Dynamiques socioculturelles dans la construction de l'intégration régionale en Afrique Centrale CEMACpar Yvan Nathanaël NOUBISSI Université Yaoundé 2 Soa - Master 2 en science politique 2019 |
SECTION2 : LES FORMATIONS POLITICO-JURIDIQUES REVALORISANT LES DYNAMIQUES SOCIOCULTURELLES DANS L'INTEGRATION REGIONALE DE L'ESPACE CEMACLa volonté de faire de l'espace cemac une zone véritablement intégrée au travers des dynamiques socioculturelles est perçu à plusieurs niveaux. D'abord au niveau communautaire à travers le traité de l'acte constitutif de la cemac (paragraphe1) ensuit au niveau des coopérations qu'entretiennent les Etats entre eux (paragraphe2) PARAGRAPHE1 : LE TRAITE DE L'ACTE CONSTITUTIF DE LA CEMAC COMME SUPPORT DE VALORISATION DES DYNAMIQUES SOCIOCULTURELLES DANS LE PROCESSUS D'INTEGRATIONPar là nous voulons dire que les dynamiques socioculturelles comme levier pour une intégration sous régionale est manifesté à travers l'article 29 de l'acte constitutif (A) mais également à travers l'article 46 (B) qui rentre chacun dans les politiques sectorielles de l'organisme. A- L'ENSEIGNEMENT, LA RECHERCHE ET LA FORMATION PROFESSIONNELLE COMME POINTS CRUCIAUX POUR L'INTEGRATION SOUS REGIONALE DE LA CEMAC La volonté pour les Etats de membres de la communauté de redynamiser et reconsolider les liens qui les unissent dans l'optique d'accéder à un stadede leur intégration est manifeste à travers la signature du traité de l'acte constitutif de la cemac par les gouvernements du Cameroun, Tchad, Gabon, Guinée équatoriale, RCA, RDC lors du sommet tenu en Ndjamena au Tchad, le 16 mars 1994. En effet le chapitre II qui renvoie aux politiques sectorielles en sa section I met en avant l'enseignement, la recherche et la formation professionnelle qui stipule que : « les actions communes à entreprendre en application de l'article4 paragraphe e) de la présente convention ont pour but la rationalisation et l'amélioration des performances de l'enseignement notamment supérieur, de la recherche et de la formation professionnelle195(*) ; ces actions peuvent comporter : - la création ou le développement d'institutions communes d'enseignement supérieur, de recherche et de formation professionnelle permettant dans certains domaines le rassemblement des moyens mis en oeuvre par les Etats membres. - L'ouverture aux mêmes conditions d'accès que les nationaux, des établissements d'enseignement à tous les ressortissants de l'union économique. - La coordination des programmes d'enseignement, de recherche et formation professionnelle dispensée par les Etats membres ; - L'évaluation des résultats de l'enseignement supérieur et de la formation professionnelle dispensée par les Etats membres ; - La reconnaissance mutuelle des diplômes sanctionnant la formation dispensée dans ces institutions ; - L'harmonisation des conditions et normes d'équivalence des diplômes obtenus dans les pays tiers. A l'analyse, cet article on peut toucher du doigt le souci qu'on les Etats de communautariser leur système éducatif et par là consolider leur intégration. Cela est perceptible à travers la directives n°01/06/-UEAC-19-CM-14 du 10 mars 2006 portant application du système LMD (licence Master Doctorat) dans les universités et établissements d'enseignement supérieur de l'espace cemac196(*). Qui a pour objectif d'encourager la mobilité nationale et internationale des étudiants, en harmonisant le système de formation, cela facilite la libre circulation des étudiants et de même des enseignants au sein de l'espace communautaire. Ainsi on assiste de manière illustrative à la présence des ressortissants étrangers de nationalité Gabonaise, Equato Guinéenne, Tchadienne, Centrafricaine et parfois congolaise dans les établissements et universités camerounaise. Ainsi dans les écoles de formations comme l'ISSEA (institution sous régionale de statistique et d'économie Appliquée) qui est une institution spécialisée de la communauté économique et monétaire d'Afrique centrale reçoit chaque année les étudiants de la sous-région et même ceux non membre de la cemac. A travers ces formations, l'ISSEA participe avec sa manière à l'intégration dans le sens où elle se trouve être le cadre de brassage multiculturel. A côté on souligne également cette présence étrangère dans les écoles tels que l'ENAM (école nationale d'administration et de magistrature) et l'IRIC (institut