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Le droit international est-il en crise


par Gbedokoun Eusebe SOSSOU
Université Amadou Hampaté Ba de Dakar - Master 2 en Droit public option Relation internationale et Management Public 2023
  

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Paragraphe 2 : En matière de protection des investisseurs étrangers

Les investisseurs étrangers cherchent des conditions d'opération qui les protègent face à l'instabilité économique. Une protection juridique consistante des investissements étrangers, de préférence sous la forme de règles internationales uniformes, s'impose donc d'autant plus. Ainsi, il parait utile qu'un tel système de protection ait vu le jour. Les États d'accueil sont en effet liés par des normes internationales visant à protéger les investisseurs étrangers des aléas politiques. La bonne application de ces normes, peut généralement être vérifiée à l'initiative des investisseurs, par des tribunaux d'arbitrage internationaux. L'État voit ainsi son action soumise à un contrôle extrême. Le droit international des investissements, évolue dans un sens favorable aux investisseurs, car il fait entrer dans son champ d'application toute la panoplie de l'action publique. Ce qui nous subordonne pour une bonne appréhension à évoquer les garanties juridiques (A) concourant à une protection accrue des investisseurs étrangers et dans un autre volet aborder les garanties juridictionnelles (B).

A : Des garanties juridiques

La protection des attentes légitimes des investisseurs étrangers a été assurée par l'ensemble des traités d'investissements qui ont été le plus souvent des traités bilatéraux d'investissements conclus entre les pays d'origine des investisseurs ou de l'investissement et les pays hôtes de l'investissement. En effet, cette protection a été à l'origine rudimentaire c'est-à-dire peu développée. Les traités bilatéraux d'investissement (TBI) font partie d'un régime d'investissement international encadrant la manière selon laquelle un pays et son gouvernement peuvent établir des règles applicables aux avoirs étrangers. Au Canada, les TBI sont appelés accords de promotion et de protection de l'investissement étranger (APIE). Par ailleurs, les accords bilatéraux de libre-échange contiennent des dispositions presque identiques à celles des TBI qui prennent la forme de chapitres sur l'investissement et s'ajoutent à d'autres dispositions

sur le commerce (par exemple le chapitre 11 de l'Accord de libre-échange nord-américain214). Ce régime d'investissement relève d'une application du droit international qui assure aux investisseurs étrangers (individus et sociétés) un haut niveau de protection contre le traitement arbitraire des États où ils possèdent des actifs. On compte plus de 2 600 traités bilatéraux dans le monde. Ces traités régissent l'action des gouvernements de façon rigoureuse, mais n'imposent pas ou imposent peu de responsabilités aux investisseurs.

Il y'a aussi des conventions bilatérales d'encouragement et de protection réciproque des investissements qui sont des traités internationaux, conclus sur la base de la réciprocité, entre deux États, afin de : définir les principes et les règles de traitement et de protection qui régiront les investissements des ressortissants d'une partie contractante sur le territoire de l'autre partie contractante. Parmi les règles de traitement de l'investissement, les traités peuvent prévoir les règles du traitement national et/ou les règles de la Nation la plus favorisée215 (clause NPF). Le principe du traitement national consiste pour l'État d'accueil à fixer la même règle de traitement pour l'investisseur étranger et pour l'investisseur national. Selon la clause NPF, un investisseur étranger ne saurait recevoir un traitement moins favorable que l'investisseur ressortissant de la nation la plus favorisée. Les traités ne concernent généralement que la phase post-implantation, sauf ceux signés par les États-Unis qui abordent la question de la phase d'implantation. S'agissant de la protection des investissements, les traités comprennent les règles applicables aux mesures de dépossession, aux sinistres ou dommages provoqués par les événements politiques, au transfert des investissements. De choisir les mécanismes qui permettront de régler les différends entre ces parties. Les accords de protection de l'investissement consacrent l'arbitrage comme mode privilégié de règlement des différends, si les parties ne sont pas parvenues à un accord au terme d'un règlement amiable. Ils permettent aux parties d'invoquer cette clause et de recourir au système qu'elles prévoient en dehors du contexte contractuel.

214 Le chapitre 11 de L'Accord de Libre Echange Nord-Américain entrée en vigueur le 01 janvier 1994 se divise en trois sections : la section A - Obligations en matière d'investissement dont les Parties à l'Accord ont convenu. (Articles 1101 à 1114), la section B - Procédures de règlement lorsqu'un différend survient entre une Partie et un investisseur d'une autre Partie. (Articles 1115 à 1138) ; la section C - Définition de certains termes employés dans ce chapitre. (Article 1139).

215 La clause de la nation la plus favorisée est une clause fréquente des traités de commerce international « par laquelle chaque État signataire s'engage à accorder à l'autre tout avantage qu'il accorderait à un État tiers ». KOULICHER (Joseph), « Les traités de commerce et la clause de la nation la plus favorisée du, XVIe au XVIIe siècle », Revue d'histoire moderne et contemporaine, Paris, Belin / CNRS, nos 6-31, 1931, p. 3-29.

Dans la sphère africaine, il y'a le Protocole d'investissement de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) signé en 2008 qui vise à promouvoir et à protéger les investissements au sein de la région de la CEDEAO. Il fournit un cadre pour le traitement des investisseurs étrangers, y compris des garanties de traitement juste et équitable, une protection contre l'expropriation et un libre transfert de fonds et beaucoup de convention.

Ces conventions posent des principes cardinaux, qui concourent à la protection des investisseurs estrangers. On note le principe de non-discrimination qui impose aux États le devoir de traiter sans discrimination les investisseurs étrangers mais aussi les investissements nationaux. Á cet égard il faut admettre que la discrimination est interdite, elle doit l'être aussi bien à l'égard des individus et des sociétés étrangères qu'à l'égard des filiales de sociétés étrangères domiciliées sur place mais contrôlées par l'étranger. Des questions qui se posent apparaissent dès qu'il s'agit d'en poser les termes : le traitement de l'investisseur étranger doit- il être rapproché de celui de l'investisseur national, ou de celui des investisseurs étrangers d'autres nationalités ? Et, dans le cadre de cette double comparaison, en quoi consiste l'égalité

?

Tout d'abord, on doit noter que le principe de la non-discrimination est limité au régime applicable à l'investissement étranger autorisé comme le précise l'article I alinéa 3 de la résolution 1803 (XVII) de l'Assemblée Générale des Nations Unies qui dispose que : « Dans les cas où une autorisation sera accordée, les capitaux importés et les revenus qui en proviennent seront régis par les termes de cette autorisation, par la loi nationale en vigueur et par le droit international216».

Ce principe repose sur des clauses contingentes qui proscrivent la discrimination. D'une part, on trouve la clause du traitement national217 qui constitue un obstacle à la discrimination

216Résolution 1803 (XVII), AG/NU, du 14 décembre 1962 sur la Déclaration sur la souveraineté permanente des peuples et des Nations sur les ressources naturelles, l'article I paragraphe 3. « Dans les cas où une autorisation sera accordée, les capitaux importés et les revenus qui en proviennent seront régis par les termes de cette autorisation, par la loi nationale en vigueur et par le droit international. Les bénéfices obtenus devront être répartis dans la proportion librement convenue, dans chaque cas, entre les investisseurs et l'Etat où ils investissent, étant entendu qu'on veillera à ne pas restreindre, pour un motif quelconque, le droit de souveraineté dudit Etat sur ses richesses et ses ressources naturelles ».

217 Le traitement national est l'obligation de considérer les investisseurs étrangers et/ou leurs investissements d'une façon qui ne soit pas moins favorable que celle qui est réservée aux investisseurs nationaux dans des situations semblables. C'est une norme relative qui compare le traitement accordé aux investisseurs et/ou aux

entre investisseur étranger et investisseur national. D'autre part, la clause de la nation la plus favorisée précitée qui fait obstacle à la discrimination entre les investisseurs étrangers.

En somme, la garantie d'une protection juridique pour les investisseurs étrangers est la pierre angulaire d'une économie mondiale saine et dynamique. En offrant un environnement sûr et sécurisé pour l'investissement, les pays peuvent libérer tout le potentiel des investissements transfrontaliers, promouvoir la croissance économique et créer un avenir meilleur pour tous. À mesure que l'économie mondiale continue d'évoluer, l'importance de cette garantie ne fera que croître, ce qui en fera une préoccupation majeure pour les décideurs politiques, les chefs d'entreprise et les investisseurs.

