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TIC et développement local au cameroun

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par Carine Laure Koudjou Talla
Université Paris X Nanterre - Master2 pro sciences de l'information et de la communication option conception et gestion de projets numériques territoriaux 2007
  

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IV -- Situation de la pauvreté au Cameroun et stratégies mises en place (extrait du DSRP 2003)

Le Cameroun est entré dans le troisième millénaire avec des atouts importants mais aussi des défis majeurs à relever pour diversifier son économie, approfondir la croissance et améliorer les conditions de vie de ses populations. Au nombre des atouts, on compte un cadre macroéconomique stable après des efforts soutenus d'ajustement, des conditions plus incitatives pour le développement du secteur privé, une position de pôle de développement dans un cadre sous-régional de plus en plus ouvert, une population relativement jeune et éduquée, capable d'absorber les nouvelles technologies et d'améliorer la productivité, et une grande stabilité politique et institutionnelle. Ces atouts constituent un « capital social » qui pourra permettre au Cameroun d'attirer l'investissement étranger, de diversifier l'économie et de relever le rythme de croissance à la mesure des besoins et des attentes des populations.

Le Cameroun aura bien besoin de tout ce capital pour faire face à un défi majeur, celui de combler un « déficit social » important qui, en l'absence d'attention adéquate et soutenue, fragiliserait à la fois les fondements de la croissance à moyen terme et la cohésion sociale. En effet, malgré des gains importants enregistrés lors de la deuxième moitié des années 1990, encore 4 Camerounais sur 10 en 2001 vivent en dessous du seuil de revenu annuel de 232.547 FCFA (soit environ 1 dollar par personne et par jour ou 19.000 francs FCFA par mois) jugé nécessaire pour permettre à un individu à Yaoundé de s'offrir un « panier minimal » de dépenses essentielles alimentaires et non alimentaires, notamment les dépenses de santé, d'éducation et de logement. D'une manière générale, les indicateurs de développement humain se sont considérablement dégradés au cours des années de crise notamment dans le secteur de l'éducation et de la santé. Les bonnes performances économiques des dernières années ne suffisent pas encore à redresser cette situation, même si l'incidence de la pauvreté a commencé à reculer.

Dans l'éducation, le taux d'accès à l'enseignement primaire des enfants en âge scolaire s'est amélioré pour atteindre 95% en 2001 suite entre autre à la suppression des frais d'écolage dans le primaire public. Toutefois, seulement un enfant sur deux (56%) finit le cycle primaire à cause d'un taux de redoublement élevé de 25% en moyenne sur le cycle et 60% de ceux qui achèvent le primaire réussissent la « transition » vers le secondaire. Ces faibles « taux de survie » et de « transition » révèlent des problèmes structurels préoccupants et entraînent un coût économique et social considérable qui croît avec la pression démographique. De même,

l'état de santé des populations s'est dégradé par rapport aux débuts des années 1990. Le taux de mortalité infantile a augmenté de 12 points entre 1991 et 1998, le taux de malnutrition chronique pour les enfants de 12 à 23 mois a progressé de 23% à 29%, le taux d'accouchements assistés par un personnel qualifié a régressé de 5 points au cours de la même période. Le taux de prévalence du VITI/SIDA a progressé de façon alarmante, de 2% à 11,8% de la population de 15 à 49 ans entre 1991 et 2002. Dans le même temps, les infrastructures de base se sont aussi dégradées avec la crise, et l'accès des populations à la route, à l'électricité et à l'eau potable demeure encore bien en deçà des attentes des populations et des exigences de la croissance économique.

Ces problèmes sont accentués par la croissance particulièrement rapide de la population urbaine (5% environ). Par ailleurs, la population camerounaise est relativement jeune (42% de la population a moins de 14 ans et 72% a moins de 30 ans) et fortement concentrée en milieu urbain. Ceci constitue à la fois un atout pour l'économie, mais aussi une pression additionnelle sur les services sociaux, les infrastructures et le marché de l'emploi. Sans une attention collective adéquate et soutenue, ces développements risquent de transformer les grands centres urbains en zones de pauvreté et d'insécurité ; ce qui fragiliserait le capital social et compromettrait les atouts compétitifs du Cameroun face au défi de la mondialisation.

