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Les boulamat et les conflits fonciers en milieu urbain tchadien: cas du premier arrondissement de la ville de N'Djaména


par Lawane LOGAM
Université de Yaoundé 1 - Master en sociologie 2022
  

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II. PROBLEME DE RECHERCHE

Le gouvernement tchadien en application des lois qui régissent le foncier au Tchad, notamment la loi n°23 du 22 juillet 1967, portant statut des biens domaniaux ; la loi n°24 du 22 juillet 1967, sur le régime de la propriété foncière et des droits coutumiers, titre 1 : article 15, alinéa 2, stipule que : « l'Etat peut immatriculer à son nom les terres vacantes et sans maître »8; la loi n°25 du 22 juillet 1967, sur la limitation des droits fonciers, article 1, « nul ne peut être privé de la propriété des immeubles ou de l'usage du sol, sans que l'intérêt public l'exige, qu'il y ait indemnisation et que les dispositions légales soient appliquées.9 Ces différentes lois montrent que l'Etat est le garant de toutes les terres et jouit des prérogatives de leur gestion. En tant que seul et unique gestionnaire avéré, l'Etat a institué le principe de la détention du titre de propriété qui donne à un individu, non seulement l'autorisation de possession légale de terre, mais aussi la possibilité de faire des investissements sans risque d'expropriation et au-delà réduire au maximum les litiges fonciers sur l'étendue du territoire national. De même, l'Etat a créé par le décret n°215/PR/MES/2001 du 24 avril 2001, l'Observatoire du Foncier au Tchad10, un organe qui permet de prévenir les éventuelles crises foncières.

Malgré toutes ces prédispositions mises en place par le gouvernement tchadien, l'on assiste plutôt à une recrudescence des litiges fonciers. Le problème que soulève la présente réflexion est celui de l'ingérence des chefs traditionnels dans les différends fonciers. Autrement dit, comment comprendre et expliquer que ces chefs traditionnels soient devenus les instigateurs ou ceux mêmes-là qui orchestrent le désordre autour du foncier.

8 Banque Tchadienne de Données Juridiques(2004), « Le droit foncier par les textes: recueil de textes sur le foncier au Tchad», N'Djaména, CEFOD, Imprimerie du Tchad, p.12

9 Banque Tchadienne de Données Juridiques(2004), idem, p.24-30

10 Acte du colloque national sur la question foncière au Tchad. (2004). « La question foncière au Tchad », N'Djaména, CEFOD, p.13

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III. PROBLEMATIQUE

Il s'agit dans cette section de faire un état de lieu de la question. Autrement dit, il est question de faire une revue critique de la littérature des travaux antérieurs avant de poser un ensemble de questionnements gravitant autour de notre problème.

Nombreux sont les travaux qui se sont intéressés à l'analyse des conflits fonciers en Afrique subsaharienne et spécifiquement au Tchad.

Dans le cadre de la présente réflexion, trois tendances ont été retenues. La première tendance regroupe les travaux des auteurs qui abordent les questions foncières à partir de l'origine des conflits fonciers, et la deuxième tendance par contre met l'emphase sur l'analyse des gestions discriminatoires des terres en Afrique en général, et plus particulièrement au Tchad et enfin, la dernière tendance s'intéresse à l'analyse des gestions discriminatoires du foncier.

? Les origines des conflits fonciers

NJOYA NDAM Moussa11 dans son mémoire de master en sociologie s'interroge sur les fondements des conflits fonciers dans la commune de Foumban II, à l'ouest Cameroun. Selon cet auteur, les conflits fonciers naissent à partir de la juxtaposition du droit traditionnel et positif au Cameroun. Il ajoute que, les conflits fonciers sont liés à la contradiction entre la loi coutumière dominante dans la commune de Foumban II, et le droit positif hérité de la colonisation. De plus, il estime que, l'une des causes premières des conflits fonciers dans la commune de Foumban est la méconnaissance du droit positif par les populations locales.

