« Pour un Sénégal autrement
géré ».
Au regard des enjeux majeurs qui entouraient le scrutin du
27 février et plus tard du 19 mars
2000, le combat des partis d'opposition sera
principalement axé sur la transparence et la
régularité de l'élection présidentielle. L'AFP et
la CODE 2000 ne vont pas s'y soustraire, bien
32 Allocution de Moustapha NIASSE, commémoration du
3ème anniversaire de l'AFP, Dakar, samedi 24 août
2002 Hôtel Méridien Président
33 Quotidien Le Matin du 23 février 2000
au contraire car l'occasion était trop belle pour obtenir
de façon définitive, ou du moins pour
les élections du moment, toutes les garanties pour
assurer le minimum de consensus politique dans l'arène. La virulence que
l'on aura prêté au leader progressiste en quittant avec fracas le
PS, va se confirmer, s'ajoutant à une forte détermination
partagée aussi par le reste de l'opposition qui sent le moment
propice de la première alternance au sommet de l'Etat
sénégalais.
Cette référence démocratique que
constitue le Sénégal à tort ou à raison sur un
continent où le bruit des bottes ne cesse de marteler les sentiers,
avait les airs d'une démocratie sans alternance que le même parti
sous différentes appellations suivant les époques aura
dirigé.
Aussi avant d'envisager de gérer autrement le
Sénégal, fallaitil se défaire du système en
place.
Pour l'AFP, le changement devait revêtir les
habits de la bonne gouvernance et du développement auto
géré ; une nécessité qui, selon son leader
« s'est imposée d'ellemême parce que les contextes
politiques changeant, il faut savoir s'adapter aux contextes politiques sans
renoncer à ses idées et principes ». En ce sens, il ne
pouvait être incarné par DIOUF qui prétendait
établir « le changement dans la continuité ».
L'AFP et tous ses partis alliés militaient donc pour la «
remise en cause de tout un style politique, tout un mode de gouvernance (...)
dans un parti (...) vieilli et ayant volontairement tourné le dos
à tout effort d'innovation, de rénovation, de rajeunissement
et d'adaptation aux circonstances et demandes du peuple
sénégalais ».
En optant pour le « Nous avons choisi l'espoir »
et en invitant les sénégalais à construire leur
« ...avenir...maintenant », le leader de
l'AFP avoue que ce choix inscrivait son parti « dans le futur et non
dans un constat statique, factuel, figé ou une sorte de
comportement rétif. Ce slogan traduisait tout un passé que nous
venions d'évaluer dans ses composantes successives, une
résolution du moment présent s'inscrivant dans l'avenir
». Malgré tout, Moustapha NIASSE révélera que
« l'AFP a fait de la communication politique sans le savoir et sans en
prendre conscience ...le parti a juste fait confiance à une
expérience politique acquise sur le terrain...Nous avons juste
été imbus des éléments théoriques de la
communication pour essayer
de les appliquer en fonction des circonstances du
moment. Après avoir défini des objectifs
globaux et sectoriels il restait à mettre en
oeuvre nos intelligences et nos réflexes d'hommes pensants pour les
atteindre».
Mais quel devait donc être l'image de l'AFP en l'an 2000
?
Pour son leader le souci n'était pas de
préserver ou de fabriquer une quelconque image.
« L'objectif était de redonner espoir à la
jeunesse sénégalaise et de l'associer à la
constitution
et à la construction du module qui devait
constituer son avenir ». Ce qui aura permis aux camarades de
NIASSE d' « agir librement et de manière naturelle,
d'éviter la confusion naturelle entre le PS qu'il avait quitté
et un `PS bis' qu'aurait pu être l'AFP ».
Pour échapper à une telle contrainte, la formation
progressiste s'est refusée à être « un
`clone
du PS' ou un parti qui s'oppose à lui comme seule
motivation de son existence et de sa vie, comme seul élément
d'analyse comparative ». Ce que le leader résume en disant
avoir réussi à
ne pas tomber dans ce réflexelà.
Face au PS, l'AFP devait marquer sa différence et
manifester son indépendance au nom de sa propre identité et du
projet national qu'elle porte depuis sa création.
Pour l'AFP, diriger un pays c'est d'une part, « vouloir
comprendre et promouvoir ses propres
valeurs au service de l'intérêt
général (...) pour viser l'efficacité » et
d'autre part, « assurer une conduite équilibrée
des options et des actions qui font l'histoire ». Il
faut donc
« s'affranchir de tous les réflexes de
boulimie, pour que se réalisent, dans l'unité et dans la concorde
nationale, le génie sénégalais et les valeurs d'une
société apaisée et juste » de sorte à
créer ou à restaurer l'éthique politique et
républicaine. Le leader progressiste se dira « prêt
à donner au combat politique (...) une nouvelle dimension, des moyens
nouveaux et une finalité nationale pour la promotion d'un
Sénégal dirigé autrement » pour
l'idéal de liberté dont le pays semblait si
intensément avoir besoin. Dans cette nouvelle manière de
gérer, il « laisse l'entière liberté de
choisir, en toute conscience » et s'en remet à la
liberté pour chaque citoyen
de l' « accompagner et d'évoluer dans un autre
cadre ».
En s'engageant dans l'opposition sénégalaise il
avait « fait le choix de lutter pour l'avènement d'un nouveau
type de société qui refuse définitivement la
division des populations en deux catégories :celle de ceux qui
produisent en souffrant,comme les paysans et les travailleurs de tous niveaux
et celle de ceux qui profitent de la souffrance des autres, dans les
villes et les campagnes, en se hissant à des postes de
responsabilités où ils trônent et croient que leur
pouvoir du moment les couvre de privilèges et les place audessus de la
loi et du droit »34 Ce
34 Allocution de Moustapha NIASSE, commémoration du
3ème anniversaire de l'AFP, Dakar, samedi 24 août
2002 Hôtel Méridien Président
qui traduit une volonté de contribuer, sous un jour et
avec un mode nouveaux, à la nécessaire reprise de conscience des
maux dont souffrait le pays 35
Dans la communication politique de son leader lors de cette
campagne placée sous le sceau de l'éthique et de la morale, les
signes n'auront pas manqué, tel ce mouchoir blanc que s'emploie
à agiter le candidat de l'AFP et de la CODE 2000. Il
avouera en tenir l'inspiration de Kenneth KAUNDA, ancien Président de la
Zambie (ex Rhodésie du Nord) , qui le tenait à la main et du
Président Léopold Sédar SENGHOR qui l'avait toujours dans
sa poche. Sa synthèse à lui aura
été de « l'avoir à
portée de main et de l'agiter » ; le sens qui s'y
attache demeure « une
adhésion à la pureté, à
l'honnêteté, la volonté de vivre en homme libre et de
lutter contre la corruption ».
En tentant d'apprécier le discours politique de
ces deux formations que sont le PS et l'AFP, nous avons pu prendre
la mesure de tout l'antagonisme qu'un tel duel à distance
pouvait sécréter. Le discours sera, sans conteste, apparu
contradictoire pour deux partis aux objectifs foncièrement
opposés; le PS misant sur son maintien au pouvoir par une confiance
renouvelée à son leader au travers d'un nouveau mandat et l'AFP,
nouvelle formation dont le chef de file est issu des rangs socialistes et qui
s'oppose désormais au régime d'Abdou DIOUF.
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