C/ LE TERTIAIRE ET LES SERVICES EN EXPANSION
Le secteur tertiaire constitue le domaine de
prédilection des investissements des
émigrés après l'immobilier. Ce secteur est largement
dominé par le commerce informel. En effet
le faible niveau d'instruction des émigrés
lougatois ne permet pas à ces derniers d'entreprendre des
investissements dans des secteurs qui nécessite des démarches
administratives et la constitution de dossiers souvent complexes. A l'image des
« baolbaol », l'émigré lougatois est un fin
commerçant qui a acquis une certaine expérience du métier
pendant sa migration. En investissant dans le commerce, certains
émigrés créent un prolongement de leur activité en
migration.
Dans le département de Louga, le commerce constitue le
principal domaine d'intervention dans le secteur tertiaire et le principal
pourvoyeur d'emplois en milieu urbain, en particulier pour les femmes et les
néo-citadins. Plus de la moitié de la population active (58,10%)
sont des travailleurs du secteur tertiaire35. Ce secteur est
très dynamique dans le département. La faible performance de
l'agriculture pousse une frange importante de la population à investir,
grâce aux revenus migratoires, ce secteur. Détenu jadis par les
Libanos-Syriens, le commerce est devenu aujourd'hui l'activité
privilégiée des lougatois.
Le secteur a une capacité constante d'adaptation aux
conditions changeantes de l'environnement économique local. Il fait
vivre un grand nombre de personnes et contribue à la création de
centaines d'emplois.
Tableau 19: Répartition des activités du
secteur tertiaire dans le département de
Louga
|
LOUGA
|
|
LOUGA
|
Catégories
|
Total
|
Urbain
|
Catégories
|
Total
|
Urbain
|
Boulangerie
|
17
|
14
|
Gros
|
6
|
6
|
Bars
|
2
|
2
|
1/2 Gros
|
18
|
13
|
Restaurant
|
42
|
17
|
Détail
|
333
|
236
|
Hôtel
|
2
|
2
|
Quincaillerie
|
20
|
14
|
Taxi clando
|
53
|
38
|
Station Svce
|
7
|
6
|
Textiles
|
63
|
36
|
Librairie
|
4
|
4
|
Menuiserie
|
25
|
17
|
Dépôt Ciment
|
31
|
27
|
Ent. Transp.
|
10
|
6
|
Dépôt Gaz
|
6
|
5
|
Ent. Bâtiment
|
25
|
17
|
Foirals
|
9
|
3
|
Charbonnerie
|
15
|
12
|
Epicerie
|
4
|
4
|
Télé centres
|
89
|
62
|
Cyber café
|
18
|
17
|
Source : Chambre de commerce et de métiers de
Louga
35 RGPH3, rapport régional Louga
Pour l'émigré, en investissant dans ce secteur,
cela permet d'alléger les charges familiales et sociales qu'il assume.
En effet, les bénéfices tirés de cette activité
peuvent contribuer à réduire les envois monétaires qu'il
effectue ou leur fréquence. Cependant, ce ne sont pas dans toutes les
activités commerciales que l'émigré lougatois investit. Il
existe des secteurs plus porteurs comme le commerce import-export de
véhicules d'occasion, de pièces détachées, la vente
de matériaux de construction, les boutiques d'habillement, les
télécentre, les cyber café...
L'import-export représente un secteur
très dynamique dans les investissements émigrés. C'est
l'une des premières opportunités d'investissement à
être exploité par les émigrés lougatois. Ce secteur,
dans ses débuts ne nécessite pas un investissement colossal de la
part de l'émigré. En effet, dans l'importation de
véhicules d'occasions et de pièces détachées, la
facilité d'obtention de la marchandise en Europe a permis à ce
secteur de se développer très vite. Il suffit alors pour
l'émigré d'assurer le convoi qui se fait
généralement par voie maritime. Ce secteur présente un
double avantage la disponibilité de la marchandise et des
bénéfices considérables qu'ils procurent. M. T L, ancien
émigré reconverti dans l'import-export de pièces
détachées, explique que ce commerce procure entre 50 et 100% de
bénéfices, raison pour laquelle il est très prisé
dans leurs investissements. Au niveau de la commune de Louga, on
dénombre plus d'une vingtaine de magasins de pièces
détachées qui appartiennent dans leur quasi-totalité
à des émigrés. L'import-export de matériel
électroménager commence également à prendre son
essor. Des magasins de bazars se sont spécialisés dans ce
commerce.
