WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

La communication politique dans les élections au Sénégal: l'exemple du PS(Parti Socialiste) et de l'AFP(Alliance des Forces de Progrès) en l'an 2000

( Télécharger le fichier original )
par Hamad Jean Stanislas Ndiaye
Université Gaston Berger de Saint-Louis (Senegal) - Maitrise de Sciences Politiques 2004
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

Le rôle des « valeurs structurantes de la tradition culturelle » et la capacité réactive de

l'individu citoyen.

La compétition politique entre les individus se nourrit en grande partie des hiérarchies sociales

existantes au niveau local et c'est dans les relations de solidarité et de dépendance que l'on peut trouver une explication à l'évolution des allégeances politiques.

À l'augmentation des pouvoirs indirects de l'influence et des pouvoirs fondés sur les usages de

la communication, correspond une augmentation parallèle des contrepouvoirs symboliques exercés dans le débat public. Ainsi que nous le notions, il existe, d'abord, des résistances politiques à l'hégémonie symbolique des pouvoirs fondés sur la communication. Il s'agit, au premier chef, du libre examen et de la fonction critique exercés par les acteurs de la sociabilité dans le cadre de leurs pratiques de communication et de leur activité symbolique.

Il demeure aussi qu' « au Sénégal, (...) le choix électoral entretient une corrélation étroite avec

les mécanismes sociaux ; il procède d'une évaluation discursive certes, mais fondamentalement, c'est un choix motivé par des affinités objectives avant d'être rationnellement suscité » 83

R. Hackfield et J. Sprag, en étudiant le caractère des influences des moyens de communication utilisés dans la campagne électorale de 1984 aux EtatsUnis, sont arrivés à la conclusion que

les gens euxmêmes, conformément à leurs préférences politiques, créent des réseaux

d'informations par lesquels ils reçoivent une information politique. Ces réseaux, dans une mesure significative, se définissent par le contexte social et l'entourage de l'individu.

En d'autres termes, la perception des évènements politiques par les gens est influencée en premier lieu par leur entourage direct. Cela ne signifie pas que les électeurs reçoivent la plus grande part de l'information relative à la politique par des simples conversations avec leurs voisins. En effet, dans la société actuelle les mass média nationaux sont la principale source

83 DIOP A. B., Logiques sociales et démocratie électorale au Sénégal. Essai de reconstitution et d'interprétation d'une trajectoire de crise : l'exemple de Fouta Toro (19832001) Thèse de doctorat en science politique, Université MONTESQUIEU, Bordeaux IV, IEP Bordeaux , CEAN, juillet 2002, p.21

d'informations politiques. Cependant, c'est particulièrement l'entourage et le contexte social qui aident les électeurs à se former une opinion politique sur les évènements actuels et à les pourvoir de sens. L'entourage social est constitué avant tout des gens avec lesquels l'individu interagit (la famille, les amis, les collègues, les voisins).

Le caractère d'influence de l'entourage ou du contexte est défini par le contenu de l'information qui circule dans ces groupes sociaux auxquels l'individu appartient. En discutant avec d'autres personnes, en échangeant avec elles des informations, il entre en contact avec les opinions diffusées dans ce milieu.

C'est que l'allégeance politique est une ruse, une tactique de positionnement. Aussi, convientil d'être souple dans l'analyse de la formation des identités politiques.

En outre, la légitimité est corrélative à l'allégeance partisane d'un individu, c'estàdire à l'ensemble des liens ou relations clientélaire, idéologique, familiale, sexuelle, primordiale qui l'identifient au sein de la scène politique. Le choix de soutenir un groupe politique dépend

de la capacité de ce dernier à répondre, d'une façon efficace, aux besoins de ses adhérents.

Souvent, ces besoins sont articulés sur la famille, sur les exigences de la vie privée et de l'économique.

Et « dans son analyse de l'orientation du comportement politique, A. Lancelot observe qu'en définitive, il s'agit de ne pas occulter le rôle fondamental et déterminant que jouent les valeurs structurantes de la tradition culturelle dans les comportements » 84

Tarik DAHOU note bien encore à ce propos la nécessité de « saisir le politique à partir des hiérarchies sociales et des pouvoirs locaux afin d'appréhender le changement de structures comme le produit de relations locales originales » et qu'il faut donc reconnaître la forte présence et la prégnance des « dépendances parentale et économique au sein des hiérarchies sociales » qui expliquent « les transformations survenant dans les relations politiques » 85.

Revenant sur la place que peuvent occuper le jeu des logiques sociales et surtout les liens de parenté, il part des « institutions aux relations politiques ». Cette lecture du politique à partir des relations n'est pas en soi nouvelle, mais elle conduit à relativiser les objets et les domaines

84 Idem

85 DAHOU Tarik, Entre parenté et politique. Développement et clientélisme dans le delta du Sénégal, Editions

Karthala et Enda Graf Sahel, Collection Hommes et Sociétés, 2004, p.16

du politique. Une telle démarche est particulièrement utile pour décrire, de manière dynamique,

les logiques du politique, mais elle dévoile aussi les effets d'échelles dans les stratégies des acteurs.

