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Dynamiques socioculturelles dans la construction de l'intégration régionale en Afrique Centrale CEMAC


par Yvan Nathanaël NOUBISSI
Université Yaoundé 2 Soa - Master 2 en science politique 2019
  

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CHAPITRE 3: LES FORMATIONS POLITICO-ETHIQUES ET JURIDICO POLITIQUES DE REVALORISATION DES DYNAMIQUES SOCIOCULTURELLES DANS L'INTEGRATION SOUS REGIONALE DE L'ESPACE CEMAC.

Par là nous voulons dire que dans la construction de l'intégration sous régionale de l'espace CEMAC, la culture peut être usité comme levier sur le plan politico-ethnique (section1) ceci en mettant en évidence la pesanteur ethnique dans les relations qu'entretiennent les populations entre elles par la dynamique du bas. Elle peut également être mobilisée sur le plan politico-juridique (section2) entendu comme les normes qui sont pensées, initiées au niveau communautaire visant à faciliter l'intégration par le canal socioculturel.

SECTION1 : LES FORMATIONS POLITICO-ETHIQUES REVALORISANT LES DYNAMIQUES SOCIOCULTURELLES DANS LE PROCESSUS D'INTEGRATION SOUS REGIONALE

L'Afrique centrale perçut et reconnu pour son homogénéité culturelle telle que le soulignait déjà Jean Marie Essomba à travers « le passé composé de l'intégration e Afrique centrale »181(*) témoigne du degré d'intimité et de lien qu'ont les peuples de cet espace géographique. Le cas de l'ethnie fang présent au Cameroun, Gabon et Guinée équatoriale est le cas sur lequel nous allons nous appuyer pour mettre en évidence cette revalorisation des dynamiques socioculturelles en effet cela se manifeste à travers le partage de la langue et des célébrations traditionnelles (paragraphe1) mais également à travers les festivals culturels (paragraphe2)

PARAGRAPHE1 : LA REVALORISATION DES DYNAMIQUES SOCIOCULTURELLES A TRAVERS LE PARTAGE DE LA LANGUE ET DES CELEBRATIONS TRADITIONNELLES.

Par là nous voulons dire que le peuple fang présent de par les trois frontières mobilise cet avantage pour pouvoir dynamiser les relations entre eux. Ainsi ils se servent non seulement de leur langue traditionnelle (A) mais également de leurs célébrations traditionnelles (B) pour valoriser l'intégration dans cet espace.

A- LE PARTAGE DE LA LANGUE TRADITIONNELLE COMME AVANTAGE POUR LES POPULATIONS FRONTALIERES DANS LA CONSTRUCTION DE L'INTEGRATION SOUS REGIONALE : LE CAS DES FANG

La langue est un outil social de premier ordre, c'est un instrument de communication entre les peuples, elle permet à chaque individu d'exprimer sa personnalité, de partager avec ses congénères sa vision du monde, de développer son potentiel intellectuel et son expérience scientifique182(*). Ainsi la langue est un outil qui permet de ce fait l'intégration dans la zone des trois frontières (Gabon, Guinée équatoriale, Cameroun) dans la mesure où elle favorise une certaine harmonie dans les relations qu'entretiennent leurs populations. En effet le fang qui est la langue infra bantou constitué de 06 grands groupes de variétés dialectale dont le ntumu, l'okak, le Nzaman, le Mvae, l'atsi et le méké. Le ntumu est la langue qui est usité par les peuples frontaliers comme facilitateur (1) mais également comment instrument d'échange (2)

1- La langue ntumu comme facilitateur dans les relations entre populations frontalières

Par là nous voulons dire que la langue traditionnelle joue un rôle non négligeable dans les relations qu'entretiennent les populations frontalières. Dans ce sens dénis nizete affirme : « la langue est l'expression la plus intime et en même temps le véhicule le plus authentique de la culture de ses locuteurs natif. Elle est donc pour chaque peuple le véritable dénominateur commun le trait d'identité culturelle par excellence »183(*) ainsi dans la zone transfrontalière de kyé-ossi, la langue devient non seulement un instrument de reconnaissance et aussi un sentiment d'unité.

Le fait que ces peuples partagent la même langue permet une facilité dans les relations. De ce fait, à travers la langue fang ou « nkob »fang, le fang peut reconnaitre son frère et du coup stigmatiser celui qui ne s'exprime pas en fang. Cette réciprocité duale entre « reconnaissance et stigmatisation » est à l'oeuvre au quotidien dans la zone frontalière. En effet lorsque vous etesàkyé-ossi et que vous etes étranger on vous pose généralement la question « one mon dzé » pour dire « tu es quoi ? » ou encore pour poser la question de savoir est ce que tu parles ils disent « yewa kop fang »184(*) . la langue est de ce fait un vecteur d'harmonie entre peuple frontaliers fang. Cette sociabilité, caractérisation de la communauté linguistique atteste que la langue implique des rapports. Dans ce sens, Pierre Bourdieu parle d'elle comme « des rapports de communications impliquant la connaissance et la reconnaissance 185(*)». JacqueFameNdongo aborde dans le même sens quand il souligne que les structures cognitives propres aux langues africaines permettent de « sentir, entendre, écouter, comprendre et obéir186(*) » on peut donc comprendre que la langue ntumu permet dans le cas d'espèce soit à une harmonisation lorsque ceux-ci la partagent mais également exclusion lorsqu'ils ne l'ont pas en commun. En témoigne le regroupement des non-fang à Akombang (bamoun-bamiléké-nordiste)

