, et jusqu'en 1957,
Simon réussit à développer son fameux concept de la «
bounded rationality » ou rationalité limitée, qu'il appelle
aussi « procédurale » : Simon M77, en fait, limite
la rationalité néo-classique aux moyens et aux fins
relatifs à l'individu. La figure suivante essaie -avec plus de mal que
de bien- de résumer les procédures de la rationalité
limitée, procédurale, de Simon :
77 Simon Herbert A., prix Nobel 78, est un
spécialiste d'intelligence artificielle. Il a été parmi
les pionniers à créer des programmes capables de démontrer
des théorèmes mathématiques. Sa femme psychologue l'a
beaucoup influencé dans sa tendance vers les sciences de la psychologie.
Il a été d'ailleurs longtemps Professeur des sciences de
l'ordinateur et de psychologie à l'Université de Pittsburgh... Il
a commencé à critiquer la rationalité néo-classique
dès 1945. En 1957 son concept de « rationalité
limitée » semble accomplit. En 1976, il conçoit le dualisme
rationnel. Mais en 1983, il révise la rationalité limitée
en lui ajoutant « l'intuition »...
Fixation de l'objectif
Problème de décision
Info non suffisantes ?
éATIONALIT LIMITéE CHE% SIMON H.A.
Recherche d'info
Incapacité
Recherche facile ?
oui
non
Choix & Décision
Traitement de l'info
non
Incapacité
Seuil de Satisfac -tion
Résultats
Incapacité
Figure 15 Q 69
Mais le mérite de Simon H.A., n'est pas simplement
d'avoir créé le concept de « bounded rationality »,
tant admiré par les économistes. Il est aussi, et surtout,
d'avoir considéré la rationalité «
illimitée » des néo-classiques comme un cas particulier de
la rationalité limité, à condition que certaines
caractéristiques de l'environnement de la décision existent.
C'est ce qui intéresse le plus notre discussion critique de la
théorie des contrats.
La rationalité d'un individu en situation de recherche
de solution pour faire un choix et décider d'une action à
entreprendre, se manifeste, selon Simon H.A., de deux façons possibles :
Si, sommairement, l'environnement de la décision est simple, certain et
parfait, là, l'individu doit user de la rationalité substantive
des néoclassiques. Si l'environnement est plus complexe, incertain, ou
turbulent, l'individu n'aurait pas d'autre choix que d'user de sa
rationalité limitée, qui est procédurale, puisque
séquentielle et adaptative. Elle est, en fait, limitée par les
propres capacités cognitives de l'individu, et adaptative par rapport
aussi à ces capacités cognitives.
Le tableau suivant résume les différences entre ces
deux dimensions complémentaires de la rationalité de Simon :
78 La notion de « délibération
» chez Simon englobe les deux étapes fondamentales : la
recherche d'information utiles à la décision et le
traitement de ces informations, en incluant aussi toute étape de
révision ou d'adaptation relatives à ces deux fondamentales. Mes
doutes de construction de ce schéma se portent sur la première
étape qui est la fixation de l'objectif. Il n'est pas clair,
d'après mes lectures, si la fixation de l'objectif se fait effectivement
lorsque l'environnement est turbulent, par contre, elle est certaine lorsque
l'environnement est simple...
Limité (info imparfaite et incomplète)
Limitées et propres à chaque individu Irréductible
(rôle de l'info)
Séquentielle, partielle et progressive Riche et
turbulent
Autres configurations de marché Règle de
satisfaction
Distincts, séparés dans le temps.
|
|
|
|
|
|
Volume d'information
Capacités de traitement
Délibération
Evaluation
Type d'environnement
Contexte du marché
Conséquence de l'hypothèse de rationalité
Processus d'évaluation et de choix
|
|
Illimité (info parfaite et complète)
Illimitées
Réductible au calcul parfait
Avant la prise de décision
Pauvre et stable
Concurrence pure et parfaite Optimalité des choix
simultanés
|
|
|
|
Tableau 8 : Comparaison rationalité limitée
& rationalité néoclassique
Source : Chambon J-P. [1995, p.40].
La théorie des coûts de transaction adopte le
concept de Simon. Face à toutes les incertitudes d'une transaction
économique (surtout celle à long terme) et les
imprécisions dues à l'inévitable incomplétude des
contrats, quels qu'ils soient, Williamson et Coase, sont convaincus que les
individus ne sont dotés que de rationalité limitée,
puisque leurs capacités cognitives sont aussi limitées. Ils ne
peuvent, en aucun cas, absolument tout prévoir dans un contrat pour
parer à toute forme d'aléa ou d'imprécision... Ils ne sont
pas en mesure de tout prévoir et de tout prendre en compte pour se
protéger contre tous les risques de la transaction (contre le «
contractual hazard »).
En plus, la rationalité de la théorie des
coûts de transaction est qualifiée de « dynamique »,
dans le sens qu'elle opère à travers le temps : En fait, dans la
théorie des contrats, le coût d'agence est le coût, que
dépenserait le principal, ou bien que gagnerait l'agent, relatif
à :
q l'effort de prévenir, ex-ante, le plus exhaustivement
possible, les alternatives de l'échange,
q et à l'effort de respecter les stipulations du contrat,
ex-post.
Là, la théorie des contrats est moins
avancée que la théorie des coûts des transactions sur
certains aspects : Ces deux points sont appréhendés par la
théorie des contrats de façon exogène : Les deux agents
économiques (le principal et l'agent) doivent en fait tout «
gérer » ex-ante, de telle façon à ce que,
après la réalisation de la transaction, la renégociation
du contrat soit assez coûteuse et inhibe toute « gestion »
du contrat ex-post. Tout se joue (et doit être fixé), donc,
avant la transaction.
Selon Missonier-Piera Frank [1997], la théorie des
coûts de transactions, par contre, considère qu'il y ait «
vie après la mort », qu'une gestion d'autres risques (moraux
surtout) doit exister et être prise en compte après la
réalisation de la transaction. Cette discussion se base surtout sur la
notion des capacités cognitives des agents économiques :
Selon Williamson, il s'agit là d'une
limitation de la rationalité des individus : Mais ce
qui différencie la rationalité dans la théorie des
contrats et celle dans la théorie des coûts de transaction, est
que la rationalité dans la théorie des coûts de transaction
est « dynamique » ; elle opère à travers le temps : une
rationalité limitée existe avant la réalisation de la
transaction, pour gérer la sélection adverse et une
rationalité limitée existe, après, pour gérer
l'aléa moral. Ce concept est appelé : « contractualisation
dynamique ».
En fait, la théorie des contrats en sélection
adverse, stipule qu'ex-ante, l'agent le plus risqué, choisira le contrat
qui couvre le plus de risque. Mais, la théorie des coûts de
transaction, puisqu'elle accepte qu'il y ait rationalité ex-post,
stipule que l'agent, de n'importe quel type qu'il soit, une fois le contrat
établit et accepté, pourrait être opportuniste et «
montrer » de l'aléa moral : Si son contrat couvre très bien
le risque d'accident routier, par exemple, il va en profiter et devenir encore
plus négligeant en conduite, de telle façon qu'il augmente
l'occurrence de ses accidents ! Ce qui traduit en bref, de la sélection
adverse ex-ante simultanée à de l'aléa moral ex- post.
Salanié B. (2000, p.5], dans une communication au congrès de
Seatle, résumant les travaux empiriques de la théorie des
contrats, évoque ce problème pour le marché de l'assurance
maladie à travers les tests empiriques y relatifs :
« One of the most debated issues regarding health
insurance is the impact of deductible on consumption. It is a well established
fact that, in cross sectional data, better coverage is correlated with
higher expenditure levels. But the welfare implications are not
straight-forward. If incentives are the main explanation, deductibles or
co-payments are likely to be useful, since they reduce over-consumption.
However, should selection be the main driving force, then limits on the
coverage level can only reduce the insurance available to risk averse agents
with no gain in terms of expenditure. The result is an unambiguous
welfare loss »
Qu'en est-il avec la rationalité dans la théorie
des contrats ?
EST-CE QUE LA THéORIE DES CONTRATS ADOPTE LE CONCEPT DE
RATIONALITé LIMITéE ?
En d'autres termes, est-ce que la modélisation d'audit
se place en rationalité limitée ou illimitée ? Là,
la réponse ne semble pas claire : En fait, certaines apparences
pourraient donner une réponse affirmative :
- Certains modèles présentent une issue
d'équilibre dont les payoffs sont loin d'être optimaux, ce qui va
de pair avec le seuil de satisfaction de Simon et non le maximum
d'utilité des néo-classiques ou optimalité paretienne, en
tant que règle de décision,
- certains modèles d'équilibre, comme celui
« séquentiellement rationnel » fonctionnent apparemment par
une logique procédurale, auto-satisfaisante, plutôt que par
logique maximisatrice intransigeante,
- en plus, il nous a été difficile de trouver
des documents qui traitent adéquatement ce point : le seul
document qui puisse jeter quelques lumières sur la question est une
communication faite par Missonier-Piera Franck, lors du 8ème
congrès mondial de l'A.F.C. et l'I.A.A.E.R., de Paris en 1997.
Ce chercheur suisse en théorie comptable a présenté un
tableau qui essaye de positionner trois théories, la
théorie économique pure néo-classique, la
théorie économique pure des coûts de transaction
et la théorie politico-contractuelle comptable positive
(empirique, de Watts & Zimmerman) selon certains paradigmes
économiques purs :
Rationalité
|
Oui
|
limitée
|
limitée
|
Opportunisme
|
Non
|
Oui
|
Oui (parfois)
|
Incertitude
|
risque
|
Oui
|
Oui
|
Information
|
parfaite
|
asymétrique
|
non homogène
|
Contrats incomplets
|
Non
|
Oui
|
Oui
|
Gestion des contrats
|
instantanée
|
ex-ante
|
ex-post
|
Unité d'analyse
|
échange
|
individu
|
transaction
|
Dimension principale
|
prix
|
asymétrie d'intérêt
|
spécificité des actifs
|
Coût principal
|
coût de production
|
perte résiduelle
|
réajustement
|
Résolution des conflits
|
minimiser les coûts de production
|
minimiser les coûts d'agence
|
minimiser les coûts de transaction
|
|
Tableau 9: Comparaison des trois théories I paradi~mes
Source : Missonnier-Piera F. [1997].
- il est évident que Missonier-Piera se base sur la
théorie d'agence pour « remplir » la colonne de la
théorie positive comptable. Or, la théorie d'agence, comme nous
l'avons précisé auparavant, n'est que l'application de
la théorie des contrats à la finance d'entreprise. Ce
qui nous permet de conclure que puisque la théorie positive
comptable admet une rationalité limitée, selon la
première ligne de ce tableau, la théorie des contrats
l'est aussi, et ainsi la modélisation en audit le serait aussi,
puisque tout se base essentiellement sur l'agence,
- Reste un point qui ne semble pas clair dans cette
discussion « rationnelle » : l'intuition :
En fait, entre 1945 et 1957, le concept de rationalité
limitée semble accomplit. Mais en 1983, Simon avoue que sa
rationalité limitée doit inclure l'intuition, et il la
définit comme :
« ...la capacité de reconnaître une
configuration de choix déjà rencontrée par le
passé et à retrouver en mémoire des
éléments que l'on a appris à son sujet. »
Chambon J-P. 11995, Chap IV, p. 401.
Cette nouvelle notion entrerait, selon Simon, dans deux
dimensions de la rationalité limitée de 1957: Simon dit en fait
que :
« - il ne suffit pas qu'un choix s'opère
conformément à la recherche d'un objectif pour le rendre
rationnel, car il doit résulter également d'une
délibération L 79, par ailleurs susceptible de
comporter une part d'intuition,
- la délibération est irréductible au
calcul car elle invente pour partie les objets qu'elle manipule,
notamment lorsque l'intuition joue un rôle dans le processus
décisionnel. »
Chambon J-P. 11995, Ch. IV, p. 41J
En d'autres termes, l'Homme invente, lorsqu'il est en train
de délibérer, c'est à dire rechercher, traiter et adapter
les informations disponibles, et il invente lorsqu'il est en train de faire un
choix pour décider son action économique. Est-ce que cette
invention, due à l'intuition, est alors inhérente à tout
modèle de la théorie des contrats ? L'intuition est non
maîtrisable par nature. Elle fait partie exclusivement de l'intelligence
humaine. Elle serait donc inopérante pour la théorie des contrat
? devrait-on, si les affirmations de Missonier-Piera F. sont vraies, faire une
analyse discriminatoire entre les modèles d'avant 1983 et ceux
d'après 1983 ?
Shackle G.L.S. de la « London School of Economics »
(de tendance école de Vienne), bien avant cette année 1983, a
parlé de l'intuition comme une composante de l'intelligence humaine et
qui a été tout le temps un ingrédient nécessaire
à la prise de décision économique, à la fixation de
choix et à la limite, à la construction de l'histoire humaine
unique en son genre. Les pensées subjectivistes de Shackle, pourtant,
s'inscrivent dans le courant de l'école autrichienne, qui prône le
« rationalisme positiviste ». Shackle dit que toute action comporte
de l'intuition et des suggestions, sans définir ces deux
concepts. Son modèle de la surprise potentielle (expliqué dans la
section suivante) se base en grande partie sur ces deux notions
non-maîtrisables. Mais la rationalité à l'autrichienne
s'oppose presque à la rationalité de Simon : Le rationalisme
positiviste dit que : « agir est rationnel », c'est à dire que
même les choix pris au hasard sont rationnels. Ce qui ne l'est pas chez
Simon, qui conditionne tout choix rationnel par la recherche et la
délibération.
Mais par rapport aux néo-classiques, la
rationalité de Simon comporte une part de subjectivisme, surtout
dans la composante intuition et le concept de seuil de satisfaction,
emprunté aux psychologues (analogue à leur « niveau
d'aspiration »). De telle façon que toute fixation de seuil de
satisfaction soit propre à chaque individu à part, et donc
très
79 La délibération est
définit comme ce qui « regroupe des procédures grâce
auxquelles l'homme s'adapte, au cours de la prise de décision,
à ses limites cognitives ». Le processus de décision, en
plus, souffre d'une « paresse » puisque l'individu choisit la
1ère alternative qui atteint ou dépasse le seuil de
satisfaction. Le niveau d'aspiration (seuil de satisfaction) n'est en fait pas
du tout équivalent à l'optimalité 1
difficile à modéliser. En addition, ce
seuil de satisfaction, qui est loin d'être l'optimum des
néo-classiques (maximisation de l'utilité), est un seuil mobile,
révisable, à chaque fois que l'individu, en situation de
décision économique, en sent le besoin.
