L'implication de la communauté internationale dans les processus de démocratisation en Afrique. Le cas du Cameroun( Télécharger le fichier original )par Jean Marcel ILUNGA KATAMBA Université de Kinshasa - Graduat 2004 |
B. L'action françaiseL'action française reste marquée par l'ambiguïté. En fait, l'idée de la conditionnalité de l'aide française à la démocratisation a été pour la première fois lancée par le ministre français de la coopération, M. Jean Pierre COT, et reprise solennellement au sommet franco-africain de la Baule en juin 1990 : « Je conclurai, Mesdames et Messieurs, en disant que la France liera son effort de contribution aux efforts qui seront accomplis pour aller vers plus de liberté »((*)176), déclarait avec ardeur François MITTERRAND. Cependant, le manque ou l'absence de fermeté de la part de la France apporte quelques tempéraments à ces ardeurs de principe exprimés par le Chef de l'Etat français. Nombreux sont les observateurs avertis qui proposent une relecture du discours de la Baule par celui du sommet de Chaillot qui s'était tenu en 1991((*)177). Ici, la liberté est laissée aux dirigeants africains de choisir en toute indépendance leur rythme et leurs modalités du processus démocratique. C'est une remise par Chaillot de ce que Baule avait tenté de retirer aux Chefs d'Etats africains. Avec le sommet de Libreville de 1992, la France va soutenir la création d'un fonds de remise des dettes dont les bénéficiaires seront le Cameroun, le Congo, la Côte-d'Ivoire et le Gabon. A l'exception du Congo, les autres Etats concernés traversent des étapes de blocages de leurs processus démocratiques. Néanmoins, ils sont aidés pour leur performance économique et leur qualité de membres de la zone CFA. Par conséquent, le principe de soutien au régime en place reste fort nonobstant l'impulsion donnée à la Baule. Ainsi, au lendemain de la réélection contestée par l'opposition et les observateurs internationaux du Président Paul BIYA en 1992, la France est non seulement le seul Etat à reconnaître officiellement sa victoire, mais aussi ne s'est pas empêchée de lui accorder une aide économique de 650 millions de Franc Français. Depuis l'avènement de Jacques Chirac à l'Elysée en mai 1995 et sa réélection en mai 2002, cette politique de la France ne semble pas beaucoup évolué. En tout état de cause, depuis 1990, la France ne semble fournir aucune preuve convaincante de la conditionnalité démocratique de son aide à l'Afrique en général et au Cameroun en particulier. Il ressort de ces diverses analyses que l'APD est plus un instrument devant servir à protéger la chasse gardée de la France, le Cameroun, face aux appétits de l'Allemagne, des Etats-Unis et de la Grande Bretagne plutôt qu'à le démocratiser((*)178). Force est de relever cependant qu'en dehors du levier de l'APD, les Etats-Unis et la France ont pu se déployer directement dans le processus de démocratisation camerounais. * (176) Extrait reproduit par M.D.EBOLO, op.cit, p.27. * (177) Sur la question, lire J.F.OBIANG, « Aide française et processus de démocratisation. Le cas du Bénin et du Gabon(1990-1994) », D.E.A. en Etudes africaines, Département de Sciences politiques, Université de Paris 1 /Panthéon - Sorbonne, 1995-1996. * (178) Le cas d'ELF AQUITAINE rentre dans la même visée politique. Celle-ci a abouti au renversement par les armes du président congolais élu démocratiquement par le peuple, Pascal LISSOUBA, au profit de Denis SASSOU NGUESSO, qu'il avait battu aux urnes. Et ce, avec la bénédiction de la France.
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