B : Des garanties juridictionnelles

La protection des investissements étrangers est un élément crucial pour encourager les flux d'investissement internationaux et promouvoir la croissance économique durable. Dans ce contexte, les garanties institutionnelles jouent un rôle essentiel de protections des investisseurs étrangers dans la mesure où ils auront accès à des recours juridiques impartiaux et efficaces en cas de litige ou d'expropriation. Au cours de ces dernières décennies des institutions importantes comme le Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (CIRDI), la cour internationale de justice, la Société financière internationale (SFI) de la Banque mondiale ont joué un rôle très important allant dans ce sens.

Le CIRDI est une organisation intergouvernementale créée en 1965218 pour régler les différends entre les États et les investisseurs étrangers. Il offre une plateforme pour la négociation et la médiation des conflits liés aux investissements étrangers, ainsi que pour l'arbitrage des différends qui ne peuvent être résolus par des moyens amiables. Le CIRDI est doté d'un système d'arbitrage conforme au droit international public, qui permet de trancher les litiges entre les États et les investisseurs étrangers de manière équitable et transparente. Á cet effet la CIRDI a rendu plusieurs décisions salvatrices au cours de ces dernières décennies.

investissements d'un pays étranger à celui qui est accordé aux investisseurs/investissements dans le pays d'accueil.

218 Le Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (CIRDI) a été créé par la Convention de Washington du 18 mars 1965.

Comme exemple la sentence du 13 novembre 2000, Maffezini contre Espagne219 dans laquelle le centre a rappelé encore une fois la portée de la clause de la nation la plus favorisée et aussi la décision sur la compétence du centre du 1er décembre 2000, Ceskoslovenska Obchodni220 par laquelle, le centre a adopté une approche large et flexible de la notion d'investissement, en tenant compte des caractéristiques objectives de l'opération, telles que la durée, le risque, la contribution et la régularité, ainsi que des intentions subjectives des parties, telles que l'existence d'un consentement à l'arbitrage et la protection du traité bilatéral d'investissement. Cette décision a également reconnu la personnalité juridique distincte des investisseurs étrangers par rapport à leur État d'origine, en permettant aux binationaux de recourir à l'arbitrage du CIRDI si l'une de leurs nationalités est celle d'un État contractant autre que l'État hôte. Cette décision a été suivie par de nombreux tribunaux arbitraux du CIRDI, qui ont appliqué les mêmes critères pour affirmer leur compétence sur des différends relatifs à des investissements variés221, tels que des prêts, des concessions, des contrats de construction, des licences, des actions, des obligations, etc.

La SFI, quant à elle, est une institution financière internationale créée en 1947 pour contribuer au développement économique et social des pays en voie de développement. Elle fournit des financements et des conseils techniques aux gouvernements et aux entreprises pour soutenir leur développement économique et social. Elle est également active dans la promotion de l'investissement international et dans la gestion des différends liés aux investissements étrangers.

Les responsabilités des deux institutions sont donc complémentaires dans la mesure où le CIRDI se concentre principalement sur la résolution des différends liés aux investissements étrangers, tandis que la SFI se focalise sur la promotion de l'investissement international et la fourniture de financements et de conseils techniques aux gouvernements et aux entreprises. L'analyse de leurs rôles respectifs montre que ces institutions internationales jouent un rôle important dans la résolution des différends liés aux investissements étrangers. Elles offrent des mécanismes de protections des investissements étrangers, en particulier ceux des petits et moyens entrepreneurs contre les risques politiques et commerciaux. Ces garanties encouragent

219 CIRDI, Sentence du 13 novembre 2000, Maffezini c. Espagne, Aff. N° ARB/97/7

220 CIRDI, décision sur la compétence, 1er décembre 2000, Ceskoslovenska Obchodni Banka, A.S. c./ République Slovaque, Aff. N° ARB/97/4.

221 CIRDI, sentence du 10 mars 2014, Tulip Real Estate Investment and Development Netherlands B.V. c. Turquie, Aff. N° ARB/11/28.

les investisseurs à investir dans des projets productifs et rentables, ce qui contribue considérablement à la croissance économique et sociale des pays en développement.

Outre ces deux institutions ; il y'a la cour internationale de justice qui a joué un rôle salvateur par le biais de ces décisions rendues en matière de protection des investisseurs étrangers. Dans cette optique, il y l'affaire Ahmadou Sadio Diallo (République de Guinée contre République Démocratique du Congo)222.

