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Dynamiques socioculturelles dans la construction de l'intégration régionale en Afrique Centrale CEMAC


par Yvan Nathanaël NOUBISSI
Université Yaoundé 2 Soa - Master 2 en science politique 2019
  

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PARAGRAPHE 2 : LE COMPORTEMENT DE CERTAINES POPULATIONS COMME VECTEUR DE LA DEVALORISATION DE L'INTEGRATION REGIONALE DE L'ESPACE CEMAC.

Par là nous voulons dire que qu'en dehors des frontières, le comportement de certaines populations constitue un obstacle ou même une entrave à l'intégration régionale par la dynamique socioculturelle. Très spécifiquement nous nous sommes attardés sur l'hostilité des populations Equato- guinéennes et gabonaise(A) vis-à-vis des étrangers et ensuit le refoulement des étrangers comme conséquence du sentiment d'hostilité(B).

A- L'HOSTILITE DES POPULATIONS EQUATO GUINEENNES ET GABONAISE VIS-A-VIS DES ETRANGERS

L'hostilité que développent ces deux pays à l'endroit des étrangers en général et pour les Camerounais peut s'expliquer par le fait de la découverte dans ses eaux territoriales de très importants gisements pétroliers89(*). Ainsi, cet hostilité va se manifester d'abord par le sentiment d'envahissement(1) ensuit par le sentiment d'insécurité(2)

1- Le sentiment d'envahissement comme source de l'hostilité des populations gabonaises et guinéennes.

Les camerounais présents au Gabon et en Guinée équatoriale constituent un fort potentiel en termes de main d'oeuvre. En effet ceux-ci sont présents par exemple au Gabon dans les secteurs de la restauration, du commerce des vivres frais, propriétaires des débits de boissons90(*). Cette situation favorise la monté d'un sentiment d'envahissement dans la mesure où ceux-ci ne se sentent plus maitre de certains domaines clés de leur société. En fait, on note une très forte présence étrangère dans ces secteurs d'activité et cela contribue au chômage des locaux ou nationaux qui n'ont plus d'espace pour se mouvoir sur le plan professionnel.

Cette situation est également justifiable du fait que ces deux pays sont tous d'abord reconnu pour leur très faible taux démographique91(*) et pour cette raison, la forte présence étrangère pourrait d'après eux favoriser une exploitation de leurs biens ou encore de la rente pétrolière dont ils sont producteurs92(*). Le Gabon pour sa part est considéré comme le pays d'Afrique centrale le plus mal loti au plan démographique et parallèlement comme un des plus nantis économiquement dans le concert des nations négro-africaines, ainsi il perçoit le phénomène migratoire comme une menace pour sa stabilité, voire sa survie en tant que nation93(*). Ainsi cette menace est appréhendée sous double forme : celle d'une totale submersion de la nation par un flot massif d'étrangers, d'une part et celle d'une rupture de l'équilibre ethno-démographique endogène94(*), corrélativement à une forte présence de populations originaires des pays frontaliers apparentées aux ethnies gabonaises d'autre part. Or le Cameroun compte plus de 22 millions d'habitants contre 2 millions pour le Gabon dont le tiers est apparenté aux fang du nord-Gabon. Cette double réalité explique de ce fait l'attachement pour des autorités gabonaises à une conception rigide et fermée de la frontière avec le Cameroun. Cette situation favorise donc le plus souvent la monté des comportements nationaliste et même xénophobe à l'endroit des camerounais en particuliers. On assiste dès lors à la montée de la xénophobie et des pratiques visant à décourager les migrants légaux ou pas parce qu'il arrive des situations ou même en cas de régularité ils trouvent quand même un moyen pour nuire aux étrangers en témoigne ces propos « j'avais la permanencia .c'était pour six mois !j'avais payé la permanencia à cent vingt mille francs. Quand ils me récupèrent, j'ai perdu mon passeport, la permanence a été déchirée. Et ce jour, j'ai compris, ces gens-là sont sauvages de nature. Parce que, que tu ais les pièces, que tu n'es pas les pièces, ils disent qu'ils ne veulent plus les étrangers chez eux ! » Les ressortissants des autres pays de la communauté en général et les camerounais en particuliers sont donc perçu comme des germes de destructions de leur pays et ce -ci peut être cerné par cette assertion : « le point d'orgue de ce voisinage sulfureux résulte bien évidement des facteurs économiques et accessoirement des relations émotionnelles. Dans la première rubrique, il faut citer la compétition de l'accès aux ressources naturelles, l'insolvabilité de malabo, la feymania des camerounais ; et dans la seconde rubrique, la peur quasi obsessionnelle du refugié considéré comme une épée de damoclès suspendue sur la tête des régimes en mal de légitimité95(*) ». Ainsi, l'intégration régionale au travers de ces propos se voit déconstruit par les populations elles même partageant à certains degrés des points communs tels la culture ethnique. Ce sentiment d'envahissement est également accompagné de celui d'insécurité tel que le proclame certains.

