2.2 L'empreinte écologique
L'Indice planète vivante (IPV) montre donc une perte
rapide et continuelle de biodiversité, surtout lorsque la
productivité de la biosphère n'arrive plus à suivre la
consommation humaine et à absorber les déchets produits.
L'empreinte écologique mesure cette perte en termes de surface de terre
et d'eau nécessaire pour subvenir à nos besoins : l'extraction
des ressources ou le traitement des déchets et bien sûr la
production et consommation.
Cependant, l'eau douce n'est pas prise en compte dans
l'empreinte écologique car sa demande et son utilisation ne peuvent
s'exprimer en termes d'hectares globaux. L'eau douce demeure néanmoins
essentielle à la santé humaine et à celle des
écosystèmes. Bien que l'eau douce ne soit pas
considérée comme une ressource rare au niveau mondial, une grande
partie est géographiquement inaccessible ou alors accessible une partie
de l'année seulement. Les ressources en eau douce sont loin d'être
distribuées équitablement à travers le monde et de
nombreux pays prélèvent en fait plus que ce qui est acceptable
pour maintenir les écosystèmes d'eau douce. Un indicateur
largement répandu de la pression sur l'eau est le ratio
prélèvement- disponibilité; il mesure les
prélèvements totaux annuels d'une population par rapport aux
ressources
renouvelables d'eau douce disponibles : plus grand est ce
ratio, plus forte est la pression àlaquelle les ressources
d'eau douce sont soumises. Selon cet indicateur, des prélèvements
de
5-20% représentent une pression légère,
20-40% une pression modérée et plus de 40% une pression
sévère.
Lorsque l'utilisation d'eau, en particulier pour l'irrigation,
ne peut plus être satisfaite par prélèvement du
ruissellement dans les rivières, ce sont les nappes phréatiques
qui sont exploitées. L'augmentation du pompage dans les nappes
phréatiques entraîne une baisse du niveau de la table des nappes
en de nombreuses parties du monde, particulièrement dans l'ouest des
Etats-Unis d'Amérique, dans le nord de la Chine et dans bien des zones
d'Asie du Sud. Ces baisses se font à des taux supérieurs à
un mètre par an. Globalement, on estime que 15 à 35% des
prélèvements d'irrigation ne sont pas durables. La consommation
d'eau a doublé entre 1960 et 2000, ce qui signifie que la consommation
moyenne par personne est restée constante. L'agriculture utilise environ
70% des prélèvements d'eau et l'industrie environ 20%.
L'empreinte d'un pays est déterminée par sa
population, la quantité consommée par chaque habitant et
l'intensité des ressources utilisées par unité de biens et
services alors que la bio capacité d'un pays est fonction du nombre et
du type d'hectares biologiquement productifs situés à
l'intérieur de ses frontières et de leurs rendements moyens. Le
déficit écologique des pays débiteurs (qui utilisent plus
de bio capacité que ce dont ils disposent à l'intérieur de
leurs propres territoires) peut s'expliquer de différentes
manières. Soit ils utilisent leurs ressources écologiques plus
rapidement que celles-ci ne se régénèrent chaque
année, soit ils importent ces
ressources d'autres pays, soit ils produisent plus de
déchets que ce qui ne peut être absorbépar leurs propres
écosystèmes. Les pays créditeurs écologiques sont
dits dotés de réserves
écologiques.
La comparaison de l'empreinte de chaque région à
sa bio capacité indique si la région a une réserve
écologique ou un déficit. Même avec une bio capacité
considérable, l'Amérique du Nord a le plus grand déficit
par personne : un américain du Nord utilise en moyenne 3,7 hectares
globaux de plus que ce que la région ne possède. L'Union
Européenne (UE-25) vient en seconde position: avec un déficit par
personne de 2,6 hectares globaux, la région consomme deux fois sa propre
bio capacité. A l'autre extrême se trouve l'Amérique Latine
: avec des réserves écologiques de 3,4 hectares globaux par
personne; l'empreinte moyenne d'un habitant d'Amérique Latine n'est que
le tiers de la bio capacité régionale disponible.
D'après cette représentation graphique, les
régions d'Asie-Pacifique et d'Afrique participeraient faiblement dans la
biocapacité mondiale moyenne par personne, alors que l'UE-25 et
l'Amérique du Nord dépassent le seuil du développement
humain, élevé en 2003. Ni le monde dans sa globalité, ni
aucune région prise séparément ne répond
conjointement aux deux critères de développement durable; seul
Cuba remplirait ces critères minimaux. Durant la période
1970-2000, les nations riches, telles que les Etats-Unis, ont significativement
aug-
FIG. 1 -
menté leur utilisation de ressources tout en
améliorant leur qualité de vie. Cela n'a pas été le
cas pour les nations les moins développées, comme la Chine et
l'Inde, où des augmentations importantes de l'IDH ont été
enregistrées, tandis que l'empreinte par personne restait en dessous de
la biocapacité moyenne globale par personne.
Il y a une prise de conscience croissante du fait que les
déficits écologiques ont de sérieuses conséquences
pour les régions et les nations. En juin 1992, la Conférence des
Nations Unies pour l'Environnement et le Développement de Rio de Janeiro
réaffirmait l'importance d'assurer une vie saine pour tous. Durant les
onze années qui ont suivi Rio l'empreinte moyenne par personne des pays
à revenus faibles ou moyens, mesurée en hectares globaux
constants, a peu
changé tandis que l'empreinte moyenne par personne des
pays à hauts revenus a augmentéde 18%. Au cours des 40
dernières années, l'empreinte moyenne des pays à faibles
revenus a
plafonné sous la barre des 0,8 hectares globaux par
personne. C'est l'empreinte énergie qui montre la plus grande
disparité par personne entre les pays à hauts et à faibles
revenus. Ceci est en partie dû au fait qu'il y a une limite de fait
à la quantité de nourriture qu'une personne peut ingérer
alors que la consommation d'énergie n'est principalement limitée
que par la capacité du consommateur à la payer.
Nous vivons au dessus de nos moyens et ce sont les choix que
nous ferons aujourd'hui qui détermineront les possibilités des
générations futures. Ces choix doivent aller dans le sens du
développement durable qui est, ici, un engagement à
»améliorer la qualité de la vie humaine tout en vivant dans
les limites de la capacité de charge des écosystèmes qui
nous font vivre». Le développement durable nécessite que le
monde, dans son ensemble, réponde conjointement
à ces deux critères, c'est-à-dire que plus
la population croît, plus faible sera la bio
capacitédisponible par personne et donc plus la hauteur de
cette zone se réduit. En 2003, les régions
d'Asie-Pacifique et d'Afrique ont utilisé moins que la
bio capacité mondiale moyenne par per- sonne, alors que l'UE-25 et
l'Amérique du Nord dépassent le seuil du développement
humain
élevé.
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