HOUDEINGAR David12 qui présente dans son article, l'historique du domaine foncier tchadien qui, selon lui est hérité de la colonisation. Par ailleurs, selon cet auteur, la primauté du droit foncier moderne au détriment du droit foncier traditionnel est tributaire des crises foncières en milieu rural qu'urbain tchadien. De plus, il ajoute que, l'augmentation de la population a contribué à la limitation des parcelles des terres, raison pour laquelle les luttes autour des terres s'intensifient au Tchad.

11 NJOYA NDAM M. (2022). « Les conflits fonciers dans la commune de Foumban II à l'ouest Cameroun », Mémoire de Master, Sociologie Urbanité et Ruralité, FALSH, Université de Yaoundé I, p.11

12 HOUDEINGAR Op.cit, p.3

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LEUMAKO NONGNI Jeannette13 dans son article oriente ses idées sur la sociogenèse du texte sur le foncier au Cameroun. Selon cette auteure, les conflits fonciers naissent de juxtaposition et de la dualité de deux systèmes fonciers différents : le foncier traditionnel informel et le foncier moderne formel. De plus, l'auteur s'appuie sur l'expérience foncière du Moungo et relève deux faits majeurs : d'abord, les modes d'acquisition des terres, et après les enjeux qui gravitent autour des terres. Enfin, elle note que, l'Etat camerounais donne l'importance au droit positif au détriment du droit traditionnel en fonction des enjeux qu'il tire des terres des individus.

FROUZET Michel14 estime dans son article que, les Etats de l'Afrique noire sont dans une situation complexe mettant ainsi les individus résidant les milieux urbains dans des situations de « précarisation extrême ». De plus, FROUZET note que, les pays de l'Afrique subsahariennes se sont mis dans le « mimétisme inutile » des législations occidentales dans leurs sociétés, lesquelles des législations ne corroborent pas avec les réalités locales et, constituent à cet effet, « un luxe ». Par ailleurs, il poursuit son argumentaire en touchant des doigts les fuites de responsabilités des Etats africains qui, ne se rendent pas compte du risque que courent leurs pays en « voulant à tout prix ressembler aux maîtres ». C'est ainsi qu'il conclue qu'il est nécessaire d'opter pour une « rétro perspective de nos sociétés » afin d'éviter les chaos urbains. Car, le phénomène d'urbanisation croissant et inquiétant nécessite une « prise en compte des valeurs locales ».

ABBA DANA15 dans son article sur, « l'évolution démographique au Tchad » estime que, les litiges fonciers sont liés à la coexistence de deux systèmes fonciers qui divergent avec les exigences sociales locales. Selon l'auteur, il s'agit de la loi foncière traditionnelle et celle moderne. Aussi, selon l'auteur, les Etats en Afrique subsaharienne s'accaparent les des terres des individus. De plus, l'auteur estime que, cette tendance d'accaparement des terres des individus est fortement liée au droit moderne juxtaposé au droit traditionnel. Par ailleurs, cet auteur martèle que, les accaparements massifs des terres des individus ont des incidents majeurs au Tchad, notamment la recrudescence des conflits fonciers qu'on observe.

13 LEUMAKO NONGNI J, (2015). « Les conflits fonciers dans le Moungo : entre luttes interethniques et luttes pour l'acquisition de l'hégémonie économique », in NGA NDONGO V, Dynamiques sociales en Afrique noire. Chantier pour la sociologie africaine, Paris, l'harmattan, p.39-51

14 FROUZET M. (1982). « Politique foncière de l'Etat dans l'aménagement urbain, mimétisme et droit : de la planification urbaine en Afrique noire », in Enjeux fonciers en Afrique noire, Paris, Karthala, chapitre X, p.326