Dans cette perspective, les régulations politiques résultent des rapports sociaux quotidiens dans

de nombreuses sphères sociales qui ne sont pas forcément spécialisées dans l'organisation des rapports politiques. Et dans ces rapports sociaux, la parenté ne pourrait être occultée surtout dans nos sociétés africaines (et patriarcales pour la plupart) et celle sénégalaise plus particulièrement.

Cette parenté, selon Tarik DAHOU, « repose sur des différences statutaires qui s'articulent à d'autres types de rapports hiérarchiques pour donner le jour à des relations d'autorité publique »86. On comprend dès lors que « les stratégies politiques peuvent même s'appuyer sur

la parenté dès l'instant où il s'agit de stabiliser les coalitions afin de perpétuer leur hégémonie »87 .

Il apparaît donc que le politique est perçu comme peu autonome de l'environnement social et économique. Les rapports sociaux, de même que l'allocation de ressources, ont une influence déterminante sur les dynamiques politiques. Bien même encore, sont mises à nu, la complexité

et l'indétermination des rapports entre univers politique et univers social.

Cet espace vital propre à une communauté d'individus, la famille, le lieu de la domesticité sociale et politique, n'est pas à négliger pour comprendre le caractère opportuniste et dynamique des allégeances partisanes. La formation des allégeances partisanes n'estelle pas l'espace et le temps d'un certain "marchandage " politique suivant des critères "économiques "

(au sens étymologique), de la compétition des partis politiques sur le "marché des biens

électifs " ? Il faut enraciner la légitimité politique dans les préoccupations quotidiennes.

Des historiens ont bien montré que la légitimité politique résulte bien souvent de la valorisation

de qualités "économiques " bien spécifiques, se rapportant à des formes de clientélisme, relatives à la gestion de problèmes domestiques concernant la subsistance matérielle, la sexualité, la santé, la maladie et générant des gains économiques au profit de "clients ".

86 Ibid., p.105

87 Ibid., p.105

Nous sommes ici au coeur de l'espace public où s'exercent des dynamiques de pouvoir symboliques et matérielles. La prééminence de la communication dans le champ politique s'explique en ce que la fonction de mobilisation prend le pas sur la fonction d'expression des idées et des idéaux et sur la fonction de représentation.

Dans le champ politique s'établissent des représentations sociales; cette façon de concevoir les représentations sociales s'apparente à celle de Murray EDELMAN qui s'intéresse aux constructions symboliques par le biais du langage en politique, dans l'information, dans la bureaucratie et les professions aidantes, entre autres, constructions qui tissent les croyances sociales : caractère rationnel du choix électoral, importance des élections pour l'établissement des politiques gouvernementales, caractère rationnel et même mécanique de l'application administratif et judiciaire des lois.

Le choix dépend donc de l'enjeu des élections, des différents programmes et, bien entendu, de leur crédibilité. La volatilité électorale est alors expliquée par l'existence de ce type d'électeurs qui ne se constituent pas prisonniers d'un parti mais choisissent leur candidat en fonction des avantages qu'il peut leur procurer. Il faut relever les capacités de résistance des citoyens face aux influences des médias qui servent à véhiculer le message politique.

Les études de l'Ecole de Columbia nous renseignent beaucoup à cet effet, sous le regard de

Tanguy WUILLEME 88

Les études relatives aux effets des médias ou de la communication ont aussi été d'un grand apport. Les études que l'on peut appeler inaugurales, sont menées en 1940 par Paul LAZARSFELD et soulignent le fait que, malgré une forte exposition aux messages politiques,

les électeurs continuent d'activer leurs croyances et appartenances antérieures notamment envers les partis politiques 89. Ils révèlent aussi l'absence d'effets massifs de la propagande sur

les électeurs et introduisent la thématique de la fin de l'électeur rationnel, informé et compétent.

88 Tanguy WUILLEME , L'étude des partis sous l'angle de la communication politique : une mise en perspective. in Les partis politiques, quelles perspectives ? ( sous la direction de Dominique andolfatto, Fabienne greffet, Laurent olivier) , Paris, L'Harmattan, 2001, collection logiques politiques.

89 Lazarsfeld P., Berelson B., Gaudet H., 1944, The people Choice : how the voter makes up his mind in a presidential campaign, New York, Columbia university press

En premier lieu, force est de reconnaître que la thématique de l'électeur rationnel conduit à concentrer les études sur la réception, ou sur les leaders d'opinion et non pas sur le « qui ? », c'estàdire sur l'émetteur, notamment les partis politiques.

En second lieu, l'importance de la notion de groupe d'appartenance dans l'analyse des déterminations du comportement de vote maximise le rôle des variables à long terme et tend à occulter l'analyse des facteurs à court terme.

