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Diversification des exportations et croissance economique: cas du Senegal


par Mamadou Lamine BOUSSO
Université Cheikh Anta Diop de Dakar - Master 2 en politique commerciale 2022
  

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SECTION 3 : REVUE DES TRAVAUX EMPIRIQUES SUR LA DIVERSIFICATION DES EXPORTATIONS ET LA CROISSANCE

Plusieurs travaux empiriques ont, d'une façon spécifique, pris en compte la relation entre la diversification des exportations et la croissance économique.En effet, l'analyse des travaux économétriques menés par Gutiérrez de Piñeres et Ferrantino (2000) dans le cas des pays de l'Amérique latine (le Chili, l'Uruguay, la Colombie...) en s'appuyant sur les données de panel, montre qu'il existe bien une interaction positive entre la diversification des exportations et la croissance économique. Ces résultats sont similaires à ceux obtenus par De Ferranti et al. (2002) et Al-Marhubi (2000) dans des pays en développement ; Hammouda et al. (2009) en Afrique du Nord entre 1980-2002 ; Mejia (2011) ; Mudenda et al. (2014) dans le cas de l'Afrique du Sud. A travers les modèles structurels de développement, Chenery, (1980), estime que les pays devraient passer des exportations primaires aux exportations de produits manufacturés pour aboutir à une croissance durable.

Dans le même ordre d'idées, Feenstra et Kee (2004) dans leurs analyses sur le lien entre la productivité d'un pays et la variété sectorielle de ses exportations, datant des années 1984-1997 sur un échantillon de 34 pays, concluent qu'une hausse de 10% de la diversité des exportations dans toutes les branches entrainerait une augmentation de 1,3% de la productivité d'un pays. En outre, la diversification des exportations vers les produits manufacturés conduit à un taux de croissance plus élevé, plus de productivité et un bien-être accru (Haussman et al, 2007 ; Palma, 2005). En se focalisant sur la méthode des moments généralisés, dans certains pays en développement au cours de la période 2000-2009, Khodayi, hamed et al (2014), arguent que la réduction de la spécialisation des exportations, autrement dit l'augmentation de la diversification des exportations a un effet significativement positif sur le taux de croissance économique d'un pays.

C'est dans ce contexte que Hesse (2009), stipule que la spécialisation principalement autour des produits de base expose les pays à des chocs externes défavorables, entraînant une détérioration des termes de l'échange avec pour conséquence un ralentissement de la croissance. Naudé et Rossouw (2011) concluent à une relation en U entre la spécialisation des exportations et la croissance du revenu par habitant en Chine et en Afrique, en utilisant des séries chronologiques.

En élaborant un modèle économétrique des déterminants de la croissance économique dans les économies de rente, riches en ressources naturelles, à partir des données d'un échantillon composé de 85 pays pour la période de 1965-1998, Gylfason (2005) tente de comprendre les relations d'une part, entre la diversification économique et la croissance et d'autre part, entre les autres déterminants de la croissance et la diversification. Il conclut que tout ce qui est bon pour la croissance encourage la diversification économique.

Dans cette même perspective Sanassee et al. (2014), ont montré dans un modèle à correction d'erreur appliqué à Maurice qu'une augmentation de 1% de la diversification des exportations se traduirait par une augmentation de 0,09% du PIB réel à court terme et de 0,11% du PIB réel à long terme. L'ajustement ne prendrait pas du temps selon les auteurs, parce que la croissance économique contribue aussi à accroître la diversification. A partir d'une approche économétrique par les moindres carrés ordinaires (MCO), sur une période de 1981-2016, Owan et al. (2020), soutiennent ainsi l'existence d'une relation positive et significative entre le produit intérieur brut non pétrolier comme mesure de la diversification économique et la croissance économique tandis que les exportations non pétrolières comme proxy de la diversification des exportations avaient un effet positif, mais non significatif sur la croissance économique du Nigéria.

Dans leur analyse fondée sur l'hypothèse d'existence d'une relation entre la diversification des exportations et la croissance économique par le biais des externalités de l'apprentissage par l'exportation et de l'apprentissage par la pratique, Herzer et al. (2006) estiment une fonction de production type Cobb-Douglas augmentée sur la base de données de séries chronologiques du Chili sur la période 1962-2001. Leurs résultats montrent que les diversifications horizontale et verticale des exportations favorisent la croissance économique. Cette constatation corrobore les résultats de Olaleye et al. (2013) qui concluent qu'une augmentation de la production du secteur agricole entraînera une amélioration significative du bien-être de la population au Nigeria. Des résultats similaires ont été trouvés par plusieurs auteurs comme Agosin (2007) et Ferreira (2009) ; Bakari, (2016), Lotti et Karim, (2017) dans la plupart des pays de leur échantillon.

