Section 2 :
Estimations du modèle économétrique et discussions des
résultats
Dans cette section, nous présentons et discutons les
principaux résultats de nos analyses empiriques en les comparants avec
ceux obtenus par d'autres chercheurs. Nous nous focalisons en particulier sur
l'effet du capital humain sur la croissance économique en RDC.Nous
allons maintenant présenter la spécification économique de
la fonction :
lpibhab = f (lich, lfbcf, lapd)(4)
Une fois vérifiée la stationnarité des
variables pour éviter les régressions fallacieuses, nous estimons
le modèle ARDL dont l'équation est donnée par (4). Nous
utilisons la méthode robuste de Newey et West (1987) pour corriger les
écarts-type de l'estimation. Le tableau suivant présente les
résultats obtenus.
a) Décalage
optimal
Nous avons utilisé le critère de Akaike (AIC) pour
choisir le modèle ARDL optimal, c'est-à-dire celui qui
présente des résultats statistiquement significatifs et les plus
simples.
Figure 11 :Sélection du modèle
optimal AIC
Le critère d'Akaike (AIC) nous donne le décalage
optimal compatible avec la série des variables. Le modèle ARDL
(2, 0, 3, 4) est plus optimal parmi le top 20 des modèles
proposés, car il offre la plus petite valeur de AIC. Les
résultats de la régression de modèle montrent que le
pouvoir explicatif du modèle est élevé avec un coefficient
de détermination de 0.99, ceci veut dire que 99% des fluctuations de la
croissance économique s'expliquent par les variables exogènes du
modèle c'est-à-dire l'ajustement de notre modèle ARDL
s'avère de très bonne qualité. Cette hypothèse sera
rigoureusement testée dans l'une des prochaines sous-sections au niveau
de l'analyse de robustesse du modèle.
b) Diagnostic du
modèle
Tableau 5 : Statistiques de diagnostic du
modèle
Hypothèses du test
|
Tests
|
Valeurs (probabilités)
|
Autocorrélation
|
Breusch-Godfrey
|
1.338294 (0.5121)
|
Hétéroscédasticité
|
Breusch-Pagan-Godfrey
|
7.820349 (0.7990)
|
Normalité
|
Jarque-Bera
|
0.394898 (0.820822)
|
Spécification
|
Ramsey (Fisher)
|
0.219320 (0.6425)
|
Source : auteur (nos estimations sur Eviews
10)
Le test de Breusch-Godfrey, basé sur la statistique de
Fisher, révèle que les erreurs ne sont pas
auto-corrélées, laprobabilité critique étant
supérieures à 5%. Le test Breusch-pagan-Godfrey, quant à
lui, renseigne que les erreurs sont homoscédastiques, au regard des
probabilités critiques associées aussi bien à la
statistique de Fisher. Enfin, le test de Jarque-Berra indique que les erreurs
sont distribuées selon la loi normale, vu que la probabilité
critique (p-value) dépasse le seuil de 5%. Le modèle
ARDL (2, 0, 3, 4) estimé est globalement bon et expliquent à
99.6% la dynamique du PIB par tête en RDC, durant la période
allant de 1970 à 2021 et le modèle est bien
spécifié confirme le test de spécification de Ramsey.
Figure 12 : Test de stabilité des
paramètres
En observant les figures ci-dessus nous remarquons que la
courbe ne coupe pas le corridor. Par conséquent, le modèle est
ponctuellement et structurellement stable durant la période sous
analyse.