15 ABBA D. (2004). « Terre enjeu de pouvoir et des conflits » in La question foncière au Tchad, Acte du Colloque Scientifique de N'Djaména du 28 juin au 1er juillet 2004, N'Djaména, CEFOD, p.133-139

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SALMANA CISSE16 analyse l'évolution historique du foncier dans le contexte africain. En effet, CISSE s'attèle sur l'analyse de deux Delta du Niger. Il commence son analyse par la présentation du texte foncier. D'abord, il déroule son idée par l'historique de la question foncière dans l'Etat du Niger qui, selon lui, le texte sur le foncier au Niger a évolué en fonction de la fertilité du sol pour la pratique de l'agriculture ou le pâturage.

De plus, il mentionne que, la terre au Niger est subdivisée en deux : « le delta vif » et « le delta mort ». Le Delta Vif grâce à sa fertilité regorge une densité numérique des cheptels et des êtres humains, et le Delta mort au regard de son infertilité ne regorge pas une densité numérique importante. Cette dualité inégale concentre donc les individus dans le Delta vif du Niger17.

Par ailleurs, CISSE ajoute que, « le gouvernement nigérien n'a pas fourni un effort juridique, car il a repris le même texte occidental pour le situer dans l'Etat du Niger qui ne corrobore pas avec les réalités locales »18. Cette situation selon l'auteur, met les acteurs dans une difficulté incertaine, la solution adéquate selon eux doit être la contextualisation de cette loi foncière avec les réalités locales.

BEKAYO Samuel inscrit son idée dans la même lance que SALMANA Cissé. A cet effet,il axe son analyse sur les causes des conflits fonciers qui sont selon lui, liées à la croissance démographique d'une part et, d'autre part le changement climatique qui limite les espaces utiles pour l'habitation ou des activités économiques. Aussi, il fait l'état de lieu de la question foncière dans le canton Bédogo dans la région du Logone Occidental, Département de Lac Wey, préfecture de Moundou Rural et les acteurs impliqués dans la gestion des terres.

En effet, l'auteur ajoute que les chefs de canton sont des observateurs dans la gestion des conflits fonciers, ils ne s'impliquent pas dans la résolution des différends qui, depuis plus de deux décennies déchirent la cohésion sociale et le vivre-ensemble.

16 SALMANA C. (1982). « Les Leyde du Delta Central du Niger : tenure traditionnelle ou exemple d'un aménagement de territoire classique. » in Enjeux fonciers en Afrique noire, p.178-181

17 SALMANA C, ibidem

18 SALMANA C, ibidem

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Par ailleurs, l'auteur mentionne dans son analyse les acteurs impliqué dans la gestion foncière qui sont les agriculteurs, les éleveurs, les ONG, les élèves et les pères d'enfant qui assurent la gestion des terres.19

NKANKEU François et NGAMINI André,20 ces deux auteurs dans leur article scientifique orientent leurs pensées sur les fondements des conflits fonciers au Cameroun, notamment ceux dans la Département de Bamboutos. Selon ces auteurs, les conflits fonciers sont liés aux représentations sociales d'une part, et d'autre part aux conjonctures économiques. Ces auteurs estiment que, la situation financière est la cause de l'inégale distribution des terres et accentuent le processus de morcellement de terres. Ainsi, leur thèse se décline en deux articulations essentielles : le morcellement à outrance caractérisé par les familles démunies et nombreuses, tandis que le morcellement spéculatoire caractérisé par le retour des élites urbaines dans les campagnes. Les conflits fonciers selon eux, naissent de la corrélation entre les populations locales et celles nouvellement installées sur les sites d'accueil.