Cependant un coup d'arrêt est venu frapper de plein
fouet ce secteur depuis l'avènement de la loi sur les voitures
importées au Sénégal36. Cela loin de
décourager l'investissement émigré l'a réoriente
dans la vente des matériaux de construction.
La vente de matériaux de construction
: À Louga le désir de tout émigré est d'avoir un
toit, de construire une villa splendide avec tous les éléments de
confort. Pour une localité qui vit au rythme de l'émigration, il
n'est pas étonnant que le secteur de la construction soit en pleine
expansion. Les nouvelles constructions sortent de terre comme des champignons.
Cet état de fait implique une forte demande en matériaux de
36 Cette loi interdit l'importation de
véhicules de plus de cinq ans.
construction. Les émigrés lougatois
désireux d'investir ont saisi l'occasion pour faire fructifier leurs
capitaux. Actuellement, la vente de matériaux de construction à
travers les quincailleries enregistre de nombreux investissements de la part
des émigrés. Le secteur de l'aluminium et du marbre connaît
également un développement fulgurant. Inconnu il y'a seulement
quelques années, l'utilisation des ces matériaux est devenue
incontournable dans les nouvelles constructions. L'évolution des
matériaux utilisés (cf. chapitre 8) renouvelle
constamment les opportunités d'investissement. Depuis quelques
années le commerce de matériaux importés d'Europe du sud
s'est taillé une place non moins importante dans les investissements des
émigrés. En outre pour l'émigré, en investissant
dans ce secteur, il se crée une clientèle dominée en
majorité par les émigrés. Les emplois créés
profitent plus aux hommes. Les femmes, quant à elles, évoluent
dans la gérance des boutiques d'habillement, des
télécentres et cyber café.
Les boutiques d'habillement : Au même
titre que la vente de matériaux de construction, le secteur de
l'habillement attire les investissements des émigrés lougatois.
L'enquête que nous avons menée au niveau du marché central
de Louga montre que plus des 3/4 de ces boutiques sont la
propriété d'émigrés.
Les boulangeries : ce secteur est investi par
les émigrés, principalement dans la communauté rurale de
Niomré. En effet dans la localité, en dehors de l'association des
émigrés qui évolue plus dans le social, certains
émigrés ont préféré investir dans les
boulangeries. Les deux qui alimentent le village et ces environs sont des
fruits de l'investissement émigré. Ceci est bien vu par la
population locale car elles emploient une quarantaine de personnes.
Les télécentres et cyber
cafés : la situation des télécommunications dans
le département de Louga a connu une évolution considérable
ces dernières années. Avec l'avènement des
télécentres, le téléphone est devenu un outil
accessible à tous. Les statistiques de la SONATEL révèlent
une augmentation de plus de 300% dans le marché des
télécentres entre 1997 et 2005. L'introduction des TIC avec
l'avènement des cyber cafés, a créé de nouveaux
métiers. Les facteurs explicatifs de cette rapide croissance peuvent
être liés à l'intérêt que les
émigrés portent à ce secteur et à ses
opportunités d'investissement. Dans la plupart des cas,
l'émigré investi dans la création d'un
télécentre pour se femme ou ses soeurs. En ^lus des emplois
créés, les télécentres
financés par les émigrés permettent de
procurer une autre source de revenus à sa famille.
D'autres domaines d'investissement existent et qui retiennent
l'attention des émigrés. Certains émigrés
relativement bien instruits s'attaquent à des secteurs jusque là
inconnus des émigrés lougatois. Des projets dans le transport,
l'hôtellerie, la transformation et la conservation des produits
maraîchers... commencent à voir jour.
Cependant l'investissement dans le secteur agricole reste encore
très timide.
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