c) Test de
cointégration aux bornes
Ce test nous facilite la vérification d'une existence
de la relation de cointégration entre les séries
sous-études, c'est-à-dire, il nous permet de vérifier si
les variables étudiées entretiennent des relations à long
terme. La statistique du test est celle de Fisher, elle est comparée aux
valeurs critiques, qui forment des bornes (inférieures et
supérieures) ;
Si Fisher > borne supérieure:
cointégrationéxiste
Si Fisher < borne inférieure:
cointégration n'éxiste pas
Si borne inférieure < Fisher <borne
supérieure: pas de conclusion
Tableau 6 : Résultats du test de
cointégration de pesaran et al. (2001)
Variables
|
Lpibhab, Lich, Lfbc, Lapd
|
F-stat calculée
|
6.017002
|
Seuil critique
|
Borne inférieure
|
Borne supérieure
|
1%
5%
10%
|
3.65
2.79
2.37
|
4.66
3.67
3.2
|
Source : auteur (nos estimations sur Eviews
10)
Dans le tableau ci-haut, les résultats du test sont
tels que la valeur de F-stat est supérieure à celle de la borne
supérieure, il y a donc l'existence de la cointégration entre les
variables sous étude, donnant ainsi accès à l'estimation
d'une relation de long terme pour saisir lesdits effets de l'indice de capital
humain, de la formation brute de capital fixe, et de l'aide publique au
développement sur la croissance économique.
d) Coefficients de long
terme et la dynamique à court terme
1. Coefficients de court
terme
Le modèle ARDL nous a permis d'évaluer les
effets dynamiques des variables exogènes sur la variable endogène
au cours du temps. Le modèle ECM associé nous permet
d'évaluer les effets à court terme des variables
indépendantes sur la variable dépendante. Les résultats
sont présentés dans le tableau 7 ci-dessous. Comme on peut le
voir dans ce tableau, le coefficient d'ajustement ou force de rappel mesure la
vitesse à laquelle la variable dépendante revient à son
niveau d'équilibre de long terme après un choc. Et est
statistiquement significatif ; il est négatif et compris entre
zéro et un (en valeur absolue). Ce qui garantit un mécanisme de
correction d'erreur et donc l'existence d'une relation de long terme
(cointégration) entre les variables.
Tableau 7 : Résultats d'estimation des
coefficients de court terme
Variable dépendante D(LPIBHAB)
|
Variables exogènes
|
Coefficients
|
Ecart-type de coefficients
|
t-Statistic
|
Probabilités
|
D(LPIBHAB(-1))
|
0.669863
|
0.083631
|
8.009740
|
0.0000
|
D(LFBCF)
|
0.067785
|
0.021459
|
3.158886
|
0.0033
|
D(LFBCF(-1))
|
-0.059816
|
0.024847
|
-2.407374
|
0.0215
|
D(LFBCF(-2))
|
-0.064111
|
0.023333
|
-2.747650
|
0.0094
|
D(LAPD)
|
0.006235
|
0.009635
|
0.647156
|
0.5218
|
D(LAPD(-1))
|
-0.005024
|
0.009926
|
-0.506169
|
0.6159
|
D(LAPD(-2))
|
0.012923
|
0.009916
|
1.303322
|
0.2010
|
D(LAPD(-3))
|
-0.025001
|
0.009209
|
-2.714896
|
0.0102
|
CointEq(-1)*
|
-0.265151
|
0.045795
|
-5.789931
|
0.0000
|
Source : Résultats obtenus à l'aide du
logiciel Eviews10
Les coefficients des variables indépendantes mesurent
les effets à court terme de ces variables sur la variable
dépendante. On peut interpréter les résultats comme suit
:
v Une augmentation de 1% du taux de croissance du PIBHAB au
retard 1 entraîne une augmentation de 0.67% du taux de croissance du
PIBHAB au temps courant, toutes choses égales par ailleurs. Ce
résultat est significatif au seuil de 1%.
Ces résultats suggèrent que la croissance
économique en RDC est fortement influencée par la dynamique de la
croissance passée. En effet, une augmentation du taux de croissance du
PIBHAB au retard 1 se traduit par une augmentation du taux de croissance du
PIBHAB au temps courant, ce qui indique un effet d'entraînement positif
de la croissance. Ce résultat est conforme à la théorie de
la convergence conditionnelle, selon laquelle les pays ayant un niveau initial
de revenu par habitant plus faible tendent à croître plus
rapidement que les pays plus riches, en rattrapant leur retard de
développement. Ce résultat est également cohérent
avec les études empiriques qui ont mis en évidence l'existence
d'un effet de persistance de la croissance dans les pays en
développement, notamment en Afrique subsaharienne (Barro et
Sala-i-Martin, 1995 ; Ndulu et O'Connell, 2008 ; Fosu, 2015).
v Une augmentation de 1% du taux de croissance de la FBCF au
temps courant entraîne une augmentation de 0.07% du taux de croissance du
PIBHAB au temps courant, toutes choses égales par ailleurs. Ce
résultat est significatif au seuil de 1%.
