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Dynamiques socioculturelles dans la construction de l'intégration régionale en Afrique Centrale CEMAC


par Yvan Nathanaël NOUBISSI
Université Yaoundé 2 Soa - Master 2 en science politique 2019
  

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PARAGRAPHE2 : LES STRATEGIES ET RATIONALITES DES ACTEURS COMME METHODES POUR UNE REVALORISATION DES DYNAMIQUES SOCIOCULTURELLES.

Par là nous voulons dire que les acteurs dans l'optique de rendre viable l'intégration sous régionale dans cet espace mobilisent des stratégies (A) mais également leur rationalité (B)

A- LES STRATEGIES DES ACTEURS

Dans l'optique d'atteindre leurs objectifs les acteurs mobilisent des mécanismes qu'il est important de souligner et mettre en évidence parce qu'ils jouent un rôle dans l'intégration sous régionale de ces trois espaces. Ainsi elles sont élaborées à deux niveaux. D'une Part les autorités locales à travers les initiatives telles que la coopération décentralisée et le programme de développement intégré de la zone des trois frontières (PDIZTF) mais également par les associations à travers leurs initiatives.

1- Stratégie des autorités de la localité

La coopération décentralisée entendu comme l'ensemble des actions de coopérations internationales menées par convention dans le but d'intérêt commun par une ou plusieurs collectivités215(*) est un élément stratégique mobilisé dans les relations qu'entretiennent ces collectivités en ce sens qu'elle favorise l'intégration sous régionale. Ainsi les collectivités locales sont devenues avec leurs coopérations des acteurs à part entière des relations216(*)

A la base les trois espaces à savoir le Gabon, la Guinée équatoriale et le Cameroun ont une proximité géographique et culturelle qui pèse en leur faveur dans la dynamique d'intégration sous régionale. En effet sur le plan géographique la ville de kyé-ossi est la seule ville du Cameroun qui est limitrophe avec deux pays à savoir le Gabon et la Guinée équatoriale. Sur le plan culturel ils sont traversés par une même ethnie nommée « fang ». Dans cet optique et sous tendu par ces logiques les autorités de meyo-kyé, ébebiyin et kyé-ossi développent une coopération qui va être taxé de coopération décentralisée, ceci en droite ligne avec le décret n°2011/1116 PM du 26 avril 2011 fixant les modalités de la coopération décentralisée au Cameroun qui stipule en article 2 « la coopération décentralisée peut s'opérer entre les collectivités territoriales étrangères d'autre part »217(*). Ainsi la coopération décentralisée dans cet espace géographique regroupe un ensemble de modalité et d'implication d'actions politiques, socio-économique, sportive et culturelle qui joue un rôle considérable dans la dynamique d'intégration.

Sur le plan politique, figure ce qu'on a appelé « la diplomatie des villes frontalières »218(*). En effet durant les célébrations des fêtes d'indépendance ou autre cérémonies nationales, les préfets et maires de chaque localité n'hésitent pas à inviter leurs homologues vivant de l'autre côté des frontières à y prendre part. À titre d'exemple, le 17 août qui commémore la date de l'accession du Gabon à la souveraineté internationale, les communautés camerounaises et Equato-guinéenne vivant à méyo-kyé défilent sous les couleurs de leurs pays respectif. Cette situation de manière connotée laisse entrevoir sur le plan relationnel une certaine harmonie et convivialité entre ces peuples des pays frontaliers. Ce qui de manière conséquente impacte positivement le processus d'intégration dans cet espace.

Sur le plan socio-économique cette coopération se caractérise par diverse aides. C'est ainsi que les natifs du Gabon et de la Guinée équatoriale n'hésitent pas à venir chercher la main d'oeuvre au Cameroun pour les travaux champêtres et de construction219(*). De même pour les sociétés présentent en Guinée équatoriale comme celle chargées du ramassage des ordures nommé « ayountamento » exploitent une partie très importante la main d'oeuvre camerounaise.