Le Gouvernement est bien conscient de l'enjeu et est déterminé à mobiliser toutes les forces vives du pays autour d'une stratégie viable pour un développement humain durable au Cameroun. Aussi, l'objectif de la nouvelle génération de politiques économiques et sociales envisagées par le Gouvernement est-il d'une part de consolider les acquis des programmes passés afin de relever le rythme de croissance, et d'autre part de renforcer la sphère sociale afin que les bonnes performances économiques se traduisent par une nette amélioration des conditions de vie des populations. A cet effet, le gouvernement a élaboré un Document intérimaire de Stratégie de Réduction de la Pauvreté (DSRP-I) en août 2000. La mise en oeuvre du DSRP-I a été accompagnée de la production d'une série de documents de stratégies sectorielles, notamment pour l'éducation, la santé, le secteur rural et les infrastructures de base (routes, eau), etc.

W.1 - La pauvreté au Cameroun

Afin de formuler une stratégie efficace de réduction de la pauvreté, les autorités camerounaises ont mené deux séries importantes de travaux complémentaires, qui ont permis d'évaluer l'ampleur de la pauvreté et d'en identifier les caractéristiques ainsi que les déterminants. En premier lieu, des analyses quantitatives fouillées ont été faites à partir des résultats des deux grandes Enquêtes Camerounaises Auprès des Ménages (ECAM I, 1996, et ECAM II, 2001). Cette approche quantitative a été complétée par une évaluation qualitative de la pauvreté et de ses déterminants, qui repose sur une série de consultations participatives auprès des populations menées sur l'ensemble du territoire national.

L'analyse quantitative révèle notamment que : (i) le taux de pauvreté monétaire au Cameroun demeure encore élevé à 40,2% de la population en 2001, bien qu'en régression significative de 13,1 points par rapport au niveau de 1996, (ii) la pauvreté au Cameroun varie considérablement selon les régions, passant du simple au double entre des zones urbaines où l'incidence est de 22% en moyenne et des zones rurales où elle atteint 50% ; (iii) la pauvreté touche particulièrement les « exploitants agricoles » (57%), les « dépendants agricoles informels » (54%) et ceux du secteur informel et les sans-emplois en zones urbaines (40%). Les résultats mettent aussi en exergue l'importance de l'éducation et des services d'infrastructure. Un pauvre sur deux vit dans un ménage où le chef est sans instruction

primaire et l'accès aux services sociaux de base (éducation, santé, eau, routes) est plus difficile pour les pauvres comparativement aux non pauvres.

L'analyse de la dynamique de la pauvreté indique que les gains en terme de réduction de l'incidence de la pauvreté entre 1996 et 2001 (13,1 points) sont plus le fait de la croissance (11,8 points) que celui de la redistribution (1,8 points). Enfin, l'analyse quantitative des déterminants confirme l'importance de la zone agro-économique, de l'occupation professionnelle, de l'éducation, de la disponibilité et de l'accès aux services d'infrastructure dans la dynamique de la pauvreté.

Les principaux résultats de l'analyse quantitative sont confortés par les informations tirées des consultations participatives que les autorités ont mené auprès des populations. En particulier, les populations camerounaises perçoivent bien la pauvreté d'abord comme un état de dénuement matériel caractérisé notamment par : (i) l'insuffisance de ressources pour satisfaire des besoins essentiels ; (ii) l'indisponibilité des services d'infrastructure ou une grande difficulté d'accès à ceux-ci, principalement l'eau, les routes, l'énergie électrique, et aux services sociaux, notamment la santé et l'éducation. Les populations perçoivent aussi la condition de pauvreté comme conséquence d'un « dysfonctionnement social », notamment la dépravation des moeurs, la perte de respect de soi, de solidarité familiale, les préjugés et attitudes discriminatoires à l'encontre de certains groupes ethniques ou sociaux. Enfin, elles associent bien la condition de pauvreté à l'insécurité, au manque de protection contre les abus, à l'absence de droits et à l'inaccessibilité aux services légaux.

