III Partie : Etude comparative entre les normes
comptables internationales (IAS/IFRS) et celles du référentiel
OHADA.
Chapitre 1 : Champ d'application et fonctionnement des
normes adaptées par l'espace ohada.
1- Présentation des grandes lignes du SYSCOHADA
1.1 Historique du SYSCOHADA
L'idée d'harmoniser les droits africains est apparue
dans les années soixante, au lendemain des premières
indépendances. Cette idée a pu se réaliser mais avec
beaucoup de difficultés, chaque Etat africain avait sa propre
législation. Déjà le plan comptable français de
1957 était utilisé en France et dans certains pays africains,
jusqu'à l'avènement du plan 1982. Entre temps, il aura
été remplacé par les plans «OCAM« (1970),
ivoirien et sénégalais (1976). Mais jusqu'en 1997, il
était utilisé par endroits dans certains pays de la sous
région.
Au lendemain de la dévaluation du franc CFA, en 1994,
il a été créé une Union Economique et
Monétaire Ouest Africain (UEMOA) par le Bénin, le Burkina Faso,
la Côte d'Ivoire, le Mali, le Niger, le Sénégal et la Togo.
Les responsables des pays ont décidé alors, dans le cadre de
l'intégration économique qu'ils entendaient réaliser, de
se doter d'un référentiel comptable commun pour remplacer
dès le 1er janvier 1998, les plans comptables jusque
là appliqués dans les pays concernés. Le système
comptable commun proposé est appelé «Système
Comptable Ouest Africain« en abrégé, SYSCOA.
Pendant ce temps, les différents actes uniformes de
l'OHADA étaient appliqués au fur et à mesure de leur
adoption. L'Acte uniforme de l'OHADA portant organisation et harmonisation des
comptabilités des entreprises en date du 24 mars 2000 poursuit le
même objectif que le SYSCOA mais dans un espace plus étendu.
A ce jour, seize (16) pays ont signé et ratifié
le traité : Bénin- Burkina Faso- Centrafrique- Cameroun- Comores-
Congo- Cote d'Ivoire- Gabon- Guinée- Guinée Bissau- Guinée
Equatoriale- Mali- Niger- Sénégal- Tchad- Togo.
Après son instauration, le SYSCOA est devenu le
SYSCOHADA (Système Comptable de l' OHADA) qui se propose d'harmoniser
les règles comptables applicables dans les pays membres de l'OHADA.
C'est ainsi que la notion de «système« a été
adoptée au détriment de celle de «plan comptable« parce
qu'elle couvre mieux l'ensemble de la norme comptable formalisée par
l'acte uniforme relatif à la comptabilité qui s'intéresse
à la fois au traitement des données comptables, à
l'ensemble cohérent des comptes coordonnés, au modèle
d'analyse des activités et de la structure de l'entreprise et de son
environnement, à l'ensemble des principes ressortant des normes
comptables internationales, aux états financiers
différenciés en fonction de la taille de l'entreprise.
L'OHADA regroupe les Etats-Parties de l'UEMOA et ceux la CEMAC
(Communauté Economique et Monétaire d'Afrique Centrale).
Depuis son entrée en vigueur, l'OHADA s'est fixé
comme objectif de converger vers les normes internationales mises en place
depuis 1973 par l'International Accounting Standards
Comittee (IASC) qui est devenu en 1977 l'International Federation
of Accountants qui regroupe certains pays des écoles continentales et
anglo-saxonnes.
2 Principes comptables
Toute comptabilité utilise implicitement ou
explicitement un certain nombre de principes, postulats, et conventions
regroupés ici sous l'appellation générale « principes
comptables de base ».
La plupart de ces principes sont universellement admis et
utilisés. Quelques-uns ont une diffusion plus limitée et sont
principalement appliqués dans les pays anglo-saxons.
Dans le plan comptable français 1957 ou OCAM, il n'a
pas été fait une référence explicite à ces
principes. Dans le Plan français de 1982, les principes retenus sont
directement ou indirectement cités, sans être commentés ou
explicités. Il en est résulté une pratique comptable
parfois défaillante, souvent difficile au niveau de
l'interprétation des textes, hésitante dans l'application et non
homogène dans l'espace comptable concerné ; d'où
l'importance d'une présentation explicite des principes retenus.
La connaissance de ces principes permet de comprendre
l'objectif général assigné aux états financiers
dans toutes les normes comptables : donner du patrimoine, de la situation
financière et du résultat de l'entreprise une « image
fidèle », une présentation non trompeuse, loyale et
claire.
Le SYSCOA retient huit « principes comptables »,
tous mentionnés dans le règlement. Ces huit principes font
l'unanimité dans les normes internationales ; ce n'est pas le cas d'un
neuvième dit de la prééminence de la réalité
sur l'apparence, d'essence anglo-saxonne. Ces différents principes sont
:
· La prudence
Ce principe ou règle est énoncé
d'entrée dans l'article 3 : « la comptabilité doit
satisfaire, dans le respect de la règle de la prudence, aux obligations
de régularité, de sincérité et de transparence
inhérente à la tenue, au contrôle, à la
communication des informations qu'elle a traitées. »
La prudence, « appréciation raisonnable des
évènements et opérations » (art. 6), s'illustre plus
facilement qu'elle ne se définit ; sa finalité est
d'éviter de transférer sur des exercices ultérieurs des
risques nés de l'exercice et susceptible d'entraîner des pertes
futures. La règle de la prudence est destinée à
protéger les utilisateurs externes des états financiers et les
dirigeants contre les illusions qui pourraient résulter d'une image non
prudente ou trop flatteuse de l'entreprise.