Sur le plan sportif c'est surtout pendant les vacances de fin d'année scolaire que des jeunes des villages situés de part et d'autre des frontières organisent des tournois de football comme le célèbre tournoi « le championnat des trois frontières » qui se déroulent depuis 2010 qui regroupe les équipes de meyokyé ( les 06 frères de meyo-kyé) venu du Gabon, Aviosto d'Ebibiyin ( guinée équatoriale) et bien sur celles de kyé-ossi. Pendant ces moments il est question de valoriser la fraternité mais également l'amour entre frères de ces trois espaces. Cela favorise bien évidemment l'intégration dans le sens où il permet une véritable consolidation des liens en dépassant les limites établies par les frontières. De ce fait, la coopération décentralisée comme levier stratégique permet non seulement un rapprochement des peuples à travers l'homogénéité culturelle mais également entre les collectivités territoriales qui sont en principe des relais de politiques édictées depuis le centre selon la dynamique (centre-périphérie). Cependant ce processus de coopération décentralisée dans la région des trois frontières relève que des rapports de bon voisinage et ne repose sur aucune base juridique. C'est dans ce sens l'initiative programme développement intégré de la zone des trois frontières a été pensée.

Le PDIZT est créé à travers l'arrêté N°2013/8885/CAB/PM de 13 novembre 2013 et placé sous l'autorité du ministre en charge de l'intégration régionale. Il se justifie par la volonté des chefs d'Etats de cet espace de créer un marché commun plus ouvert et plus dense et par conséquent accélérer le processus d'intégration sous régionale. Cette réalité est plus ou moins perceptible à travers ses missions qui déroulent un ensemble d'axes d'intervention et son déploiement dans la zone d'AMBAM.

2- La stratégie des associations de commerçants

Les commerçants de la localité de kyé-ossi développent un mécanisme basé sur différents contrats220(*) avec les acheteurs Gabonais et équato-guinéens dans l'optique de viabiliser l'intégration sous régionale dans cet espace mais également pour très facilement évacuer leur produits. En effet, ces contrats sont de plusieurs types, ils peuvent être des contrats de confiance, de fidélisation et de troc.

Le contrat de confiance consiste ici à bâtir une relation de confiance entre les commerçants et les grossistes venu de l'autre côté des frontières. Ainsi, les commerçants gabonais et équato-guinéens réputés pour leur fort pouvoir d'achat, réussissent à travers leurs achats à nouer une relation de confiance avec les commerçants camerounais dans le sens ou ceux peuvent percevoir de l'argent des semaines avant le chargement des marchandises dans les camions.

Le contrat de fidélisation quant à lui consiste pour les commerçants à continuer à traiter avec l'acheteur Gabonais ou Equato guinéen quand bien même l'ancien contrat d'achat n'est pas arrivé à terme. Ainsi les commerçants de la filière tomate en l'occurrence par les commerçants qui achètent à foumbot pour livrer aux guinéens au marché central de kyé-ossi. Si parvenu à kyé-ossi leur clients n'ont pas la totalité de leur argent et désire faire de nouveau crédits ils acceptent sans hésitation.

Des contrats de troc sont constatés principalement sur la filière haricot sec qui conduit les opérateurs à échanger des volumes d'haricot sec contre du vin rouge importé de Guinée Equatoriale. Les deux parties sont à la fois fournisseur et client. La transaction se fait entre un commerçant basé au Cameroun et un autre commerçant basé en Guinée Equatoriale. L'idée est d'avoir pour un même acteur un magasin de haricot et un magasin de Vin. Le commerçant Camerounais qui s'engage dans cette relation contractuelle est à la recherche des nouveaux débouchés pour son haricot. De ce fait c'est lui qui se rend en premier sur le marché Guinéen à la recherche d'un partenaire commerçant de vin qui accepterait de contracter avec lui. L'inconvénient ici est qu'il faut avoir un gros capital. Mais l'avantage est qu'il peut réduire les risques de non-paiement car les intérêts coïncident un peu chez les deux partenaires. Ainsi à travers ces contrats les commerçants réussissent très minutieusement à bâtir de bonnes relations avec les commerçants Gabonais et Equato Guinéens et cela participe véritablement à revaloriser les dynamiques socioculturelles dans le sens où c'est par le canal de la langue traditionnel, du moins la majeure partie de ces opérations prennent en compte cette variable-là.

