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Dynamiques socioculturelles dans la construction de l'intégration régionale en Afrique Centrale CEMACpar Yvan Nathanaël NOUBISSI Université Yaoundé 2 Soa - Master 2 en science politique 2019 |
PARAGRAPHE2 : LES FRONTIERES COMME LEVIERS STRATEGIQUES DE DEVALORISATION DES DYNAMIQUES SOCIOCULTURELLES DANS LE PROCESSUS D'INTEGRATIONPar là nous voulons dire que la frontière dans le processus d'intégration régionale de l'espace cemac est souvent utilisé à des fins subjectives des Etats et par là nuisance pour les dynamiques socioculturelles. En effet celle-ci peuvent être usitées comme moyen d'intimidation (A) mais également comme un moyen de chantage et de pression (B). A- LA MILITARISATION DE LA FRONTIERE COMME MOYEN D'INTIMIDATION ET DEVALORISATION L'INTEGRATION SOCIOCULTURELLE : LE CAS DE LA GUINEE EQUATORIALE La guinée équatoriale, pays partagé entre des formations insulaires et continentales connait un regain d'intérêt stratégique ces derniers temps140(*). Autrefois isolés et déprécié, ce petit pays situé à la jonction du golfe de guinée et de l'Afrique centrale du centre ouest a vu sa valeur cotée à la hausse, en raison de son statut de nouvel Etat ayant même des ambitions régionales de puissance141(*). Ainsi conscient de ses atouts et la convoitise dont il fait l'objet va développer et même instaurer des dispositifs restrictifs comme la difficile implémentation du principe de libre circulation par la communauté. A cela s'ajoute les multiples vagues de refoulement des étrangers sur son sol en témoigne celles de 2004, 2007 et 2008 ou plusieurs étrangers en général et des camerounais en particulier furent rapatriés. Bien que cette présence démographique étrangère soit un défi à relever, la Guinée 2quatoriale fait également face à des tentatives permanentes de coup d'etat. En témoigne la dernière tentative de décembre 2017 ou le président dans son palais de Koete Mongomo pour les fêtes de fin d'année échappa au projet des mercenaires142(*). Ainsi, dans l'optique de faire face à cette double menace sécuritaire et démographique, la guinée équatoriale va instaurer et même développer la militarisation de ses frontières en vue d'intimider ses voisins qui sont parfois accusés de complices. Par militarisation nous faisons référence à la forte présence militaire au niveau des frontières. Notons de ce fait que les militaires ne sont pas toujours en tenu mais très souvent en civil parce que faisant dans la plus du temps dans le renseignement. Et c'est ce renseignement qui permit d'intercepter le coup d'état de décembre 2017. Les mercenaires furent arrêtés avec des armes à la frontière avec le Cameroun (kyé-ossi). Pour également maitriser les entrés se placent dans les brousses pour empêcher toute tentative de contournement. Il arrive des cas ou ceux-ci ôtent la vie aux clandestins en témoigne ce propos : « depuis deux mois voici le quatrième jeunes qui meurt dans laforet en essayant de traverser la frontière de la guinée équatoriale. Quand les militaires equato guinéens les tuent ils viennent les jeter ici la chaines ou les jettent dans l'eau 143(*)» cette militarisation de la frontière equato guinéenne dévalorise les dynamiques socioculturelles dans le sens où le fait que la frontière soit militarisée cela intimide non seulement les potentiels mercenaires mais également les populations étrangères innocentent qui par ce phénomène se trouvent découragées. Pour les peuples frontières comme les fang-ntumu cela affecte leur mobilité parce que intimidés et contraint à amoindrir leur déplacement. B- LES FRONTIERES COMME OUTILS DE CHANTAGE ET DE PRESSION POUR LA GUINEE EQUATORIALE A L'ENDROIT DE SES VOISINS : KYE OSSI COMME EXEMPLE. Contrairement à ce qui se passe entre les Etats ouest africains, ou la libre circulation des personnes et des biens est garantie par la communauté économique des Etats de l'Afrique de l'ouest (CEDEAO) depuis plus de deux décennies, les mouvements transfrontaliers des individus en Afrique centrale restent perçus, à tort ou à raison comme une négation des territoires hérités de la colonisation144(*). Les frontières de cette région et plus particulièrement celle de la guinée équatoriale sont les lieux ou s'exprime encore le nationalisme. En