PROBLEMATIQUE
La Boucle du Blouf ou D200 est une voie de communication qui
assure la desserte des villages de l'Arrondissement de Tendouck ; une
route qui intéresse plus de quarante mille habitants avec des
productions fruitières importantes.
Le choix de ce thème s'explique non seulement par un
désir de faire mieux connaître notre terroir à ceux qui ne
le connaissent pas assez (donc l'intérêt de ce sujet pour
nous) ; ce choix est aussi guidé par l'importance politique et
sociale ainsi que l'actualité du sujet (c'est face à la
dégradation de cette voie et ses effets que la route du Blouf a fait
l'objet d'un traitement médiatique important au cours de ces
dernières années).
Enfin, le choix de ce sujet entre dans le cadre de
l'application de la recherche documentaire, un volet important dans la
carrière d'un enseignant. Par ailleurs, l'étude des voies et
moyens de communication est abordée à presque tous les niveaux du
cycle moyen en Géographie ; ce qui constitue une autre source de
motivation pour nous.
Pour réaliser ce dossier, nous avons
procédé par une recherche documentaire à travers la
construction d'une bibliographie dont les outils sont :
- des dictionnaires généraux ;
- une encyclopédie ;
- des ouvrages généraux et
spécifiques ;
- des sources Internet ;
- un quotidien ;
- des archives.
Cette bibliographie a été
complétée par des enquêtes, des visites sur le terrain, des
entretiens.
C'est par ces procédés que nous avons pu
collecter des données qui sont à la base du document que nous
soumettons à votre appréciation.
PREMIERE PARTIE : PRESENTATION DU CADRE D'ETUDE
Introduction
La Départementale 200 ou Boucle du Blouf traverse une
région aux caractères physiques et humains monotones. Sur le plan
physique le Blouf qui correspond administrativement à l'Arrondissement
de Tendouck, a des caractères subguinéens (selon les
données fournies par le Service Départemental de l'Agriculture de
Bignona).Du point de vue humain, c'est une région
homogène exclusivement habitée par des diola. Les
activités économiques sont pour l'essentiel agricoles avec une
prédominance d'activités traditionnelles.
Situation et localisation du Blouf
1. Carte : le Blouf dans la région de
Ziguinchor
Carte no1
![](importance-route-developpement-socioeconomique-region-boucle-de-blouf1.png)
2. Situation et localisation
Le Blouf est une partie du département de Bignona
(à l'Ouest de Bignona). Cette région correspond à
l'Arrondissement de Tendouck. Elle est limitée au Nord par le
Baako*(dans le Diouloulou), au Sud par le département de Ziguinchor,
à l'est par la commune de Bignona
et à l'Ouest par un ensemble d'estuaires* qui
débouchent un peu plus loin sur l'Océan Atlantique.
k
Le Blouf correspond aussi aux anciens cantons des Djigouttes
Nord et Djigouttes Sud (d'après les archives : code
11D1/0150). Aujourd'hui le Blouf comprend vingt villages et une
commune rurale ; cinq communautés rurales : Affiniam , Bagaya
, Balingor , Bessire , Bodé ( Ebouck ) , Boutégol , Bouteum ,
Dianki , Diatock , Diégoune Djimande , Ediamath , Elana , Kagnobon ,
Kartiack , Mandégane , Mangagoulack , Mlomp , Tendouck , Thiobon et la
commune rurale de Thionck-Essyl
La traduction du mot Blouf paraît complexe parce qu'elle
ne fait pas l'unanimité d'un village à l'autre. D'après
certains habitants du Blouf même, ce nom serait dérivé de
« oulouf» c'est-à-dire les non initiés. C'est
à partir de ce nom qu'on parle de la Boucle du Blouf comme on dirait la
route du Baol ou la route du Fouta
B. Le cadre physique
1. Le relief
Sur le plan structural le Blouf est une région qui se
caractérise par de bas plateaux atteignant rarement dix (10)
mètres d'altitude, des plaines, de nombreuses vallées
arrosées par une multitude de cours d'eau pour la plupart saisonniers
(d'après le Service Départemental de l'Agriculture de
Bignona) ; sauf les cours d'eau envahis par la mer. La partie haute (ici
la notion de est relative) du Blouf correspond à l'Est notamment
Diégoune, Djimande, Kagnobon jusqu'à Kartiack ; une zone
caractérisée par l'importance de la latérite.
