II. La mobilisation des acteurs
Bien qu'une réflexion soit en cours sur le dispositif
d'aides octroyées aux personnes handicapées pour leur permettre
de réaliser pleinement leurs choix de vie63, il serait avant
tout souhaitable de considérer d'égal à égal le
travail des « salariés handicapés » et des «
salariés normaux ». En effet, d'un point de vue purement
sociologique, un grand pas en avant serait accompli, pour mieux intégrer
ces personnes dans la société, si la réticence des
salariés à travailler avec eux et celle des employeurs à
les embaucher dans l'entreprise devenait inexistante. A quand cette
évolution ?
Tout le problème découle alors de cette
inégale répartition du travail et d'accès à
l'emploi en milieu ordinaire quand, pour autant, l'accès à
l'emploi leur est possible et autorisé.
Un certain nombre de personnes s'avèrent indispensables
au maintien ou à l'insertion de la personne handicapée au sein de
l'entreprise. Cette mobilisation d'acteurs intéresse deux niveaux. Celui
des acteurs de l'entreprise (A), qui, dans le cadre de la prise en compte
pluridisciplinaire de la santé au travail, doivent concevoir des actions
programmées permettant la prévention des situations
handicapantes, après une analyse dûment réalisée.
Celui, également, des acteurs institutionnels (B), dont l'enjeu est
d'optimiser les moyens et les démarches qu'ils ont la
responsabilité de mettre en oeuvre.
A. Acteurs de l'entreprise : actions programmées de
prévention des situations handicapantes
Le maintien dans l'emploi des personnes handicapées
bénéficie d'un cadre légal. Mais l'arsenal juridique ne
peut à lui seul résoudre tous les problèmes qui, de plus,
concernent aussi des salariés ne relevant pas de ce statut. Environ 4,5
millions de personnes souffrent d'une limitation de leur capacité de
travail, pour lesquelles l'entreprise doit mettre en oeuvre un dispositif
adéquat, avant même que le développement de son
activité ne s'en trouve lui-même "handicapé".
Tous les acteurs de l'entreprise concourent alors au
développement d'une dynamique en faveur de l'insertion professionnelle
et du maintien dans l'emploi des salariés handicapés.
63 Source : La documentation Française
1:1 Le salarié handicapé
Le salarié handicapé, doit avant toute chose
avoir une certaine volonté de travailler, de conserver son emploi et
doit pouvoir se projeter dans un avenir professionnel. Certains ne font pas
face à la réalité car ils veulent continuer à
travailler comme avant leur accident. Le prise de conscience de leur sort est
donc difficile. La première chose qui doit être effectuée
pour intégrer un tel salarié c'est de vérifier sa
motivation à travailler.
1:1 L'employeur
L'employeur, quant à lui, peut avoir tout type de
réaction. Dès lors, c'est par la discussion que son avis
négatif pourra changer, afin de ne pas s'arrêter à la
première impression. Car pour beaucoup d'employeurs, handicapé
veut dire incapable de travailler. Or, nous l'avons vu
précédemment, c'est loin d'être le cas. Alors pour ne pas
se limiter à cette situation, l'employeur après avoir pris
conscience de cela en ayant une discussion avec des organismes64 et
le médecin du travail, pourra sous forme d'un projet par exemple, voir
si la création de nouveaux postes adaptés à la personne
handicapée est possible au sein de son entreprise.
1:1 Le collectif de travail
C'est ensuite le collectif de travail qui développera
ou non une ambiance favorable à l'intégration d'un salarié
handicapé. En effet, les autres salariés ont un rôle
très important dans l'acceptation de la personne et dans sa
réintégration car c'est ce collectif qui amène un peu de
souplesse dans la réalisation des taches. Leurs attitudes peuvent
être extrêmement variables. Il ne faut pas compter toutefois sur
les premières bonnes réactions pour trouver une solution durable
ou pour stabiliser une situation. Parfois, le rejet est immédiat,
l'insertion ou réinsertion n'en sera que plus difficile voire impossible
alors, même avec la volonté de l'employeur.
64 ADAPT
![](insertion-maintien-personnes-handicapees-milieu-ordinaire-de-travail43.png)
L'insertion et le maintien des personnes handicapées en
milieu ordinaire de travail 1:1 Le délégué syndical
Le délégué syndical a un rôle
primordial en matière d'information et de sensibilisation concernant
l'emploi des travailleurs handicapés. Il prend l'initiative de
négocier des accords d'entreprise65 en faveur des
travailleurs handicapés.
1:1 Le Comité d'Entreprise
Le comité d'entreprise lui aussi joue un rôle
important en la matière. En l'absence de comité d'entreprise, les
attributions relatives à l'information et la consultation du
comité concernant l'emploi des travailleurs handicapés reviennent
aux délégués du personnel66.
Le comité d'entreprise doit recevoir communication dans
le rapport annuel unique du bilan des actions entreprises ou projetées
dans l'entreprise en faveur des travailleurs handicapés en
matière d'embauche, d'adaptation, de réadaptation ou de formation
professionnelle67.
Le rapport annuel doit comporter la déclaration
annuelle d'emploi de personnes handicapées prévue à
l'article L.323-8-5 à l'exclusion de la liste des
bénéficiaires de l'obligation d'emploi employés
mentionnée au 1° de l'article R.323-9-1 du code du
travail68.
Le comité reçoit des informations
économiques et professionnelles spécifiques concernant les
travailleurs handicapés et assimilés. Il doit en effet avoir
communication de la déclaration annuelle obligatoire d'emploi de
travailleurs handicapés69. Toutefois, en vertu du
décret n°2003 -- 886 du 15 septembre 2003, le document transmis ne
comprend pas la liste des bénéficiaires de l'obligation d'emploi
employés mentionnée au 1° de l'article R.323-9-1 du code du
travail.