La règle de la prudence crée une
dissymétrie entres les probabilités de pertes et celles de gains,
car elle conduit à enregistrer systématiquement les
premières et à omettre tout aussi systématiquement les
secondes : toute perte probable doit être entrée dans les charges
de l'exercice, alors que les gains ne sont notés en produits que
lorsqu'ils sont réalisés (existence d'un contrat de vente).
Une illustration très éclairante du principe de
prudence est donnée dans le SYSCOA par la comptabilisation des
écarts de conversion à la clôture de l'exercice : les gains
probables de change ( sur la base des cours de change à la clôture
de l'exercice) sont notés au bilan dans un poste spécifique du
passif (hors capitaux propres), mais ne sont pas enregistrés dans les
produits ; en revanche les pertes de change à cette date, notées
au bas de l'actif en tant qu'écarts de conversion, sont inscrites en
charge sous forme de charges provisionnées.
Le principe de prudence ne devrait pas surprendre les
entreprises, puisqu'il figurait déjà dans l'origine conceptuelle
et technique des plans comptables antérieurs. Toutefois son application
est en pratique délicate car il convient d'apprécier
raisonnablement les faits et les risques.. Il faut en conséquence
rappeler aux responsables des comptes que :
- la prudence doit être raisonnablement
intégrée aux analyses faites à la clôture de
l'exercice : une insuffisance ferait courir des risques aux tiers utilisateurs
; mais un excès risquerait de fausser l'image et conduirait à des
provisions fictives, donc à la création de réserves
latentes et occultes ;
· La permanence des méthodes
Le principe de permanence des méthodes (de
présentation et d'évaluation) est indispensable aux comparaisons
des états financiers dans le temps. La comparabilité des
états financiers annuels successifs qui est nécessaire aux
analyses des utilisateurs repose sur cette permanence.
Ce principe est rappelé par les articles 34 et 40 du
règlement. Comme le précédent il n'est pas nouveau pour
les entreprises. Toutefois, les conditions de son application comportent des
modifications par rapport aux plans comptables précédents.
1- Nature des changements des méthodes
Les circonstances d'un changement de méthode peuvent
être classées en : 1.1 Changements d'origine externe à
l'entreprise
Il s'agit essentiellement :
- de changements intervenus dans la législation ou la
réglementation comptable, et qui s'impose à l'entreprise ;
- Le type même de ces changements est le passage d'un
plan comptable à l'autre (exemple passage du plan OCAM au SYSCOA), ou la
parution d'une nouvelle disposition règlementaire concernant le mode de
comptabilisation d'une opération (provisions pour retraites par exemple)
ou la présentation d'un des états financiers ;
- de modification de la législation fiscale,
entraînant pour l'entreprise un changement de présentation ou de
comptabilisation, afin de pouvoir bénéficier des avantages
fiscaux y attachés.
Le même type de ces modifications est le système
des « amortissements dérogatoires », non justifiés au
plan économique, mais que l'entreprise a tout intérêt
à comptabiliser pour bénéficier de leur déduction
fiscale. A cet égard, pour éviter l'altération du
résultat économique par l'impact de ces changements
d'opportunité fiscale, le SYSCOA prévoit l'inscription de cet
impact non dans le résultat d'exploitation, mais dans le résultat
« hors activités ordinaires ».
Ainsi, le résultat net est-il déformé par
cet impact, mais non le résultat courant, dit « résultat des
activités ordinaires » ;
- de modifications du taux de certains impôts, de
créations ou de suppression d'impôts... Exemples : passage de
l'impôt sur le bénéfice de 33% à 25%,
création d'une taxe parafiscale.
1.2 Changements d'origine interne décidés par
l'entreprise
Ces changements peuvent porter sur :
- la présentation des états financiers (cas assez
rare) ; - les méthodes d'évaluation.
Le cas de ces méthodes d'évaluation sont de loin
les plus fréquentes et entraînent toujours une modification du
résultat, qui n'est plus ce qu'il aurait été si l'on
n'avait pas changé de méthodes. Exemples :
- décision de dégager désormais un «
bénéfice partiel » sur opérations pluri exercices ; -
modification d'un plan d'amortissement ;
- pour l'évaluation des stocks, passage de la
méthode de « première entrée, première sortie
» à celle du « coût moyen pondéré
après chaque entrée ».
Les changements de méthodes d'évaluation n'ont pas
toutes les mêmes conséquences au plan de la règle de non
changement de méthode.
1.3 L'application de la méthode et ses incidences sur
le résultat
Tout changement de méthode comptable doit, dès
lors qu'il induit des modifications significatives dans les états
financiers de l'exercice, ou est susceptible d'en induire au cours d'exercices
suivants, faire l'objet d'une information dans l'état annexé.
Par ailleurs, l'incidence de changements sur les capitaux propres
(au sens large) peut s'exercer :
- sur le résultat de l'exercice au cours duquel est
intervenue la modification (cas général en application du
principe «d'intangibilité du bilan » : identité bilan
d'ouverture/ bilan de clôture) ;
- sur les capitaux propres à la clôture de
l'exercice (cas particulier, exceptionnel).
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