La zone basse est une sorte de corniche* allant de Thiobon
à Affiniam ; donc l'Ouest du Blouf qui est la zone des sols
hydromorphes* principalement.
2. Le climat
Dans le Blouf le climat est dans son ensemble
subguinéen. Cependant on note quelques variations entre l'Est chaud et
moins humide (c'est la zone continentale avec Diégoune, Djimande,
Dianki, Bessire, etc.) et l'Ouest plus humide et moins chaud (la bande de
terre depuis Thiobon jusqu'à Affiniam).
Les températures moyennes en période de chaleur
varient entre 26°c le matin et 34°c dans la zone côtière
alors que dans la zone continentale elles sont de l'ordre de 28°c et
36°c. En période de froid on constate que l'Est est plus frais le
matin et la nuit mais en début d'après-midi on note des
températures qui peuvent monter jusqu'à plus de 30°
(d'après le Service Départemental du
Développement Rural de Bignona)
Les cumuls pluviométriques
d'après les données de certaines stations comme celle de
Tendouck, peuvent aller jusqu'à 1059mm en moyenne.
Cependant, on note des différences entre les années. En 1994 les
cumuls à Tendouck ont donné 1445mm contre 692mm en 1983 une
année de sécheresse (voir tableau ci-après)
TABLEAU 1 : Pluviométrie
à la station de Tendouck (1980 à 2006)
Année
|
Cumuls en mm
|
Année
|
Cumuls en mm
|
1980
|
716,1
|
1994
|
1445,2
|
1981
|
1025
|
1995
|
1237,6
|
1982
|
942,2
|
1996
|
889,3
|
1983
|
692,8
|
1997
|
1002,4
|
1984
|
864,9
|
1998
|
1080,5
|
1985
|
1144,2
|
1999
|
1379,4
|
1986
|
1060,4
|
2000
|
1206,3
|
1987
|
1303,3
|
2001
|
1153,3
|
1988
|
1166,0
|
2002
|
819,0
|
1989
|
1359 ,9
|
2003
|
1165,3
|
1990
|
1071,6
|
2004
|
749,0
|
1991
|
996,1
|
2005
|
1079,2
|
1992
|
809,7
|
2006
|
1130,0
|
1993
|
1104,0
|
Moyenne
|
1059,1
|
|
Source : Service
Départemental du Développement Rural de Bignon, janvier
2007
3. La végétation
Photo 1 :( Sékou
Mané).
![](importance-route-developpement-socioeconomique-region-boucle-de-blouf2.png)
Forêt galerie au pont de Thionck-Essyl
(septembre 2007)
En raison des conditions climatiques plus ou moins favorables
et de l'hydrographie, on note une végétation abondante dans le
Blouf. Selon le Service Départemental des Eaux
et Forêts, on rencontre principalement deux formations
végétales dans le Blouf : la savane
arborée à l'Est et la forêt
secondaire à l'Ouest. Les espèces ou essences y
sont variée ; des arbustes aux grands arbres : elaeis
guinéensis (palmier à huile) sous forme de
forêt galerie* depuis Thiobon jusqu'à
Affiniam, parkia biglobosa (néré) un peu partout mais
qui connaît aujourd'hui les effets de la sécheresse surtout dans
les zones moins humides, daniellia oliveri (baline en diola) avec sa
sève qui est récoltée pour en faire de l'encens, ceiba
pentendra (le fromager), dialium senegalensis (solom),
detarium senegalensis (ditakh), etc.
La mangrove*est représentée par
des espèces comme le rhizophora racemosa et avicennia africana.