Troisième méditation, celle des réseaux. Et Frédéric SAWICKI de remarquer à cet effet « le rôle des trajectoires sociales et politiques qui déterminent l'acquisition de ressources et de savoirfaire spécifiques à laquelle est liée la constitution de réseaux d'interconnaissances, dont l'existence même est susceptible de générer des formes d'intérêt et d'affinités non évidemment réductibles à l a position sociale des individus » 90

Les réseaux sociaux sont crées autour d'objets multiples (clubs de pensée, groupes confessionnels, spirituels, professionnels, etc.). La communication y occupe des espaces et des temporalités invisibles à ceux qui n'y participent point.

Il apparaît donc que l'électeur ou le récepteur développe certaines capacités de résistances. Il prête une attention sélective aux messages émis ou diffusés en fonction de ses contraintes, ses centres d'intérêt ; de sorte que les messages sont réévalués en fonction des différents paysages mentaux et paradigmes. Et surtout, l'impact dépend des relations interpersonnelles : LAZARSFELD souligne le rôle des groupes de références et des leaders d'opinion proches du récepteur. L'on peut bien être amené à croire que ce dernier s'emploie souvent à réinterpréter

les contenus du message et du discours en fonction de ses ressources culturelles.

Ainsi à la problématique des effets des médias sur le public, s'est substituée la question de savoir ce que les individus faisaient des médias. Elle a permis de mieux mesurer l'impact de ces prétendus facteurs à court terme que sont l'information et la communication.

La thématique de la réception a permis de prendre en compte toutes sortes de publics en reconnaissant la validité d'une approche vers les publics dits populaires comme vers les plus instruits. Cet aspect permet de traiter toutes sortes de dispositifs de communication politique s'adressant à des publics différenciés (d'autant plus qu'au Sénégal il existe un très fort taux

90 SAWICKI F., 1988, Questions de recherche : pour une analyse locale des partis politiques, in Revue Politix, n°2, pp.1327

d'analphabétisme). Il faut donc dépasser « la démocratie des lettrés »91 car « le discours politique pour être opérant, doit absolument épouser l'idiome local pour permettre à tous les citoyens du haut et du bas , de comprendre et de s'approprier le discours des hommes politiques » 92

Par ailleurs, si l'étude s'est portée sur le récepteur dans son individualité, des ouvertures à un aspect collectif se sont fait jour. La question s'est posée de connaître l'impact du contexte et des appartenances de tous ordres sur la réception d'un individu. Des tensions existent effectivement entre les parcours, les inscriptions et les appartenances sociales des individus et la réception qu'ils font d'objets médiatiques. Tensions qui existent également entre les identités, les expériences, les représentations des individus et ces mêmes produits médiatiques. Toutes empêchent une compréhension unilatérale de la réception et des effets des médias.

Il convient ainsi de déplacer la question de l'influence sur les comportements politiques vers la question de l'influence de la communication sur les cognitions et les représentations que les individus se font des situations politiques.

Les recherches en communication politique révèlent alors la sensibilité des électeurs à la conjoncture, à des facteurs de court comme l'information médiatique.

La sensibilité à la conjoncture n'implique pas, pour autant, que l'on dénie le poids des variables à long terme93 mais si les préférences stables existent, elles sont éclairées par l'information à court terme sur la campagne et la situation de l'environnement. Les électeurs développent des processus cognitifs de recherche et de traitement de l'information en correspondance avec les mécanismes persuasifs de l'information.

Il demeure aussi que la thèse de Tarik DAHOU sur le rôle qui peut être valablement prêté à la parenté est à relativiser dans une certaine mesure. En effet, les relations hiérarchiques de la famille ne sont peut être pas plus stables que les relations politiques. Les liens qui unissent les membres de la famille évoluent et pas seulement en fonction de cycles réguliers, mais également au gré d' 'accidents de parcours' liés aux transformations économiques ou politiques. Ces impacts de l'environnement produisent des effets différents selon les réactions

91 Pour reprendre les mots de Aminata DIAW in Sénégal, Trajectoires d'un Etat (dir.), Dakar, CODESRIA, Paris, Karthala, 1992

92 cf. cours de Sociologie électorale

93 GELMAN A., KING G., 1993, Why are American Presidential election Campaign Polls so variable when votes are so predictable ?, British Journal of Political Science, n°23

du groupe, car celuici répond à ces variations par des stratégies nouvelles qui doivent être accordées avec les stratégies individuelles; ce qui ne va pas de soi. Les normes de comportement au sein de la sphère parentale sont également l'objet de négociation en fonction des rapports de force politique et ne se caractérisent pas nécessairement par la stabilité.

C'est pourquoi il est nécessaire de mettre en place une étude plus globale sur la communication politique en prenant en compte l'ensemble des ces données mais aussi en travaillant avec les producteurs des messages comme avec les récepteurs et les médiateurs.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams