Introduction générale
Depuis toujours, l'homme essaie de domestiquer les animaux. Il
les élève, les transporte et les abat afin de se nourrir. Au
cours du temps, l'élevage des animaux, le transport et l'abattage ont
pris de nouvelles formes.
Au cours du XIXème siècle, les premières
législations sur la protection des animaux ont fait leur apparition en
Angleterre puis en Allemagne. Par la suite, chaque pays européen s'est
alors doté d'une législation visant à protéger les
animaux.
De nos jours, la notion de bien-être animal dans
l'élevage, le transport ou l'abattage prend tout son sens. Cette notion
vient de deux courants complémentaires : d'une part, de
l'évolution même de l'élevage, du transport et de
l'abattage au travers de l'industrialisation ; d'autre part, de
l'évolution du statut de l'animal, en tant qu'être vivant et en
tant qu'être sensible.
De nombreux progrès ont été
réalisés au XXème siècle en ce qui concerne
l'élevage, le transport et l'abattage des bêtes. De nombreux
travaux ont été réalisés dans le but de garantir
une viande de qualité. Néanmoins, les travaux en matière
de transport des animaux semblent aujourd'hui bien insuffisants.
Il est aujourd'hui primordial de faire évoluer tant la
législation européenne que les modes de transport des animaux
d'abattoirs. Dans ce mémoire de fin d'étude, alliant la
logistique et la qualité, nous nous intéresserons aux transports
des animaux en Europe. En effet, comment garantir une viande de qualité,
un marché sous-jacent évolutif sans prendre en compte des notions
de qualité totale ?
Comment un investissement en qualité des
transports (des animaux d'abattoirs) et une réglementation
renforcée peuvent-ils accroître le bénéfice pour les
entreprises et le consommateur ?
Afin de répondre à cette question, nous diviserons
le plan en trois parties.
Nous nous attarderons dans un premier temps sur la
réglementation actuelle du transport des animaux à
l'échelle européenne. Nous analyserons son évolution et la
remettrons en question.
Dans un second temps, nous expliquerons en quoi le transport
des animaux est une phase capitale dans la chaine logistique. Nous verrons son
influence sur la qualité de la viande et verrons comment l'optimiser.
Enfin, nous verrons quels peuvent être les avantages
(commerciaux, sanitaires et éthiques) d'un investissement en
qualité des transports sur le long terme du point de vue des
consommateurs et de l'entreprise.
I. Les règlementations européennes du
transport international d'animaux d'abattoir.
L'industrialisation et la spécialisation de
l'agriculture ont engendré l'apparition de nouveaux moyens de transport
bien plus performants et bien moins chers qu'auparavant. Ainsi,
l'élevage, le transport et l'abattage d'animaux ont atteints de
nouvelles dimensions.
Le transport n'a plus la dimension locale ou régionale
(voire même nationale) qu'il avait autrefois. De nos jours, plus de 300
millions d'animaux (porcs, bovins, ovins, caprins ou encore
équidés) par an sont transportés à travers l'Europe
voire même au-delà et la durée des trajets ne cesse
d'augmenter. En effet, pour des raisons économiques les petits abattoirs
tendent à disparaître (par le biais de rachat, de fusion ou
autres...) au profit de géants européens de l'abattage, plus
compétitifs puisqu'ils permettent d'accueillir un plus grand nombre
d'animaux dans des délais toujours plus courts. Les animaux sont donc
abattus de plus en plus loin de leur lieu d'élevage.
Il est important de souligner que plus un voyage est long plus
le risque est grand d'imposer à l'animal des souffrances : stress,
fatigue d'être debout, recherche de l'équilibre, chaleur,
humidité ou froid, abreuvement et affouragement rares voire
inexistants.
Au-delà de la protection « éthique »
des animaux, les longs transports affectent la qualité de la viande. Il
est donc impératif de les contrôler et de soumettre les
transporteurs à une législation stricte afin de préserver
l'animal et le consommateur.
Dans un premier temps, nous étudierons l'historique des
législations européennes au travers d'un tour d'horizon des
travaux effectués, puis, dans une seconde partie, nous nous attarderons
sur la règlementation européenne actuelle. Il conviendra enfin de
démontrer ses limites dans une dernière partie.