LE BRIS Etienne et LE ROY Etienne pensent que, la structuration actuelle de la gestion foncière dans l'Afrique noire ne cadre pas avec les pensées capitalistes du foncier créées par les dirigeants africains juste après les indépendances octroyées. Ils estiment aussi que, les sociétés contemporaines africaines sont marquées par un « référent précolonial » qui exclut volontiers les acteurs locaux à la gestion des terres par le biais du pouvoir étatique. Ils qualifient ce fait par l'appellation « propriétaire éminent ». L'Etat qui semble être régulateur des terres du pays est marqué ici par un « cliché précolonial » qui, jusque-là, marque son esprit et sa manière de « gérer » les ressources foncières.21

MOUPOU Moïse22 dans son article retrace la sociogenèse des litiges fonciers au Cameroun. Selon cet auteur, les litiges fonciers naissent de l'ambiguïté des textes fonciers au Cameroun. Aussi, cet auteur ajoute que, la superposition de plusieurs droits (coutumier,

19 BEKAYO SAMUEL : « Gestion foncière au Tchad, stratégie des acteurs locaux. Etude appliquée au Canton Bédogo, Département du Lac Wey, l'acte de du Colloque organisé par l'Ecole d'Eté de l'IEPF du SIFEE et Colloque International du SIFEE, Cameroun du 05 au 15 septembre 2011.

20 NKANKEU, F et NGAMINI, A. (2010). « De la conquête foncière aux crises interethniques au Cameroun : le cas des Bamiléké et leurs voisins, in « Morcellement et concentration foncière .Des réalités complexe à l'Ouest Cameroun : cas du Département de Bamboutos », in Regards multidisciplinaires sur les conflits fonciers et leurs impacts socio-économico-politiques au Cameroun, Laboratoire de Développement Durable et Dynamique Territoriale, Département de Géographie, Université Montréal, chapitre 2, p.18-33

21 LE BRIS, E et LE ROY, E. (1982). « La question foncière en Afrique noire » in Enjeux fonciers en Afrique noire, p.393-399

22 MOUPOU M. Op.cit

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étatique, positif, etc.,) rend difficile la résolution des conflits fonciers et causent des confusions sur le processus d'acquisition des terres, d'arbitrage des conflits fonciers au Cameroun.

? Les gestions discriminatoires des terres

BANDOUMAL OUAGADJIO23 dans son article, fait dès l'entame de ses propos une analyse statistique et démographique de la question foncière au Tchad. En plus, il estime que, la recrudescence des conflits fonciers s'explique par l'inégale répartition de la population sur le territoire tchadien. Par ailleurs, l'auteur note que, l'inégale répartition de la population se justifie par les contraintes naturelles, notamment les facteurs climatiques (la pluviométrie qui arrose mieux la nappe du sud du pays que celle du nord). Aussi, il martèle que, la fertilité du sol dans les zones du sud, de l'est a entrainé une forte concentration de la population vers les zones fertiles terres, favorables aux activités économiques. Il termine son analyse mettant en exergue les conflits liés à la succession après le décès des parents.

DONG MOUGNOL Gabriel Maxim24 part de l'analyse historique du foncier en se basant sur le phénomène de la migration. D'emblée, selon DONG MOUGNOL, les conflits fonciers sont liés aux stratégies de sécurisation des terres par les Bamiléké originaires de l'Ouest Cameroun. De plus, il ajoute que, la forte concentration de la population dans la région de l'ouest a entrainé une forte mobilité des Bamiléké vers la région du Mbam. Les conflits fonciers semblent trouver leur fondement dans le contact entre les Bamiléké migrants d'une part, et la population locale d'autre part.

CATHERINE André25 analyse dans son article les conflits fonciers liés à la répartition discriminatoire des terres. Selon cette auteure, les conflits fonciers sont liés à la succession après les décès des parents. Elle ajoute que, l'exclusion des femmes et des enfants de leurs terres après le décès de leurs proches alimentent davantage les litiges fonciers au Rwanda. De même, l'auteure note que, la discrimination culturelle défavorise les femmes et donne le pouvoir aux hommes, au détriment de l'intérêt des femmes et des enfants.

