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Le Rwanda: analyse géopolitique d'une puissance émergente africaine


par Guy Herod PAMBO MIHINDOU
Université Omar Bongo - Master 2023
  

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4.1. La dépendance du Rwanda vis-à-vis de ses partenaires étrangers

4.1.1. Le Rwanda : un pays piégé par sa géographie aux multiples contraintes

Le décollage économique du Rwanda et son statut de puissance régionale et africaine acquis grâce à une diplomatie intensive marquée par le déploiement de ses forces armées sur le continent, ne doivent pas masquer les faiblesses récurrentes de cet État qui demeure parmi les plus pauvres au monde. Le pays fait face à une situation géographique pénalisante : territoire exigu sans accès à la mer, et soumis à une pression démographique. En géopolitique, la position est un élément important qui peut conférer des avantages ou des désavantages à un État en fonction de sa localisation. La position par rapport au domaine maritime est l'une des plus précieuse en géopolitique au regard des intérêts économiques mais aussi géostratégiques qu'elle représente pour un État.213 Disposer d'une façade maritime confère de nombreux avantages aux États qui en sont pourvus sur les plans économiques et stratégiques. A contrario, les États qui en sont dépourvus sont soumis à de nombreuses contraintes qui les relais bien souvent à la marge des circuits d'échanges internationaux.214 Ne disposant pas de fenêtre maritime, l'enclavement apparait pour le Rwanda comme l'une des contraintes majeures auxquelles il fait face dans sa quête de puissance au niveau continentale et ce pour plusieurs raisons.

D'abord, ce désavantage géographique place cet État en situation de dépendance permanente vis-à-vis des pays qui disposent d'une ouverture sur la mer. Il s'agit notamment du Kenya et de la Tanzanie, qui à travers les ports de Mombasa et de Dar es Salaam, lui donnent la possibilité de s'ouvrir au reste du monde via le transport maritime (cf. carte 15). Ses approvisionnements en produits manufacturés en provenance de l'étranger indispensables pour son économie dépendent de deux corridors : le corridor nord, en provenance du port de Mombasa via le Kenya et l'Ouganda et le corridor central, en provenance de Dar es Salaam via la Tanzanie et le Burundi. Les importations et exportations du Rwanda se font majoritairement via le corridor central en raison des délais qui y sont plus courts et des coûts de transport moins onéreux que ceux du corridor nord. En effet, les coûts de transport des marchandises qui passent par le corridor central sont 14 % moins élevés que ceux du corridor septentrional et la durée

213 P. GOURDIN. (2010). Géopolitiques manuel pratique. Paris : Choiseul Editions, p.49.

214 S. ROSIÈRE. (2008). Dictionnaire de l'espace politique. Géographie politique et géopolitique. Paris : Armand Colin, p.88.

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d'acheminement via celui-ci est plus courte que celle offerte par le corridor du nord.215 Le trajet Dar es Salaam-Kigali s'effectue en quatre jours environ alors que le trajet Mombasa - Kigali s'effectue entre six et sept jours, en raison notamment du transit des marchandises en Ouganda et des distances plus importantes.216 Il faut aussi noter que ces corridors souffrent de la mauvaise qualité des voies de communication entre les différents pays. Cela complexifie davantage l'acheminement des marchandises vers le Rwanda. De plus, les corridors qui partent des ports vers le Rwanda sont encore loin d'être multimodaux, la route est toujours la principale voie utilisée pour le transport des marchandises. Même si ces dernières années, des efforts ont été engagés au niveau régional pour faciliter la circulation des marchandises (réduction des documents à remplir, initiation de plusieurs projets d'amélioration des voies de transports), l'accès au Rwanda depuis les ports de l'océan Indien demeure long et coûteux. Pour illustration, le coût de transport d'un container de Mombasa à Kigali est par exemple quatre fois supérieur à celui entre Mombasa et la Chine.217 Ainsi, fortement dépendant de ses voisins, de leur stabilité et de leur bon vouloir, le confinement logistique du Rwanda est comme une épée de Damoclès qui pèse constamment sur lui et menace ses exportations et importations de minerais et de marchandises. Surtout qu'à un moment dans son histoire récente, le Rwanda a eu des relations diplomatiques difficiles avec son voisin tanzanien. La raison principale de cette période de tensions diplomatiques a été la suggestion d'un dialogue politique entre les FDLR et le gouvernement rwandais faite par le président de la Tanzanie de l'époque, Jakaya Kikwete, en marge du cinquantenaire de l'UA organisé en Ethiopie en 2013. Cette proposition venant du président tanzanien avait donné lieu à des échanges verbaux agressifs entre ce dernier et P. Kagame.218 Au final, si un conflit armé n'a pas eu lieu entre les deux États, la dépendance du Rwanda vis-à-vis du port tanzanien de Mombasa aurait pu être utilisée pour asphyxier l'économie rwandaise. De ce point de vue, stratégiquement, le Rwanda en cas de confrontation directe avec son voisin se serait retrouvé fortement handicapé. Il faut aussi noter que l'enclavement du Rwanda l'oblige à traverser deux États (Burundi et Ouganda), avec lesquels les relations ne sont pas toujours bonnes, avant d'accéder à la mer. En effet, les corridors du nord et du centre passent par les capitales des deux pays (Bujumbura et Kampala) suscités avant

215 AMBASSADE DE FRANCE AU RWANDA. (2021). Au Rwanda, des défis à relever avant de devenir un hub logistique régional. La Lettre économique de l'Afrique de l'Est et de l'Océan Indien, (9), 13-14. Disponible à l'adresse : https://www.tresor.economie.gouv.fr/Articles/5141a33b-d9b7-48f1-b21f-62c394d0747a/files/5341b983-a724-418a-bc2f-db3926ff95e4

216 Ibid.

217 Ibid.

218 JEUNE AFRIQUE. (2013, 27 août). Le Rwanda et la Tanzanie à couteaux tirés. Disponible à l'adresse : https://www.jeuneafrique.com/168895/politique/le-rwanda-et-la-tanzanie-couteaux-tir-s/

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de rejoindre les côtes de l'océan Indien. Tout comme dans le cas tanzanien, cette situation de passage obligé par les capitales d'États considérés comme hostiles, pourrait s'avérer extrêmement pénalisante pour l'économie du Rwanda si jamais un conflit ouvert venait à avoir lieu.

En outre, l'étroitesse de son territoire représente une limite interne particulièrement contraignante pour le Rwanda. Avec une superficie d'à peine 26 338 km2, le Rwanda ne dispose pas de grandes quantités de ressources naturelles qui sont pourtant importantes pour son économie. L'étroitesse de son territoire le confronte également à une importante pression démographique caractérisée par une raréfaction des terres cultivables. Selon les prévisions de croissance démographique de l'ONU 2019 (scénario moyen), la population du Rwanda pourrait attendre 23 millions d'habitants d'ici 2050. Si cette tendance se confirmait, elle pourrait accentuer les problèmes liés à la disponibilité des terres.

Carte 17. Les principaux débouchés maritimes du Rwanda

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