Imbs et Wacziarg (2003) dans leurs analyses portant sur différents pays, sur la relation entre la concentration sectorielle nationale et la structure du revenu par habitant, ont montré que la diversification avait une relation en U inversé avec le niveau de développement. Ainsi, selon eux, la croissance se manifeste par une augmentation de la diversification sectorielle, mais à un certain seuil de revenu par habitant, la distribution sectorielle de l'activité économique a tendance à se reconcentrer. Mais leur étude a surtout mis l'accent sur l'importance d'une gestion saine des facteurs macroéconomiques dans les efforts de diversification des économies.

Selon Levin et Raut (1997), lorsque les exportations totales d'un pays comprennent une plus forte proportion d'exportations de produits manufacturés, cela a un effet positif sur la croissance économique.

En utilisant les données désagrégées sur les exportations, Klinger et Lederman (2004) montrent qu'alors que la diversification augmentait dans les pays peu développés, elle diminuait lorsque les pays dépassaient un certain revenu intermédiaire. Les nouveaux produits exportés selon ces auteurs, avaient une forme d'une courbe en U inversée par rapport aux revenus, ce qui présage que les économies deviennent moins concentrées et plus diversifiées à mesure que les revenus augmentent. Ce n'est qu'à des niveaux de revenus relativement élevés qu'une augmentation de la croissance s'accompagne d'une plus forte spécialisation et donc d'une plus faible diversification. Ces résultats vont dans le même sens avec ceux obtenus par Cadot, Carrère et Strauss-Kahn (2011).

Par ailleurs, Bakari et Mabrouki (2016), analysent la relation entre la croissance économique, l'exportation et l'importation au Maroc en s'appuyant sur les techniques de modélisation VAR et de causalité au sens de Granger. Leurs résultats montrent l'existence d'un effet de causalité qui va de la croissance économique vers l'exportation alors qu'il n'existe aucun effet qui va de l'exportation vers la croissance. Ce résultat est similaire avec ceux obtenus par Sachin et al. (2015) dans le cas de l'Inde.

Cependant Chang et al. (2000), Sharma et Panagiotidis (2005) trouvent des résultats qui ne semblent pas valider l'hypothèse de la croissance tirée par les exportations. Nicet-Chenaf et Rougier (2008) soulignent qu'une trop grande diversification des exportations peut nuire à la croissance d'un pays. L'auteur a utilisé la méthode des moments généralisés (GMM) et s'est concentré sur la Tunisie, l'Égypte, la Jordanie, le Maroc, l'Algérie et l'Israël.

Aditya et Roy (2009) sont parvenus également à des conclusions similaires sur l'effet de la diversification des exportations sur la croissance en utilisant la même démarche dans un échantillon de 68 pays. De plus, Gutiérrez de Piñeres et Ferrantino (2000) en utilisant les données des séries temporelles obtiennent un effet négatif entre la diversification des exportations et la croissance en Chili et en Colombie.

Conclusion partielle

En conclusion de ce chapitre, l'analyse approfondie a porté sur la conceptualisation et la revue de la littérature sur la diversification des exportations et la croissance économique. La première section a détaillé les concepts clés de diversification et de croissance, mettant en évidence les enjeux et identifiant les déterminants de ce processus crucial. La revue de la littérature théorique dans la section suivante a souligné l'évolution des théories du commerce international, passant de la spécialisation à la reconnaissance croissante de la diversification comme moteur essentiel de la croissance, en particulier selon les théories de la croissance endogène.

La dernière section a exploré les travaux empiriques, révélant une diversité de résultats sur la relation entre la diversification des exportations et la croissance économique. Certains auteurs ont appuyé une corrélation positive, mettant en lumière les avantages potentiels de la diversification, tandis que d'autres ont signalé des effets négatifs ou des seuils critiques.

En résumé, cette exploration approfondie a jeté les bases nécessaires pour comprendre les aspects théoriques et empiriques de la diversification des exportations et de son impact sur la croissance économique. La prochaine étape consistera à appliquer ces connaissances à notre contexte spécifique, en analysant de plus près les données pour évaluer comment ces concepts s'appliquent à notre sujet de recherche.

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