Devant cette impasse de nature logique, et devant la
pénurie de documents qui puisse profondément traiter un tel
sujet, nous avons jugé utile de demander l'avis d'un spécialiste
de la théorie des contrats, Pr Salanié Bernard. Il a
affirmé alors catégoriquement que la théorie des contrats
ne se place pas en rationalité limitée M80.
Ce qui nous élimine tout espoir de retrouver une quelconque dimension
subjectiviste dans les modèles d'audit et nous pousse plus à
affirmer carrément l'aspect mécaniciste de ces modèles.
Quoique une certaine perplexité persiste, à
notre avis, vis-à-vis de cette affirmation : Lorsque Simon a
redéfinit la rationalité néo-classique, il l'a liée
à un environnement simple et stable. Chambon J-P. [1995, Ch. IV, p. 39]
dit expressément :
« L'auteur (Simon H.A.) expose en 1976 une conception duale
de la rationalité :
- la rationalité parfaite ou objective : s'exerce
lorsque l'individu dispose d'une information complète et
parfaite, elle s'applique donc au contexte de la concurrence pure et
parfaite. elle est aussi nommée rationalité substantive,
- et la rationalité limitée ou subjective :
forme le concept que Simon établit en 1957, celle-ci s'applique à
la quasi totalité des comportements réels des agents qui
disposent dans la majeur partie des cas d'une information
incomplète et imparfaite ».
Nous savons évidemment que la définition de
l'information « parfaite » et « complète » a
été faite par Harsanyi John en 1967. Entre 1967 et 1976, Simon
H.A. a eu bien le temps d'assimiler et de discuter ces nouvelles
caractéristiques de l'information. Nous pensons alors qu'en ayant
distingué les deux « formes » ou « dimensions » de
sa rationalité à travers le support de la distinction entre les
caractéristiques de l'information sus-citées, il a agit
intentionnellement et scientifiquement. Personne donc ne peut mettre en doute
le sérieux de ce prix Nobel dans ce qu'il a dit en 1976.
Les modélisateurs de la théorie des contrats
adopteraient-ils la rationalité limitée de Simon, pour
certains de leurs modèles, sans le savoir ?
Par conséquent, et d'après cette définition
duale de 1976, on pourrait déduire que les modèles de la
théorie des contrats, (ainsi que de la modélisation en audit)
peuvent être divisés en deux :
80 Par un e-mail datant du 26 Octobre 2001, Pr
Bernard dit expressément : « À ma connaissance, les
modèles de la théorie des contrats ne se placent pas en
rationalité limitée. On souhaite le faire, mais personne ne sait
vraiment comment faire. ».
- Ceux qui fonctionnent avec information certaine et parfaite,
sont des modèles auxquels on applique la rationalité objective
(maximisatrice des néo-classiques),
- alors que le reste des modèles, (à
information imparfaite et incomplète), sont des modèles auxquels
on applique de la rationalité limitée, subjective,
peut-être même sans le savoir ! On pourrait même
élargir ce groupe de modèles à ceux qui sont «
hybrides », qui usent d'information complète mais imparfaite ou
d'information parfaite mais incomplète...
Si cette déduction est vraie, alors notre
modèle de Datar & Alles [1999] devrait se placer en
rationalité limitée ! , puisque selon la Tableau 7 de la page 53,
l'information utilisée par ce modèle est incomplète et
incertaine. Par conséquent, la mécanicisité de notre
modèle serait plutôt nuancée.
Même si cette déduction est vraie, la question
de la modélisation de l'intuition va rester toujours sans
réponse : La définition de l'intuition de Simon de 1983 focalise
la mémoire, donc des faits passés, mais il revient et dit qu'elle
comporte une part d'invention, qui échappe à tout essai de
modélisation. La mémoire pourrait être
modélisée à travers l'histoire d'un eu pour un
modèle donné. Mais l'invention, qui est propre à chaque
individu, logiquement, ne peut pas être modélisée. Ce qui
revient à dire que peut-être la théorie des contrats adopte
la rationalité limitée de 1957. Mais est-ce qu'elle adopte la
rationalité limitée, intuitive, inventive, de 1983 ? Il est
très difficile de pouvoir répondre à cette question.
Passons maintenant à notre critique de la
mécanicisité de la modélisation en audit, et qui soit en
relation avec les apports de la théorie des coûts de transaction,
à travers l'opportunisme dans la théorie des contrats :
t' DANS Ll E DES
CONTRATS e E OU CONJECTURAI ?
Il s'agit de comparer entre la notion d'opportunisme dans la
théorie des contrats avec la notion équivalente en théorie
des coûts de transaction : La différence peut marquer un point de
plus contre la mécanicisité de la théorie des contrats, et
par la même, de la modélisation en audit.
La théorie des coûts de transaction « met
le doigt » sur un point assez important du discours économique
théorique : Un agent économique est-il opportuniste ? comment ?
l'est-il tout le temps ? le sont-ils tous sans exception ? Une telle critique
portée à l'opportunisme dans la théorie
des contrats, est beaucoup plus une critique à
l'utilitarisme de la théorie économique pure qu'une critique
à la théorie des contrats elle-même M81.
L'opportunisme n'opère pas si l'environnement de l'opération
économique n'est pas caractérisé par l'asymétrie
d'information. S'il opère, il est alors simultané à un
« manque de confiance » envers les agents plus qu'envers
l'opération.
Pour pouvoir répondre à ces questions, le
débat pourrait diverger profondément vers des questions portant
sur l'éthique économique M82. Néanmoins,
quelques idées brèves doivent être exposées
sommairement pour mieux situer cette discussion.
LES INSUFFISANCES DE L'UTILITARISME ECONOMIQUE FACE AUX
NOTIONS DE CONFIANCE ET DE BIENVEILLANCE :
Le système moral raisonné de l'utilitarisme se
fonde sur l'impératif de choisir entre plusieurs alternatives celle
qui apporte la plus grande somme totale de bonheur, sous entendu -à
soi d'abord, ensuite aux autres-. Ce qui fait souvent rapprocher l'utilitarisme
de l'opportunisme. L'anthropologie dans l'utilitarisme économique (ou
étude de l'Homme en économie), stipule que l'individu doit
être simplement rationnel : c'est à dire simplement et
uniquement maximisateur de son utilité propre, et il se contente
d'un classement de préférences unique et
multifonctionnel M83.
L'utilitarisme ignore la notion de confiance entre les
agents économiques lors du déroulement d'opérations
économiques, et il ignore aussi la bienveillance des agents entre
eux, qui touche à la solidarité sociale, à la prise en
charge des plus démunis, au rôle crucial de l'Etat en
matière d'éducation, de santé, de recherche et
développement...
La question de la « relation avec l'Autre » n'a, en
fait, jamais été posée dans le modèle
économique utilitariste M84. Pour Smith Adam,
qui est le plus modéré des utilitaristes, le
M81 Des libéraux comme Alchian et Friedman
arguent que « seules les firmes qui adoptent le comportement le plus
rationnel, c'est à dire le plus calculatoire, peuvent survivre à
long terme ». Chambon J-P. 11995, Ch.IV, p. 471.
M82 Je tiens ici à remercier vivement Mr
Raouf Yaich, qui m'a donné la possibilité d'enseigner avec lui
une matière que je trouve fort intéressante qu'est
l'éthique comptable. Il a surtout eu le grand mérite de m'avoir
inculquée comment « apprendre à apprendre,
indéfiniment ». Les développements de cette section
trouvent, alors, origine essentiellement dans la partie introductive de son
cours pionnier en Tunisie.
M 83 - Unique
:.........................c'est ce qui explique « l'atomicité
» des agents économiques,
- Multifonctionnel : ....... c'est ce qui est remis en
question par la Théorie des Choix Sociaux en ce qui concerne, par
exemple, le débat sur les fondements mathématiques de la
règle de majorité, pour les votes...
M84 - Positivisme : positivism,
ililililililililililililililil : Système philosophique d'Auguste
Comte, rejette la théologie (
ilililililililililililil) et les à priori de
la métaphysique en faveur de l'observation, de l'expérimentation
et de l'approche scientifique empirique, qui sont alors l'unique fondement
de la connaissance. Il considère que l'humanité passe par 3
étapes : théologie, métaphysique et positivisme
comme explication ultime des phénomènes. Ensuite, pour achever
l'ensemble du système, A. Comte crée la
Mémoire de DEA-Comptabilité - ISCAE -
Décembre 2001 Analyse Critique de la Modélisation en Audit
Chapitre II - page : 75
85 Problèmes économiques n°2637,
page 35.
86 Sen le qualifie d'idiot rationnel et de
demeuré social, puisqu'il ne se soucie que de sa propre utilité,
et semble n'avoir aucun engagement moral envers ni famille, ni
société, et ne subir aucune contrainte macro-sociale. Sen A. K.
11999, p. 861.
87 - une liberté positive
constituée de « droits potentiels » et de «
capacité » à convertir ces droits en ressources, (il faut
nécessairement que ces droits et capacités convergent),
- et une carte de droits à l'échange :
entitlement map : qui transforme les dotations (des vecteurs) en
disponibilités alternatives de biens.
problème de cette relation se résout de
lui-même : le bonheur du consommateur fait le bonheur du laitier, du
boucher, etc... Pour Amartya Kunar SEN, prix Nobel d'économie en 1998,
ce problème est appelé : relativité de l'agent. Sen A.K.
explique qu'à titre d'exemple, le salaire perçu en contre partie
d'un travail, est strictement conçu par l'utilitarisme comme une
rémunération individuelle, alors que dans la vie de tous les
jours, ce salaire est perçu comme « un mode de satisfaction
d'obligations familiales, communautaires puis de satisfaction des
préférences individuelles » M85.
Notre société d'aujourd'hui comporte fatalement
en elle-même les conséquences de ce type de philosophie
positiviste qu'est l'utilitarisme : Augmentation
généralisée des inégalités de revenu,
abandon, dans la vie économique comme dans la vie sociétale, des
valeurs morales en faveur de plus d'égoïsme, d'opportunisme, et de
dualisme éthique, etc...
Pour que sa critique contre l'utilitarisme soit constructive,
Sen A.K. arrive à démontrer qu'on peut concilier entre engagement
moral et rationalité économique : Dans sa théorie, qui lui
a valu un Nobel, l'individu n'est pas seulement rationnel Q86 : c'est
une personne libre (liberté conceptualisée
mathématiquement [1387) et responsable des autres. Sen
A.K. dit que : « La réflexion sur le sujet est
inséparable de celle sur le type de rapport que les personnes
entretiennent entre elles, notamment dans la recherche de la survie »
(relativité de l'agent économique). Son modèle
économique arrive à traiter aussi bien la « bienveillance
» que la « solidarité », que les « engagements
moraux ».
Sen conçoit aussi un seuil de conscience qui a
pour rôle de contourner l'impératif --utilitariste- de la
liberté (on ne peut être ni trop libre, ni pas libre du tout).
Alors que la plupart des économistes, de tendance libérale,
refusent de prendre en compte ces valeurs qui motivent les gens : le faire
serait s'ingérer dans les libertés individuelles. Sen
soutient la théorie traditionnelle
Sociologie.
- Utilitarisme : Utilitarianism,
ililililililil : Philosophie qui dit que l'économie se base sur le
principe du plus grand bonheur pour le plus grand nombre d'individus, c'est un
courant téléologique (il ililililililil) qui repose
sur la finalité et non les moyens mis en oeuvre pour réaliser
ce bonheur, donc cela peut se faire au détriment de certaines valeurs
morales.
- Hédonisme : Hedonism, ililililil :
Le modèle de décision moral de l'hédonisme, comme de
l'épicurisme, est de « rechercher le plaisir, pour soi et pour les
autres ». En effet, l'hédonistique est le principe des
économistes libéraux qui prêchent au maximum de jouissance
à moindre effort. Sauf que l'on confond souvent l'hédonisme
simple à l'hédonisme égoïste qui recherche le plaisir
propre de l'individu.
économique walrasienne, mais il affirme que : « La
réalité ignorée par l'utilitarisme est qu'il est
impossible de concevoir la théorie économique sans
ingérence dans « l'intouchable » liberté individuelle,
car certaines valeurs morales et éthiques sont
déterminées par les conditions matérielles des individus
et par leurs pratiques sociales » . Ce qui est sûr, c'est que la
clé de la résolution de ce problème de relativité
de l'agent, d'utilitarisme et de confiance dans les opérations
économiques, réside dans le « simple » classement des
préférences de chaque individu.
Toutefois, il est à noter que d'autres
économistes à conviction utilitariste, tel l'exemple de Harsanyi
John C. et d'Edgworth Francis Ysidro, ont aussi remis en cause cette
unicité de la structure néo-classique utilitariste des
préférences de l'individu : Il est opportun de citer au passage,
certaines réflexions inachevées de Harsanyi J.C. :
« La distinction importante qu'établit John
Harsanyi entre les préférences « éthiques » et
les préférences « subjectives » offre au sommet de la
structure (des préférences) une possibilité
supplémentaire : « les premières doivent exprimer ce que
l'individu préfère en fonction des seules
considérations sociales ou impersonnelles, et les secondes
doivent exprimer ce qu'il préfère en réalité, que
ce soit en fonction de ses intérêts personnels ou de tout autre
critère ». Sen A.K. 11999, p. 1071.
Edgeworth Francis Ysidro, utilitariste et pionnier de la
théorie des contrats, reconnaît aussi avec nuance que
l'égoïsme de l'homo ceconomicus est impur : l'individu
serait selon Edgworth
«
Courbe des contrats
Bien B
Courbes d'indifférence
Boîte d'EdEeworth
Bien B
Prix d'équilibre
un utilitariste mixte,...en admettant un élément
de sympathie pour autrui » M88. Edgeworth F.Y., a
admis depuis 1881 les notions de contrat, et de conflit, en créant la
courbe des contrats, qui traduit l'ensemble des allocations optimales au sens
de Pareto. Pour lui, il n'y avait nul besoin de « l'héraut de
Walras » (commissaire priseur) pour effectuer le tâtonnement du
marché vers l'équilibre, il suffisait d'une série de
renégociations de contrats provisoires préalables à la
réalisation de la transaction... Sa
« boîte » visualise la négociation et
l'adéquation entre les frontières efficientes, de chaque partie
au conflit, pour l'obtention d'un accord économique qu'est le
contrat. Pourrais-t-on alors en déduire que cet
« élément de sympathie pour autrui »,
dont Edgworth a parlé, réside simplement dans les courbes
d'indifférence de sa « boîte » ?
CI 88 Edgeworth 11881, p.1041 « Mathematical Psychics
», cité dans Sen A.K. [1999,p.871.
Bien entendu, un besoin en confiance ne naît que si
une asymétrie d'information existe au sein de l'opération
ou de la relation économique : Si l'on est obligé de recourir
à la confiance, c'est à dire à avoir confiance en
quelqu'un, avec qui on effectue des transactions économiques, c'est que
nécessairement on manque d'information le concernant : sur ce qu'il fait
ou ce qu'il est.
La théorie des contrats avance que : Au lieu que cette
confiance soit à la limite naïve, il faudrait qu'elle soit
intelligente, c'est à dire qu'elle n'existe que parce qu'elle est le
résultat d'un processus, (de contrôle ou de sélection ou
d'incitation...) systématisé, inhérent à
l'opération économique elle- même, autrement dit comme
résultat d'un système « garde-fous ».
Dans notre modèle DA [1999], c'est le
propriétaire qui « doit recourir » à la confiance parce
qu'il est incapable de tout observer, et c'est le manager et/ou l'auditeur qui
pourraient être opportunistes. Leur opportunisme est double : il
réside dans la décision de mentir en ce qui concerne la
divulgation du résultat réel de la firme, et/ou de ne pas honorer
l'engagement pris, en ce qui concerne l'effort --convenu- à fournir (de
gestion ou d'audit).
Cet opportunisme, selon le système moral
raisonné de l'utilitarisme discuté ci-dessus, basé sur la
rationalité néo-classique, est une caractéristique
inhérente à la personne, car elle est égoïste par
définition, et par définition aussi, elle ne cherche
qu'à maximiser son utilité individuelle.
« Le principe de rationalité (illimitée)
signifie que les individus agissent en utilisant au mieux les ressources dont
ils disposent, compte tenu des contraintes qu'ils subissent. Cette
définition appelle trois commentaires :
q L'individu rationnel est égoïste : il tient
compte uniquement de son propre intérêt,
q Il constitue en outre une unité de
décision autonome : son comportement n'est pas
déterminé par des habitudes sociales consciemment ou
inconsciemment assimilées, son comportement est défini
indépendamment de toute contrainte macro-sociale, la définition
de la rationalité est donc ahistorique,
q Enfin, l'individu rationnel est maximisateur, il
effectue des choix qui maximisent sa satisfaction. » Cahuc P. (1998,
p.41.
Billand et Solal vont dans le même sens, et distinguent
:
« Trois éléments au fondement de la
motivation de l'individu qui, dans la théorie standard (walrasienne),
sont compactés dans l'hypothèse de la rationalité :
le bien-être (ou l'utilité) de l'individu, son but et son choix.
...la théorie standard adopte les postulats suivants :
q le bien-être de l'individu est centré sur
lui-même (self-centered),
q le bien-être de l'individu détermine son but,
q le but de l'individu détermine le choix qu'il
opère. »
Biland P. & Solal P. (1999, p.51.
En d'autres termes, puisque l'agent, dans la théorie
des contrats, adopte une rationalité néoclassique, il
néglige alors, par définition, tout sentiment altruiste. Il ne
peut être donc qu'opportuniste, s'il a l'occasion de vivre une situation
d'asymétrie informationnelle qui lui est favorable.
Sauf que, une certaine nuance est donnée par
la théorie des coûts de transaction : L'opportunisme peut
exister chez l'individu parce que cet individu est maximisateur, toujours, mais
lorsqu'il est affligé de rationalité limitée et non d'une
rationalité illimitée :
« C'est cette volonté de maximiser ses propres
intérêts, conjuguée avec l'existence d'une
rationalité limitée, qui conduit ... au concept d'opportunisme.
»
Missonier-Piera F. 11997, p.41.
À notre avis, cette nuance est due au dualisme
rationnel de Simon : Nous avons expliqué précédemment que
Simon ne conçoit la rationalité que relativement à
l'environnement de la décision économique à prendre :
- Si l'environnement est simple, parfait, alors l'individu
adopte une rationalité illimitée. Par conséquent, il
sera systématiquement opportuniste, de façon
inhérente,
- Si l'environnement s'avère compliqué,
incertain, incomplet, imparfait, et turbulent... là, l'individu ne peut
pas avoir d'autres choix que d'adopter une rationalité
procédurale, limitée à ses propres capacités
cognitives. L'opportunisme de cet individu devient alors conjectural et non
systématique : l'individu peut choisir d'être opportuniste comme
il peut choisir d'être altruiste, dans le cadre restreint de cette
décision à prendre.
A notre avis aussi, à l'opposé de la
rationalité walrasienne, qui n'admet jamais l'altruisme, la
rationalité procédurale de Simon a la possibilité de
donner « une chance » à l'individu d'être altruiste,
même si cet altruisme peut s'avérer être de l'opportunisme
« différé ». cette possibilité donnée
à l'individu pour montrer de l'opportunisme conjectural,
résiderait peut-être dans la dimension non maîtrisable de la
rationalité limitée de 1983, qui est l'intuition !
L'opportunisme, en fait, dans la théorie des
coûts de transaction, est définit comme une «
propension à la mauvaise foi » selon Williamson O.E. lorsqu'il
traite du « Hold-up behavior ». L'opportunisme est donc un
penchant et non une caractéristique systématique,
inhérente, chez l'individu de la théorie des coûts de
transaction.
« L'agent opportuniste peut ne pas dévoiler
volontairement un certain nombre d'information, voire publier une information
erronée, ou même s'engager expressément à agir d'une
façon déterminée, alors u'il sait u'il n'en fera
rien. » Missonier-Piera F. 11997,p.41.
Accompagné de « contractualisation dynamique »
expliquée auparavant, l'opportunisme dans
la théorie des coûts de transaction, peut
générer de la sélection adverse, s'il est ex-ante, ou
générer
de l'aléa moral, s'il est ex-post. Cette
variabilité est, alors, caractéristique plus de comportements
humains que de comportement mécanicistes. Ce qui n'est pas le
cas de l'opportunisme chez l'individu de la théorie des contrats.
Passons maintenant à notre 3ème et
dernière critique à la modélisation en audit : elle touche
à la construction des croyances dans le modèle de Datar Srkant M.
et Alles Michael Gamini [1999]. Cette construction est d'ailleurs classique, la
critique est alors à adresser plutôt à la théorie
des contrats qu'à la modélisation d'audit ou au modèle DA
[1999] précisément.
CONSTRUCTION DE RÉPUTATION DANS DA f1999)
edE CRITI~UE : LES CROYANCES DU MANAGER
|
DA [1999] se sont basés sur le modèle
d'équilibre de Kreps & Wilson [1982a] pour construire le leur. Il
s'agit de l'équilibre séquentiellement rationnel. D'autres
modèles d'équilibre peuvent utiliser le concept de
réputation, tels la « récurrence à rebours » ou
la « main tremblante ». Mais la récurrence à rebours
demande à ce que l'information soit parfaite et complète pour que
l'équilibre existe, et celui de la main tremblante semble ne plus
être utilisé depuis longtemps M89.
Notre troisième et dernière critique du
modèle DA [1999] touche à la mécanicisité de cette
construction de réputation de l'auditeur. Cette construction est
endogène et permet d'expliquer la plupart des comportement des agents en
relation (manager, auditeur, propriétaire). Elle est surtout
périodiquement alimentée par une révision des croyances du
manager envers le type d'auditeur, selon l'observation du comportement de ce
dernier.
Par conséquent, examinons d'abord
l'endogénéïté de ce concept, puis examinons la nature
et l'évolution des croyances du manager, qui sont un
élément focal du modèle, pour pouvoir les critiquer avec
plus de précision.
L RÉ DE 'A EST
È :
Les caractéristiques majeures de cette construction de
réputation se résument ainsi :
1. D'abord, le plus important est que la réputation dans
DA [1999] est endogène, puisqu'elle dépend des stratégies
des joueurs et des états de la nature,
2. ensuite, elle est développée dans un cadre
interne, en présence d'un auditeur interne ou d'un comité
d'audit,
3. la réputation découle d'un processus dynamique
plutôt que d'un processus répétitif M90,
4. enfin, la réputation de l'auditeur
bénéficie au manager pour inhiber son opportunisme et surtout au
propriétaire, pour réduire son asymétrie d'information.
Evidemment, la réputation endogène est
générée par le modèle lui-même et non
extérieurement ou indépendamment du modèle. Ceci est
d'autant plus évident que les auteurs visent essentiellement à
expliquer la formation d'une réputation par la construction même
de ce modèle. Dans les modèles qui ont
précédé DA [1999], la réputation de l'auditeur ne
sert que pour différencier entre les offreurs du service d'audit sur le
marché. Elle traduit différents niveaux de « richesse »
de l'auditeur ou de la firme d'audit, différents niveaux de
compétence d'audit, et différents niveaux de technologie d'audit
usitée...
Le modèle de DA [1999] explique pourquoi un auditeur
recourt à la construction d'une réputation, et ce modèle
prédit, par la même, l'effet de cette réputation autant sur
l'auditeur, que sur le manager, que sur le propriétaire. Dans le
modèle DA [1999], à l'équilibre, l'auditeur « strong
», puisque « par principe » il est toujours diligent, serait
toujours réputé diligent. Mais pour l'auditeur « weak
», il lui faudrait être diligent pendant un certain nombre de
période, pour qu'il puisse simuler d'être « strong », et
inhiber ainsi tout comportement mensonger de la part du manager (à cause
de l'importance de /3 M91). Par conséquent, l'auditeur peut
ensuite ne plus fournir d'effort puisque le manager le croit
de type strong. Tout le problème du jeu est, alors, celui
de comparer la croyance révisée (en appliquant la
règle de Bayes T. à la croyance à priori M92 après
chaque période) à l'utilité espérée y
conséquente M93, pour décider quelle action des deux
choisir.
Ce problème dépend donc intimement de la
construction des croyances du manager envers le type de l'auditeur et
dépend aussi de la connaissance commune de cette croyance par les
autres joueurs, surtout l'auditeur. Plus la croyance du manager est faible en
période initiale, plus l'auditeur faible devrait fournir d'effort,
durable, (et un coût d'audit plus important) pour simuler
M89 Rasmusen E. par e-mail.
M90 Par un e-mail datant du 5.11.01, Rasmusen E. dit
que « A dynamic game is one with moves in sequences. A repeated one
repeats the same moves ».
M91 /3 est la désutilité du
manager due à la pénalité qu'il doit payer au
propriétaire au cas où son mensonge est découvert par
l'auditeur diligent. Voir Annexe I : Définition des variables
utilisées par le modèle DA et ses formes stratégiques.
M92 À condition d'être sur l'«
equilibrium path », pour pouvoir connaître les valeurs des
probabilités de chaque action des joueurs.
M93 La variable b = (b sd--bs n) /3, joue ici
un rôle pivot. Voir Annexes pour les définitions des variables.
M94 « In common usage, reputation is a
characteristic or attribute ascribed to one person by another (e.g. « A
has a reputation of courtesy »). Operationally, this is usually
represented as a prediction about likely future behaviour (e.g. « A is
likely to be courteous »). It is, however, primarily an empirical
statement (e.g. « A has been observed in the past to be courteous »).
Its predictive power depends on the supposition that past behavior is
indicative of future behavior. » Wilson R. « Reputation in games and
markets » [1985, pp.27-62], cité dans DA [1999, p.403].
une réputation de « strong ».
Avant d'étudier la construction des croyances dans DA
[1999], il faudrait examiner leur concept de « local reputation »
qu'ils ont « inventé » à ces fins : Se basant sur la
définition de Wilson [1985] M94, Datar & Alles
affirment qu'une réputation est un concept relatif : un individu
n'a pas une réputation absolue unique et convenue par les tous autres
agents ou individus, mais il peut avoir plusieurs réputation, chacune
par rapport à un agent à part. Ce qui veut dire que l'auditeur
peut avoir, par exemple, une réputation « envers » le
manager différente de sa même réputation «
envers » le propriétaire...
En effet, leur concept de « local reputation » est
développé dans le contexte de la relation entre le manager et
l'auditeur :
« First, the auditor's local reputation with the manager
depends on the behavior of the auditor as observed by the manager, rather than
on an auditor's exogenous characteristics (such as whether it is a Big Five or
non-Big Five firm). ...Second, the auditor's reputation affects the behavior of
the manager in future interactions by influencing the manager beliefs about how
thorough the audit is going to be. The auditor's reputation for being thorough
serves as a deterrent to misreporting by the manager. » DA [p.403].
n Ce concept est alors endogène : il est
déterminé par l'histoire du jeu et non par des
caractéristiques exogènes de l'auditeur, connues par les autres
agents ,
n Ce concept est relatif à un seul individu, en
l'occurrence le manager dans notre modèle DA [1999] : à ce
qu'expliquent Datar & Alles, il apparaît que la « Local
Reputation » ou réputation locale, est une construction mentale
dans l'esprit du seul manager, relative à l'auditeur. Cette construction
est une évolution de croyance à travers l'avancement du jeu entre
ces deux individus ou agents (ils peuvent être des firmes...), c'est un
cercle vicieux alimenté par, d'un coté, le comportement de
l'auditeur tel qu'observé par le manager, et d'un autre, par les
croyances probabilistiques du manager envers le type de l'auditeur. La croyance
du propriétaire, par exemple, envers le type de l'auditeur n'intervient
absolument pas dans la construction de cette réputation locale
manager-auditeur,
n On comprend de DA [1999] que ce concept ne peut pas
être autre qu'évolutif : s'il n'y avait dans ce jeu qu'une
seule période, la révision de croyance aurait été
inutile, puisque la révision d'une croyance à priori, d'une
période, ne sert que pour la période
qui la suit; et si le jeu n'avait pas été
dynamique, le concept de réputation locale n'aurait pas pu fonctionner,
puisque chaque période ne porterait plus de nouvelles valeurs de
probabilités, d'états de la nature, de payoffs... qui
contribueraient dans une construction dynamique de la réputation,
Enfin, ce concept est appliqué à un cadre
interne : l'auditeur est un auditeur interne ou un comité d'audit,
plutôt qu'un auditeur externe indépendant :
« In this paper, we analyze auditor reputation in the
internal setting in which a firm's audit committee wishes to validate the
statements of its manager, rather than the usual external setting in which
auditors act as attestors of the firm's financial reports. In this local
context, the explicit objective of auditing is to proactively deter
misreporting by the manager. This is a fundamentally different setting from
externally focused auditing, examined in the previous literature, since the
role of reputation is much more circumscribed. » DA 11999,
p.403.1.
Le motif de cette différenciation réside dans
le fait que dans une relation entre manager et auditeur interne, le manager
peut mieux observer le comportement de l'auditeur que dans le cas
où l'auditeur est externe. Et l'auditeur ne doit pas seulement valider
les états financiers mais valider tout état
délivré par le manager. La formation de la réputation,
ses effets et son évolution, sont ainsi mieux approchés et mieux
examinés.
CRITIQUE DE LA LOCAL REPUTATION » ~
Est-ce que le modèle DA peut s'appliquer aussi bien
à l'auditeur interne qu'à l'auditeur externe ? : L'article de
Datar & Alles n'indique pas dans son résumé qu'il s'agit
d'une recherche touchant exclusivement au domaine de l'audit interne. Puis,
dans le corps de l'article, il est fait nuance entre l'application du
modèle à l'audit interne et son application à l'audit
externe (dans le sens que le modèle s'apprête mieux à
l'audit interne). Malgré cette nuance, l'un des auteurs, Alles Michael
G. affirme que :
« The paper is meant to be for external auditing as
well as internal. But as an analytic model, it requires some abstraction.
Thus the model depends crucially on repeated interaction between the
auditor and the manager so that reputations can develop. ...otherwise, local
reputation will not arise. » 1M1195
Donc, le modèle DA peut s'appliquer aux deux
catégories d'audit. L'important donc, pour la réalisation du
concept de « local reputation » est la
répétitivité de l'interaction entre manager et
auditeur, ainsi que la possibilité au manager d'observer le
comportement de l'auditeur. Si ces deux aspects se réalisent,
même dans le cadre d'un audit externe, la « local reputation »
peut se construire et le modèle peut s'appliquer.
1M1195 Par un e-mail datant du 24.10.01, de Michael
Gamini ALLES.
n
M96 Saâda T. 119971 affirme qu'elle est même plus
vieille que l'institution de l'audit externe.
M97 Idées résumées à
partir de Jouanneau A. 120011 - Participation du Luxembourg au Colloque de
l'A.T.A.I. d'Avril 2001 et de Mabkhout A. f20011- Participation de
PriceWaterHouse --Tunisie au même colloque.
M98 Certains haut-cadres au sein de la Direction
des Participations au Ministère des Finances, ont vainement
essayé d'introduire cette institution de comité d'audit depuis
voici 15 ans de cela, surtout dans les banques. Ils ont fait alors face
à de l'incompréhension de la part des auditeurs internes de ces
banques, qui se voyaient mal comme contrepouvoir à leur propre Conseil
d'Administration.
M99 Le conseil de surveillance qui joue le rôle
d'un contre-pouvoir vis-à-vis du conseil d'administration, la
création de la notion d'administrateur indépendant...
M 100 Voir la communication de Barnia M. au Colloque
de l'A.T.A.I. d'Avril 2001, pour une définition comparative
anglo-saxonne et européenne de l'Administrateur Indépendant.
Datar & Alles précisent que leur modèle
s'applique aussi bien à l'auditeur interne qu'au comité d'audit :
Qu'est-ce alors un « Comité d'audit » ? : là, il faut
consacrer une petite section à ce sujet, vu son importance :
C 3 A tOCAI REM/TAUON
B ~
Le « Comité d'audit » est une invention
anglo-saxonne M96. Cette institution existe surtout pour les grandes
firmes et les grands groupes d'affaire.
n INITIATIVE M97 : Aux U.S.A., l'initiative
de créer des comités d'audit au sein de certaines grandes firmes,
a été déclenchée, dès les années 70,
par le marché boursier (NYSE et SEC). Au R.U., l'initiative a
été mixte : privée et gouvernementale. En Europe, La
France et la Suisse ont été les pionniers : En France et suite au
rapport Viennot (1995), cette initiative a été essentiellement
privée, émanant d'associations professionnelles. En Allemagne,
elle est gouvernementale et encore assez timide. Enfin en Tunisie, il n'y a pas
encore de loi qui oblige les firmes à se créer un comité
d'audit, mais il y a eu, depuis le décret 87-529 du 1er Avril 1987, une
recommandation dans ce sens pour les E.P.I.C. M98. Actuellement, il
s'agit plutôt d'une prise de conscience déclenchée par des
associations professionnelles telle l'Association Tunisienne des Auditeurs
Internes (A.T.A.I. membre de l'International Association of Internal Auditors).
En plus, la nouvelle loi sur des sociétés commerciales a
introduit « un nouveau mode de gouvernance d'entreprise qui se rapproche
du comité d'audit » M99. En bref, à l'état
actuel des choses, l'institution du comité d'audit n'est obligatoire
qu'aux U.S.A. et au R.U., et seulement pour les firmes cotées en
bourse.
n COMPOSITION : Généralement, pour les
anglo-saxons et pour l'Europe, ce comité doit être
constitué d'administrateurs externes (indépendants)
M100. Le nombre minimal est de 3
administrateurs obligatoirement non salariés et
majoritairement indépendants. L'un au moins doit avoir des connaissances
comptables, sinon, l'auditeur externe de la firme est autorisé à
participer aux réunions du comité. Enfin, le nombre maximal est
généralement de 7 administrateurs, mais il dépend
essentiellement de la taille de la firme et du conseil d'administration.
RÔLE ET POUVOIR DU COMITÉ D'AUDIT : le
comité d'audit est un organe de supervision. Sa prérogative est
de changer les paradigmes de l'audit interne, dans le sens que l'audit interne
devienne « à double tranchant » vis-à-vis de
l'administration, en ayant plus d'autonomie pour analyser le « risque
d'affaire ». Le comité d'audit veille donc à la bonne
réalisation de deux piliers principaux de gouvernance d'entreprise : la
responsabilité et la communication : Il exerce plus un contrôle
opérationnel du « risque d'affaire » que du contrôle
interne, et exerce un contrôle sur la fiabilité de l'information
communiquée au marché.
En pratique, il matérialise un lien qui
s'établit entre le conseil d'administration, l'audit interne et
l'auditeur externe. Ce lien est créé en 1er lieu par souci de
coût, afin de permettre à la firme auditée
d'économiser une partie des honoraires d'audit externe, en chargeant
l'audit interne de certains de ses travaux (les plus élémentaires
et répétitifs). Par conséquent, le comité d'audit
-- ou plutôt la concertation entre administrateurs indépendants du
conseil d'administration et l'auditeur externe- fixe les travaux de l'audit
interne, veille à la qualité et à l'autonomie
d'investigation de l'audit interne par rapport au conseil d'administration, et
renforce le contrôle interne et le système d'information de la
firme, surtout vis-à-vis des partenaires de cette
dernière, dans le contexte du respect de la réglementation, de
l'éthique des affaires et du contrôle des conflits
d'intérêts au sein de la firme. En Allemagne, il est prévu
même que ce comité ait pour rôle de sélectionner
l'auditeur externe de la firme...
Ainsi, une vue générale est donnée sur la
composition et le rôle du comité d'audit. Examinons maintenant la
relation du comité, ainsi définit, avec le concept de «
local reputation » du modèle DA [1999] :
« LOCAL REPUTATIO1V » & COMITÉ
D'AUDIT: les uestions : la relation entre ce concept et le comité
n'est pas aussi évidente et claire : En fait, deux questions bien
distinctes se posent ici :
1. Un des piliers de cette local reputation et de
l'équilibre du modèle DA, est le fait que le
comité d'audit (ou l'auditeur interne) constitue bien
une menace pour le manager mensonger (à travers 13 ).
Comment alors le comité d'audit pourrait constituer un contrepoids par
rapport au conseil d'administration si, d'un coté, ses membres sont
choisit par le Conseil d'administration lui-même, d'un autre coté,
ils ne sont pas tous indépendants et, d'un 3ème coté, la
responsabilité civile du comité et ses pouvoirs sont si
ambiguës dans certains pays ?
2. Kreps [1993, p.] a posé une question qui s'applique
bien au contexte de ce jeu de Datar & Alles : Il se demande si la
réputation est attachée à l'individu, ou à
l'industrie, ou au lieu d'affaire (organisation design) ? : En fait, Datar
& Alles appliquent leur modèle au comité d'audit pour dire
que c'est la structure qui peut menacer le manager mensonger. Cette structure
contient des administrateurs et parfois un auditeur externe. La « local
reputation » de l'auditeur envers le manager serait alors rattachée
aux administrateurs ou bien à l'auditeur externe ou bien au
comité d'audit en tant que structure à part ?
Il est réellement difficile, comme le note Kreps dans
son livre, de répondre à cette question. La réponse est
encore plus difficile si le comité ne contient pas d'auditeur externe.
Comment, dans ce cas, le manager va baser sa croyance à priori, sur
quels éléments ou évidences ? sur le caractère
personnel des administrateurs ?, sur leur réputation d'affaire ? sur des
renseignements à propos de conflits entre ces administrateurs
indépendants et le conseil d'administration ?...
Aussi, lorsque le modèle n'est appliqué que sur
l'auditeur interne et que la firme n'a pas de comité d'audit, comment
construire cette local réputation en sachant que l'auditeur interne est
un simple salarié de l'administration et que ses prérogatives
d'indépendances ne sont qu'aphorisme ?
À la limite, pour ajouter une autre abstraction
à celles déjà comptabilisées pour ce modèle
DA [1999], nous devons appliquer ce modèle à deux seuls cas : le
cas où la firme a un comité d'audit, dans lequel l'auditeur
externe est très actif et influençant, et le cas où la
firme n'a pas de comité d'audit et son auditeur interne jouit bien de
certaines prérogatives d'indépendance, lui permettant d'exercer
effectivement cette menace sur le manager (ou conseil d'administration).
Passons maintenant à la décortication de la
construction de cette « local reputation » à travers la
construction des croyances du manager envers le type diligent ou
négligent de l'auditeur :
La formation de cette « local reputation »
dépend d'une structure précise des croyances du manager envers le
type de l'auditeur. Datar & Alles [1999, p.4161 ont, en fait,
modélisé la croyance du manager comme suit :
n q t = croyance du manager que l'auditeur est du type «
strong » à la période t,
n si t = T, q T = 8 (croyance à priori du
manager que l'auditeur est strong),
n si t < T, (les t sont des backwards dans le temps) q t
s'exprime des trois manières suivantes :
i. Si un résultat non-désiré xn se
réalise, et le manager rapporte la vérité, alors aucune
révision de la probabilité que l'auditeur soit « strong
» ne peut être faite, et puisque
tout type d'auditeur acceptera le rapport du manager. Donc, q t =
q t+1
iii. si un résultat désiré x d est
rapporté par le manager, et si l'auditeur est diligent de
façon à ce qu'il réussit à
détecter et rapporter le résultat réel, alors q t = max
q t+1l
03101,
iv. si un résultat désiré est
rapporté par le manager, et si l'auditeur est négligent de
façon à ce qu'il rapporte un résultat réel
contraire à ce que connaît le manager, alors
iv. si qt+1= 0, alors pour tout t = 1, 2, ..., t , q t = 0 .
,
La mécanicisité de cette construction de croyances
est mise en relief surtout par la « règle » :
q t = max q t+1l
En fait, b t est un simple terme calculé
à partir de différentes utilités, et le terme q t+1 est
aussi un terme simplement calculé à partir de l'application de la
règle de Bayes de probabilité conditionnelle à la croyance
à priori du manager.
Est-ce que chacun de nous, lorsqu'il doit
réfléchir et trouver à quel degré il croit envers
une chose ou pas, se comporterait de cette façon si calculatoire et
automatique ? est-ce que ces termes b et q sont les justes termes à
prendre en compte pour estimer une telle croyance envers le type de l'auditeur
? déjà, b est un rapport d'utilité, et l'utilité
est encore une notion qui nous échappe, et q est une probabilité
subjective, qui elle aussi
Q 101 Ici, b t est la variable b (= (b sd--bs
n) ) élevée à la puissance t et non pas b exprimée
à la période t, et q t+1 est la croyance du manager
que l'auditeur est du type strong, obtenue par la révision
bayesienne de q t (qui la précède d'une période).
nous échappe, dans le sens qu'aucun modèle au monde
n'explique comment trouver cette quantité probabiliste, comment estimer
la fréquence d'un tel évènement !
A notre avis, la réalité de la construction de
croyances se passe autrement :
- il est vrai que la croyance à priori est une
estimation, mais elle pourrait ne pas être une estimation d'une simple
probabilité fréquentiste abstraite, autrement dit une estimation
de la fréquence d'un évènement plus ou moins possible,
elle pourrait dépendre de plusieurs facteurs qu'il importe beaucoup de
connaître et d'exploiter,
- cette estimation pourrait dépendre de l'état
d'esprit où se trouve le manager, ses humeurs, les informations qu'il a,
son caractère propre (méticuleux, nanf,
expérimenté...), selon cet état, il évaluerait
autrement le type de l'auditeur,
- cette construction de croyance pourrait dépendre
aussi de la culture du manager, puisque pour chaque pays, pour chaque culture,
il existe des valeurs éthiques de comportement différentes : Par
exemple, le degré de diligence d'un auditeur africain ou asiatique
serait sûrement différent du degré de diligence d'un
auditeur occidental, même si chacun des deux, dans son pays, serait
compté parmi les professionnels diligents. Ce fait influencerait
sûrement l'estimation de la croyance, envers cette diligence, par le
manager africain et le manager occidentale...
- enfin, à notre avis aussi, cette estimation de
croyance ressemblerait plutôt à une note, donnée par le
manager, à l'auditeur, après examen de certains critères
qui renseignent sur le degré de diligence ou de négligence de ce
dernier. Le processus d'estimation d'une croyance envers un
événement ou un fait donné serait peut-être
similaire au processus de notation d'un étudiant par son enseignant.