Les arbustes sont représentés par combretum micrantum
(kinkéliba), guiera senegalensis (nguer), icacina
senegalensis.
L'herbe y existe abondamment, notamment andropogon
gayanus.
Des espèces comme carapa procera (touloucouno
en mandingue et boukounoum en diola), pterocarpus erinaceus
(vèn) sont en voie de disparition.
Les forêts, en raison de leur importance et de
l'exploitation abusive qu'elles subissent, sont protégées
à travers l'érection de certaines en forêts
classées* ; c'est le cas de la forêt entre
Tendouck et Bagaya (source : Service Départemental des
Eaux et Forêts de Bignona ; données obtenues par
enquête)
4. L'hydrographie
Photo 2 (Sékou
Mané)
![](importance-route-developpement-socioeconomique-region-boucle-de-blouf3.png)
Nouveau pont de Tendouck (septembre
2007)
Le réseau hydrographique du Blouf est composé
essentiellement de rivières, de mares, de marigots et pas de fleuve. Ce
réseau est assez dense pendant l'hivernage contribuant ainsi à
l'irrigation des nombreuses rizières dont certaines sont conquises dans
la mangrove. De nombreux cours d'eau, du fait des changements climatiques ont
disparu en laissant survivre une végétation abondante de palmiers
à huile. La plupart des ponts (Tendouck, Thionck-Essyl, Ediountou*) sont
le fait de la présence de ces cours d'eau. D'autres cours d'eau sont
envahies par la mer et pour éviter la remontée de la langue
salée dans les terres de culture, des digues sont
aménagées dans les villages concernés.
(Données fournies par le service départemental de
l'agriculture)
C. Le cadre humain
1- Population : origines, évolution et
évolution
Selon des récits oraux racontés dans chaque
village, les populations qui occupent la terre du Blouf seraient venues
d'ailleurs (pour la majorité). Cependant il est difficile d'identifier
les populations authentiques de cette région. A titre d'exemple, les
populations d'Affiniam, de Bouteum, du hameau* de Djilapaho et
de Thionck-Essyl seraient originaires de Bandial* dans le département de
Ziguinchor. Les autres indiquent vaguement l'Est qui d'après certains
correspondrait au Gaabou où cohabitaient diola et autres ethnies qui
peuplent la Casamance.
A part Djilapaho qui est rattaché à Affiniam,
Boutégol, Ediamath et Bodé le reste du Blouf est constitué
de gros villages dont la moyenne dépasse 1000 habitants. Selon
les estimations de la Direction de la Statistique et de la
Prévision, la population de l'Arrondissement de Tendouck
(sans la Commune de Thionck-Essyl) était de 39461 habitants au 31
décembre 2005 et les projections donnent 43404 habitants en
2015. D'après le Service Régional de la
Prévision et de la Statistique la population de Tendouck était
de 30173 h en 2004 pour une superficie de 902 km2 et 8806 h pour la Commune de
Thionck-Essyl ; soit un total pour le Blouf de 38979 h. Le dernier
recensement dont les résultats ont été corrigés et
publiés en 2007 donne une population totale de 38164 h pour tout le
Blouf dont 19524 femmes.
La densité de population tourne autour de
43 h/km2 (cf. Répartition de la population selon la
circonscription administrative page 8, Direction de la Statistique et de la
Prévision, année 2005).
Mais ce chiffre cache les disparités dans l'occupation
de l'espace. Le centre, occupé par des forêts, est presque vide.
La petite Boucle depuis Diégoune (ancien Djigouttes Nord) est la partie
des gros villages alors que dans la partie Sud c'est seulement Tendouck et
Balingor qui font office de gros villages.
Après une période de forte émigration
vers les années 1973 en raison de la grave sécheresse qui a
sévi dans la région, on assiste de nos jours à un
début de rurbanisation*qui concerne surtout
les retraités et des jeunes qui ont perdu tout espoir de trouver un
emploi en ville. Même si l'émigration des jeunes filles continue,
elle n'est pas aussi importante qu'autrefois car la plupart des jeunes filles
sont élèves ou étudiantes et de plus en plus certaines
s'intéressent au maraîchage.