Les consultations participatives ont aussi permis de recenser les recommandations des populations concernant les axes stratégiques de lutte contre la pauvreté. Les populations ont mis l'accent sur l'importance d'améliorer leurs capacités à générer des activités économiques afin de se « prendre en charge », d'appuyer les filières agricoles de production et de faciliter l'insertion des jeunes et des pauvres dans le circuit économique par des actions ciblées. Elles ont aussi relevé la nécessité de résoudre les problèmes d'accès à l'eau, en particulier dans la région Nord du pays, de développer les routes pour désenclaver les régions et faciliter la participation des pauvres aux activités marchandes. Les populations ont recommandé que les autorités accordent une plus grande attention et engagent plus de ressources pour améliorer l'éducation et combattre les maladies contagieuses, en particulier la pandémie du VIH/SIDA et le paludisme qui compte pour l'essentiel de la morbidité et de la mortalité au Cameroun.

IV.2 - Les principaux axes stratégiques du DSRP

Les résultats des analyses quantitatives et qualitatives précédentes ont permis au Gouvernement d'identifier les grands axes de la stratégie à moyen terme de réduction de la pauvreté, en cohérence avec les grands objectifs de développement auxquels le Cameroun à souscrit. Les sept axes principaux de la stratégie sont :

Axe 1 : La promotion d'un cadre macro-économique stable

Axe 2 : La diversification de l'économie pour renforcer la croissance

a) Le secteur rural : Appuyer les opérateurs pour favoriser la production' assurer des revenus et la sécurité alimentaire aux populations.

(i) l'appui à la modernisation de l'appareil de production par la facilitation des financements à
moyen et long termes, et le renforcement des ressources humaines dans le secteur grâce à des

rénovations dans la formation professionnelle, (ii) le développement des infrastructures dans le secteur rural (routes, piste, eau, etc.), (iii) la restructuration du cadre institutionnel et la promotion d'un environnement incitatif et (iv) la gestion durable des ressources naturelles.

b) L'industrie manufacturière : Favoriser la compétitivité générale et appuyer l'essor des filières agroalimentaire' textile et transformation du bois pour relever la contribution de l'industrie à la croissance.

c) Les services : Favoriser le développement du tourisme' des technologies de l'information et de la communication' des transports et des finances.

Pour ce qui est des technologies de l'information et de la communication, le Gouvernement poursuit une stratégie à deux volets. Un premier volet concerne la promotion du secteur afin de favoriser son essor. A cet égard, le Gouvernement a créé une Agence Nationale des Technologies de l'Information et de la Communication (ANTIC, Avril 2002) pour promouvoir le développement des centres d'information (cybercafé) et faciliter leur accès aux populations. Le gouvernement considère aussi des mesures fiscales (réduction de droits et taxes à l'importation de matériel informatique) pour favoriser la croissance du secteur. Un second volet concerne l'accès des populations aux services d'information. A cet effet, les autorités ont élaboré un plan « ambitieux » comprenant l'ouverture de centres communautaires multimédia dans les provinces afin de permettre aux populations enclavées d'avoir accès, via Internet, aux informations utiles dans les domaines de la santé, de l'éducation, de l'agriculture, de l'élevage et de l'environnement. Elles envisagent également l'installation de nouvelles radios rurales qui viendraient s'ajouter aux quinze stations déjà opérationnelles et qui seront financées par le PNUD et l'UNESCO. Les autorités entendent par ailleurs mettre en oeuvre un plan sectoriel de communication pour appuyer la stratégie nationale de lutte contre le VIH/SIDA.

Axe 3 : Le renforcement du secteur privé comme le moteur de la croissance

Le Gouvernement se donne pour priorités : (i) d'améliorer l'environnement physique des entreprises en accélérant le développement des infrastructures de transport, des télécommunications, de fourniture et de distribution d'énergie, (ii) d'améliorer le cadre institutionnel et réglementaire pour accroître l'efficacité des prestations publiques aux entreprises, (iii) de garantir la sécurité juridique des investissements par l'amélioration du fonctionnement du système judiciaire et l'application du cadre juridique des affaires, et en particulier celui de l'OHADA, (iv) de promouvoir la pénétration des produits camerounais sur les marchés extérieurs, (v) de consolider les mécanismes de concertation et de dialogue avec les organisations du secteur privé.

