II- L'engagement de l'UNESCO : Le PIDC à la
loupe
Le PIDC ou Programme International pour le
Développement de la Communication est le seul forum multilatéral
du système des Nations Unies dont l'objectif principal était
depuis sa création en 1980 d'aider les pays en développement, sur
leur demande, à « identifier les besoins et domaines
prioritaires... et à élaborer leurs plans de développement
de l'information et de la communication ». Le PIDC vise également
à apporter l'appui requis pour l'élaboration des projets de
développement des infrastructures à travers l'assistance
d'experts ou de consultants de l'UNESCO. Conformément à la
résolution de Belgrade ayant abouti à son adoption, le programme
accorde une priorité décroissante aux entreprises de dimension
régionale, puis sous-régionale et enfin nationale. Ainsi est
confirmée la volonté des fondateurs du PIDC : «
d'accroître en particulier la contribution des moyens de communication
à un développement économique, social et culturel,
endogène et de favoriser l'échange international de l'information
». La spécificité du PIDC est que non seulement ce Programme
apporte une assistance aux projets relatifs aux médias, mais il vise
également à établir les conditions favorables à
l'essor de médias libres et pluralistes dans les pays en
développement.
Les efforts du PIDC ont eu un impact important dans un grand
nombre de domaines dont le développement des médias
communautaires et des organisations de radio et de télévision, la
modernisation des agences de presse nationales et régionales, et la
formation des professionnels des médias. Le PIDC a distribué
quelque 90 millions de dollars pour plus de 1000 projets dans 139 pays en
développement et pays en transition. Depuis 1980, le PIDC aide donc les
pays en développement à accroître leurs capacités en
matière de communication et à améliorer la formation dans
ce domaine. Le programme intergouvernemental « Information pour tous
» (PIPT)49, mis en place plus récemment en janvier 2001,
est une autre plate-forme de réflexions et d'actions pour soutenir le
PIDC tout en contribuant à la réduction de la fracture
numérique.
49 Le PIPT est un programme intergouvernemental
créé en 2000. Il est étroitement intégré aux
activités du Programme ordinaire de l'UNESCO, en particulier dans le
domaine de la communication et de l'information. Le PIPT travaille en
étroite collaboration avec d'autres organisations intergouvernementales
et des ONG internationales, en particulier avec celles qui sont
spécialisées dans la gestion et la préservation de
l'information, comme la Fédération internationale des
associations de bibliothécaires et des bibliothèques (IFLA) et le
Conseil international des archives (CIA). Au début de 2006, on
dénombre déjà plus de 50 comités nationaux pour le
PIPT qui concrétisent l'orientation du Programme au niveau des pays et
permettent d'interpréter et de promouvoir la vision du PIPT dans les
communautés locales.
Mais depuis bientôt trois décennies, le PIDC dont
la création était intervenue dans un contexte justifié de
déséquilibre des flux transfrontières et de revendication
d'un NOMIC et qui avait pourtant pour but de « réduire
l'écart entre les divers pays dans le domaine de la communication »
n'arrive pas à prendre un véritable envol. Selon l'expression de
l'un de ses initiateurs, Mustapha Masmoudi, le programme donne aujourd'hui
l'image d'un mécanisme qui « tourne dans le vide ». En effet,
le frein au développement international de l'information et de la
communication s'explique par les difficultés financières pour
faire face aux urgences multiples dans les pays les moins avancés. Entre
temps, le nombre de ces pays, au lieu de régresser avec les programmes
de redressement structurels de la Banque mondiale et du Fonds Monétaire
International a, au contraire, progressé passant de 25 pays en 1971
à 49 en 1991. Ceci nous fait penser à un probable
«développement du sous-développement » en
référence à l'expression de Pierre Jalee.
Quoiqu'il ait approuvé en vingt ans 700 projets
relatifs à la communication dans 130 pays en développement, le
PIDC n'a financé que le tiers des projets présentés. Le
montant de ces financements s'est élevé à 78 millions de
dollars, mais ceci reste une somme de loin en deçà des besoins.
« Même multiplié par dix ou vingt fois, le budget du
programme ne parviendrait à satisfaire les besoins de la communication
du Sud. Il faut explorer de nouvelles pistes de financement » estime le
Vénézuélien M. Antonio Pasquali, ancien sous-directeur
général de l'UNESCO faisant remarquer que « le
progrès technologique caractérisé par l'obsolescence
artificielle des TIC et du matériel informatique rend dérisoire
tout effort de rattrapage ». Face à l'indifférence de la
plupart des pays industrialisés du Nord (excepté l'effort
financier remarquable de la France et des pays scandinaves) par rapport
à la situation, la mission du PIDC semble relever en plein parcours de
l'impossible. Comment, en effet, développer la communication et en
équilibrer la circulation quand on sait que le taux de connexion
Internet en Afrique ne représente que 0,04% du taux mondial ? A en
croire les experts en communication ayant travaillé sur le PIDC, son
bilan après des années d'existence se résume à la
somme d'un certain nombre de carences s'énonçant en termes de
lenteur de procédures, difficulté d'apprécier la
manière dont un projet s'intègre dans le plan de
développement général d'un pays, de la justifier et de
l'évaluer, insuffisance de crédits,... Peut être que les
modestes résultats du PIDC et l'impression de blocage qui se
dégage de son bilan de fonctionnement trouveraient leurs explications
dans les raisons similaires à l'échec du NOMIC puisque le
programme était entre autre un instrument stratégique pour
baliser l'environnement à un nouvel ordre mondial tant
réclamé par les pays du Sud.
Heureusement qu'il y a aujourd'hui un regain de confiance des
donateurs ayant amené le Bureau du Programme international pour le
développement de la communication (PIDC) à décider de
financer 74 projets de développement des médias (dont 31
concernent l'Afrique) dans 59 pays en développement, lors de sa
51ème réunion annuelle (du 27 au 29 mars 2007 au Siège de
l'UNESCO). Les pays donateurs qui soutiennent le PIDC ont augmenté de
manière significative leur contribution financière en 2006, ce
qui a permis au programme de recueillir cette année près de 2,7
millions de dollars à consacrer à des projets de
développement des médias.
Les principaux donateurs ont été le Danemark
(445 000 dollars en 2006), l'Espagne (531 000 dollars en 2006), les Etats-Unis
(305 000 dollars en 2006), la Finlande (250 000 dollars en 2006), la
Norvège (654 000 dollars sur deux ans) et la Suisse (501 000 dollars sur
trois ans). La Finlande et la Norvège ont doublé leur assistance
financière au PIDC, tandis que la contribution des Etats-Unis a
été multipliée par cinq et celle de l'Espagne par dix.
Nonobstant ce regain d'intérêt des pays
donateurs, les espoirs sont beaucoup plus tournés aujourd'hui vers le
Fonds de Solidarité Numérique. Le FSN réussira-t-il
là où le PIDC semble être tombé en panne
sèche (par manque de carburant financier nécessaire pour conduire
ses nombreux projets jusqu'à terme) ? Ou l'histoire n'est-elle qu'un
éternel recommencement et que la solidarité numérique est
juste l'invention d'un nouveau concept pour entretenir les imaginaires sociaux
de la technique en Afrique et ressusciter les espoirs des actions entreprises
dans le cadre du PIDC ?
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