23 BANDOUMAL O. (2004). « Démographie et question foncière au Tchad » in La question foncière au Tchad, Acte du Colloque Scientifique de N'Djaména du 28 juin au 1er juillet 2004, p.143-144

24 DONG MOUGNOL, G, Op.cit, p-50-53

25 CATHERINE A. (2004). « Origines des conflits fonciers et de la violence au Rwanda » in La question foncière au Tchad, Acte du Colloque Scientifique de N'Djaména du 28 juin au 1er juillet, N'Djaména, CEFOD, p.34

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LAMBATIM Hélène 26 quant à elle soulève dans son article les causes culturelles des litiges fonciers. Selon cette auteure, dans les cultures tchadiennes, les femmes sont reléguées au second plan dans les gestions foncières. L'auteure ajoute que, l'exclusion des femmes de la gestion foncière est tributaire des conflits fonciers observés au Tchad. Aussi, elle estime que, les sociétés tchadiennes s'appuient sur des valeurs patriarcales informelles pour déposséder les femmes de leurs terres, et aussi, les spolier et exproprier les terres qu'elles héritent après le décès de leurs époux. Enfin, elle mentionne que, cette pratique discriminatoire alimente tous les jours les conflits fonciers entre les individus.

? Les perspectives des résolutions des conflits fonciers

MBAYE27 dans son article sur « Le projet de mise en valeur de la Valée de BAÏLA en basse Casamance(Sénégal ) » articule son orientation sur l'origine des différends fonciers et aussi, les mesures entreprises dans le processus d'arbitrage de ces différends au Sénégal.

De plus, MBAYE fait la présentation d'un projet entreprit par le gouvernement sénégalais pour la création des sites d'habitations. A cet effet, selon l'auteur, les enquêtes menées dans quelques villages sénégalaises avaient pour but de déterminer les causes des litiges fonciers, les implications de l'Etat dans la gestion des terres et, les manières entreprises pour la résolution des conflits entre les habitants d'un même village et/ou les villages voisins.28

Par ailleurs, l'auteur fait un bref aperçu du Basin de BAÏLA qui constitue la toile de fond de cette recherche. Selon lui, ce basin est occupé majoritairement par les DIOLA qui sont les premiers occupants de cet espace des terres. Les DIOLA représentent 73% des occupants de cet espace. Après les DIOLA, on note la présence des DIOLA BOULOUF, FOGNY, DIOLA FOGNY COMBO qui occupent quant à eux, la plus petite proportion. L'une des premières causes de litiges fonciers selon MBAYE, est la répartition inégale des terres entre les acteurs. Cette inégale répartition s'explique par les legs et l'héritage. Néanmoins, les personnes immigrées ne possèdent pas assez des terres parce qu'ils sont assimilés aux nouveaux occupants. 29

26 LAMBATIM H. Op.cit, p.194

27 MBAYE DIAO, « Le projet de mise en valeur de la Valée de BAÏLA en basse Casamance(Sénégal) » in Enjeux fonciers en Afrique noire, p.228-239

28 MBAYE DIAO, Ibidem

29 MBAYE DIAO. « Le projet de mise en valeur de la Valée de BAÏLA en basse Casamance(Sénégal) » in Enjeux fonciers en Afrique noire, p.228-239

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De plus, l'auteur note que, la question foncière est l'une des préoccupations la plus complexe ,à cet effet, elle s'accompagne des certaines complications liées à la restitution des terres prêtées par les grands-parents à leurs voisins qui les prêtaient pour les activités économiques. Les malversations foncières surviennent après les décès des parents. Cette manière de confiscation de terre par les « étrangers » a donc causé les conflits dont les résolutions s'avèrent inefficaces au regard de leurs importances et actualités quotidiennes. Les difficultés liées à la résolution durable de ces litiges ont donc poussées certains habitants à l'instar de DIOLA FOGNY COMBO vers des nouvelles zones d'occupations qui sont moins peuplées. En outre, allant dans la même lance, BAYE pense que,

L'Etat mettra sur pied après l'indépendance une commission de gestion des terres qui, malheureusement semble être méconnue par la communauté village. Cet organisme étatique mettra en difficulté les autorités traditionnelles qui ont héritées les terres de leurs ancêtres et qui selon-eux, les autorités instituées par l'Etat sont illégitimes aux yeux des autochtones locaux dans le sens où ces derniers ne sont forcément héritiers de lignée locales. C'est ainsi que la résolution des litiges par ces derniers semble être un peu négligés.30

Par ailleurs, pour répondre aux crises foncières, BAYE estime que, les autorités en charge de la gestion foncière instituée à partir des années 1979 et, après la réforme foncière de 1972, sont donc les yeux directs de l'Etat moderne dans la gestion foncière. A partir de cet instant, la terre appartient à ceux qui possèdent le titre de propriété reconnue par la loi.

En dernier essor, l'auteur termine son analyse en montrant les manières dont les acteurs locaux et les autorités administratives règlent les litiges fonciers. D'abord,

la première entreprise par le gouvernement sénégalais était la remise des terre aux premiers occupants ou ceux qui détiennent une preuve formelle qui atteste que, la terre réclamée les appartient, au cas contraire, la terre revient à ceux qui détiennent une preuve tacite. Au cas où, ils ne parviennent pas à une résolution quelconque, ils gardent eux-mêmes les terres faisant l'objet des litiges. Un autre cas de résolution de litiges par les acteurs locaux est le phénomène de « l'immigration » vers autres zones pour éviter l'écoulement des sangs.31

30 MBAYE DIAO,Ibidem

31 MBAYE DIAO, « Le projet de mise en valeur de la Valée de BAÏLA en basse Casamance(Sénégal) » in Enjeux fonciers en Afrique noire, p.228-239

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En plus des travaux de BAYE à partir de l'expérience sénégalaise des mécanismes de résolution des crises foncières, la philosophie de LANDCAM32 abonde dans la même lance mais, à partir du vécu des paysans camerounais.

En effet, l'objectif visé par LANDCAM est la gestion efficiente des ressources naturelles camerounaises afin de garantir l'avenir de la génération future. Dans ce projet, il a été mis en exergue la problématique de l'exclusion des certaines catégories sociales dans la gestion des terres, telles les femmes et les enfants qui n'ont pas un « droit de propriété » de terre. Le présent projet semble pertinent à première vue, dans le fait qu'il cherche à concilier la gestion gouvernementale du foncier à celle « dite traditionnelle » qui est presque inaperçue par les décideurs publics. 33

Aussi, il convient de rappeler que le fait que l'Etat s'est porté « garant total » de la gestion des terres crée un vide au niveau des zones rurales dans la mesure où, les responsables en charge des questions foncières se trouvent essentiellement dans les chefs-lieux de département ; le soucis d'une « véritable décentralisation foncière » semble être l'une des pistes aboutissant à une « véritable solution aux différends fonciers » au Cameroun. 34

En plus, l'octroi des terres à des investisseurs privés internationaux et le manque d'un registre contenant d'une manière objective la liste des toutes les terres immatriculées alimentent davantage les différends fonciers. Au Cameroun seulement 15% des terres sont immatriculées. Or, 85% des terres non immatriculées se trouvent dans les zones rurales où, les acteurs ne connaissent pas d'une part la nécessité de la « sécurisation formelle » de leurs terres et, d'autre part, les difficultés liées à cette sécurisation. Ces difficultés se justifient par le fait que, les acteurs paysans ne possèdent pas les ressources financières conséquentes nécessaires à leur service. Le gouvernement camerounais gagnerait dans la mise sur pied d'un document cadastral harmonisé prend en compte les droits coutumiers sur les terres et, le droit positif afin d'éviter les frustrations et, la gestion des différends fonciers intra et intercommunautaires.35

32 LandCam est un projet qui vise à mettre sur pied des approches innovantes pour faciliter un dialogue inclusif au niveau national, sur la base des enseignements tirés des expériences passées, afin d'améliorer la gouvernance foncière.