Ces résultats suggèrent que la croissance de la
formation brute de capital fixe (FBCF) a un effet positif et significatif sur
la croissance du produit intérieur brut par habitant (PIBHAB) en RDC. En
effet, une augmentation du taux de croissance de la FBCF au temps courant se
traduit par une augmentation du taux de croissance du PIBHAB au temps courant,
ce qui reflète l'impact de l'investissement sur la productivité.
Ce résultat est conforme à la théorie endogène de
la croissance, selon laquelle l'accumulation du capital physique est un facteur
de progrès technique et d'innovation. Ce résultat est
également en accord avec les études empiriques qui ont mis en
évidence le rôle positif de l'investissement dans la stimulation
de la croissance dans les pays en développement, notamment en Afrique
subsaharienne (De Long et Summers, 1993 ; Levine et Renelt, 1992 ; Mankiw et
al. 1992).
v Une augmentation de 1% du taux de croissance de la FBCFde
manière cumulée entraîne une diminution de 0.123% du taux
de croissance du PIBHAB au temps courant, toutes choses égales par
ailleurs. Ce résultat est significatif au seuil de 5%.
Ces résultats indiquent que la croissance de la
formation brute de capital fixe (FBCF) a un effet négatif et
significatif sur la croissance du produit intérieur brut par habitant
(PIBHAB) en RDC. En effet, une augmentation du taux de croissance de la FBCF de
manière cumulée se traduit par une diminution du taux de
croissance du PIBHAB au temps courant, ce qui reflète un effet de
déplacement de la production. Ce résultat est contraire à
la théorie néoclassique et endogène de la croissance,
selon lesquelles l'accumulation du capital physique est un facteur positif de
la croissance économique. Ce résultat est également en
contradiction avec les études empiriques qui ont souligné le
rôle positif de l'investissement dans la promotion de la croissance dans
les pays en développement, notamment en Afrique subsaharienne (De Long
et Summers, 1993 ; Levine et Renelt, 1992 ; Mankiw et al. 1992). Une possible
explication de ce résultat paradoxal est que la FBCF en RDC est
inefficace ou mal allouée, en raison de problèmes
institutionnels, politiques ou infrastructurels.
v Une augmentation de 1% du taux de croissance de l'APDau
retard 3 entraîne une diminution de 0.025% du taux de croissance du
PIBHAB au temps courant, toutes choses égales par ailleurs. Ce
résultat est significatif au seuil de 1%.
Ces résultats suggèrent que la croissance de
l'aide publique au développement (APD) a un effet négatif et
significatif sur la croissance du produit intérieur brut par habitant
(PIBHAB) en RDC. En effet, une augmentation du taux de croissance de l'APD au
retard 3 se traduit par une diminution du taux de croissance du PIBHAB au temps
courant, ce qui reflète un effet de substitution de l'aide à
l'effort national. Ce résultat est conforme à la théorie
de la malédiction de l'aide, selon laquelle l'APD peut avoir des effets
pervers sur la croissance économique, en réduisant les
incitations à la bonne gouvernance, à la mobilisation des
ressources internes et à la diversification des exportations. Ce
résultat est également cohérent avec les études
empiriques qui ont mis en évidence l'existence d'un seuil critique d'APD
au-delà duquel l'aide devient contre-productive pour la croissance dans
les pays en développement, notamment en Afrique subsaharienne (Easterly
et al. 2004 ; Rajan et Subramanian, 2008 ; Minoiu et Reddy, 2010).
v Le taux de croissance de l'indice de capital humain n'exerce
pas d'effet sur le taux de croissance du PIBHAB en RDC.