2- La langue comme instrument d'échange

Kyé-ossi est reconnu pour son marché et les multiples transactions qui s'y déroulent. Ainsi, la langue ntumu est au coeur de plusieurs opérations qui peuvent s'opérer dans cet espace. Par exemple dans les transactions économique, la langue ntumu est également un moyen de facilitation dans l'achat des biens raison pour laquelle, les jours de marchés, les allogènes s'expriment en ntumu afin d'avoir des échanges beaucoup plus courtois avec les ntumuéquato- guinéens et gabonais. Ainsi, le fait que le commerçant s'exprime en langue locale, cela lui donne plus de crédibilité et de considération aux yeux de l'acheteur équato- guinéen ou gabonais. Ainsi, la place qu'occupe la langue ntumu dans les transactions transfrontalières entre les populations frontalières atteste de la vitalité d'une société soucieuse de construire une intégration sous régionale de cet espace. Hors mis tout ce qui est entrepris par les Etats ou régionalisme du Haut. Ainsi Mokamdavid pense que «  ces peuples représentent une passerelle nécessaire pour l'intégration régionale en Afrique »187(*)ainsi ces transactions représenteraient le régionalisme du bas. La maitrise de la langue devient donc déterminante dans les relations que les commerçants et les acheteurs venus des pays voisins entretiennent.

B- LA VALORISATION DES DYNAMIQUES SOCIOCULTURELLES A TRAVERS LES CELEBRATIONS TRADITIONNELLES

Par là nous voulons dire que l'intégration par la socio-culture ou intégration par le bas s'effectue par le truchement des populations fang ntumu à travers les festivals traditionnels (1) mais également à travers les mariages et les cérémonies mortifères (2)

1- La consolidation des liens à travers le festival des peuples fang : le mvet-oyeng

En dehors d'un simple rassemblement de clans, le festival culturel mvet-oyengde Ambam est novateur. Il est le tout premier festival intercommunautaire entre fang avec pour objectif de renouer le lien d'intégration régionale en Afrique centrale par le moyen de la culture. Il va ainsi au-delà d'unir uniquement les clans en se projetant dans une logique de construction régionale par l'exaltation de la culture fang dans sa totalité et sa globalité. Il s'était tenu pour la première fois en 2015 à Ambam et réunissait les peuples fang du Cameroun, du Gabon et de la Guinée 2quatoriale mais aussi du Congo Brazzaville autour de leur culture dont l'un des symboles le plus globant est le « Mvet »188(*). Ainsi pendant ces moments d'échangent culturel entre ces peuples on note une reconsolidation des liens mais également une manifestation d'un sentiment d'unité. En effet à travers ce festival, les peuples n'ont nullement pris en compte qu'ils appartiennent à des espaces géographiques différents. Ainsi la transversalité et le transnationalisme de la portée du mvet parce que rassemblant les fang de trois espaces, donne au mvet-oyeng une portée consistante dans la dynamique d'intégration. Ainsi, organisée par des institutionnels et révélateur d'une dynamique intégrative, met en évidence le sentiment d'appartenance à la communauté par l'exaltation du mvet. Ceci donne de souligner son caractère intégrateur mais également fédérateur par ce que prônant la paix, la prospérité et l'intégration régionale en Afrique centrale. En témoigne les images de cet évènement :

La sculpture d'un MbomMvet Cérémonie d'ouverture

Source : www.ambam.cm

Source : www.ambam.cm


Source : www.ambam.cm

2- La consolidation des liens sociaux à travers la célébration des mariages et commémorations

Les mariages jouent un rôle important dans la consolidation des liens entre les peuples frontaliers. Ainsi par association Max Weber entent « une relation sociale lorsque et tant que la disposition de l'activité sociale se fonde sur un compromis d'intérêts motivée rationnellement (en valeur ou en finalité) ou sur une coordination d'intérêts motivés de la même manière »188(*). Cette définition prend uniquement en compte le mariage civil qui a lieu devant l'officier d'état civil et sur le mariage religieux dont la bénédiction nuptiale se à l'église. Elle marginalise ou exclu de ce fait le mariage traditionnel ou coutumier entendu par Georges Balandier comme ensemble de rites entourant cette célébration de noces189(*). Ainsi corneliaBounangMfoungue a donc classifié les différentes étapes qui constituent le mariage traditionnel coutumier appelé « aluk » chez les fang. La première consiste à la présentation de son probable époux à ses parents ensuit vient le moment du mariage traditionnel caractérisé par le versement de la dot par le fiancé à la famille de la fille190(*). Enfin une cérémonie de dépôt de la jeune fille dans sa nouvelle famille appelé transfert de l'épouse191(*). Ainsi l'union entre Homme et femme s'inscrit dans un cadre large, elle va au-delà du couple. Ainsi se ne sont plus seulement les individus qui se mettent ensemble mais tout le clan. Le mariage permet ainsi de rattacher les clans en renforçant la solidarité et la fraternité entre les peuples fang en dépit de l'existence des frontières l'institution du mariage démontre la capacité des réseaux transfrontaliers d'user de leur lien socio Anthropologiques pour construire un espace social imaginaire192(*) en Afrique centrale.

Le mariage coutumier en tant que plateforme d'échange culturel entre les individus contient presque toujours des rites. Ces derniers lui donnent son originalité et sa spécificité. Il permet donc de construire l'intégration régionale en Afrique centrale. Ainsi on assiste le plus souvent les week-ends dans la ville de kyé-ossi des mariages entre camerounais et gabonais ou équato Guinéen. Par exemple le mariage de l'une des filles du chef traditionnel de 3ème degré de kyé-ossi avec un équato guinéen en 2016 a quelque peu contribué à resserrer les liens avec les populations d'Ebebiyin en ce sens que celui-ci y est natif et partant du fait que les deux se soient unis les populations de cet espaces se sont senti désormais au travers comme appartenant à une même famille. Cette mobilité rend de ce fait caduque toute étatisation de frontière en raison du degré d'interdépendance qui donne du sens et un contenu à leur dynamiques solidaristes.

Il permet d'exprimer un vouloir vivre ensemble c'est-à-dire s'érige en communauté par la force de cette relation sociale devenu transfrontalière dans la zone des trois frontières.

Le deuil comme le mariage est considérablement influencé par la famille. En effet la perte d'un membre n'exerce pas seulement une influence sur la famille éloignée, c'est tout le groupe familial c'est-à-dire le lignage qui est touché. Cette importance du groupe familial vient du fait qu'il joue un rôle déterminant dans cette commémoration mortuaire. Ainsi la pesanteur familiale est le signe révélateur de l'importance du clan dans la pratique mortuaire. La mort d'un fang est doc toujours lié à la perte d'un être cher d'un clan d'origine et d'un clan secondaire en raison de l'alliance matrimoniale. C'est ce que confirme ce propos « nous sommes tous d'une même famille. Quand il y a mariage ou deuil ici au Gabon ou en Guinée équatoriale nous sommes obligés de nous rassembler 193(*)»on assiste ainsi à une intégration socioculturelle dans la mesure ou les deuils sont également des occasions permettant à tous les clans touchés de se rassembler. Cet élan de fraternité permet ainsi de renforcer les liens des familles dans ce sens Hélène Dubreil et ses collègues pensent que « la famille est au centre de tous les rites mortuaires (...) »194(*) ainsi ce rôle central de la famille confirme le dynamisme solidariste à caractère communautaire dont font preuve les peuples fang présent de part et d'autre des frontières.

* 181 Op cit p.15

* 182 Rachel EfouaZengue, « un ciment pour l'intégration sous régionale : la langue », in Daniel Abwa et Al, dynamique d'intégration régionale en Afrique centrale, presse université yaoundé, novembre 2001, tom2, P.475-479

* 183 Bienvenu nizete, op.cit, p 31-43

* 184 Moise tsala, op.cit

* 185 Pierre Bourdieu, langue et pouvoir symbolique, Paris, édition fayard, 1982.P.60

* 186 Jean famendongo, Essai sur la sémantique d'une civilisation en mutation : le génie africain est de retour, Paris, l'harmattan, 2015, P.77

* 187Mokam David, « les peuples traits d'union et l'intégration régionale en Afrique centrale : le cas des Gbaya et des moundang »in Daniel Abwa et Al (dir), dynamique d'intégration régionale en Afrique centrale, Yaoundé, presse universitaire de Yaoundé, 2001, tom1, pp.125-139

* 188 Gilles Ferrol (dir) dictionnaire de sociologie, Paris, Armand colin, 2009, p.12

* 189 Georges balandier, sociologie actuelle de l'Afrique noire, Paris, presse universitaire de France, 1982, 4èmeed, p.120

* 190 Moise tsala, op, cit, p.85

* 191 Cornelia BounangMfougue, « le mariage Africain, entre tradition et modernité : étude socio-Anthropologique du couple et du mariage dans la culture gabonaise », université Paul Valery, Montpelier III, thèse doctorat en art et lettre, science humaine et sociale : sociologie, 2012, P.144

* 192 Moise tsala, opcit, p.51

* 193 Entretient avec Mme Ada chef traditionnel 3ème degré de kyé-ossi le 19/10/2018

* 194 Hélène dubreuil, Francine montagny et famyrabichaud, le deuil dans les différentes cultures.

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"Là où il n'y a pas d'espoir, nous devons l'inventer"   Albert Camus