des relations internationales du Cameroun) qui forment chaque année des ressortissants étrangers après quoi ceux-ci retournent occuper des fonctions soient administratives soient diplomatiques. Pour ce qui est de l'ENAM, les étrangers peuvent y avoir accès de deux manières. D'abord ils peuvent être à la base des fonctionnaires qui viennent juste recevoir des formations et pour cela subventionnées par leur Etat respectif après quoi ceux-ci y retournent. Ensuit ces étrangers peuvent également réussir au concours et financer leurs études de leurs propres poches. On assiste donc à depuis quelques années à une présence considérable des ressortissants des pays étrangers dans ces grandes écoles. En témoigne le fait que lors de la cérémonie de fin de stage de la promotion de 2018 on comptait 72 étrangers sur 367 élèves toutes sections confondues197(*). Ainsi ces grandes écoles contribuent à l'intégration régionale dans le sens où elles servent de canaux pour une inculcation de valeurs administratives communautaires et judiciaire parce que permettant une harmonisation des culturels à caractère diplomatique et administrative au niveau de la sous-région. En ce sens que les enseignements que ceux-ci reçoivent sont implémentés dans leur contexte. Elles participent également à l'intégration dans le sens où elles permettent la socialisation des potentiels administrateurs de la communauté et de ce fait favorise l'émergence des liens de camaraderie et de fratrie entre eux198(*) ce qui contribue de manière concrète et même optimale à l'intégration de cet espace géographique Cette réalité est également perceptible dans la zone des trois frontières : Cameroun, Gabon et Guinée équatoriale ou dans la localité de kyé-ossi, chaque matin à défaut d'élire domicile sur place, les élèves gabonais et équato-Guinéens traversent les frontières pour venir étudier. En témoigne ce propos : « ce qui explique cette forte présence étrangère dans notre établissement c'est en partie la situation géographique de la ville de kyé-ossi qui partage ses frontières avec les villes de meyo-kyé au Gabon et Ebebeyin en Guinée équatoriale (...) c'est enfin parce que notre système éducatif attire les ressortissants de ces pays »199(*) de ce fait cette localité permet et contribue à sa manière à la formation des étrangers venu des pays limitrophes. Ce qui favorise l'intégration dans cet espace transfrontalier. Ainsi les frontières sont supplantées au profit du lien culturel et la quête du savoir. On peut donc comprendre que ce souci manifesté à travers l'implémentation de l'article 29 du traité favorise la revalorisation des dynamiques parce que mettant en avant l'éducation et la formation des ressortissant des pays membres comme un moyen de rendre l'intégration de cet espace effective. Cette réalité est également ce qui sous-tend l'esprit de l'article46 du même traité. B- LA PROTECTION DES VALEURS CULTURELLES NATIONALES ET DU PATRIMOINE ARTISTIQUE DES ETATS COMME CATALYSEUR POUR L'INTEGRATION DES ETATS DE LA ZONE CEMAC Comme levier de valorisation et canal d'intégration sous régional, la communauté va à travers la politique sectorielle portant sur le tourisme mettre un accent sur la protection de l'environnement et le patrimoine culturel des Etats membre comme le stipule explicitement l'article 46 en ces termes : dans l'exercice du pouvoir défini à l'article 6 alinéa2 de la présente convention, la conférence des chefs d'Etats et le conseil des ministres, dans le respect des missions imparties dans ce domaine aux organisations régionales spécialisées veillent à la prise en compte des objectifs suivant200(*) : - la protection des valeurs culturelles nationales et du patrimoine artistique des Etats ; - la protection de la qualité de l'environnement dans les sites touristiques - la protection des populations contre la délinquance internationale A l'analyse de cet article on peut comprendre le souci affiché de promouvoir et protéger les acquis culturels des Etats nation parce que déterminant pour la construction de l'intégration de cet espace. Ainsi la coopération de la cemac avec le CERDOTOLA201(*) vise à construire un partenariat permettant la mutualisation des efforts pour promouvoir un développement culturellement soutenable dans l'espace cemac202(*). Ainsi le cerdotolat à travers ses projets courants203(*) devient d'un outil opérationnel de