Tableau 2 :
Estimations de la population de Tendouck de 2005 à 2015 :
(tableau simplifié)
Unité administrative
|
31.12.2005
|
31.12.2006
|
--
|
--
|
--
|
31.12.2015
|
Arr. de Tendouck
|
39461
|
39880
|
--
|
--
|
--
|
43404
|
C.R. Diégoune
|
7294
|
7371
|
--
|
--
|
---
|
8023
|
C.R. Kartiack
|
7125
|
7201
|
---
|
----
|
--
|
7837
|
C.R. Mangagoulack
|
8690
|
8782
|
--
|
--
|
--
|
9558
|
C.R. Mlomp
|
1016
|
1026
|
----
|
--
|
--
|
1177
|
C.R. Balingor
|
6191
|
6257
|
--
|
--
|
--
|
6809
|
NB. C.R. : communauté rurale
Source : Direction de la
Prévision et de la Statistique janvier 2006.
2. Population : ethnies, langues,
religions
Le Blouf est presque exclusivement habité par
des diola (plus de 99%). Une minorité de peulh, surtout des
commerçants et des bergers, est notée dans presque tous les
villages. Quelques familles mandingues existent à Kartiack et à
Thiobon et de plus en plus, ces peuples allogènes* s'intègrent au
milieu culturel diola.
Le diola est la langue parlée au
Blouf. Cependant cette langue a des variantes ; donc des
dialectes* et même dans ces dialectes on note des accents en fonction des
origines de la population et du voisinage. C'est ainsi que Tendouck,
Boutégol, Elana, Bodé, Mangagoulack, Bagaya, Diatock (voisins)
ont à peu près le même accent. Bessire, Dianki et Kartiack
sont linguistiquement proches du Baako (dans l'arrondissement de Diouloulou).
Thionck-Essyl, bien que distant de Affiniam, Bouteum, et Djilapaho, leur est
très proche sur le plan linguistique à cause de leurs origines.
Kagnobon, Diégoune et Djimande d'une part et d'autre part Balingor et
Mandégane ont leur accent. Thiobon et Ediamath se rapprochent avec
l'introduction de beaucoup de termes mandingues dans leur dialecte. Mlomp
constitue une particularité ; son dialecte ne s'apparente qu'au
karone* dans le Kafountine*
Malgré toutes ces différences, ces peuples
partagent la même culture. A titre d'illustration, l'initiation
(« boukout») qui permet au garçon d'acquérir
certaines aptitudes, est un trait commun à ces villages.
Sur le plan religieux, le Blouf est majoritairement
musulman. Aujourd'hui il n'y a presque plus d'animistes dans la
région. L'animisme a disparu avec sa pratique qui est
le fétichisme ; même si on peut noter ça et là
des processions* de femmes menées par des prêtresses* en temps de
malheur.
Le christianisme est présent à
Thionck-Essyl, Boutégol, Tendouck, Mangagoulack, Elana
(à plus de 99%), Affiniam, Bouteum, Kartiack. Des villages comme
Mandégane, Diégoune, Djimande, Kagnobon, Bagaya, Diatock, Thiobon
n'ont pas de chrétiens.
Le Blouf est une terre composée de villages.
Malgré les efforts de modernisation (électrification, adduction
d'eau), on n'y trouve aucune ville même
s'il y a la commune rurale de Thionck-Essyl qui est en voie d'urbanisation.
D. Les activités
économiques
1. Les activités traditionnelles
a. Les cultures vivrières
Par la durée que prennent les travaux champêtres
consacrés au riz (depuis le semis jusqu'à la récolte)
ainsi que l'importance de cette céréale dans l'alimentation (le
riz est un véritable produit de civilisation en milieu diola), la
riziculture est de loin la première activité traditionnelle,
sinon la première activité économique du Blouf. Il est
très difficile de donner des chiffres sur la production de riz du fait
de certaines pesanteurs socioculturelles (le cultivateur n'aime pas qu'on parle
de sa richesse de peur qu'on lui jette un mauvais sort) mais aussi des
difficultés des services compétents en la matière (les
services de l'agriculture) à recenser les productions.