33 LANDCAM,idem, p.8

34 LANDCAM,Ibidem

35 LANDCAM,Idem

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MFEWOU Abdoulay36 dans son ouvrage fait une analyse des résolutions partiales des différends fonciers par les autorités compétentes. Il fait mention des magistrats, des sous-préfets et des préfets qui tranchent les litiges en fonctions de leur appartenance ethnique. Or, les crises foncières entre les Peuls autochtones et les migrants (Massa,Moussey,Toupri) engendrent des milliers des pertes en vies humaines. De même, le processus entrepris par les chefs traditionnels pour asseoir une paix durable. Pour la plus part, les terres disputées reviennent aux premiers occupants. Toutefois, dans le cas du S.A.I.B, l'Etat a dépossédé les individus au profit des investisseurs privés.37

Il convient de mentionner que, les perspectives de résolutions des crises foncières entreprises au Sénégal, Côte d'Ivoire et le Cameroun semblent constituer un idéal type dans les sociétés tchadiennes. C'est ainsi que, les pistes soulevées paraissent intéressantes dans la mesure où, elles permettent non seulement aux pays ci-cités de renouveler les productions sur le foncier, mais aussi au Tchad afin d'entreprendre des mesures adéquates pour une harmonisation foncière.

BEKAYO Samuel inscrit son idée dans la même lance que MFEWOU. A cet effet, il axe son analyse sur les causes des conflits fonciers qui sont selon lui, liées à la croissance démographique d'une part et, d'autre part le changement climatique qui limite les espaces utiles pour l'habitation ou des activités économiques. Aussi, il fait l'état de lieu de la question foncière dans le canton Bédogo dans la région du Logone Occidental, Département de Lac Wey, préfecture de Moundou Rural et les acteurs impliqués dans la gestion des terres.

En effet, l'auteur ajoute que les chefs de canton sont des observateurs dans la gestion des conflits fonciers, ils ne s'impliquent pas dans la résolution des différends qui, depuis plus de deux décennies déchirent la cohésion sociale et le vivre-ensemble.

Par ailleurs, l'auteur mentionne dans son analyse que les acteurs impliqué dans la gestion foncière qui sont les agriculteurs, les éleveurs, les ONG, les élèves et les pères d'enfant qui assurent la gestion des terres.38

36 MFEWOU A. (2010). Migrations, Dynamiques Agricoles et problèmes fonciers dans le Nord-Cameroun : le périmètre irrigué de Lagdo, Paris, l'Harmattan, p.162

37 MFEWOU Abdoulay, idem,p.170

38 BEKAYO SAMUEL : « Gestion foncière au Tchad, stratégie des acteurs locaux. Etude appliquée au Canton Bédogo, Département du Lac Wey, l'acte de du Colloque organisé par l'Ecole d'Eté de l'IEPF du SIFEE et Colloque International du SIFEE, Cameroun du 05 au 15 septembre 2011.

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De l'ensemble des travaux de nos prédécesseurs, il ressort que leurs travaux ont été orienté sur l'origine des conflits fonciers, les gestions discriminatoires des terres en Afrique en général et au Tchad en particulier et les perspectives des résolutions des conflits fonciers.

Toutefois, ces études se sont avérées insuffisantes sur l'implication des chefs traditionnels dans les commercialisations des terres dans le milieu urbain. C'est ainsi que, suite aux travaux antérieurs qui ont traité la question foncière, le présent travail suit cette logique, mais met un accent particulier sur « l'implication des chefs traditionnels dans le processus de commercialisation de terres, les stratégies qu'ils développent au quotidien en vendant des espaces d'autrui ».

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"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote