Le Règlement des conflits entre actionnaires dans les sociétés anonymes de l'espace OHADA : analyse et perspectives( Télécharger le fichier original )par Julien Hounkpe Université d'Abomey Calavi (Bénin) - DESS Droit des Affaires et Fiscalité 2006 |
CHAPITRE II : LES NOUVEAUX MECANISMES DE RESOLUTION DES CONFLITS ENTRE ACTIONNAIRES
Lorsque les pactes d'actionnaires ne jouent pas leur rôle pacificateur, les conflits entre actionnaires peuvent conduire à la solution radicale de la dissolution judicaire pour justes motifs (art. 1844-7, 5° Civ), dont on sait toutefois l'hostilité de la jurisprudence94(*). Moins radical, l'administration provisoire constitue une alternative à laquelle les plaideurs recourent volontiers. Quoique consentie avec moult précaution, uniquement en cas de risque manifeste d'atteinte sérieuse à l'intérêt social, elle intègre la perspective d'un dessaisissement du droit de présider aux affaires de la société. A côté de ces mécanismes traditionnels pour sortir de la crise, il existe deux solutions plus modernes, fondées sur la disparition de l'actionnariat d'une des parties au conflit. Les procédures d'exclusion et de retrait d'un actionnaire sont mises en oeuvre lorsque les circonstances révèlent une dégradation irrémédiable des relations entre actionnaires. L'exclusion d'un actionnaire peut être initiée par ceux qui entendent rester dans la société, alors que la procédure de retrait est initiée par l'actionnaire sortant. S'il ne faut pas systématiquement éviter les tribunaux, les actionnaires doivent garder à l'esprit qu'il existe par ailleurs des alternatives, applicables même en cours de procédure judiciaire : la conciliation et la médiation. La solution ne passe pas nécessairement par les tribunaux et les parties restent libres d'avoir recours à une méthode alternative. Plutôt que de laisser le juge prendre une décision à leur place, les actionnaires peuvent solliciter l'intervention soit d'un conciliateur ou d'un médiateur. L'exclusion et le retrait judiciaire d'un actionnaire seront examinés (section 1) avant la conciliation et la médiation (section 2). Section 1 : L'exclusion et le retrait judiciaire d'un actionnaireLes législations modernes étrangères notamment le droit positif belge95(*), ont apporté un éclairage tout à fait nouveau sur la problématique de résolution des conflits sociétaires en introduisant un mécanisme assez radical. S'il existe de justes motifs96(*), un actionnaire peut être tenu de céder ses actions à un ou plusieurs coactionnaires (art. 636 à 641 Code Belge des Sociétés) §1, ou d'acheter les actions d'un ou plusieurs coactionnaires (art. 642 à 643 Code Belge des Sociétés) §2. Paragraphe 1 : L'exclusion judiciaire pour justes motifs.
Nous examinerons brièvement la procédure et les effets de l'exclusion pour justes motifs. * 94 Les juges indiquent que la dissolution est une mesure exceptionnelle qui ne se justifie que lorsqu'il n'est pas possible de résoudre les conflits par d'autre mesures, Bédard c. Journeaux, C.S. Montréal, n° 500-11-028537-062, 7 déc. 2006. * 95 En France, l'exclusion décidée par le seul tribunal suscite beaucoup d'opposition. Certaines juridictions du fond estiment cependant qu'en cas de conflit irréductible entre actionnaires, l'élimination d'une partie d'entre eux est préférable à la dissolution pour mésintelligence grave. La Cour de cassation s'y est opposée. Voy. Tilquin, Les conflits dans la société anonyme et l'exclusion d'un associé, RPS 1991, n° 6560. * 96 La mésintelligence grave et permanente entre actionnaires est la catégorie reine des justes motifs, puisqu'en pratique la plupart des motifs évocables aboutiront à une telle mésentente entre les actionnaires. Mais pour autant un simple différend n'est pas suffisant. Le désaccord doit être profond et durable et doit nuire sérieusement au fonctionnement de la société et/ou à la poursuite par celle-ci de son objet social. |
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