2- Le sentiment d'insécurité comme source de l'hostilité des populations Gabonaises et Equato guinéennes.

Ce sentiment vient de la trop forte présence des camerounais sur les sols gabonais et equato guinéens. Par ailleurs l'investissement des camerounais dans les activés criminelles a conduit à la structuration d'un discours officiel et d'une opinion publique96(*). En effet les camerounais sont accusés de banditisme et d'escroquerie en guinée équatoriale. Ainsi, le président équato guinéen dénonçait leur implication dans « la plus part des actes délictueux commis à malabo(...) les camerounais sont beaucoup malin, les feymen et autres multiplicateurs de faux billets de banque »97(*). En effet, l'étiquetage socio comportemental apparait comme une donnée constante de matrice de la lecture à travers laquelle toute communauté nationale perçoit les communautés nationales étrangères établies sur son sol. Cette situation favorise quelque l inculpations des étrangers en général et des camerounais en particuliers de tous maux dont ils peuvent être victime. Comme Au Gabon ce processus revêt la forme d'une campagne médiatique permanente, tant l'immigré africain y est régulièrement présenté à l'opinion comme le propagateur de fléaux sociaux98(*) . Les étrangers en général et les camerounais en particuliers sont reconnu pour leur implication dans des activités très nocives tel que la feymania99(*) ou encore l'arnaque dont ils ont réputation. En effet le phénomène du « calling-calling » qui consiste à appeler des inconnus au téléphone et leur proposer des produits ou encore leur faire croire qu'ils ont gagné des lots et qu'ils doivent rentrer en possession de ces dits lots ou produits moyennant une maudite somme d'argent. Le plus souvent après le dépôt d'argent la ligne du feyman ne fonctionne plus. Bien que soit un exemple parmi tant d'autres, les camerounais sont dans la plus part des cas indexés de responsable et même de coupable par les équato-guinéens ou gabonais. Ainsi la multiplication de ces phénomènes favorise le plus souvent la monté du sentiment d'insécurité ressenti par les populations et sponsorise par-là les expulsions question de nettoyer le territoire. Ainsi, les grandes vagues d'expulsions d'immigrants vécues au Gabon (1992 et 1995) et en Guinée Equatoriale (2004) ont été à chaque fois officiellement motivées par le besoin de faire baisser la criminalité100(*).

B- LE REFOULEMENT DES POPULATIONS ETRANGERES COMME FACTEUR DEVALORISANT DE L'INTEGRATION

Face à la trop forte présence des étrangers sur leur sol, les autorités Gabonaise et Guinéennes vont faire appel à la brimade et à l'intimidation comme mode d'action(1) pour ensuit les rapatrier sur leur territoire(2).