Cependant il faut noter que le riz « nourrit son
homme ». Il n'est pas rare de voir certaines familles couvrir leurs
besoins alimentaires (le riz se mange au petit déjeuner, au
déjeuner et au dîné) à partir de leurs propres
productions en bonne année pluvieuse. On se permet parfois de vendre du
riz à la boutique pour des dépenses. Le Général
Economique et Commercial, une grande boutique à Thionck-Essyl,
créée par des ressortissants de Thlonck-Essyl en France, agit
dans ce sens en achetant le riz produit localement pour le revendre moins cher
aux populations pendant l'hivernage.
Le riz se cultive exclusivement pendant la saison des pluies
dans les bas-fonds* inondés et dans des zones non inondés (le riz
de plateau de plus en plus abandonné à cause de la divagation des
bêtes). La variété la plus cultivée est oryza
glaberina mais aussi oryza sativa (riz asiatique) qui
connaît une forte spéculation du fait de son cycle
végétatif court
Le mil, longtemps laissé pour compte, a fait une
percée extraordinaire dans le Blouf, surtout le mil
sanio. En raison de son cycle végétatif
court et de ses exigences hydriques modestes, le mil est en train de changer
les habitudes alimentaires des populations du Blouf. Le plat de riz au matin
est peu à peu remplacé par la bouillie de mil appelée
« moni ». Ici la production ne se calcule pas en poids ou
volume mais en bottes de mil. Comme c'est une céréale qui n'est
pas suffisamment intégrée dans les habitudes alimentaires, la
production couvre souvent les besoins des populations.
Le mais y existe mais en jardin de case ; ce qu'il
n'occupe pas de grandes surfaces. Aujourd'hui il fait l'objet d'une grande
spéculation agricole avec l'introduction de la variété
hybride plus productive. Dans les jardins de case on trouve aussi du haricot
dont la principale zone de culture est l'espace compris entre Kartiack, Dianki
et Bessire ; la patate douce, le taro, le manioc et un peu d'igname
complètent le tableau des cultures vivrières.
b. La cueillette
En raison des conditions climatiques favorables, la
végétation est abondante. Les forets offrent non seulement leur
bois de chauffe et d'oeuvre, mais aussi et surtout des fruits sauvages
très prisés des populations locales et des citadins. Ainsi
le detarium (ou ditakh en wolof) cueilli à
Mlomp, Thiobon principalement à partir d'octobre jusqu'en janvier, en
fonction de la période de maturité, est transporté par
camion et vendu à Bignona, à Ziguinchor, à Dakar.
Le « madd » ou saba
senegalensis le « troll » (sifemb en diola) ou andolfia
sont cueillis en grande quantité entre Diégoune,
Djimande, Kagnobon, Bessire, Dianki jusqu'à Thlonck-Essyl ; dans
presque tous les villages du Blouf. Les villages de Dianki et Bessire sont les
principaux domaine de dialium guineense (solom en wolof). Le fruit
de « touloucouno » (carapa procera) est
récolté pour être transformé en une huile
utilisée dans les soins de certaines maladies respiratoires comme la
toux, l'asthme ; les courbatures, le rhumatisme, etc. Cette huile est
vendue très chère (plus de 5000f le litre dans le Blouf)
Le palmier à huile donne l'huile de
palme, des balais à partir des
feuilles, des chevrons pour la confection des toits
des maisons. Aujourd'hui la production d'huile de palme a beaucoup
baissé à cause de la diminution du volume pluviométrique
et feux de brousse qui détruisent chaque année une partie des
palmeraies.
La foret offre aussi le gibier qui est composé
de rongeurs dont le lièvre, de
ruminants comme l'antilope,
d'oiseaux (surtout la perdrix).
En mer le ramassage de coquillages ainsi que la récolte
des huîtres dans les estuaires*depuis Thiobon jusqu'à Affiniam
alimente un commerce largement tourné vers l'extérieur (Bignona,
Ziguinchor, Dakar)
c. La pêche artisanale
Dans le Blouf, il est rare de voir un village sans
pêcheur ; mais c'est principalement l'extrême Ouest, plus
poissonneux qui concentre le plus grand nombre de pêcheurs. Dans cette
zone, d' après un document de la Direction de
la Prévision et de la Statistique sur la région de Ziguinchor en
2005, sont capturés des barracudas,
des capitaines, des carangues (saka), des
ethmoloses (obo), des machoirons
(Kong), des grondeurs perroquets (sompattes).
La carpe (avec toutes ses
variétés) ainsi que le mulet sont les
espèces les plus représentées et les plus
consommées dans le Blouf.
Des captures importantes sont réalisées ici et
varient selon les périodes ou saisons. En période de froid le
poisson descend dans les mers profondes et le produit est difficile à
trouver même pour la consommation locale (constat que nous
avons fait à l'occasion de nos
enquêtes).Passée cette période, on ne va plus
au débarcadère ; ce sont les pêcheurs ou les
« bana bana » qui passent de maison en maison pour
écouler leur produit.
De loin Thiobon dépasse les autres
débarcadères du Blouf. Malgré l'utilisation de moteurs
hors-bord*, de plus grandes pirogues et la tentative de modernisation
initiée par le Projet de Développement de la
Pêche Artisanale dans la région de Ziguinchor
(PAMEZ), le secteur de la pêche reste encore
artisanal ; c'est une des principales causes de la faiblesse des prises
car le matériel et les méthodes de pêche n'ont presque pas
changé depuis des décennies.
d. L'élevage
L'activité pastorale reste essentiellement
traditionnelle et extensive.
L'espèce bovine qu'on y élève est
le taurin* qui résiste à la
trypanosomiase et à certains insectes vecteurs de maladies tropicales.
Les troupeaux de bovins appartiennent à des familles et il est rare de
voir une famille sans bêtes. Mais ce
« trésor » est gardé longtemps secret ;
ce sont les funérailles et surtout l'initiation* qui le
révéleront. Dans cette zone les populations craignent plus la
destruction des cultures par les bovins que l'insuffisance des pluies.
L'élevage concerne aussi et surtout les petits
ruminants comme les chèvres (caprins),
les ovins ainsi que les
volailles. L'âne, utilisé
dans le transport, s'y adapte mais pas le cheval.
Comme chez le peulh, l'élevage en pays diola (le Blouf
ici) est une activité de prestige sentimental. On est satisfait d'avoir
des un grand troupeau mais il est rare tuer une bête pour
améliorer son alimentation, sauf quand elle agonise ou quand elle est
vieille. Les rares occasions de mise en valeur de l'élevage sont les
funérailles et l'initiation.
2. Les activités modernes
C'est principalement dans l'agriculture, notamment
les plantations et le
maraîchage que le Blouf a beaucoup réussi. Chaque
année des tonnes de mangues de diverses variétés
(mongo Tendouck, ket, Kent, diourou, saralion, etc.)
depuis la plus hâtive (saralion) jusqu'à
la plus tardive (ket), sont récoltées.
En Casamance le Blouf fait partie des plus grands producteurs de mangues.
La production d'agrumes (orange, citron,
mandarine, pamplemousse) est en net recul en faveur de
l'arrondissement de Diouloulou, en raison de la diminution des pluies.
