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Revenu des cordonniers de la ville de Goma et satisfaction des besoins primaires de leurs menages


par Selemani kighoma
Université libre des pays des grands lacs - Graduat 2017
  

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I .3 Relation entre revenu et bien-être

Il serait évidemment difficile de parler du bien-être et bonheur dans un pays de grande pauvreté, quand les besoins primaires ne sont pas couverts, comme la santé, logement, loisir, éducation, la qualité d'emploi, mais aussi les structure familiales cette relation entre revenu et bien-être est loin d'être si mécanique car la corrélation entre le bien-être subjectif et le revenu monétaire est positive et significative, tous ceci s'explique au niveau du bien-être d'ensemble, Si la situation financière ou la santé sont assez peu évoquées comme des raisons d'être heureux aujourd'hui, ils semblent en revanche davantage perçus comme des moyens d'améliorer le bien-être. Réciproquement, précarité financière et mauvaise santé sont les deux principaux vecteurs du malheur. Autrement dit, les problèmes d'argent ou les difficultés de santé constituent un obstacle sérieux au bonheur mais avoir des revenus ou une bonne santé ne peuvent, seuls, être la source du bonheur26(*).

I.3.1Le critère égalitariste

La doctrine éthique appelée utilitarisme - dont se réclament notamment Adam Smith, Jeremy Bentham, John Stuart Mill - retient le critère du bien-être collectif, et procède à des comparaisons interpersonnelles de bien-être (ou d'utilité). Une façon de faire, qui remonte au moins à Bentham, considère tous les hommes identiques du point de vue de l'utilité, le bien-être collectif étant conçu comme la somme de bien-être individuel. Cette somme est maximale lorsque la répartition des ressources est strictement égalitaire, du moins si on suppose que le bien-être individuel augmente de plus en plus lentement avec la quantité consommée, ce qui semble raisonnable. En effet, dans ce cas, tant que la répartition des ressources est inégalitaire le bonheur collectif peut être augmenté en prélevant un peu de ses ressources au plus riche pour les donner au plus pauvre. Et ce, ainsi de suite, jusqu'à ce que tout le monde soit sur le même plan. À cet argument en faveur de l'égalitarisme, on peut cependant en opposer un autre la redistribution des revenus a un effet négatif sur les incitations ceux sur lesquels les prélèvements sont faits mettront moins d'ardeur au travail, ce qui finalement peut avoir un effet négatif sur le bien-être collectif (la « taille du gâteau » à partager étant moindre que s'il n'y avait pas eu redistribution). À ce propos, on dit parfois qu'il y a dilemme entre équité et efficacité27(*).

Premier problème : le bien-être ne se réduit pas au seul revenu. Le prix Nobel Amartya Sen, qui participera à la commission Stiglitz, insiste depuis de nombreuses années sur la nécessaire prise en compte d'autres éléments : la santé d'une personne et son niveau d'éducation sont ainsi des éléments complémentaires, des attributs nécessaires pour que cette personne soit capable de jouir de son revenu et de traduire celui-ci en «bien-être». Les travaux de Sen ont conduit à la construction des «indices de développement humain» qui retiennent trois indicateurs : le revenu par tête, l'espérance de vie à la naissance et le niveau moyen d'éducation de la population. Cet éclairage permet déjà d'affiner la vision obtenue par le seul revenu moyen par habitant et modifie, parfois de manière importante, l'ordre des pays dans l'échelle du développement28(*).

Mais une telle approche reste limitée, car elle ne s'appuie que sur des moyennes. Or, si l'on s'en tient au seul revenu, un même revenu moyen peut en fait cacher des situations très différentes. Comme 200 euros sont beaucoup plus utiles à un sans-abri qu'au président d'une banque, si le revenu moyen augmente d'une telle somme, il n'est pas indifférent de savoir si cette hausse profite à l'un plutôt qu'à l'autre. D'où la nécessité, dans la mesure de bien-être d'une population comme de l'évolution de ce bien-être, de tenir compte des disparités de situation. Des indices d'inégalité permettent alors de représenter de manière synthétique ces disparités. En gros, il s'agit de passer du revenu moyen à un calcul du bien-être moyen. Mais si l'hypothèse que 200 euros sont plus utiles à un pauvre qu'à un riche est peu contestable, il faut quantifier cette différence d'utilité.

En supposant que le gain serait à peu près identique pour le pauvre ou pour le riche, il suffit de connaître le revenu moyen, sans se préoccuper de sa répartition ; mais si on estime que 200 euros de plus sont à peu près inutiles à un très riche, on se soucie surtout de la pauvreté et on doit connaître la manière dont le revenu se distribue dans la population.

Le choix d'un indice est ici une véritable décision politique. En outre, s'il traduit une vision de la société, son calcul se heurte à de considérables difficultés pratiques. Car, pour connaître la répartition du revenu dans la population, il faut disposer d'informations détaillées. On peut relever de telles informations en conduisant des enquêtes mais on peut également s'appuyer sur des données d'origine administrative, notamment fiscales, particulièrement utiles.29(*)

La distribution du revenu ne suffit pas pour connaître la santé moyenne (mesurée par l'espérance de vie), encore faut-il savoir de quelle manière cette santé se répartit dans la population. Encore plus délicat, il faut évaluer comment la santé est associée au revenu, l'inégalité de santé renforçant bien souvent la disparité des revenus. Et ce qui est vrai de la santé et des revenus s'applique aux autres éléments à prendre en compte : patrimoine, éducation, environnement.

Pigou n'a pas seulement parlé des externalités, des taxes contre les monopoles et de l'encouragement aux industries à rendement croissant pour faire baisser les coûts. Il est aussi allé puiser jusque chez le philosophe-économiste Henry Sidgwick (1838-1900) la problématique d'une divergence possible entre les intérêts privés et les intérêts sociaux et chez

Sidgwick, repris par Marshall, cette idée déjà vieille que l'utilité marginale du revenu était décroissante à mesure que le revenu augmentait. Si l'on ajoute à cela l'idée des utilitaristes comme Sidgwick d'après lesquelles on finirait par mesurer l'utilité comme la température ou, encore mieux, comme des molécules, on a les deux points qui amèneront une riposte de Lionel Robbins30(*).

La théorie du bien-être de Pigou repose sur deux propositions fondamentales.

La première dit que tout accroissement de la somme disponible des biens économiques va dans le sens d'une augmentation du bien-être. Il appartient à celui qui conteste cette proposition, dit-il, de faire la preuve du contraire dans les faits. La seconde se veut aussi de nature positive : étant donné l'utilité décroissante du revenu ou de la richesse, tout transfert de richesse des plus riches aux plus pauvres qui n'a pas pour effet de décourager et donc de diminuer la production représente un accroissement de bien-être. Non seulement le bien-être économique défini ici est-il la somme des bien-être individuels, mais on peut également prendre pour acquis que dans un environnement identique, la ville de Leyde et la ville de Manchester en Angleterre, par exemple, les goûts de la population de ces deux villes et un accroissement du revenu veut dire à peu près la même chose pour tous. Alors on peut faire des comparaisons interpersonnelles et comparer les deux villes dans un graphique où l'utilité est une fonction du revenu, l'accroissement étant de plus en plus faible à mesure que le revenu augmente. Ainsi, la ville qui a un revenu plus élevé perdra moins en utilité, si on la taxe, que la plus pauvre gagnera en utilité si on lui transfère le revenu de cette taxe, d'où la justification du transfert qui apporte un solde social positif en utilité31(*).

* 26P.Yves GEOFFARD, mesurer le les revenus ou le bien-être? Paris,2008, disponible sur www.liberation.fr/tribune/2008/02/25/mesurer-les-revenus-ou-le-bien-etre_65904

* 27E.BINICOURT, économie «  économie du bien-être » disponible sur www.universalis.fr/encyclopedie/microeconomie-economie-du-bien-etre/2-du-bien-etre-individuel-au-bien-etre-collectif/

* 28P. Yves GEOFFARD,op.cit.p.2.

* 29Idem .pp.5-6

* 30R. PELLETIER, op.cit. pp.7-8.

* 31Idem. P.11.

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