Théorie de la Reconstruction Rationnelle. Programmes de Recherche et Continuité en sciences( Télécharger le fichier original )par Julien NTENDO BIASALAMBELE SJ Faculté de Philosophie St Pierre Canisius, KInshasa - Licence en philosophie 2007 |
III.2.5. Dialectique entre Histoire interne et histoire externeCette relation dialectique se fonde sur le fait que l'historiographie des sciences nécessite que l'histoire interne ou noyau dur, soit complété et protégé par l'histoire externe (qui est seconde alors que l'autre est première et la détermine) afin d'expliquer certains facteurs non rationnels résiduels de l'histoire des sciences. Les facteurs externes à la science ont un rôle - second, certes, mais non négligeable- à jouer dans l'explication du progrès scientifique. Sachant que la philosophie propre du programme détermine le choix rationnel des problèmes, toute reconstruction commence par reconstruire le fragment pertinent, les moments rationnels de l'histoire interne241(*). A première vue, les facteurs psychologiques subjectifs n'ont pas d'intérêt pour l'histoire interne. Au contraire, une reconstruction qui se borne à l'internalisme n'est pas une reconstruction rationnelle. Car, « Non seulement le succès ("interne") ou la défaite ("interne") d'un programme ne peuvent être jugés que d'un point de vue rétrospectif, mais très souvent il en est de même pour son contenu. L'histoire interne ne se réduit pas à la sélection de faits méthodologiquement interprétée : à l'occasion, elle peut aussi en présenter une version radicalement améliorée »242(*). En effet, chaque programme de recherche est marqué par un parti pris théorique, à tel point que l'histoire sans "parti pris théorique" est impossible243(*). Ce qui rend utopique la seule reconstruction interne. En effet, rapporte Lakatos, qu'ils recherchent des faits durs ou des généralisations inductives, qu'ils soient chasseurs d'expériences cruciales négatives ou de changements de problèmes progressifs ou dégénératifs, les chercheurs sont tous marqués par ce parti pris théorique244(*). C'est dire que ceux qu'un historien considère comme des facteurs externes constituent souvent un bon fil conducteur pour la méthodologie. Ces facteurs orientent de manière implicite et inavouée le travail du chercheur245(*). En définitive, le falsificationnisme, l'inductivisme, le conventionnalisme doivent être complétés par leur histoire externe, s'ils veulent rendre compte du progrès des sciences. Le débat sur la conjonction de l'externalisme et de l'internalisme pour la définition du progrès scientifique débouche sur celle de l'évaluation des logiques rivales et des reconstructions concurrentes au sein de l'histoire des sciences. Ainsi, le problème de la rationalité scientifique se comprend en relation avec la méthodologie de la reconstruction rationnelle, comme discussion critico-historique et des méthodologies par l'élite scientifique, et comme exigence d'intégration des acquis scientifiques précédents dans les nouvelles théories. * 241 Cfr. Lakatos, Histoire et méthodologie de sciences..., p. 210. Telle est la tendance de bon nombre des théories de la croissance de la connaissance, à se baser simplement sur l'histoire interne. D'où le danger d'une épistémologie désincarnée. Dans une telle manière de procéder, l'historien opère une sélection qui laisse de côté tout ce qu'il y a d'irrationnel dans le développement du programme. Idem, p. 211. * 242 Idem, p. 212. * 243 Cfr. Idem, p. 213. * 244 Ibidem. * 245 Lakatos reconnaît aussi que le problème majeur de l'histoire externe consiste à déterminer, à préciser les conditions psychologiques nécessaires pour rendre possible le progrès scientifique. Ce problème lui-même exige déjà une méthodologie. |
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