Au-delà de cette stratégie générale, le Gouvernement entend appuyer et utiliser le secteur privé, notamment les PME/PMI (Petites et moyennes entreprises/Petites et moyennes industries) comme un instrument privilégié pour créer des richesses et développer les services sociaux afin de combattre la pauvreté. En cela, la stratégie gouvernementale de développement du secteur privé comporte des axes spécifiques d'appui ciblés sur les PME et les micro-entreprises. Les objectifs sont de :(i) renforcer l'implication du secteur privé dans le développement des capacités, notamment dans l'offre de services sociaux tels l'éducation et la santé ; (ii) renforcer la compétitivité des PME/PMI à fort potentiel de croissance; (iii) mobiliser davantage des ressources financières en faveur des PME/PMI et des micro- entreprises, par la diversification et l'adaptation des instruments financiers, ainsi que le développement de la micro-finance ; (iv) appuyer l'organisation du sous-secteur des

PME/PMI et de l'artisanat afin de faciliter le partenariat, par exemple la promotion d'un programme de développement des réseaux ou groupes (networks/clusters) de PME, de micro- entreprises et de pépinières d'entreprises ; et (v) améliorer l'impact du programme de privatisation sur la sous-traitance des services aux PME/PMI. Le Gouvernement poursuivra par ailleurs sa politique d'appui institutionnel de consolidation du secteur financier traditionnel et de la micro-finance dans le nouveau cadre réglementaire régional.

Axe 4 : Le développement des infrastructures pour appuyer les secteurs productif et social

Les axes prioritaires de la stratégie de développement des infrastructures : (i) le renforcement du réseau routier, en volume comme en qualité, (ii) l'amélioration de l'accès à l'eau potable, (iii) l'extension de la couverture du territoire en réseau électrique et (iv) la résolution rapide des insuffisances actuelles dans la production électrique constituent

Dans le même temps, il s'agit de favoriser la création d'activités économiques et d'emploi pour les groupes défavorisés à travers l'utilisation des techniques à haute intensité de main d'oeuvre (HIMO) dans les programmes d'entretien et de réhabilitation de routes et des pistes rurales. Ces objectifs se déclinent en plusieurs axes stratégiques, notamment : (i) des investissements nouveaux pour l'extension du réseau routier, (ii) la réhabilitation des réseaux en mauvais état, et l'entretien régulier de l'ensemble du réseau routier, (iii) une programmation plus efficace à moyen et long termes accompagnée de mécanismes de financement appropriés, et l'amélioration des capacités d'exécution tant privée que publique.

Axe 5 : L'accélération de l'intégration régionale

Axe 6 : Le renforcement et la valorisation des ressources humaines

(i) la promotion de l'éducation de base pour tous, (ii) l'amélioration de l'état de santé de la population en général et celui des mères et des enfants en particulier, (iii) l'amélioration des conditions de vie en zones urbaines, (iv) la lutte contre le chômage et l'insertion des populations défavorisées dans le circuit économique, (v) la promotion de l'égalité et de l'équité entre les sexes, et (vi) l'amélioration des conditions nécessaires à l'épanouissement et à la sauvegarde de la famille et de l'individu.

Axe 7 : Améliorer la gouvernance, l'efficacité des services administratifs et le cadre institutionnel

La promotion de la bonne gouvernance et la lutte contre la corruption constitueront également des facteurs essentiels de la réussite du programme de réduction de la pauvreté. Les populations ont en effet cité, lors des consultations participatives, la corruption et plus généralement les manquements à la gestion saine des affaires publiques comme déterminants importants de la pauvreté au Cameroun. Dans le cadre de la mise en oeuvre du programme national de gouvernance (PNG) adopté en juin 2000, les autorités mettront un accent particulier sur (i) le renforcement de la transparence et de la responsabilisation (« accountability »), (ii) l'amélioration de l'offre de services sociaux de base, (iii) le renforcement de l'Etat de droit et de la sécurité juridique et judiciaire des investissements, (iv) la poursuite du processus de décentralisation/déconcentration de la gestion des affaires publiques et (v) l'amélioration de l'information du citoyen sur la gestion des affaires publiques.

Tableau 1 : Synthèse de l'Etat de pauvreté du Cameroun

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"L'imagination est plus importante que le savoir"   Albert Einstein