effet celle-ci fait usage de sa frontière pour faire chanter les populations de kyé- ossi. La particularité de cette localité est le fait que sa population vie majoritairement de la densité des échanges commerciaux qui s'y opèrent. En effet la majorité des produits qui viennent de l'intérieur du Cameroun plus précisément des provinces nourricières que sont l'ouest, sud-ouest sont sont stockés au marché d'Akobang. Suit au coup d'état manqué la guinée Equatoriale a décidé de fermer sa frontière et de l'ouvrir dans une moindre mesure une fois par semaine à savoir le mercredi. Par chantage nous voulons dire que la guinée équatoriale étant consciente de ce que les populations de kyéossi territoire camerounais vivent majoritairement du commerce et des échanges. Cela dit en fermant ou même en ouvrant périodiquement cela affecte l'économie de la localité dans la mesure où ceux-ci ont un pouvoir d'achat considérable en témoigne ce propos : « les fang équato guinéens payent un peu de toutalors que fang gabonais payent beaucoup plus la banane et le plantain donc, si un gabonais dépense 50000 francs cfa, un équato guinéens dépense 80000 franscfa Vous voyez donc que lorsque la chaine est fermée, il y a crise car les vivres se gatent à Akombang. Si la fermeture atteint deux semaines, les allogènes bamiléké et bamoun quittent la ville pour rentrer à l'ouest145(*) ». A la réalité la fermeture de la frontière équato guinéenne revêt un effet boumerang dans la mesure où dépendant également des vivres frais venus de kyéossi, ceux-ci se trouvent obligés de passer par des vois informelles. De ce fait, les points de passages informels tel que « le port d'Akombang » situé à l'entrée de la paroisse notre dame de kyé-ossi et les pistes de brousses d'Esaben146(*)sont les lieux de circulation des produits échangés dans l'informel par la fermeture de la frontière Equato guinéenne. Ils opèrent généralement de façon nocturne afin d'éviter tout désagrément. Ils prennent toutes les précautions dans le but d'échapper toute interpellation. Toutefois en journée, mais à faible intensité. Cette précision des acteurs est expliquée par Paul brenton et ses collègues qui pensent que « le succès de ce genre de commerce dépend de la capacité qu'ont les individus (....) sans être soumis à la violence ou harcèlement et sans avoir à effectuer de paiements : sommes importantes non officielles, paiement de tarifs ou de frais démesurés »147(*). Pour dire que le fait que la guinée Equatoriale mobilise sa frontière à des moments pour faire chanter les populations de kyé-ossi, elle-même se trouve pénalisée et obligée d'employer les méthodes informelles. Ainsi cette situation se trouve dévalorisante pour le processus d'intégration dans le sens ou, la spécificité de cette espace étant son homogénéité culturel ceci de par la présence des fang ntumu au Gabon, en Guinée équatoriale cela doit être usité comme base d'une relation harmonieuse et par conséquent viabiliser la vision de la communauté. * 140 Mathias Eric OwonaNguini, « la Guinée Equatoriale en perspective : vues, visées et vision géopolitique » in enjeux n°28 juillet- septembre 2006, p.05 * 141 Come Damien Awoumou, « la guinée équatoriale : le nouveau moteur de la dynamique d'intégration au sein de la cemac ? »in enjeuxn°28 juillet-septembre 2006,P.43 * 142kambu, la guinée équatoriale dit avoir déjoué un coup d'etat, in Action n°42, le 04/01/2018, p.05 * 143 Entretient Mme ekotto, aide-soignante au centre de santé « santé mis »le 15/10/2018. 1 heure * 144Bennaflakarine(1999), « la fin des térritoires nationaux : état et commerce frontalier en Afrique centrale » in politique Africaineen ligne à https://www.cairn.info/revue-politique-africaine-1999-1-page-25.htm, consulté le 24/01/2019 * 145 Moise tsala, les peuples frontières et les dynamiques d'intégration régionale en Afrique centrale : le cas des fang de la zone frontalière Cameroun-Gabon-Guinée Equatoriale, UYII SOA ,mémoire master2,2016,P.92 * 146 ibidem * 147 Paul Brenton et Al, « les femmes pauvres qui pratiquent le commerce transfrontalier dans la région des grands lacs d'Afrique : des affaires à risque »Fruit d'un rapport Afrique- Notes de la politique commerciale, 2011 |
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