1- Les brimades et menaces comme mode d'action des gabonais et Guinéens

Les étrangers Africains en général et les camerounais en particulier présent sur les sols gabonais et équato guinéen sont pour la plus part du temps victimes de brimade et d'intimidation. En effet cette situation donne lieu à de nombre abus à l'encontre des migrants camerounais travaillants dans ces territoires. Pour ce qui est de leur traitement sur le sol guinéen, les abus sont quelque peu plus accentués comme nous le récit de l'un d'entre eux : « tu sais quoi, c'est un pays d'abord le gouvernement militaire. Pourquoi ? Parce que quand vous travaillez c'est au moment de la paye, le grand patron appelle la police. Donc, à l'heure où on est en train de vous payer, on est en train de diviser l'argent en deux pour donner à la police. Donc si on te paye deux cents milles la police est là à coté on t'arrête documentos ! documentos ! C'est le grand patron qui dit aussi aux policier le voici et c'est comme ça qu'on te prend101(*) ».ainsi le plus souvent lorsque ceux-ci travaillent ils sont victimes d'abus dans la mesure où ils ne rentrent pas dans la totalité de leur sur la base du chantage des autorités policières et même parfois des populations à en croire ce que nous un autre : « le jour où j'ai décidé que je m'en vais chez moi qu'il décharge mon salaire , c'est là où il est allé appeler les militaires après m'avoir payé. Dans le camion que j'avais loué, il y avait beaucoup de choses ils ont tout pris plus les pagnes, les bijoux, téléphones et vins rouges, ils ont tout prise et sont venu me jeter ici102(*) à kyé-ossi » ainsi, dans leur activité communes, les camerounais sont soumis à un chantage. Ainsi leur interpellation en Guinée équatoriale revêt toujours un caractère soudain parce qu'il surprend toujours les migrants. C'est ce que l'un d'entre eux raconte : « on était au chantier en train de travailler .mais les militaires sont arrivés, ils ont dit que tout le monde descende de la charpente. On descend alors !tout le monde même les aides maçons qui étaient là, tu sois camerounais ou que tu ne sois pas camerounais. Tous les étrangers. On arrive alors on nous si tu es camerounais tu entres dans la voiture. On nous amène à la police. On nous met en cellule ». Les migrants bien que déjà brimés sont interpelés dans leurs lieux de services sans qu'ils ne s'y attendent .les prenant de cours et au dépourvu, ils sont le plus souvent désemparés face à leur incapacité de récupérer leurs biens. Cette situation est quelque peu ce qui caractérise le vécu de ses populations et cela favorise véritablement la désintégration de l'espace cemac parce que impactant les relations entre ses Etats au sein de l'institution même. Cette situation conduit dans la plus part des cas aux rapatriements des dits populations.

2- Le rapatriement des étrangers comme facteur désintégrateur de l'espace CEMAC

Le refoulement est la conséquence du sentiment d'insécurité. Ainsi perçu comme une menace, pour les populations gabonaises et equato - guinéennes et ne pouvant parvenir à une totale étanchéité de leur différentes enveloppes frontalières, ils vont entreprendre d'appliquer vis-à-vis de l'immigration une méthode désormais largement éprouvée sur le continent à savoir le rapatriement des étrangers africains en général et les camerounais en particulier. En effet ces rappariements sont le plus souvent accompagnés de violence extrême comme le témoigne ce propos : « on nous a rapatrié comme ça là. Même la maison ou on louait, les militaires nous ait plus ramené la bas »103(*). 1995, 2004 et 2007 témoignent à titre illustratif de ce qui est considéré comme une grosse déshumanité pour l'avancée de l'intégration sous régionale en cemac. En 1995, une vaste opération de vérification des papiers de séjours est lancée et baptisée « opération tonnerre » qui conduisit à un rapatriement de prêt de 5000 étrangers parmi lesquels les camerounais104(*). Ils sont rapatriés parce que accusés de semeur de trouble. Ainsi, pendant ces mouvements les familles fondées sur les mariages entre nationaux et étrangers se trouvent le plus souvent déstabilisées et abandonnées à elle-même. Dans la même lancée, les relations entre le Cameroun et la Guinée Equatoriale prirent en coup lors des expulsions de mars 2004. En effet cette situation fut à l'origine d'un Etat manqué par les mercenaires venu de l'Afrique du sud105(*). Les camerounais furent accusés d'avoir été une base de préparation de ce coup d'Etat. Ce qui a favorisé une riposte farouche des nationaux à l'endroit de ceux-ci. Les populations camerounaise furent donc rassemblées et même empaquetées dans leur ambassade à Malabo ou ils furent ensuit rapatrié au Cameroun plus précisément à kyéossi. Le même scénario s'est produit avec euphémisme en 2007, de nombreux camerounais fuyant les exactions perpétrées par les forces de sécurités et de défense Equato- guinéennes ont trouvé refuge dans les locaux du consulat du Cameroun à Bata (au moins 5000) et à l'ambassade du Cameroun à Malabo (au moins 3000). Lors de ces évènements on a enregistré des arrestations abusives, des scènes des violences physiques de toutes sortes, des pillages des demeures et des boutiques appartenant au Camerounais106(*). A l'origine de cette situation d'amalgame et de confusion, pire encore il y'a eu un braquage de deux établissements bancaires (la CCEI Bank ex- Afriland first bank) à Bata , le mercredi 05/12/2007 par les assaillants cagoulés venus du large et soupçonnés d'être d'origine camerounaise, après enquête il est établi que ceux-ci étaient constitués des ressortissants Equato- guinéens107(*) . Il est de ce fait claire que le plus souvent ces expulsions viennent des sous-entendus dans la mesure où étant considéré comme dangereux pour le territoire, les Camerounais sont souvent taxés de responsable des vols et d'arnaques sans preuve palpable.

A travers ces situations un climat de conflictualité et même de haine s'est installé entre les populations transfrontalières de ces deux pays. Ce qui a quelque peu entaché la fluidité au niveau des échanges qu'ils entretiennent. Ayant eu un entretien par téléphone avec un rapatrié celui se prononçant sur la question du rapatriement et des raisons qui pourrait expliquer cela dit ceci : « ils ont commencé à compliquer les papiers. C'est-à-dire, on te demandait et ton visa d'entrée, il fallait avoir un carnet de compte, et, ils demandaient trop de papiers, n'étaient pas vraiment pas possible pour un débrouillard d'avoir. Mieux encore, un commerçant mais un débrouillard ce n'était pas facile. Enfin sans vous mentir, le coût s'élevait à près de cinq cent mille francs. Vous voyez que même aux Etats-Unis ce n'est pas à ce coût qu'on fait une résidence. Puisque aujourd'hui, sans papiers, sans visa, on te demande près de 800000 franc cfa.qui est presque un 1 million pour faire une résidence d'un An. Tu vas travailler combien en un An pour pouvoir faire la résidence, c'est très difficile 108(*)»

On peut donc constater que, la logique intégrative tel énoncée ou même promulguée par le traité instituant la libre circulation est sapé par les intérêts égoïstes et rempli de rancoeur109(*) donc nourrissent certains Etats. Ainsi la dynamique socioculturelle au travers du lien ethnique que partagent ces pays et qui en principe devrait être un levier moteur pour une intégration que l'on a vu nulle part ailleurs se trouvent supplanté par ces logiques nationalistes.

* 89 Lucien Ewangue, «  comment la guinée Equatoriale défend ses frontières », in Enjeux n°28, juillet- septembre 2006, p.20

* 90 Yves alexendrechouala, « le marquage diasporique du jeu interetatique de l'Afrique du golf de guinée », enjeux n°13 octobre - decembre 2002, p.21

* 91 Serge loungou, « la libre circulation des personnes au sein de la cemac : entre mythe et réalités », in belgeo (en ligne),n° 3, 04 décembre 2012, p. 4

* 92 Ibidem,p.08

* 93 Dominique Bangoura, « frontières et espaces frontaliers en Afrique centrale »,inenjeux n°06, janvier- mars,2006,p.7

* 94Ibidem,p.07

* 95Koufanmenkene jean, tchudjingCasmir, « un exemple de blocage du processus d'intégration en Afrique centrale : la persistance des facteurs conflictuels entre la Guinée Equatoriale et ses voisins francophones depuis 1979 », in danielAbwa(dir) et al les dynamiques d'intégration régionale en Afrique centrale,presse universitaire, Yaoundé, nov 2001, Tom1,p.337

* 96 Yves alexendrechouala, « la crise diplomatique de mars 2004 entre le Cameroun et la Guinée Equatoriale », polis revue camerounaise de science politique, vol 12,numéro spécial 2004-2005

* 97 AFP Afrique, 15/08/2000

* 98 Jeune afrique économie, n°190,1995, p.13-17

* 99Choualat Alexandre yves, « l'installation des camerounais au Gabon et en Guinée équatoriale : les dynamiques originales d'exportation de l'Etat d'origine ? » in Sindjounluc (dir), Etat, individus et réseaux dans les migrations africaines, Paris, Karthala, 2005,p.85-97

* 100 Jeune Afrique, n°1784, 1995

* 101 Entretient avec Donfackeric le 16 /10/2018 à kyéossi

* 102 Entretient avec Ngankamflorent le 16 /10/2018 à kyéossi

* 103 Entretient avec buldah le 18/10/2018 à kyéossi

* 104 Serge loungou, op.cit,p.22

* 105 Mathias ericowonanguini, interviewé par le quotidien, mutationdu 17 mars 2004, consulté le 10/01/2019

* 106Abdoullahi, l'intégration en zone cemac : essai d'analyse des difficultés, université de Yaoundé 2 Soa, Mémoire, 2013-2014

* 107Abdoullahi,op.cit,

* 108 Entretien obtenu par téléphone avec un rapatrié de la Guinée équatoiale résident à Ambam le 18/10/2018

* 109 Mathias ericowonanguini, interviewé par le quotidien, mutationdu 17 mars 2004, consulté le 10/01/2019

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