B- LES RATIONALITES DES ACTEURS

La rationalité peut être perçut ici en terme de retombé, de gain ou même de bénéfice pour les acteurs. Ainsi dans la dynamique des échanges entre ces trois espaces l'objectif pour chacun est bien évidemment de tirer un profit. Cela dit chacun maximisent sur ses profits et minimisent ses pertes. Dans ce sens, Max Weber distingue deux type de rationalité à savoir la rationalité en valeur entendu comme une action qui consiste à agir par conviction et dans laquelle l'acteur est guidé par une certaine conviction221(*). Cette rationalité qui est différente de la rationalité en finalité qui elle renvoie à une action qui relie les moyens et objectif poursuivi parce qu'il est question pour l'acteur de comparer les objectifs, les moyens possibles pour l'atteindre et chercher les moyens efficaces pour pouvoir y parvenir222(*). Transposé dans le cadre de nos observations de terrains ces deux types de rationalité coexistent dans les actions que les différents Etats posent.

Les autorités locales à savoir le chef traditionnelle et le maire de kyé-ossi dans leur multiple entreprise partent du principe selon lequel les gabonais et équato guinéens sont des frères pour eux parce que appartenant à l'ethnie fang. Cette situation permet donc à ce que toutes initiatives entreprise par ces autorités aient une dimension inclusive parce que intégrant les pays frères. Cela dit le fait qu'ils partagent les mêmes valeurs culturelles affecte leurs pensées et leurs actions et les amènent à communier ensemble lors des évènements heureux ou malheureux peutimporte l'existence des frontières.

La rationalité en finalité quant à elle est perceptible à travers les méthodes et moyens dont se donnent non seulement les autorités de la localité mais également les associations de commerçants. En effet pour ce qui est des associations des commerçants ceux-ci savent que les étrangers gabonais et équato-guinéens ont un pouvoir d'achat assez consistent par conséquent méritent d'être pris très au sérieux. Dans cette optique ils prennent des risques en laissant des marchandises à crédit avec l'intention d'écouler très facilement leurs produits.

Au niveau des autorités le principe de la diplomatie est celui qui est mobilisé dans l'intention de maintenir de bonne relation avec les étrangers gabonais et équato-guinéens. Cela dit malgré le mauvais traitement dont sont le plus souvent victime les camerounais en Guinée Equatoriale ceux-ci s'arrangent à ce que les populations de kyé-ossi les traitent dignement lorsqu'ils viennent effectuer des achats parce que sachant qu'ils font la force de l'économie de la localité parce que disposant d'un pouvoir d'achat assez consistant.

* 215 Bertrand Gallet, « les enjeux de la coopération décentralisée »,in revue internationale et stratégique,2005, n°57, P.61-70

* 216ibidem

* 217 Article 2 du décret n°2011/1116 du premier ministre fixant les modalités de coopération décentralisée

* 218ARBARET-SCHU, Cynthia (2002), « Les villes européennes, attracteurs étranges de formes frontalières nouvelles », dans Bernard RHEITEL et al. (dir.), Villes et frontières, Paris, Anthropos, p. 51-62

* 219Christian-Yann Messe Mbega, « Les régions transfrontalières: un exemple d'intégration sociospatiale de la population en Afrique centrale ? » in éthique publique, 2015, n°17, p.10

* 220 Le contrat renvoie ici à un accord non formel qui lie le vendeur à l'acheteur. Il est le plus sous verbal et par conséquent non écrit.

* 221 François Mazuir, « le processus de rationalisation chez max weber »in société, 2004 (n°86), p.119-124

* 222 François Mazuir,op.cit

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