1. Tour d'horizon des travaux effectués
L'approche que nous avons en ce qui concerne la protection des
animaux (d'abattoirs ou de compagnie) est fortement influencée par nos
valeurs morales, éthiques et culturelles mais aussi par la
prospérité économique de la société.
Néanmoins, de manière générale,
les consommateurs européens se soucient tant de l'animal et de son
bien-être (condition d'hébergement, transport, abattage...) que de
la qualité de la viande qu'ils ont dans leurs assiettes.
Dés 1950, les associations et autres organisations de
protection des animaux ont revendiqué les souffrances animales. Sous
cette influence, les milieux politiques au niveau national, communautaire et
européen ont entrepris de réglementer la protection des animaux
lors du transport ou de l'abattage.
1.1 Les travaux du Conseil de l'Europe
Un certain nombre de textes français, communautaires ou
européens réglementent la protection de l'animal en transport
international.
Au début des années 1960, l'Assemblée
consultative du Conseil de l'Europe a entrepris des travaux sur les transports
internationaux d'animaux. Le 22 septembre 1961, le Conseil de l'Europe
émettait et adoptait une recommandation s'y référant.
Deux ans plus tard, le Comité des Ministres du Conseil de
l'Europe décidait de constituer un comité d'experts ayant pour
mission d'ériger un projet de convention.
La Convention européenne sur la protection des animaux
en transport international1 verra le jour le 13 décembre
1968. De 1969 à 2004, 24 Etats membres du Conseil de l'Europe
l'ont ratifiée (dont la France le 29 juillet 1974). La Convention est
entrée en vigueur le 20 février
1 La Convention européenne sur la protection des animaux
en transport international STE n°65
1971. La dite Convention règle tout ce qui concerne le
chargement des animaux en vue d'un transport international c'est-à-dire
la préparation des animaux, la conception des moyens de transport,
l'aptitude des animaux au transport, les conditions de transport, les
contrôles vétérinaires, le traitement des animaux, les
certificats et les aspects spécifiques aux différents modes de
transport (rail, route, bateau, avion).
A la fin des années 1980, cinq recommandations sur le
transport, notamment celui des chevaux, des porcs, des bovins, des moutons, des
chèvres et des volailles ont été détaillées.
Ces directives visaient principalement les transporteurs et toutes personnes
influant de prés ou de loin sur le transport international des
animaux.
En 1996, à la suite de vastes campagnes
médiatiques dénonçant de nombreuses
irrégularités dans le transport d'animaux en Europe, les Etats
membres du Conseil de l'Europe et signataires de la Convention
européenne sur la protection des animaux en transport international se
sont à nouveau réunis afin de réagir au plus vite. Ils ont
pris connaissance et approfondie la recommandation de l'Assemblée
parlementaire du Conseil de l'Europe. Dans cette recommandation,
l'Assemblée se disait: «Particulièrement
préoccupée par de nombreuses informations sur les mauvais
traitements aux animaux en transport international et la souffrance
infligée aux animaux par l'attente inutile aux frontières».
Et suggérait: «De demander aux Parties à la Convention
européenne sur la protection des animaux en transport international
d'améliorer d'urgence les conditions de transport international de
bétail et de renforcer les mécanismes de contrôle de la
mise en oeuvre de la législation».
Par la suite, les Etats signataires de la Convention ont
décidé d'amender l'ancienne convention et de l'adapter en
fonction des nouveaux éléments et des résultats
scientifiques obtenus au cours des trente années de travaux.
La nouvelle Convention Européenne sur la protection des
animaux en transport international2 est entrée en vigueur le
14 mars 2006 suite à la ratification de quatre Etats. Il s'agit d'une
convention-cadre s'appliquant à toutes les espèces d'animaux
vertébrés. Nous détaillerons le règlement CE 1/2005
relatif à la Convention Européenne sur la protection des animaux
en transport international dans la seconde partie.
2 La nouvelle Convention Européenne sur la protection des
animaux en transport international STCE n°193
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