Le comité veille au respect de la loi du 10 juillet 1987
et est en mesure d'établir le bilan des embauches et la
réalisation ou non du quota de 6%.
Dans les entreprises occupant au moins 200 salariés, le
comité d'entreprise constitue une commission de la formation
chargée notamment d'étudier les questions relatives à
l'emploi et au travail des personnes handicapées70. Les
rapports de cette commission sont soumis à la délibération
du CE.
65 Cf. Supra, Partie I, Chapitre II, Paragraphe II
66 Article L.422-5 alinéa 1 du code du
travail
67 Article L.432-4-2 5 du code du travail ;
Deuxième alinéa du 2.5 du II de l'Article R.462-19
68 Décret n°2003 -- 886 du 15 septembre
2003
69 Article R.323-10 du code du travail
70 Article L.434-7 du code du travail
![](insertion-maintien-personnes-handicapees-milieu-ordinaire-de-travail44.png)
En cas d'embauche, en liaison avec le CHSCT71, le
comité d'entreprise doit être consulté sur les mesures
prises « en vue de faciliter la mise ou la remise au travail des
accidentés du travail, des invalides de guerre et assimilés, des
invalides civils, des travailleurs handicapés, notamment sur les mesures
relatives à l'obligation d'emploi de ces catégories de
travailleurs. La consultation porte sur les conditions d'accueil, la
période d'essai et l'aménagement des postes de travail
»72.
Le comité doit aussi être consulté et
donner son avis sur les mesures concernant l'aide financière pouvant
être accordée par l'Etat afin de faciliter la mise ou la remise au
travail de personnes handicapées en milieu ordinaire de travail dans le
cadre de l'article L.323-9 du code du travail ou dans le cadre d'un contrat de
sous-traitance et d'embauche progressive de travailleurs handicapés
conclu avec un établissement de travail
protégé73; sur les contrats de mise à
disposition de travailleurs handicapés employés en ateliers
protégés74.
Chaque trimestre dans les entreprises d'au moins 300
salariés et chaque semestre pour les autres, le comité
d'entreprise doit pouvoir prendre connaissance des contrats passés avec
les établissements de travail protégé lorsqu'ils
prévoient la formation et l'embauche de travailleurs handicapés
dans l'entreprise75.
Il est à noter que les consultations du CE portent sur les
problèmes généraux relatifs à l'emploi des
travailleurs handicapés dans l'entreprise mais non sur chaque cas
individuel76.
Le CHSCT
Au-delà de ses prérogatives propres, le CHSCT
doit porter une attention particulière sur les conditions de travail des
personnes handicapées employées au sein de l'entreprise et
veiller à la prévention de la santé de tous les
salariés.
Il doit être consulté sur les mesures prises en
vue de faciliter la mise, la remise ou le maintien au travail des
accidentés du travail, des invalides de guerre, des invalides civils et
des travailleurs handicapés notamment sur l'aménagement des
postes de travail77.
71 Comité d'Hygiène de
Sécurité et des Conditions de Travail, Cf. Infra.
72 Article L.432-3 alinéa 5 du code du
travail
73 Article L.432-3 alinéa 5 du code du
travail
74 Article D.323-25-3 alinéa 4
75 Article L.432-4-1 du code du travail
76 Cass. Soc. 26 mai 1981, Bull. civ. V n° 466
77 Article L.236-2 alinéa 10 du code du
travail
![](insertion-maintien-personnes-handicapees-milieu-ordinaire-de-travail45.png)
![](insertion-maintien-personnes-handicapees-milieu-ordinaire-de-travail46.png)
![](insertion-maintien-personnes-handicapees-milieu-ordinaire-de-travail47.png)
Dans les entreprises de plus de 50 salariés, il
émet un avis sur les conditions d'accueil, d'aménagement des
postes de travail. Tandis que les entreprises de moins de 50 salariés,
ce rôle incombe aux délégués du personnel.
Il doit par ailleurs être consulté sur la
création, dans les entreprises de plus de 5000 salariés, d'un
atelier spécial de rééducation ou de
ré-entrainement au travail et/ou sur l'aménagement d'ateliers ou
de postes spéciaux de rééducation ou de
ré-entrainement au travail78
Il convient de soulever que les entreprises se mobilisent et
s'efforcent le plus souvent de développer leurs actions de maintien pour
l'ensemble des salariés en difficulté. Que pense-t-elle de leur
initiative ?79
La préoccupation première d'un responsable de
production est alors de composer au quotidien en tenant compte des restrictions
d'aptitudes de l'effectif. Quand le nombre de personnes en difficulté
est important, il finit par entraver le déroulement ou le
développement de l'activité. Cependant, ce type de
problème ne naît pas spontanément.
Révélé à l'occasion d'une évolution du
volume ou de la nature de la production, il est bien souvent le résultat
d'un écart qui s'est creusé au fil du temps entre les ressources
et le potentiel humain requis par cette évolution. D'où la
nécessité évidente d'anticiper et de mettre en place une
véritable politique de maintien qui s'avère de plus en plus
pertinente dans un contexte de vieillissement de la population au travail.
Ainsi, certains groupes industriels, notamment dans le secteur automobile,
oeuvrent dans le sens d'une accessibilité des situations de travail au
plus grand nombre (actions de correction et de conception des moyens de
production, formation). Dans une logique plus prospective, ils renforcent
également leurs politiques de prévention des risques
professionnels et de gestion des compétences et des qualifications.
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