La banane existe, mais en faible
quantité. Un fait important à signaler, les G.I.E. de femmes qui
auparavant s'occupaient de maraîchage seulement, s'investissent
désormais dans les plantations. En 2001 par exemple, la seule vente de
mangues a permis au G.I.E. des femmes de Kaffanta (un sous-quartier de la
commune de Thionck-Essyl) de gagner 1500000f et depuis cette date elles n'ont
jamais gagné moins d'un million sauf en cas d'attaque de la
mouche blanche. A Mlomp, le G.I.E. des femmes de Balokir (un
quartier de ce village) produit chaque année plus de 2 tonnes d'oignon
(le violet de galmi*) sans compter une importante
production de tomate. Le G.I.E. Banga de Bougotir, un autre sous-quartier de
Thionck-Essyl qui a gagné le deuxième prix du chef de
l'Etat pour la promotion de la femme en 2003, puis un
prix d'honneur en 2004, évolue dans un grand verger
où il y a des arbres fruitiers et des produits maraîchers.
L'arachide est cultivée dans
cette région mais non seulement elle occupe de petites surfaces, ses
productions sont faibles. En effet, cette culture qui aurait pu se
développer dans cette zone est confrontée à la divagation
du bétail, mais aussi et surtout les singes qui sont très friands
d'arachide, sans compter les rats et les perdrix. Dans ces conditions, tous
ceux qui cultivent l'arachide la récoltent au prix de beaucoup de
sacrifices.
Le mais, autrefois culture vivrière, est en train de
faire une percée dans le Blouf avec l'utilisation de nouvelles
variétés (le mais hybride*)
Malgré l'utilisation de ces nouvelles
variétés et le développement de la plantation,
l'agriculture reste dans son ensemble traditionnelle. Le tracteur n'est pas
encore connu au Blouf alors que la traction animale est faiblement
introduite.
3. Le commerce
En raison de l'importance des autres activités
économiques, le Blouf est une région dynamique en matière
de commerce. Cette activité fait vivre beaucoup de familles.
Les produits d'exportation de la zone sont
les produits agricoles, notamment les produits de plantation comme les
mangues, les oranges, les citrons ; les produits maraîchers
(surtout la tomate) ; les produits de la cueillette comme le
« madd », le produit de parkia biglobosa
(néré et nététou), l'huile de palme, l'huile de
carapa procera (touloucouno), les balais. Ces produits sont
vendus dans les villes comme Bignona, Ziguinchor, Dakar et sont
transportés par camion à travers la Départementale 200 ou
Boucle du Blouf qui fait l'objet de la présente étude ou par
pirogue jusqu'à Ziguinchor (à partir de Thionck-Essyl, Elana,
Bouteum, Affiniam).
En retour le Blouf reçoit des marchandises
diverses (matériaux de construction,
denrées et autres produits de consommation courante)
sous forme d'importations. Ces produits sont vendus principalement dans
des boutiques existant au Blouf principalement le long de la Boucle du
Blouf. A part Thionck-Essyl qui a un petit marché qui ne fait
même pas 200 m2, on n'en trouve pas d'autre dans la région ;
il n'y a pas de marché hebdomadaire sauf que des marchands ambulants
(des baol baol) passent d'un village à l'autre.
De plus en plus, de jeunes commerçants du Blouf
achètent des produits locaux qu'ils revendent à Ziguinchor,
à Dakar ou ailleurs. Or, pendant des décennies ce commerce
était dominé par des étrangers venus pour la plupart de
Dakar ; des commerçants très connus dans le Blouf :
Alla Bèye, Thioune, Mamadou Dia etc.qui fréquentent cette partie
du département de Bignona en fonction de la récolte des oranges,
des mangues tant que le Blouf est accessible, c'est-à-dire quand la
route du Blouf est praticable
Conclusion
L'étude de la région du Blouf a permis de
décrire ses principales activités économiques ;
surtout dans le domaine de l'arboriculture, un secteur très dynamique
malgré la modestie des moyens de production. Mais il faut noter que la
survie de ces activités et même des populations de cette
région dépend largement de l'existence de voies de communication
adéquates car la clientèle est en dehors même du
Blouf ; d'où l'importance de la route dans le développement
socioéconomique.
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