L'indice de capital humain (ICH) ne semble pas influencer la
croissance du produit intérieur brut par habitant (PIBHAB) en RDC. Cette
conclusion rejoint celle de Pritchett (2001) qui a étudié 127
pays entre 1960 et 1990. Selon lui, le capital humain, mesuré par le
nombre moyen d'années de scolarisation, n'a pas d'effet positif sur la
croissance, et parfois même un effet négatif. Il propose trois
raisons : l'éducation ne rend pas les travailleurs plus productifs,
l'éducation ne correspond pas aux besoins du marché, ou
l'éducation est utilisée à des fins non
économiques. Le capital humain intervient cependant dans le processus
d'ajustement à long terme en cas de déséquilibre à
court terme.
2. Coefficients de long
terme
Le coefficient de correction d'erreur étant négatif
et statistiquement significatif, il est possible d'estimer la relation de long
terme. Il s'agit en fait de régresser l'équation (9) à
laquelle nous sommes parvenus dans le troisième chapitre. Les
résultats sont les suivants :
Tableau 8 : Résultats d'estimation des
coefficients de long terme
Variable dépendante D(LPIBHAB)
|
Variables exogènes
|
Coefficients
|
Ecart-type de coefficients
|
t-Statistic
|
Probabilités
|
LICH
|
-2.567397
|
0.183132
|
-14.01938
|
0.0000
|
LFBCF
|
0.308032
|
0.059018
|
5.219272
|
0.0000
|
LAPD
|
0.006908
|
0.053303
|
0.129607
|
0.8976
|
C
|
6.313956
|
0.943482
|
6.692184
|
0.0000
|
Source : Résultats obtenus à l'aide du
logiciel Eviews10
Les coefficients des variables indépendantes mesurent
les effets marginaux de ces variables sur la croissance économique. On
peut interpréter les résultats comme suit :
Une augmentation de 1% du taux de croissance de l'ICH
entraîne une diminution de 2.57% du taux de croissance du PIBHAB, toutes
choses égales par ailleurs. Ce résultat est significatif au seuil
de 1%.
Ces résultats indiquent que l'indice de capital humain
(ICH) a un effet négatif et significatif sur la croissance
économique en RDC. En effet, une augmentation du taux de croissance de
l'ICH entraîne une diminution de la croissance économique, ce qui
reflète l'impact négatif de la faible qualité de
l'éducation et de la santé sur la productivité et
l'innovation. Ce résultat est contraire à la théorie de la
croissance endogène, selon laquelle le capital humain est un facteur
positif de la croissance économique, en favorisant le
développement des compétences, la diffusion du savoir et la
création de nouvelles technologies. Ce résultat est
également en contradiction avec les études empiriques qui ont mis
en évidence le rôle positif du capital humain sur la croissance
dans les pays en développement, notamment en Afrique subsaharienne
(Barro, 1991 ; Mankiw et al. 1992 ; Benhabib et Spiegel, 1994). Une possible
explication de ce résultat paradoxal est que l'ICH en RDC est mal
mesuré ou mal utilisé, en raison de problèmes
institutionnels, politiques ou infrastructurels.
Une augmentation de 1% du taux de croissance de la FBCF
entraîne une augmentation de 0.31% du taux de croissance du PIBHAB,
toutes choses égales par ailleurs. Ce résultat est significatif
au seuil de 1%.
Ces résultats indiquent que la formation brute de
capital fixe (FBCF) a un effet positif et significatif sur la croissance du
produit intérieur brut par habitant (PIBHAB) en RDC. En effet, une
augmentation du taux de croissance de la FBCF entraîne une augmentation
du taux de croissance du PIBHAB, ce qui reflète l'impact de
l'investissement sur la productivité et l'innovation. Ce résultat
est conforme à la théorie endogène de la croissance, selon
laquelle l'accumulation du capital physique est un facteur de progrès
technique et d'innovation. Ce résultat est également en accord
avec les études empiriques qui ont mis en évidence le rôle
positif de l'investissement dans la stimulation de la croissance dans les pays
en développement, notamment en Afrique subsaharienne (De Long et
Summers, 1993 ; Levine et Renelt, 1992 ; Mankiw et al. 1992).
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