Il ressort des faits que, le 28 décembre 1998, la Guinée a déposé une requête introductive d'instance contre la République démocratique du Congo au sujet d'un différend relatif à de « graves violations du droit international » qui auraient été commises sur la personne de M. Ahmadou Sadio Diallo, ressortissant guinéen. Dans sa requête, la Guinée soutenait que Monsieur Ahmadou Sadio Diallo, homme d'affaires de nationalité guinéenne, avait été, après trente-deux (32) ans passés en République démocratique du Congo, injustement incarcéré par les autorités de cet État, spolié de ses importants investissements, entreprises et avoirs mobiliers, immobiliers et bancaires puis expulsé. La Guinée y ajoutait que « cette expulsion était intervenue à un moment où M. Ahmadou Sadio Diallo poursuivait le recouvrement d'importantes créances détenues par ses entreprises Africom-Zaïre et Africontainers-Zaïre sur l'État congolais et les sociétés pétrolières qu'il abritait et dont il était actionnaire ».Dans sa requête, la Guinée invoquait, pour fonder la compétence de la Cour, les déclarations d'acceptation de la juridiction obligatoire de celle-ci faites par les deux États au titre du paragraphe 2 de l'article 36 du Statut de la Cour.

D'abord dans son arrêt sur le fond du 30 novembre 2010, la Cour a jugé que, eu égard aux conditions dans lesquelles M. Diallo avait été expulsé le 31 janvier 1996, la RDC avait violé l'article 13 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, ainsi que le paragraphe 4 de l'article 12 de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples. Elle a également jugé que, eu égard aux conditions dans lesquelles M. Diallo avait été arrêté et détenu entre 1995 et 1996 en vue de son expulsion, la RDC avait violé les paragraphes 1 et 2 de l'article 9 du Pacte et l'article 6 de la Charte africaine. La Cour en bon droit a conclu que « la République démocratique du Congo avait l'obligation de fournir une réparation appropriée, sous la forme d'une indemnisation, à la République de Guinée pour les conséquences préjudiciables résultant des violations d'obligations internationales visées aux points 2 et 3 du dispositif » et ensuite

222 Ahmadou Sadio Diallo (République de Guinée c. République démocratique du Congo), indemnisation, arrêt,

C.I.J. Recueil 2012, p. 324.

dans sa décision du 19 juin 2012, La cour a conclu que l'indemnité à verser à la Guinée s'élevait donc à un total de 95 000 dollars, payable le 31 août 2012 au plus tard. Elle a décidé que, en cas de paiement tardif, des intérêts moratoires sur la somme principale courraient, à compter du 1er septembre 2012, au taux annuel de 6 pour cent. La Cour a décidé que chaque Partie supporterait ses frais de procédure.

Cette affaire est intéressante également à d'autres égards et est d'une pertinence notoire dans la mesure où la CIJ n'est compétente que pour connaitre des litiges purement étatiques223. Mais là il s'agit d'un individu qui saisit la cour par le biais de son État et cette dernière y fait référence à la jurisprudence des autres juridictions internationales et régionales des droits de l'Homme. Des questions peuvent être soulevées sur l'interaction et l'influence mutuelle entre la CIJ et ces juridictions ainsi que sur la position qu'adopterait la Cour s'il s'agissait de questions « plus controversées touchant à la souveraineté étatique »224. La Cour adopterait-elle la position des juridictions de protection des droits de l'Homme qui sont plus protectrices ?

Toutefois, on doit relever que cette posture qu'a pris la cour n'est pas soudaine. Depuis des années déjà la cours rendait déjà des décisions remarquables en remarquable en matière de protection des investisseurs étrangers comme on l'a eu à observer dans l'arrêt CIJ, arrêt Nottebohm en 1955225 et Barcelona traction en 1970226

En somme, ces garanties institutionnelles de protection des investissements étrangers encadrées par le droit international sont un élément clé pour les particuliers qui souhaitent investir à l'étranger, et participer ainsi à la promotion de la stabilité et de la croissance économique mondiale, même si les règles sont toujours en pleine mutation.

223 Article 34-1 du statut de la cour internationale de justice.

224 EL BOUDOUHI (Saida), « Affaire Ahmadou Sadio Diallo (République de Guinée c. République Démocratique du Congo), Fond : La CIJ est-elle devenue une juridiction des droits de l'Homme ? », Annuaire français du droit international, N°56, 2010, pp. 277-299.

225 CIJ, arrêt, 6 avril 1955, Nottebohm, Rec. CIJ, 1955.

226 CIJ, arrêt, 5 février 1970, Barcelona Traction (Belgique c/ Espagne), (fond), Rec. CIJ, 1970.

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"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard