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Le droit international est-il en crise


par Gbedokoun Eusebe SOSSOU
Université Amadou Hampaté Ba de Dakar - Master 2 en Droit public option Relation internationale et Management Public 2023
  

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Paragraphe 2 : Les mesures coercitives

Parmi les solutions existantes, celles qui ont retenues notre attention et semblent plus pertinentes, sont celles proposées par Boutros Boutros-Ghali dans son agenda en 1992 notamment la création d'une armée pour l'ONU (A) qui va permettre d'éviter la sous-traitance

303 Le terme «médiation» désigne tout processus, quelle que soit son appellation, dans lequel les parties demandent à un tiers de les aider à parvenir à un règlement amiable d'un litige, d'un rapport conflictuel ou d'un désaccord (ci-après le «différend») découlant d'un rapport juridique, contractuel ou autre ou lié à un tel rapport, impliquant des personnes physiques ou morales, y compris des entités publiques ou des États. In Acte uniforme relatif à la médiation, 23 novembre 2017, JO (entrée en vigueur : 23 février 2018).

des opérations coercitives aux États et aussi mettre en place un système dénommé « système de ressources en attente » (B).

A : La nécessité de la création d'une armée pour l'ONU

« Je recommande que le Conseil envisage de faire appel, dans des circonstances clairement définies, à des unités d'imposition de la paix dont le mandat serait défini à l'avance

»304. Cette recommandation de Boutros Boutros-Ghali reflétait son idée de doter l'Organisation d'unités d'imposition de la paix, destinées à remplir les tâches excédant la mission traditionnelle des forces de maintien de la paix et capables de mener par exemple, des « interventions préventives pour protéger les populations avant la consolidation de la paix »305.

Á la différence avec les forces de Casques bleus classiques, ces unités seraient fournies par des États membres et composées de militaires volontaires et stationnés en réserve sur le sol de leur pays. Eu égard à la difficulté présumée des missions qu'elles auraient eu à accomplir, ces forces devaient être lourdement armées et particulièrement bien entraînées. Sur le plan juridique il était prévu que leur déploiement et leur fonctionnement seraient autorisés par le Conseil de sécurité, au titre de l'article 40 de la Charte mais qu'à la différence des forces habituées ces unités seraient placées sous le commandement en chef du seul Secrétaire général.

En l'occurrence, Boutros Boutros-Ghali ne faisait que ressusciter un projet remontant à la résolution 377/V de 1950, par laquelle l'Assemblée générale avait adopté une recommandation prévoyant pour tous les États membres le maintien, sous le nom « d'Unités des Nations Unies », de contingents pouvant être rapidement disponibles. Cette suggestion demeura à l'état de projet, pour les mêmes raisons qui ont conduit les membres de l'Organisation à laisser en sommeil la proposition de Brian Urquhart. Comme l'observe Jean-Pierre Colin, en effet, « cette idée [...] susceptible de rappeler aux uns les Brigades internationales, [...] fait aux yeux des autres planer sur la force le spectre du mercenariat »306. Or, pour la plupart des États membres et, en tout cas pour les grandes puissances, si mercenariat il doit y avoir, autant qu'il soit à leur avantage. De la même façon, s'il faut prêter à l'ONU des troupes, pour parfois

304 Boutros Boutros-Ghali, Agenda pour la paix, op.cit., par.44.

305 SMOUTS (Marie-Claude), « Pour qui sont ces soldats ? », in L'ONU et la guerre : La diplomatie en kaki, Editions Complexe, Bruxelles, 1994, p. 24.

306 COLIN (Jean-Pierre), « Le leadership américain et révolution actuelle de la sécurité collective », Presses

universitaires de Nancy, Nancy, 1992, p. 131.

imposer la paix, autant en conserver le commandement direct, sans passer par le Secrétaire général. Toutes choses au demeurant, qu'autorise la pratique de la sous-traitance mais que n'aurait pas permis le système des unités d'imposition de la paix. Un système qui reste, de ce fait, à l'état de projet, comme, d'ailleurs, la plupart des autres mesures proposées par Boutros Boutros-Ghali et visant à « militariser » l'ONU.

Même si aujourd'hui, les temps ont changé, la réalité est peu probable de voir les États membres accepter de mettre au service de l'ONU, et surtout sous les ordres du Secrétaire général, des forces disposant d'un mandat coercitif et donc susceptibles d'être utilisées dans des actions de contrainte armée militairement dangereuses et politiquement délicates, force est de contester le projet est louable et doit être pris en considération.

À cet égard, la proposition de Brian Urquhart de créer une force d'imposition de la paix de 5 000 hommes environ composée de volontaires recrutés spécialement et directement par l'Organisation307s'avère sans doute plus réaliste. Elle ne fait elle aussi, que reprendre une idée énoncée en 1950 par Trygve Lie lui-même. Ce dernier avait alors proposé la création d'une brigade internationale composée de tous les volontaires compétents, issus de tous les États de la société internationale, liés à l'Organisation par « des engagements valables deux ou trois ans

» et dotés d'un uniforme particulier et distinctif. Cette « Brigade des Nations Unies », mise « à la disposition du Conseil de sécurité », aurait été chargée des tâches coercitives, sous la direction de cet organe et au nom des Nations Unies308.

Même s'il existe un risque qu'une force militaire de l'ONU soit manipulée par des nations puissantes pour leurs propres intérêts, compromettant ainsi sa légitimité et son efficacité elle pourrait éviter les interférences nationalistes et les conflits d'intérêts qui peuvent surgir lorsque les États utilisent leur propre militaire pour poursuivre des objectifs nationaux. Elle pourrait également aider à réduire les tensions entre les États et à promouvoir une culture de la coopération et de la Diplomatie.

B : La nécessité de mettre en place un système de ressources en attente

L'idée là avait été émise par Javier Ferez de Cuellar dès 1990, qui avait prié les États membres d'indiquer le personnel militaire qu'ils seraient prêts à mettre à la disposition de

307 URQUHART (Brian), «For a UN Volunteer military Force», New York Rewiew of Books, 10 juin 1993.

308 LIE (Trygve), Au service de la paix, collection Mémoire du temps présent, Gallimard, Paris, 1957, p. 380.

l'Organisation. Cette idée a été reprise par Boutros qui a créé, pour l'occasion dans le temps, un groupe spécial de sept officiers conduit par le colonel français Gérard Gambiez. Ce groupe s'est fixé pour objectif de « développer un système de ressources en attente capable d'être déployé en entier ou en partie, dès le début de 1994, n 'importe où dans le monde, à la demande du Secrétaire général, dans un délai convenu, pour des missions au service des Nations Unies, en exécution d'un mandat du Conseil de sécurité »309. Ce système des ressources en attente pour l'ONU et non de l'ONU dit « un Stand-by System »310 s'avère, à bien des égards plus réalistes que le projet de création d'un corps permanent de Casques bleus, à la disposition du Secrétaire général de l'ONU parfois évoqué par divers observateurs des relations internationales311.

Comme l'avait expliqué Boutros Boutros-Ghali « le système des forces et moyens de réserve vise à permettre de se faire une idée précise des forces et autres moyens que tout État Membre pourrait tenir prêts comme convenu, pour les mettre éventuellement à la disposition d'une opération de maintien de la paix »312. Il s'agirait donc d'établir à l'avance un stock d'hommes et de matériel313 sur lequel le Secrétaire général serait certain de pouvoir compter et qui lui permettrait d'évaluer, au mieux les capacités réelles d'intervention de l'Organisation.

L'intérêt principal de ce projet, par rapport au système antérieur, réside dans le gain de temps supposé réalisé par l'Organisation. Le Secrétaire général doit certes toujours obtenir un

309 Colonel Gérard Gambiez, cité par COLIN (Jean-Pierre), « Le leadership américain et révolution actuelle de la sécurité collective », Presses universitaires de Nancy, Nancy, 1992, p. 132.

310 GAMBIEZ (Gérard), « Les ressources `'en attente'' d'es Nations Unies », Droit et Défense, N° 94/4, octobre

1994, pp. 50 et ss.

311 Cet hypothétique corps permanent diverge fondamentalement des forces théoriquement prévues à l'article

43 de la charte. Il s'agirait en espèce d'un corps de Casques bleus, soumis à des conditions d'engagement restrictives et dont l'avantage principal tiendrait dans la Possibilité d'éviter au Secrétaire générales marchandages auxquels il doit se livrer pour obtenir des troupes, avant de pouvoir lancer la moindre opération, pourtant décidée par le Conseil de sécurité. Sur ce projet, qui a débouché sur la notion des ressources en attente.

312 Rapport du Secrétaire général du 30 juin 1994, Arrangements relatifs à des forces et moyens de réserve pour le maintien de la paix, S/1994/777, para. 2.

313 D'après ce même rapport (paragraphe 3), « ces moyens peuvent consister en des formations militaires. Une police civile, des personnels (civils et militaires) spécialisés, du matériel spécialisé et d'autres moyens ». L'Agenda pour la paix suggérait déjà la constitution d'un stock de matériel de base (véhicules, matériel de transmission, etc.), dans lequel il pourrait être puisé dès le lancement d'une opération. La constituons d'un tel stock permettait de résoudre le Problème du manque de matériel de certains contingents très mal équipés, qui oblige les Nations Unies à en acheter sur place ou à solliciter constamment les contributions volontaires d'autres États membres. Boutros Boutros-Ghali, Agenda pour la paix, op.cit., para 45.

accord des États, mais celui-ci a été pour partie déjà donner. Il sait donc à quoi s'en tenir et vers quels États prioritairement se tourner pour un acquiescement qui devrait être de principe, sauf circonstances très particulières.

Actuellement, très peu d'opérations peuvent démarrer immédiatement après avoir été autorisées par le Conseil de sécurité, il faut d'abord, évaluer le coût de l'opération établir un budget prévisionnel et obtenir le financement ; ce qui peut prendre plusieurs semaines. Il faut ensuite, obtenir des États membres les hommes et la logistique nécessaires. Le Secrétariat général doit, à ce stade se livrer à de véritables marchandages qui prennent du temps. Le système des ressources en attente permettrait, sinon de supprimer, du moins d'atténuer les conséquences de ces immanquables tractations et ainsi de gagner de précieuses semaines. Un tel système garantirait également au Secrétariat général de gérer au mieux les ressources que sont prêts à lui fournir les États membres si le stock s'avère314 insuffisant, il s'abstiendra d'initier une nouvelle opération. Il l'autoriserait, enfin à compter sur du personnel immédiatement opérationnel et dont l'équipement et la spécialisation correspondraient parfaitement aux besoins de la mission315.

Ce serait là une innovation qui apparaît donc des plus intéressantes sur le papier mais qu'il faudra encore traduire en pratique mais s'il présente en effet de notre point de vue, comme de celui de David Ruzié « une faiblesse essentielle : celle d'être, en dernière analyse, tributaire de l'acceptation des États de participer à une opération donnée »316.

314 Sur les trop longs délais que nécessité la mise en place d'une opération de maintien de la paix. Voir ZACKLIN (Ralph), « capacités financières et techniques des organisations internationales : financement et gestion des opérations de maintien de la paix de l'Organisation des Nations Unies », in SGDN, « Sécurité collective et crises 'internationales », SGDN/La Documentation Française, Paris, 1994, pp. 415-416.

315 Cf. le rapport du Secrétaire général du 30 juin 1994, sur les arrangements relatifs à des forces et moyens de réserve pour le maintien de la paix : « Les effectifs fournis dans le cadre du système de forces et moyens de réserve doivent être pleinement opérationnels, y compris disposer du matériel dont ils ont besoin pour fonctionner ». S/1994/777, para. 4.

316 David Ruzié, « Le cadre juridique des interventions françaises au Rwanda », Droit et Défense, Octobre 1994,

p. 5.

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