L'enseignant essaye d'apprécier si certains critères
s'appliquent, ou peu ou pas du tout, sur l'étudiant, et suivant son
système d'appréciation, il agrège ces appréciations
par critère, en un seul nombre qui est la note finale de
l'étudiant. Si on poursuit ce raisonnement, il deviendrait
nécessaire de recourir aux mathématiques floues pour traduire ce
processus d'évaluation...
Face à ces constatations, la mécanicisité de
la construction des croyances de Datar & Alles [1999] est alors remise en
question, principalement, par les quatre points suivants :
1. une critique à la théorie de la
probabilité,
2. une critique à l'exogénéité de la
croyance à priori de DA [1999],
3. une critique à la révision bayesienne de la
croyance
4. et une critique à la connaissance commune dans le
jeu.
Q 102 Discipline assez nouvelle,
partagée entre les scientifiques gestionnaires et les scientifiques
économistes.
Q103 George Lennox Sharman SHACKLE, 1903-1992,
« disciple » de Hayek F.A. à la « London School of
Economics », est compté parmi les affirmés des
économistes à tendance « école de Vienne ». Ses
meilleurs travaux sont ceux qui critiquent Keynes dans le fait que sa «
théorie générale » ne tient compte ni du temps, ni
des caractéristiques psychologiques du sujet humain (subjectivisme
radical)...
Examinons-les, un à un pour, ensuite, essayer de les
exploiter au troisième chapitre de ce mémoire :
/L CROYANCE 4
I "MENT UNE NOTION PROBABIUSTE +
Ce premier point est le plus important des quatre. Bien que ce
débat touchant à la théorie de la probabilité est
né avec la naissance de « l'école de Vienne » et de
« l'individualisme méthodologique », c'est à dire
depuis les années vingt à peu près, mais il reste comme
même d'actualité, surtout pour les chercheurs en «
économie cognitive » Q 102 ou pour les
chercheurs en « Management de connaissance » (les scientifiques
informaticiens surtout).
Ce débat est beaucoup plus
épistémologique que technique : la première remise en
question de ce sujet revient surtout à Georges L.S. Shackle. La remise
en question technique revient alors à Glenn Shafer.
Épistémologiquement, les croyances ont
été, depuis toujours, conçues comme distributions de
probabilité, fréquentiste, alors que leur nature inhérente
pourrait ne pas l'être ainsi. La contribution la plus notable, dans ce
sens, est celle de Georges L.S. SHACKLE M103, un penseur assez
méconnu par le Mainstream, mais qui a été son critique des
plus coriaces : Shackle G.L.S. a développé, durant les
années 70, une approche subjectiviste radicale de la théorie
économique pure, en réponse à la défaillance de la
théorie néoclassique à résoudre certains
problèmes économiques réels. Ses ouvrages n'ont pas
réussit à constituer une théorie générale
cohérente face à celle Keynesienne, néanmoins ses
idées éparses n'ont pu être adoptées et
développées que récemment.
Pour réussir leur formalisme économique, les
néoclassiques ont compressé toutes les abstractions de leurs
modèles, par rapport à la vie économique réelle,
dans les notions « amalgamées » d'utilité, de
probabilité et de rationalité. Shackle défend l'une des
plus robustes critiques jamais faite à la théorie de la
probabilité :
CRITIQUES DE SHACKLE G.L.S. A LA THÉORIE DE LA
PROBABILITÉ :
Pour Shackle, la théorie économique devrait
mieux penser la probabilité et le rôle du temps : En fait,
Shackle présente trois sortes de reproches à la notion de
probabilité LU 104 :
1. « la répétition réelle des
épreuves est l'exception plutôt que la règle » pour
tenir compte des circonstances temporelles, spatiales et émotionnelles
de chaque expérience, pour chaque individu. Sauf que certains chercheurs
en intelligence artificielle y répliquent par une recherche d'un sens
commun raisonnable,
2. « la probabilité empêche toute marge
d'action sur l'éventualité évaluée » à
expliquer.
3. et « la probabilité implique
l'équiprobabilité des choix car elle se définit comme le
nombre des cas favorables divisés par le nombre des cas possibles »
: en fait, d'une part, les gens sont généralement de mauvais
calculateurs de probabilité; ils ne peuvent que rarement tenir en compte
effectivement de toutes les possibilités. En plus, certains
scientifiques acceptent mal comment la probabilité, issue des grands
nombres, puisse être appliquée à des expériences
assez singulières. Tel Pearl J., il épaule cette affirmation par
:
« There is really no compelling reason that beliefs,
being mental disposition about unrepeatable and often unobservable events,
should combine by laws of proportions that govern repeatable trials such as the
outcomes of gambling devices. »
Pearl J. 11988, p.151.
Ces trois points critiques de Shackle se sont faits
justement contre la théorie des eux : Elle ne peut, selon lui,
que mettre en relief la cohérence des décisions des
joueurs et non leur efficacité. Le joueur réel essaie
d'évaluer la « plausibilité psychologiquement estimée
» et non d'estimer une fréquence d'un événement plus
ou moins possible.
« Le fondement de cette notion de surprise potentielle
(de Shackle), est de nature expérimentale, car elle renferme
l'anticipation, l'intuition et l'étonnement que l'on éprouve dans
une situation donnée. ...(pour lui) Chaque acte comporte des espoirs
et craintes, mais aussi un système de prévision dont la
rationalité n'en est qu'un élément.
... le temps prend d'ailleurs une dimension
particulièrement importante dans son analyse Ide Shacklej, puisqu'il est
partie prenante dans la construction mentale. Il affirme en plus que la
rationalité n'a pas de sens en absolu, u'une décision
rationnelle ne peut être comparée à une autre
décision rationnelle, car elle est indissociablement liée au
contexte décisionnel et notamment à son cadre temporel.
Chambon J-P 11995, Ch. IV, p.361
À notre avis, une croyance est une
décision : On décide de croire, avec un degré x, qu'un
tel auditeur est de type diligent, puisqu'on a sur lui certaines informations,
ou qu'on infère... On ne fixe pas abstraitement et arbitrairement la
quantité de croyance, on la décide, suite à des facteurs
qu'on devrait éclaircir dans ce travail. Par conséquent, une
croyance est incomparable avec une autre croyance, même émanant de
la même personne, et vis-à-vis d'un même sujet. Cette
incomparabilité est forgée par la différence temporelle et
contextuelle inhérente à la naissance de chaque croyance. Nous
pouvons aller plus loin dans cette analyse de la croyance inspirée de
Shackle :
« ...Shackle s'insurge...contre l'emploi des
probabilités dans la décision pour prendre position en faveur de
la décomposition des opérations réelles de l'esprit et
du processus cogniti0. »
Chambon J-P 11995, Ch. IV, p.361
C'est cette décomposition nécessaire des
opérations réelles de l'esprit et du processus cognitif, qui se
veut être le « cheval de bataille » de la présente
critique à la modélisation en audit : quand un quelconque manager
décide de croire qu'éventuellement l'auditeur est de type
diligent, tout un processus cognitif encore inconnu a, en fait,
fonctionné dans son « réseau » mental. Ce processus,
comme tout autre, aurait besoin d'inputs et de système de traitement
pour générer l'output, qui est le degré ou plus simplement
la quantité de croyance. La construction de la réputation de
l'auditeur, par conséquent, dépend crucialement des «
modalités de fonctionnement » de ce processus.
Passons maintenant à la critique de la théorie de
la probabilité faite par G. Shafer Q105 :
AUTRE CRITIQUE À LA PROBABILITÉ : FONCTION DE
CROYANCE DE SHAFER G. :
La critique de Shafer est beaucoup plus nuancée que
celle de Shackle. Si Shackle veut tout nier dans la théorie de la
probabilité et dans la rationalité substantive, Shafer
modère sa critique en essayant de positionner la théorie de la
probabilité par rapport à sa propre théorie de
l'évidence. En, fait, le but de la théorie de la
probabilité est d'exprimer, de manière cohérente, comment
une croyance change à la lumière d'une information partielle ou
incertaine. Elle est la principale théorie apte à mesurer la
sensibilité des croyances au contexte qui les « entoure ».
Shafer G. affirme même que :
« Probability is not really about numbers, it is
about structure of reasoning »Q106.
Q104 Les phrases en gras, qui suivent, sont de Chambon
J-P 11995, Ch. IV, p. 371.
Q 105 Glenn SHAFER est un spécialiste
de système-expert d'audit et mathématicien. Sa théorie de
l'évidence, qu'il a inventé depuis 1976, se
base essentiellement sur la notion de « fonction de
croyance ». Sa fonction de croyance et la règle de Dempster-Shafer
ont nettement
amélioré l'appréciation des trois
composantes du risque d'audit (RA=RI+RC+RD) et la construction, par la
même, de logiciels d'audit. Q106 Pearl J. (1988, p. 151.
Pour répondre à la première des trois
critiques de Shackle, certains chercheurs conviennent que croyance et
chance ne jouent ni le même rôle, ni n'obéissent aux
mêmes règles mathématiques. Mais ces chercheurs
proclament surtout, notamment Judea PEARL [1988, p. 15], que les
croyances sont une « distillation d'expériences
émotionnelles » : L'être humain accumule, tout au
long de ses expériences, des connaissances, des faits et des
sensations dans sa mémoire cognitive. Pour des raisons de
difficulté de stockage en mémoire, en principe, il ne peut
retenir que des moyennes, des importances et des relations
qualitatives abstraites entre les phénomènes ou
évènements vécus : Il ne retient, en fait, qu'une
« impression mentale » qui peut aider à
déterminer des actions futures. L'organisation mentale de la
connaissance et des croyances, fait que cette impression mentale ne
mûrisse, pour ce qui concerne un type d'expériences donné,
que si cette expérience est vécue à une
fréquence assez importante, ce qui revient à adopter
nécessairement la probabilité fréquentiste comme
moyen pour pouvoir calculer la croyance :
Fréquence d'expérience « quantité
» d'impression mentale 9 croyance
Ce qui rejoint les pensées de Shafer G. et sa critique
à la probabilité. Elle est donc plus nuancée que
celle de Shackle. Shafer ne nie pas la probabilité, mais il la
ré-explique autrement, et elle ne vise absolument pas à
remettre en cause l'épistémologie économique ou le bien
fondé d'une quelconque rationalité. Cette critique de
Shafer est plutôt une prise de conscience --mathématique- d'un
simple fait : Le manque d'observation d'un événement ne
signifie pas automatiquement son absence. Cette
simple constatation a permit à Shafer d'inventer sa
théorie de l'évidence M107 dans laquelle
la théorie de la probabilité est positionnée comme le
Q 107 Selon Bouchon-Meunier B. [1994],
Shafer G. [1976] et Lesage C. [1997], la théorie de
l'évidence de Shafer est résumée principalement
par la fonction de croyance et par la règle de Dempster-Shafer :
- La fonction de croyance Bel (A) s'exprime ainsi :
« Dans un univers de référence fini X, une masse globale
égale à 1 de croyance est répartie entre tous ses
évènements possibles. Une masse m attribue un coefficient entre 0
et 1 aux parties de X de telle sorte que EX?Am(A)=1, m(A) représente le
degré avec lequel un groupe d'observateurs croit en la
réalisation de l'événement A. Toute partie non vide B de X
telle que m(B) ? 0 est appelée « élément focal
». Bel (A) en une partie quelconque de X (en prenant considération
de tous les éléments focaux qui entraînent A) est : Bel (A)
= EA?B m(B).et le degré de plausibilité Pl(A) = EAnB ? ö
m(B). » de telle façon qu'on a toujours [croyance = 1 --
plausibilité].
Il faut noter, néanmoins, que le point faible le plus
important de cette théorie est qu'elle ne clarifie pas du tout son
expression au cas où les évènements ne sont pas
indépendants. Shafer n'a consacré dans son livre «
Mathematical Theory of Evidence » de 297 pages, qu'une seule page
à la notion d'indépendance, alors que les risques en audit sont
générés par de multiples et complexes connexions !
- La règle de Dempster-Shafer, quant à
elle, a été surtout appliquée au jugement d'audit : Les
composantes du risque d'audit RA = RI + RC + RD (selon les SAS de
l'AICPA n° 39 & 47) ont été conçues en tant que
probabilités, et leur agrégation, une multiplication. La
règle de Dempster-Shafer les exprime autrement : Chaque composante
devient un vecteur à 3 éléments m1, m2 et m3, (par
application de la fonction de croyance : mi sont des masses
d'évidence) tels que :
· m1 = croyance qu'il n'y a pas erreur,
· m2 = croyance qu'il y a erreur,
· et m3 = ignorance.
· Le risque d'audit est alors un vecteur égal
à la somme des trois autres.
Mais cette somme n'est pas une somme classique des
mathématiques booléennes, cette somme est, en fait, la
règle de combinaison de Dempster-Shafer pour
l'agrégation d'évaluations (ou masses d'évidence) qui est
exprimée par la formule suivante appliquée, ici en
particulier, aux 2 premières masses : m1,2(A) = (1-K)-1.
EBnC=A [m1(B).m2(C)] avec K
=EBn? [m1(B).m2(C)]. ö
Mesures de Nécessité vulgaire
Mesures de Nécessité
Mesures Floues
Mesures de Croyance
Mesures de Probabilité
Mesures de Possibilité
Mesures de Possibilité vulgaire
Mesures de Plausibilité
montre cette figure :
Ensuite, certains chercheurs en
mathématiques floues et en intelligence artificielle
ont, à leur tour, positionné la théorie de
l'évidence de Shafer par rapport aux mesures floues et par rapport
à la notion d'incertitude M108 : Certes, l'évidence ou la
croyance de Shafer est bel et bien une mesure floue,
Figure 17: Relation entre les Classes de Mesures
Floues
mais elle n'englobe pas les mêmes mesures d'incertitudes
que celles de la logique floue.
Ce qui nous permet de différencier entre la croyance de
Shafer et celle que nous comptons approfondir au chapitre III de ce
mémoire. Mais au préalable, il faut effectuer une exposition
approfondie bien que assez succincte de la logique floue vis-à-vis de
l'incertitude et surtout de la théorie des sous-ensembles flous
M109.
Bref, la critique de Shafer G. à la probabilité
se résume par le fait que la probabilité subjective (ou croyance
probabilistique) estimée par une personne envers un fait est
différente de sa croyance (« évidentielle » de Shafer)
envers ce même fait, puisqu'une croyance probabilistique nulle, par
exemple, n'indique pas si la personne croit que le fait ne se réalisera
pas, ou si la personne n'a pas d'information sur ce fait pour estimer cette
croyance. Pour lui croyance et probabilité diffèrent.
Pour résumer ce 1er point critique de la construction
des croyances dans le modèle de D atar & Alles, il faut dire que la
théorie de la probabilité semble non adéquate pour
traduire une croyance, et ce pour les motifs suivants :
m La répétition réelle des
épreuves est l'exception plutôt que la règle, alors que
chaque croyance est une expérience unique en son genre, on applique une
mesure issue de raisonnement basé sur la répétition,
à une situation rarement répété !
m la probabilité empêche toute marge d'action
sur l'éventualité évaluée,
m la probabilité implique
l'équiprobabilité des choix, (où est appliquée
l'entropie de Shanon), alors que cette situation n'est qu'un cas parmi
d'autres, et elle est en plus assez particulière,
M108 Notamment Lotfi ZADEH, Didier DUBOIS, Henri
PRADE, Philippes SMETS, Georges G. KLIR 1
M109 Les mesures de nécessité, de
plausibilité, et de possibilité, floues et vulgaires,
montrées par la figure 18, sont définies à l'Annexe
III.
0 et la probabilité subjective nulle ne
différencie pas entre absence de fait et méconnaissance du fait
par la personne qui estime sa croyance probabilistique.
2. = QUE 1d4 CROYANcit À
PRIORI Di, DA 112221 EST
É A YK C h ? ~
Effectivement, une incohérence pourrait être
relevée dans la construction de la « local reputation » :
Datar & Alles insistent maintes fois dans leur article sur le fait que leur
modèle de réputation est endogène : Ce qui veut dire que
la formation de la réputation ne dépend que du jeu en
lui-même et non de facteurs exogènement déterminés
:
« In the context of our model, two aspects of reputation
are important. First, the auditor's local reputation with the manager depends
on the behavior of the auditor as observed by the manager, rather than on an
auditor's exogenous characteristics (such as whether it is a Big Five or
non-Big Five firm). This notion of locally based reputation is in contrast to
the approach adopted by the auditing literature,... where exogenous differences
between auditors (wealth or technology) creates a global reputation that drives
behavior, rather than being driven by behavior. » DA fp.403].
Donc, selon ces auteurs, la « local reputation »
dépend du comportement de l'auditeur tel qu'observé par le
manager, plutôt que de ses caractéristiques exogènes
au modèle, telle, par exemple, l'appartenance aux grands réseaux
internationaux d'expertise comptable M110.
Plus précisément, pour que la réputation
de l'auditeur soit endogène, il faut qu'elle ne dépende que des
stratégies de l'auditeur, et des croyances du manager. Le
problème réside à la toute première période
du jeu T, où le manager ne dispose d'aucune observation du
comportement de l'auditeur.
Comment le manager doit estimer sa première croyance
envers le type de l'auditeur ? Cette croyance de première période
est 8 (que l'auditeur est strong, et 1- 8 que l'auditeur est
weak) : À partir de la période qui suit, le manager a la
possibilité d'observer le comportement de l'auditeur et de constater
s'il a été diligent ou négligent. Le manager révise
alors 8 (par la règle de Bayes de la probabilité
conditionnelle) et obtient q 1 qui est la croyance de la période 1, et
ainsi de suite... Mais tout le problème réside dans l'estimation
de Ben absence d'observations : Comment le manager « calcule
» 8 ? :
Q 110 Les Cabinets internationaux Bigs
étaient, il y a 10 ans, au nombre de six (huit
précédemment) : Arthur Andersen, Coopers & Lybrand, Deloitte
Ross Tohmatsu, Ernst & Young, KPMG Peat Marwick et Price Waterhouse. Par
une fusion entre Coopers et Price, ils sont devenus cinq. Ils sont
évidemment classés premiers du monde entier selon le
critère du chiffre d'affaire. D'autres réseaux internationaux
existent mais ils manquent de structuration dans leur organisation et de vision
globale dans leurs choix stratégiques par rapport aux bigs. Ce qui
crée et rend durable l'avantage comparatif des bigs autant en termes de
technologies, que de bases de données, de spécialistes et de
structures ou système de recherche (aides financières aux
universités, constituant en contre partie un certain lobbying,
stratégies de recherche...).
1. D'abord, Datar & Alles posent que « 8»
existe (n'est pas nulle) et le justifient intuitivement :
« To begin with, there must be some belief among owners
and managers that some proportion of auditors will audit thoroughly (if
everyone believed that all auditors are inherently bad, then there would be no
means of developing any sort of reputation for quality, nor would there be any
incentive for an auditor to do so). »DA fp.414].
2. Ensuite, ils essayent de donner au lecteur quelques
renseignements sur l'interprétation
de 8, à différentes occasions, sans
vraiment arriver à l'établir et expliquer comment doit
faire le manager pour trouver sa croyance de départ, sa
croyance à priori de la toute
première période :
0 D'un coté, ils lient «
8» à des facteurs exogènes qui caractérisent
l'auditeur avant même qu'il n'ait d'interactions avec le manager, des
facteurs exogènes mais observables comme la richesse de l'auditeur (ou
la firme d'audit) ou sa réputation, « commune », connue par
d'autres gens que le manager :
« It can be... inferred from an exogenously determined
observable variable such as auditor wealth or reputation. » DA fp.4031.
0 d'un autre, Datar & Alles expliquent
seulement que l'importance de « 8» influence l'importance du
nombre des périodes durant lesquelles le manager aurait à
travailler et à rapporter la vérité au propriétaire
et que la valeur de « 8» devrait être
influencée par les initiatives institutionnelles (réglementations
du marché, système de justice...) et associatives
professionnelles (initiatives de l'ordre des experts comptables ou
d'association d'auditeurs internes, tels l'OECT et l'ATAI) qui visent à
améliorer une image de marque commune à tous les auditeurs
:
« For a fixed T, the higher the value of qT
= 8, the longer the periods over which the manager will no shirk and
misreport. Hence, institutional factors that increase the prior beliefs that
auditors are diligent enhance the value of auditing. Setting professional
standards, developing a code of ethics, and penalizing auditors heavily for
negligence can all be interpreted as attempts to enhance the image that
auditors are of strong type. As far as audit litigation is concerned, the issue
is whether the publicity surrounding prominent cases makes observers more
confident that weak auditors are being weeded out of the profession (so raising
prior beliefs 8), or whether publicity reduces public confidence, so
reducing 8. »
DA Ip.4211.
3. Enfin, ils interprètent l'ensemble des croyances du
manager (ou plutôt l'évolution de sa croyance) comme une
vraisemblance ou probabilité d'occurrence du type strong, analogue
à la réputation de l'auditeur :
« We interpret the manager's beliefs as to the likelihood
that he is facing a strong auditor as the local reputation of the auditor
with the manager. » DA ip.418].
En somme, ces auteurs ne donnent que quelques indications sur
la « formation » de la croyance à priori «
8» du manager. En plus, bien qu'ils insistent à
maintes occasions sur le fait que leur modèle de réputation est
endogène, ils admettent que le point de départ de la formation de
cette réputation se base sur des facteurs exogènes au
modèle.
A notre avis, la formation d'une réputation, même
si elle est locale, ne peut absolument pas s'amorcer indépendamment de
l'environnement dans lequel elle naît : la réputation est par
nature une information approximative partagée par l'environnement de
l'individu, plus ou moins convenue entre les personnes formant son entourage
direct et indirect.
La croyance à priori du manager doit
se baser sur des facteurs extérieurs au eu qui
le lie avec l'auditeur, et ses facteurs ne peuvent pas seulement se
résumer à des initiatives institutionnelles ou associatives, ou
seulement au facteur richesse de l'auditeur. A notre avis, ces facteurs sont
beaucoup plus nombreux, et le manager ne fait qu'exploiter une riche
variété de ces facteurs qu'il trouve dans l'environnement de
l'entreprise ou dans l'environnement de l'auditeur, pour se construire une
idée de base sur la diligence possible de cet auditeur avant qu'une
quelconque interaction avec lui n'ait lieu.
Il est vrai que la réputation de l'auditeur avec le
manager, même si elle est locale, se traduit par une construction mentale
au sein du cognitif de ce dernier. Mais cette construction ne peut pas
naître d'elle-même, il suffit de la moindre information pour qu'un
semblant de croyance à priori commence à exister. Le manager, de
part sa fonction, son expérience et son « flair », ne peut pas
être en situation d'absence complète d'information concernant
l'auditeur. S'il en sent le besoin, il essaye de chercher lui-même cette
information, aussi minime qu'elle soit, dans l'environnement de l'entreprise et
même dans l'environnement de l'auditeur.
Même si l'auditeur est nouveau dans le marché de
l'audit, de telle façon qu'une réputation commune au sein de ce
marché ou du monde des affaires en général n'a pas eu le
temps de s'établir, la simple apparence de l'auditeur, ou de son
cabinet, peut renseigner sur sa position professionnelle qui serait prise comme
signal sur sa diligence professionnelle... et les gens d'affaire compte des
fois plus sur ce genre de flair que sur des « informations
économiques scientifiquement prouvées »...
IMI1111 Autrement : P(B/A)=
1P(A)-1]. IP(A/B).P(B)], A et B pouvant être partagé
chacun en 2 sous-évènements, suivant les 2 actions des
Il suffit d'énumérer plusieurs travaux
empiriques qui essayent de mettre en relief des critères de
réputation, pour pouvoir établir une liste approximative de ces
facteurs, qui pourraient influencer la genèse d'une croyance à
priori d'un quelconque manager :
- plusieurs travaux mettent l'accent sur l'appartenance aux
Bigs,
- d'autres font ressortir des facteurs comme le prestige de la
clientèle de l'auditeur,
- ou aussi les moyens technologiques pour l'utilisation des
quels l'auditeur est connu,
- ou aussi son degré de structuration
- son passé judiciaire professionnel, ou
disciplinaire...
En plus, il faut noter que ces facteurs devraient continuer
à être pris en compte dans les estimations du manager, même
lors de la révision de ses croyances. Il ne faut pas qu'il ne compte que
sur sa seule observation du comportement de l'auditeur : à titre
d'exemple, si en cours du jeu, le manager estime une de ses croyances
révisées que l'auditeur est bien diligent et qu'entre temps, une
affaire en justice contre cette même diligence de l'auditeur soit
jugée en défaveur de l'auditeur, la croyance du manager ne doit
plus rester insensible à cette information, elle doit être
révisée à la baisse, même si son comportement
indique une parfaite diligence professionnelle...
1. C 1,44 R
Y1510N 9 DES C ~
Comme il a été montré
précédemment, la construction des croyances du manager s'amorce
par une croyance à priori à la toute première
période T, puis pour chaque période t, elle est
révisée, par application de la règle de Bayes, pour que le
manager puisse décider quelle action choisir.
1. EN QUOI CONSISTE ALORS CETTE RÉVISION BAYESIENNE
DES CROYANCES ? :
La règle de Bayes est une façon
rationnelle de révision des croyances à priori. C'est une
méthode qui procure un formalisme de raisonnement touchant à des
croyances partielles, sous certaines conditions d'incertitude. Elle permet de
passer de la probabilité à priori à celle à
posteriori. La croyance à priori est une probabilité à
priori, alors que la croyance révisée est une probabilité
à posteriori M111 :
Probabilité à posteriori de
l'événement = Vraisemblance de l'info . Probabilité
à priori de l'évènement
Vraisemblance marginale de l'info
L'application de cette probabilité conditionnelle de
Bayes Thomas M112 nécessite que le
modélisateur connaisse ces vraisemblances, alors que la vraisemblance
d'une information ne peut être connue qu'à l'équilibre. Par
conséquent, le calcul des probabilités à posteriori ne
peut jamais être indépendant de l'équilibre.
Ce qu'il faut faire, c'est proposer un équilibre (ou
un chemin d'équilibre) puis l'utiliser pour calculer des
probabilités à posteriori. Après coup, il faut choisir le
meilleur chemin (du point de vue des utilités ou payoffs), c'est
à dire la stratégie d'équilibre. C'est ce qui explique la
rationalité de cette méthode de révision des
probabilités à priori.
2. EN QUOI L'APPLICATION DE CETTE RÈGLE DE BAYES
EST-ELLE ALORS REPROCHÉE ?
Les reproches sont deux : Ces reproches ou critiques reviennent
à la règle de Bayes et non à son application : elles sont
extrêmement simples :
0 Notre première critique concerne
l'exhaustivité des sous-évènements :
Il est, en fait, assez difficile de prendre en compte tous
les évènements pouvant composer l'événement dont on
dispose la probabilité à priori. Dans notre modèle, la
décomposition de l'événement dépend de la
décomposition des actions de chaque joueurs (en l'occurrence deux
actions). Mais la croyance relative à cet événement ne
dépend pas seulement de cette décomposition d'action, plusieurs
autres évènements peuvent influencer à la hausse ou
à la baisse cette croyance.
0 et la seconde critique, concerne
l'indépendance entre ces sous-évènements :
Cette même décomposition de
l'évènement n'est pas aussi évidente à faire : pour
que les probabilités partielles soient multipliées ou
sommées, ils faut qu'elles concernent des évènements
à intersection vide, mutuellement exclusifs. Il n'est pas évident
au manager, dans notre modèle, de savoir si telle ou telle action de
l'auditeur concerne
joueurs.
M112 Thomas Bayes était un prêtre
anglais du XVIIIème siècle (1702-1761). Ses essais en
mathématique et en statistiques n'ont été publiés
qu'ad posthume. Il a déduit sa règle de probabilité
à posteriori à partir du jeu suivant : En jetant des balles sur
une table, il déduit la longueur de la table suivant le nombre de balles
tombées à gauche ou à droite d'un point fixé sur la
table ! La critique que nous exploitons contre cette règle signifie pour
ce jeu de la table, en particulier, que Bayes pourrait facilement se tromper de
calculs si les pieds de la table ne sont pas parfaitement horizontaux ou bien
que la surface de la table ne soit uniforme... de telle façon que la
totalité des évènements pouvant influencer la
tombée des balles soit difficile, même impossible à
connaître. Ce qui rend impossible le calcul de cette
probabilité ou la déduction de cette information.
113 Un certain Aumann R. parle même de
connaissance commune (mutuelle) d'ordre 1, d'ordre 2... (Aumann R. "Game
theory", The Mac Millan Press, 1987, cité par Guerrien B. 11997, p.
601.
l'événement « auditeur diligent » ou
l'événement « auditeur négligent ». Datar &
Alles soulèvent effectivement cette nuance en disant que les actions de
l'auditeur sont en réalité un continuum.
Passons enfin, à notre 4ème dernier
point critique des croyances du manager dans la construction de la « local
reputation » de Datar & Alles [1999] :
4. C DE l C C DES
J ~
C'est une hypothèse forte, dans le sens qu'elle permet
une abstraction intense par rapport à la réalité. Elle est
d'abord définit ainsi :
« Information is common knowledge if it is known to all
players, each player knows that all of them know it, each of them knows that
all of them know that all of them know it, and so forth ad infinitum »
Q 113. Rasmusen E. 11990, p. 501.
Dans notre modèle, cette notion de connaissance
commune est nécessitée surtout dans le processus de formation de
la réputation de l'auditeur : si, à chaque période,
l'auditeur ne peut pas connaître la valeurs de la croyance du manager de
cette même période, il ne peut pas connaître quelle action
choisir et quelle stratégie adopter.
La connaissance commune ne se contredit pas avec
l'asymétrie d'information ou l'information cachée. Ce qui est
connaissance commune, c'est la partition de l'information de tout le jeu, qui
est indépendante même de l'équilibre du jeu : Chaque joueur
sait à quel degré l'information de l'autre joueur est
précise, même s'il ignore lui même à quel noeud se
situe le jeu, pour une période donnée. Datar & Alles
affirment que pour que l'auditeur puisse choisir une action à partir
d'un noeud donné du jeu, pour une période donnée, il faut
qu'il ait une connaissance commune de la valeur de la croyance du manager
(à priori ou révisée, selon la période).
A notre avis, il est difficile, durant le déroulement
réel de ce genre d'interaction, qu'une personne sache exactement ce que
croit une autre. A notre avis aussi, elle recourerait plutôt à une
estimation personnelle de la croyance de l'autre joueur envers elle ; c'est
à dire que l'auditeur, en réalité, ne peut qu'estimer
la croyance du manager envers lui et non la connaître avec exactitude.
Il faudrait donc plutôt chercher à établir une notion
d' « estimation commune » au lieu de connaissance commune.
Ici, finit le chapitre II consacré à une remise
en question, intégrée, de la mécanicisité de la
modélisation de l'interaction stratégique en audit. Elle est
intégrée dans le sens qu'une explication approfondie,
accompagnée de sa critique, est donnée pour chacun des trois
aspects remis en question, du modèle de Datar & Alles [1999] :
Ces aspects critiques ne sont que l'écho d'une remise
en cause éternelle de la pensée économique
néoclassique, appliquée à l'audit. Mais ils ouvrent un
« chantier » trop ambitieux au regard de ce simple travail de
mémoire de DEA.
Le chapitre III va essayer par conséquent, de
focaliser la réflexion sur un seul de ces trois points remis en
question, en l'occurrence le point le plus important qu'est la construction des
croyances du manager envers le type de l'auditeur.
Cette construction de croyance pourrait trouver un meilleur
terrain de réflexion scientifique dans le cadre de la
subjectivisation du comportement, tel que pensée par Shackle, qui
pourrait être effectivement meilleure que le terrain de la
mécanicisité néoclassique, bien qu'elle ne le rejette
absolument pas.
Par conséquent, et puisque les mathématiques
floues sont celles des plus proches au raisonnement approximatif humain, nous
pensons, à notre avis, que la subjectivisation de la construction des
croyances du manager, envers le type de l'auditeur, pourrait être
autrement et mieux appréhendée, grâce aux
mathématiques floues.
Passons alors au chapitre III du présent mémoire
pour :
- avoir d'abord un très bref aperçu du
subjectivisme « à la Shackle »,
- avoir un bref aperçu des mathématiques floues
-essentiellement la théorie des sous- ensembles flous- ,
- puis pour approfondir la réflexion sur une
construction subjectivisée des croyances du manager envers le type
diligent ou négligent de l'auditeur, plus précisément par
une fusification des composantes de cette construction de croyances (ces
composantes pourraient être choisies au regard des résultats de
certains travaux empiriques touchant à la réputation de
l'auditeur ou à la qualité des travaux d'audit),
- enfin, pour proposer une idée encore embryonnaire d'une
vérification empirique de cette construction subjectivisée de
croyances.
CuAPITet III M114
MOD1~ISATION D'AUDIT et tOGIQUE r~OUE~
SUBJECTIVISATION POSSIB~E ~
|
Le modèle de Datar & Alles [1999] -et la
théorie des contrats en général- prédisent des
comportements mécanicistes, précis, calculatoires de la part des
joueurs ; auditeur, manager et propriétaire. Ces comportements sont
modélisés indépendants de tout contexte de la relation
économique ou de tout état psychologique des agents
économiques. Critiquer cette mécanicisité revient à
mettre en évidence le fait que ces comportements ne sont pas aussi
évidents (incontestables) et aussi automatiques que ne le montre le
modèle.
Les trois critiques adressées, dans le chapitre II
M115, au modèle de Datar & Alles [1999] constituent,
donc, une critique générale à la
mécanicisité du modèle. En addition, les
difficultés, soulevées à la fin du chapitre I dues au
cercle vicieux caractérisant les essais empiriques de falsification des
modèles d'audit, constituent, une autre critique, générale
aussi, à la modélisation de l'interaction stratégique en
audit.
Ensembles, ces aspects critiques du premier et surtout du
second chapitres, ne sont que l'écho d'une remise en cause
éternelle de la pensée économique néoclassique. Ils
constituent, alors, un robuste point d'appui au développement du
présent chapitre III afin d'approfondir la réflexion vis-
à-vis des faiblesses de la modélisation d'audit.
Néanmoins, ces aspects critiques, appliqués dans le
cadre de ce travail à l'audit, ouvrent un « chantier » trop
ambitieux au regard de ce simple mémoire de DEA.
Il suffit, par exemple, de se rendre compte de la
complexité des conséquences possibles d'une
critique à la rationalité : elle remet en cause la
notion de l'utilité, les composantes aussi de
M114 Je remercie chaleureusement Mes Professeurs Dr
Foued Ben Abdelaziz, de l'ISG-Bardo et Mr Patrice Perny de l'Université
de Paris VI, (spécialiste en modélisation de décision
multicritère floue) pour m'avoir soutenue et aidée à
construire le présent chapitre. Ils m'ont consacré, sans qu'ils
en soient vraiment obligés, beaucoup de leur temps et de leurs efforts,
afin de mener à bien cette partie assez technique du travail. Qu'ils
trouvent, ici, l'expression de ma profonde et sincère gratitude.
M115 Critiques contre :
1. La difficulté de la distinction entre les types de
l'auditeur,
2. la non-limitation de la rationalité et la
mécanicisité de l'opportunisme des joueurs dans ce
modèle,
3. et contre le concept de local reputation appliqué au
comité d'audit et surtout contre l'application de la théorie de
la probabilité à la composante 'croyance' de ce concept de local
reputation du modèle DA [1999].
l'utilité, elle remet en cause même la notion
d'espérance, elle nécessite l'approfondissement de la
réflexion qui touche à l'identification de ces limites de
rationalité (le temps, le contexte de la décision, le contexte
individuel du décideur...), etc...
Il est donc plus que nécessaire de réduire le
champs de réflexion du chapitre III à un seul et unique
point critique à choisir parmi cet ensemble général de
points faibles de la modélisation en audit.
Notre choix est guidé (seulement guidé et non
fondé sur) par les pensées épistémologiques
subjectivistes, anti-mécanicistes, de Shackle G.L.S., puisque cet
économiste subjectiviste s'intéresse plus au « comment
» qu'au « pourquoi » de ces comportements d'individus
économiques. Essayer de comprendre comment ces individus se comportent,
signifie essayer de subjectiviser les modèles mécanicistes
critiqués, ceci, à travers une nécessaire «
décomposition des opérations réelles de l'esprit et du
processus cognitif », et une remise en cause du rôle de la
théorie de la probabilité dans ces modèles d'audit.
Le chapitre III essaye par conséquent, de focaliser la
réflexion sur le dernier et le plus important des trois points critiques
mis en relief par le Chapitre II, en l'occurrence la construction des
croyances du manager envers le type, diligent ou négligent, de
l'auditeur.
Ce choix de la construction des croyances est, en fait,
doublement important :
0 Important par rapport au chapitre II
puisqu'il remet en question la construction de la réputation de
l'auditeur, qui s'avère être un concept plutôt ambiguë,
pourtant il est le noyau grâce auquel « fonctionne » le
modèle DA[1999],
Utilité de l'Audit
UNE TRIADE D'AUDIT?
Diligence de l'Auditeur
Qualité d'Audit
Réputation de l'Auditeur
0 et important par rapport au chapitre I,
puisque la réalité complexe de la réputation de diligence
d'un auditeur se perçoit nécessairement vis-à-vis de la
qualité de son travail qui, à son tour, se perçoit
vis-à-vis de l'utilité de l'audit pour ses utilisateurs
Q116 :
Il est alors primordial d'insister sur le fait que le
présent
Figure 18
chapitre ne prétend absolument pas, et en aucun cas,
apporter un modèle de substitution à
Q116 Cette phrase ne vise pas à insinuer qu'une
quelconque dépendance existe entre ces quatre notions
(réputation, qualité, utilité, et diligence d'audit), ni
une relation de causalité, d'ailleurs. La nature de cette relation entre
ces quatre notions est encore mal définie.
la construction de croyance du modèle DA [1999], il ne
fait qu'approfondir la réflexion sur ce
_ qu'approfondir . _
sujet. Comme le montre le titre de ce chapitre, il ne fait que
poser une question et non pas essayer de démontrer une réponse.
Ce chapitre III, en fait, compte amorcer une réflexion sur une
éventuelle subjectivisation, telle que pensée par Shackle, de la
construction de croyance du manager.
L'outil que nous pensons le plus adéquat à cet
essai de subjectivisation s'avère être les mathématiques
floues (ou logique floue), puisqu'elles sont le type de logique qui est le plus
proche de la logique approximative humaine, face à la logique des
mathématiques exactes des modèles mécanicistes.
Par conséquent, le présent chapitre III se propose
de développer les étapes de réflexion suivantes:
1. Avoir un très bref aperçu du «
subjectivisme à la Shackle »,
2. avoir un petit aperçu des mathématiques floues,
essentiellement la théorie des sous- ensembles flous,
3. proposer une idée de décomposition du
processus cognitif qui fonctionne lors de la fixation de la croyance du manager
envers le type diligent ou négligent de l'auditeur, et notamment le lier
à des critères précis de réputation de
l'auditeur,
4. approfondir les composantes de ce processus en les
structurant dans un modèle flou, proche des modèles de
décision multicritère,
5. proposer un exercice d'application de ce modèle de
construction subjectiviste de croyance, pour améliorer sa
compréhension de la part du lecteur,
6. enfin, proposer une idée encore embryonnaire d'une
vérification empirique de ces croyances fusifiées dans une
relation d'audit.
Que signifie alors « subjectiviser » et comment
subjectiviser les croyances du manager envers le type de l'auditeur, tels que
appréhendées par le modèle de Datar & Alles [1999]
?
QUE SIGNIFIE « SUBJECTIVISER ~ ~
ET QUE FAUT-Ii SUBJECTIVISER DANS DA11222/
~
« Subjectiviser » un comportement, veut dire le
rendre relatif à son auteur. Rendre une variable à titre
d'exemple, subjective, veut dire la rendre dépendante de
l'appréciation de chaque individu à part. Rendre un modèle
subjectif, veut dire alors, changer ses variables mécanicistes
(subjectivisables) en des variables subjectives, en les faisant dépendre
de l'appréciation de chaque individu qui voudrait appliquer le
modèle à son cas. C'est ce qu'entend entreprendre le
présent chapitre. Il est évident que ces variables «
subjectivisables » ne reflètent ni l'incertitude (de l'action de la
nature, par exemple), ni des mesures fondamentalement mécanicistes. On
ne peut subjectiviser que ce qui est subjectivisable, que ce qui
dépend de l'appréciation de l'individu.
A la limite, on peut concevoir que « subjectiviser »
est un antonyme de « mécaniser » ou « axiomatiser ».
Une pensée subjectiviste n'existe que parce que des modèles
complètement automatiques, systématiques existent. Subjectiviser
voudrait alors dire cesser de théoriser une mécanique du
comportement.
Avant d'entamer la réflexion au niveau du comportement des
agents en relation d'audit, examinons la naissance de cette approche par
rapport à la théorie économique pure :
Tous les développements de la théorie
économique pure se sont reposés sur un pilier appelé
« rationalité économique ». Néanmoins,
l'intérêt de ce pilier n'a été
qu'instrumental, pour permettre aux économistes, fervents de
formalisme unifié, de représenter l'homme, décideur
économique dans toutes ses dimensions, par un individu seulement
maximisateur, atemporel et universel.
Le subjectivisme, est alors contre cette transformation de
phénomène subjectifs, dépendants de contextes et de
mobiles de comportement, en phénomènes objectifs,
extrêmement quantifiables, juste pour faciliter la modélisation
économique et pour rendre « scientifiquement exacte » une
discipline qui traite de l'homme.
« ...puisque les phénomènes humains ne
produisent pas les mêmes effets dans les mêmes circonstances, les
contradictions apparaissent clairement dans l'expression « science de
l'homme ». En effet, l'homme ne saurait répondre aux
critères scientifiques de :
- permanence,
- d'uniformité,
- et de répétitivité
des phénomènes scientifiquement observables. »
Chambon J-P 11996, Ch. II7J.
M117 Ici, il faut faire abstraction des discussions
philosophiques entretenues sur l'essence de la réalité (la
réalité est celle observée, ou imaginée, ou
objectivement théorisée ? ...). Shackle dit à ce sujet :
« what we do in our actions is based on what goes on in our own minds...
(your reality is) your list of choosable things that has to be constructed or
composed by yourself before you can choose. ». The Austrian Economics
Newsletter, Spring 1983.
Q 118 George Lennox Sharman SHACKLE,
1903-1992, « disciple » de Hayek F.A. à la « London
School of Economics », est compté parmi les affirmés des
économistes à tendance « École de Vienne ». Ses
meilleurs travaux sont ceux qui critiquent Keynes dans le fait que sa «
théorie générale » ne tient pas compte ni du temps,
ni des caractéristiques psychologiques du sujet humain...
Par conséquent, une subjectivisation d'un modèle
mécaniciste, pourrait le faire rapprocher de la réalité
économique M117. La subjectivisation de comportement
modélisé pourrait donc aider à réduire ces
difficultés puisque le modèle en lui-même devient plus
proche de la réalité économique de la relation d'audit et
donc pourrait devenir mieux vérifiable empiriquement.
Examinons, alors, l'apport de Shackle Georges L.S. dans ce cadre
:
S G LS. ~
Shackle G.L.S. M118 a
développé, durant les années 70, une approche
subjectiviste radicale de la théorie économique pure, en
réponse à la défaillance de la théorie
néoclassique à résoudre certains problèmes
économiques réels. Ses ouvrages n'ont pas réussit à
constituer une théorie générale cohérente face
à celle Keynesienne, néanmoins ses idées éparses
n'ont pu être adoptées et développées que
récemment.
Le subjectivisme est radical quand il y a abandon de
l'hypothèse de rationalité au sens néoclassique. Donc, la
critique la plus singulière que Shackle a apporté au Mainstream,
réside dans la question de la rationalité : Le point crucial de
sa critique traite du choix à prendre, face à l'incertitude. Par
conséquent, il nie la possibilité et l'opportunité de
rechercher une théorie économique unifiée sous un
quelconque formalisme. Autrement dit, l'aspect mécaniciste des
néoclassiques perd toute raison d'être dans la pensée de
Shackle.
Mais ce qui intéresse le présent travail, n'est
pas exactement sa critique coriace contre les néoclassiques, mais
plutôt la clarté d'analyse des comportements
économiques individuels qu'on retrouve amalgamée à sa
critique aux néoclassiques : Pour lui, si l'explication
néoclassique des comportements économiques est vraie, alors
l'histoire humaine entière ne devrait même pas exister : en voici
l'explication :
« If we can really explain any choice completely, we are
saying we can point to causes which made this choice inevitable...we really are
saying that the person who made the choice is merely a link in the machine,
he's just a connecting-rod, which means he's not a maker of history in any real
sense...lhe is, on the contraryl a chooser which cannot be fully explained.
» Shackle G.L.S. 119831.
Le manager de notre modèle DA [1999], ne peut pas, par
exemple, à chaque fois être opportuniste envers le
propriétaire, parce que les personnes sont plus ou moins respectueuses
de la moralité et de l'éthique, ou même par respect
à certaines relations humaines, on ne peut pas « garantir »
alors qu'à chaque fois, chaque joueur du modèle DA soit
opportuniste, car, chaque décision prise par chaque joueur à
chaque période, comporte ses propres raisons d'être...
Face à ce rejet, Shackle apporte une robuste nouvelle
théorie dite de la « surprise potentielle ». Nous l'exposons
ici, très brièvement, afin de montrer comment la pensée de
Shackle est plus proche de la réalité des individus
économiques que ne le prétende la théorie
néoclassique. Pour lui, la théorie économique devrait
mieux penser la probabilité et le rôle du temps :
Surprise maximum
Théorie de la "Surprise Potentielle" de Shackle
G.L.S.
Surprise minimum
0
Y
a
b c d e f
Profit Potentiel
X
Source :
Lavoie D.C. [1978, p.126] (Traduction Libre)
Parfaitement possible
Impossible
Figure 19
Le décideur économique examine une panoplie
d'actions. Le résultat de chacune lui est incertain. Il focalise son
attention sur le gain possible et la perte possible de chaque action pour en
choisir la meilleure. On peut, alors, concevoir : X un repère qui
représente un intervalle de profits ou gains potentiels d'une action
donnée [ce sont
exactement des « ex ante » profits psychiques], et Y
qui représente la « plausibilité » de cette
chaîne d'éventualités... Shackle montre, alors, que les
meilleurs profits recherchés par le décideur, et qui sont
jugés raisonnablement possibles, sont :
q Le moindre gain qui se confond à la pire perte
(au point « b »),
q et le meilleur gain qui se confond avec la moindre
perte (point « e »).
Les points des profits inférieurs à « b
», ou supérieurs à « e », manquent de pertinence
pour le décideur [puisque pratiquement impossibles]. Les points
situés entre « b » et « e » manquent aussi de
pertinence puisque de meilleurs (ou de pire) gains sont possibles. Ce
degré de pertinence est affecté par Shackle à un
3ème repère « O » qu'il appelle 'attention
arresting power'.
Lavoie D.C. [1978, p.126-7].
Avec cette théorie de la surprise potentielle, Shackle
arrive à mieux expliquer l'aversion au risque et à mieux
justifier la cardinalité des préférences, surtout
lorsqu'il conçoit cette cardinalité en termes de volume
M119. L'intérêt de cette théorie pour le
présent mémoire, est :
- d'un coté, sa critique des mesures
probabilistes : pour lui, l'incertitude est plutôt une
évaluation personnelle, propre et exclusive à chaque individu qui
la fait, d'une notion de surprise. A la limite, elle peut être prise pour
une justification de son rejet de la théorie de la probabilité
comme outil parmi les outils de modélisation des comportements
économiques,
M119 Le problème de Shackle, en fait,
réside dans le fait d'arriver à trouver des unités
non-arbitraires à ses repères, qui traitent essentiellement
de mesures « émotionnelles ».
- et d'un autre coté, sa prise en compte
poussée du contexte psychologique de la décision chez l'individu
économique, de telle façon qu'il essaie d'expliquer le
comment de la décision avant d'en expliquer les causes ou les effets.
Le subjectivisme « à la Shackle » admet donc
que le comportement économique individuel ne peut pas être
indépendant du contexte où il existe, contexte psychologique
en premier lieu, et temporel en dernier lieu.
Puisque chaque individu économique du monde, subit
nécessairement un contexte qui lui est propre (social, politique,
national, historique, ...), cela influence indubitablement son état
psychologique M120, de telle façon que chaque
individu se comporte face à une situation d'une manière qui lui
est propre, et plus encore, un même individu, exposé à une
même situation, pourrait se comporter différemment, selon son
humeur et selon la période (le passage du temps).
C'est cette idée qui inspire à la base notre
réflexion pour subjectiviser des croyances.
Pour connaître mieux ces contextes afin de mieux mesurer
leur effet sur la décision économique de l'individu, il devient
logique et nécessaire de tenter de les décomposer :
« ...Shackle s'insurge...contre l'emploi des
probabilités dans la décision pour prendre position en faveur de
la décomposition des opérations réelles de l'esprit et
du processus cogniti%. »
Chambon J-P 11995, Ch. IV, p.361
C'est cette décomposition nécessaire des
opérations réelles de l'esprit et du processus cognitif, qui se
veut être le « cheval de bataille » du présent
mémoire : Pour essayer de subjectiviser des croyances, nous pensons
décomposer le processus cognitif qui les génère. Ce
processus est appliqué particulièrement à la
réputation -de diligent ou de négligent- de l'auditeur du
modèle DA [1999].
Une telle construction de croyance pourrait trouver un
meilleur terrain de réflexion scientifique dans le cadre de la
subjectivisation du comportement, tel que pensée par Shackle, qui
pourrait être effectivement meilleure que le terrain de la
mécanicisité néoclassique, bien qu'elle ne prétend
absolument pas la rejeter : cela signifie que le subjectivisme auquel
prétend ce travail
120 Cette causalité a été bien
démontrée par les travaux forts connus de Hofstede G. 119871, sur
l'influence de la culture sur la nature psychologique humaine et sur ses
décisions. Un travail analogue a été conduit par Gray S.J.
119881 pour étendre cette causalité au comportement professionnel
comptable des individus dans plusieurs pays du monde.
Q121 Je remercie Mr Rebaï Abdelwaheb,
Mlle Nefzi Hana, Mr Dubois Didier, et Mr Mongin Philippe, pour leur
contributions à enrichir mes connaissances de la logique floue. Cette
section est une synthèse de leurs enseignements et aussi d'extraits de
Bouchon-Meunier 119951, Klir & Fogel 119881, Kaufmann A 119731, Pearl J.
119881, Shafer 119761, Tong-Tong J-R. 119951, Bouchon-Meunier 119941...
Q122 La logique booléenne est une branche des
mathématiques qui traitent des calculs logiques grâce à des
fonctions booléenne et à des opérateurs comme « ou
» et « et ».
serait un subjectivisme nuancé et non radical,
puisqu'il pourrait être toujours réinséré à
la mécanique du modèle de base. Ce point sera mieux
expliqué aux sections suivantes. Passons maintenant à l'outil que
nous avons choisit pour la subjectivisation des croyances du modèle
DA:
QuEt EST t'E0uTIt DE
SuBJECTIVISATI0M ?
L'objectif de notre essai de subjectivisation est de
décomposer un processus cognitif, mental, relatif à la
détermination de la croyance du manager envers le type de l'auditeur,
pour mieux comprendre ce processus et essayer, par conséquent et si
possible, de le modéliser de manière plus rapprochée
à la réalité.
Il est évident, à nous tous, que lorsque, par
exemple, le manager « croit » que l'auditeur est diligent, il ne peut
absolument pas dire si sa croyance se quantifie à 75 % ou 75,6 %. Chaque
individu de nous, lorsqu'il tente de savoir « à combien » il
croit à un fait et« à combien » il n'y croit pas, il ne
fait qu'approximer, apprécier, cette quantité. Il est
plutôt plus à l'aise lorsqu'il exprime sa croyance
linguistiquement : « je crois plutôt qu'il est du bon type »,
« je suis plutôt tenté à le considérer comme
tel », « il est certainement du bon type », « je ne crois
absolument pas qu'il soit diligent », etc... :
La croyance du manager est principalement une approximation et
non une quantité
exacte parfaitement mesurable.
Les mathématiques classiques, et surtout la
théorie de la probabilité, n'admettent pas une telle
approximation : alors que la logique floue, si. Dans ce qui suit, nous allons
en premier lieu, exposer brièvement quelques aspects
élémentaires de la logique floue, puis, en second lieu, nous
allons ainsi pouvoir motiver notre choix de l'utilisation du flou comme outil
de subjectivisation.
Q'E- aie L4
OG1C« ? e Q121
La logique floue peut être considérée
comme un grand domaine dans lequel la logique booléenne Q122 a
été étendue pour incorporer et traiter le concept de
« vérité partielle ». Une vérité
partielle peut s'associer à une valeur allant du «
complètement vrai » au « complètement faux ».
La logique floue a été introduite par Dr Lotfi
Zadeh, en 1960 Q123 :
« ...rather than regarding fuzzy theory as a single
theory, we should regard the process of « fuzzification » as a
methodology to generalize ANY specific theory from a crisp (discrete) to a
continuous (fuzzy)form. »
Zadeh L. 11975] cité dans Gupta & Sanchez 119821.
Elle constitue une extension des mathématiques
conventionnelles. L'histoire des mathématiques floues et de leur
application dans divers domaines tels la reconnaissance d'image, la prise de
décision, l'industrie, les systèmes experts... a montré
qu'on perd moins de temps pour aboutir au même résultat, qu'on
stipule moins de règle et qu'on approche mieux ainsi le raisonnement
approximatif humain face au raisonnement exact des mathématiques
conventionnelles. Zadeh a inventé le concept de sous-ensembles flous, et
a développé ensuite la théorie des possibilités.
Les deux : « théorie des sous-ensembles flous » et «
théorie des possibilités » constituent « la Logique
Floue ».
DEGRÉ D'APPARTENANCE :
Comme il y a une forte relation entre la logique
booléenne et le concept de sous-ensemble, il y a une similaire forte
relation entre logique floue et théorie des sous-ensembles flous : En
théorie classique Q124, un sous-ensemble U de S peut
être associé à une relation « u » définie
sur Sx(0,11, telle que :
u : S ---> [0,1]
x ---> 0 si x E U,
1 si x e U.
de telle façon qu'on peut représenter u comme un
ensemble ordonné de paires dont le premier élément de
chaque paire est un élément de S et le second, un
élément de f0,1], c'est à dire soit 0 soit 1. Autrement,
cela signifie que 0 représente une « non-appartenance », et 1
représente l'appartenance. Dire qu'il est vrai que x soit un
élément de U (ou qu'il est faux que x soit un
élément de U) est déterminée par la paire dont le
premier élément est x : si son second élément est
0, alors il est faut que x appartienne à U, si le second
élément de cette paire est 1 alors, il est vrai de dire que x
appartient à U.
Q123 Mais, en ces temps là, la logique floue
n'a pas eu d'écho dans le milieu scientifique américain,
jusqu'à ce que les japonais aient trouvé le moyen de l'appliquer
à l'industrie et à l'informatique. Les années 70 ont alors
été marquées par une prolifération grandiose
d'articles mathématiques qui développent les notions
élémentaires du flou ou d'articles scientifiques d'application du
flou au domaine de l'ingéniorat ou de l'informatique... De nos jours, le
développement de cette discipline mathématique continue
sereinement. Les concepts flous deviennent extrêmement
sophistiqués, mais leur développement accuse un rythme plus
nuancé que celui des années 70.
LUI 124 Appelée aussi «
conventionnelle » ou encore « vulgaire » (en anglais : «
crisp » ) par opposition à « floue ».
De façon similaire, un sous-ensemble flou F de S peut
être définit comme un ensemble de paires ordonnées, ayant
chacune comme premier élément un élément de S, et
comme second élément un nombre appartenant à l'intervalle
[0,1], avec pour chaque élément de S, une et une seule paire qui
lui est associée. F peut donc être associé à une
relation f sur Sx[0,1], telle que 1 puisse traduire une appartenance
complète à F, et 0 une non-appartenance complète à
F, et l'infinité de valeurs se trouvant entre 0 et 1 puisse traduire un
« degré d'appartenance » intermédiaire. S est alors
appelé un « univers de discours » pour le sous-ensemble flou F
et f est appelée « fonction d'appartenance » à F.
Ainsi, une vérité partielle devient possible à
représenter mathématiquement, et ce grâce au degré
d'appartenance.
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