II Les archives audiovisuelles dans les programmes
culturels de masse au Bénin
Au Bénin, les archives audiovisuelles, bien que
revêtant une importance indémontrable dans le fonctionnement des
médias et nourrissant les attentes des téléspectateurs ne
sont pas promues jusqu'ici à leur juste valeur. Or, il n'est un secret
pour personne que les médias ont de par leur philosophie et leur nature
un rôle culturel de taille. Perçus ainsi, les aspects qu'ils
secrètent doivent tenir des fonctions similaires, même en dehors
de la radio, de la télévision et du cinéma.
Si la réalité culturelle des archives au
Bénin adopte une lenteur, c'est qu'il y a des facteurs sociologiques qui
constituent un sérieux handicap.
1- Les archives en général dans les
systèmes des valeurs
Une question cruciale qu'on est en droit de se poser est de
savoir : pourquoi au Bénin aime t-on le son et l'image, la radio et la
télévision et qu'au même moment l'indifférence
affichée face aux archives audiovisuelles est frappante ? La
réponse ne serait pas aisée, mais les repères
sociologiques des groupes et les mentalités héritées de la
tradition et de l'histoire peuvent permettre des approches.
D'une manière générale, la
société a une mauvaise perception des archives. Elles sont
souvent définies comme des vieilleries et ne méritent pas de ce
fait l'intérêt social. En outre, ce n'est pas un secret pour
personne que l'Afrique a hérité de l'Ecriture et que pour ce
faire, toute mémoire consignée sur papier n'a pas drainé
pendant longtemps l'assentiment des peuples. On préfère se mettre
à l'écoute de la tradition orale pour visiter les pages du
passé que de se référer aux archives. Dans cette mouvance,
l'oralité magnétisée à travers le son et l'image a
aussi été confondue à tort et à travers au papier.
D'où son rejet, probablement inconscient par la majorité des
composantes sociales. De façon sérieuse, on peut se demander ce
que valent sérieusement une pièce historique, une bande sonore
ancienne et une circulaire de l'époque coloniale dans notre
système social.
Le système de valeur peut être défini comme
un ensemble cohérent ou une hiérarchisation des priorités.
C'est une vision du monde présente dans l'inconscient des pensées
les plus rationnelles. A l'évidence, on ne devient pas fonctionnaire
pour sauver la mémoire collective, mais l'idée première
est de gagner sa vie. Les sociologues ont démontré que les
valeurs s'organisent autour d'un ensemble d'idéaux
caractérisés par des objectifs de grandeur personnelle et de
réussite individuelle. On a ainsi envie de devenir une
célébrité ou un haut cadre. Le plus souvent cette vision
que l'on se fait de soi n'est pas cristallisée dans les rayons
d'archives.
Les tendances lourdes de la société, l'essor des
priorités de groupes et la mauvaise lecture du bien fondé et de
la philosophie interne des archives en général expliquent qu'au
Bénin, des années se soient passées laissant « la
mémoire audiovisuelle dans l'oubli » hormis l'exploitation
épisodique qu'en font les hommes de médias. Les archives
audiovisuelles qui font l'objet de cette étude n'ont alors ou souvent
pas constitué un pôle capital d'intérêt dans les
programmes culturels et autres manifestations susceptibles de magnifier
pourtant leur concours culturel
2-Les archives audiovisuelles dans les calendriers
culturels au Bénin
Les archives audiovisuelles sont des témoins dynamiques
et mouvants du passé. Grâce à elles, le passé se vit
au présent avec une mobilité passionnante. Dans plusieurs pays
où l'on est convaincu de leurs forces sociales et de leurs impacts dans
la formation de l'homme et du citoyen, des actions culturelles d'envergure les
associent fréquemment. Si elles ne commandent pas à elles seules
la mise en route de programmes, elles sont alors rattachées à
d'autres calendriers dans le dessein de démontrer leur valeur
culturelle. Le constat au Bénin révèle une torpeur de ce
point de vue. Les 50 ans de radio et le quart de siècle de
télévision ne sont pas encore exploités par la
société culturelle béninoise.
Si des efforts isolés sont quelque peu perceptibles sur
la mise en valeur du patrimoine photographique du Bénin à travers
des expositions fréquentes, c'est un silence du côté des
archives de radio et de télévision. Dans les autres domaines
artistiques et culturels, il est courant d'observer l'organisation des
vernissages d'expositions divers, des foires culturelles, des colloques de tous
genres. Mais rarement l'occasion de ces manifestations culturelles est saisie
pour sortir les documents audiovisuels anciens de leur mutisme.
Plus au-delà de ce constat, il est à remarquer
que le milieu de la création et de la culture n'est pas dans
l'économie des archives audiovisuelles. Or on peut s'imaginer les riches
enseignements que créateurs, artistes de tous ordres et
opérateurs culturels sont amenés à tirer de ces documents
pour alimenter et nourrir les réflexions actuelles.
En général, si les archives sont
sous-exploitées notamment d'un point de vue culturel, la raison est
à chercher dans la politique culturelle engagée par l'Etat.
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