référence mondiale pour la mise en oeuvre des politiques culturelles de la Communauté en liaison avec ses objectifs de promotion de l'Intégration par un marché Commun, des infrastructures et le Développement Durable, des Politiques Economiques, Monétaires et financières, les Droits de l'Homme, la Bonne Gouvernance et le Développement Humain et Social. Cependant l'absence de dispositifs institutionnels communautaire favorise de ce fait la prééminence des dispositifs étatiques. Pour dire que l'absence au niveau communautaire d'une instance spécialisée dans la protection du patrimoine culturel des Etats de la sous-région pousse ces Etats à adopter eux même des mesures adéquates. Situation qui conduit à ce qu'on pourrait appeler un effacement des valeurs culturelles communautaires. Entendu comme un effacement progressif des valeurs culturelles communautaires au détriment de celles des Etats pris individuellement. * 195 Article 29 de l'acte constitutif de la cemac * 196 Mme laure Ayina, Diagnostic de la mise en oeuvre de tous les protocoles et autres instruments d'intégration : mesures pour l'accélération de construction du marché régional, rapport provisoire, ref.n°021/MINEPAT/PASAPE/DP3/2012 * 197SorèleGuebediang à Bessong, « 367 élèves de l'ENAM achèvent le formation militaire » in Cameroun tribune, 16 novembre 2018, * 198 Lors de sa rencontre avec les étrangers de l'Enam, Le ministre de la fonction publique et de la réforme administrative, Mr joseph LE, affirme : « Avant d'entrer dans le vif du sujet, je voudrai saluer votre présence dans cette école et dans notre pays. C'est la matérialisation concrète de la dynamique d'intégration sous régionale dont le Cameroun sous la houlette du Président de la république, son excellence Paul BIYA, se veut le moteur. C'est avec fierté que nous vous accueillons dans cet établissement qui forme l'élite de notre Administration Publique. La scolarité commune que vous passez ici, a le mérite non seulement de former aux mêmes savoirs et habiletés les futurs hauts fonctionnaires que vous êtes appelés à devenir mais aussi de rapprocher davantage nos pays frères à travers deux choses essentielles. La première est relative aux valeurs transmises ici pour faire de nos Administrations respectives des outils performants de développement. Tandis que la deuxième concerne les liens de camaraderie voire d'amitié qui sont certainement nés entre vous. Tout cela concourt à faciliter le dialogue et le partage d'expériences entre produits issus du même moule. C'est cette solidarité étatique et interpersonnelle que nous essayons de promouvoir avec l'admission à l'ENAM de ressortissants de pays voisins (....) » source : http://josephle.cm/rencontre-entre-monsieur-le-minfopra-et-les-eleves-etrangers-de-lenam/ consulté le 06/02/2019 à 20h29 * 199 Entretient avec Mr Bekalecharly, surveillent général et professeur de philosophie au lycée biligue de kyé-ossi, le 18/10/2018 * 200 Article 46 du traité de l'acte constitutif de la cemac * 201 Crée en 1977 par les Etats fondateurs de la cemac avec l'appui de l'OUA et l'UNESCO. Le cerdotola est une institution internationale dont la mission est la sauvegarde, la promotion et la valorisation des traditions et des langues Africaines. Le cerdotola a au fil du temps élargi son mandat territorial au-delà de l'Afrique centrale pour intégrer l'ensemble du continent et de la diaspora Africaine. Le cerdotola s'investit dès lors dans la mobilisation intellectuelle et idéologique pour engager les ressources que constituent les traditions et le patrimoine Africain dans les dynamiques d'émergence, de développement durable et de renaissance, en plaçant l'Homme Africain au centre de toute stratégie. WWW.Cerdotola.org consulté le 01/02/2019 à 21h30 * 202 Site WWW.Cerdotola.org consulté le 01/02/2019 à 21h30 * 203 Les projets courants du cerdotola sont : Valorisation pédagogique des traditions africaines ; Sauvegarde des Savoirs patrimoniaux et mémoire des communautés ; Musiques, productions artistiques et créativité contemporaine ; Projet NULIGRA (Numérisation de la littérature grise d'Afrique) ; Mise en réseau des Bibliothèques, Archives et Musées de la CEEAC ; Archive numérique des langues et ressources orales d'Afrique (ALORA). Source : https://fr.cerdotola.org/les-projets consulté le 06/02/2019 à 21h23 |
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