3. Sensibiliser les habitants du premier arrondissement de
la ville de N'Djaména sur les enjeux lies a la sécurisation de
leurs terres
L'idée de former, sensibiliser les individus
impliqués dans la gestion foncière dans le premier arrondissement
de la ville de N'Djaména semble être aussi une porte de sortie des
crises foncières aiguës auxquelles les individus sont
confrontés. Durant notre investigation, nous nous sommes appesantis sur
la nécessité de sécuriser les terres par le titre foncier,
mais la plupart des individus rencontrés dit de n'est pas
connaître l'importance du titre foncier. Certains ajoutent en disant
qu'on ne peut pas facilement avoir le titre foncier et aussi, le titre foncier
est fait pour les hommes qui veulent construire des grosses villas. A ce
niveau, l'appréhension du titre foncier comme une pièce
maîtresse dans la sécurisation des terres rurales qu'urbaines
semble échapper certaines catégories sociales. C'est ainsi qu'un
informateur affirme :
que ferai-je avec le titre foncier ? [...] ; je ne peux
pas chercher à avoir un titre foncier alors que mes maisons sont
construites en terres noires [...]. Si je veux construire des villas, j'irai
vor la procédure d'obtention du titre foncier. Sinon, peut-être un
jour l'un de mes enfants aura l'audace de le faire. Je ne vois pas que le titre
foncier ait une importance dans le terrain où il n'y a pas des grands
investissements matériels. 181
Le propos de cet informateur montre à quel point le
titre foncier est méconnu par certains individus dans le premier
arrondissement de N'Djaména. Certains individus disent de n'avoir jamais
parlé du titre foncier et pire encore que le titre foncier soit
considéré comme une pièce maîtresse dans la gestion
des terres. C'est ainsi que près de 80% des terres dans le premier
arrondissement de N'Djaména ne sont pas sécurisées. Nous
nous basons sur les informations fournies par près de 300
informateurs.
De plus, certains individus estiment que, le titre foncier
c'est le maire qui doit l'offrir aux citoyens résidants dans sa
circonscription administrative. Donc cette volonté de l'Etat tchadien de
sécuriser de manière durable les terres par un titre foncier
reconnu au guichet unique semble être mal perçue par la grande
partie du premier arrondissement de la ville de N'Djaména. Selon
certains informateurs, la vraie sécurisation des terres se fait par mise
en valeur à travers les plantes et aussi, le témoignage des
voisins, c'est dire que les voisins diront
181 Entretien avec un habitant de Zaraf en octobre 2021
114
que les terres appartiennent à tel monsieur ; telle
dame. Mais à ce niveau, est-ce que le risque n'est pas grand. Au cas
où certains voisins ne reconnaissent pas réellement que les
terres appartiennent à tel monsieur ou telle dame, n'y a-t-il pas
là des sérieuses confusions. Le mieux sera d'arrimer pour dans la
procédure formelle de sécurisation des terres par le titre
foncier. C'est dans cette lancée qu'un informateur affirme :
je sais que les voisins sont les témoins oculaires.
Lorsque j'ai acheté mes terres, ils étaient là
présents. Ce n'est pas à cause d'un petit papier que je perdrai
mes terres. Aussi, j'ai déjà durée sur mes terres. Je suis
ici sur ces terres depuis les années 1977. Je n'ai jamais eu des
problèmes des terrains. Pensez-vous que je perdrai mes terrains ? [...]
je dirai non ! J'ai 10 enfants et c'est ici qu'ils sont nés.182
La volonté de sécuriser les terres par l'Etat
devrait impliquer les individus concernés dans le processus pour
l'atteinte des objectifs escomptés. Cependant, au Tchad en
général et dans le premier arrondissement de N'Djaména en
particulier, l'Etat a mis de côté les individus résidants
sur son territoire. Sinon, comment peut-on explique le fait que la grande
partie de la population, les lettrés et les illettrés ne
connaissent pas l'importance du titre foncier. Nous avons interrogé de
plus 100 ménages sur l'importance du titre foncier, seulement 20
ménages reconnaissent la valeur dudit document. Est-ce là une
sécurité des terres. Les 80 ménages ne constituent-ils pas
un risque pour la distorsion du tissu social dans le long terme. L'Etat doit
organiser les compagnes de sensibilisation sur les enjeux liés à
la sécurisation des terres par le titre foncier.
Il se dégage donc de ces tendances que, le titre
foncier en tant que pièce maîtresse qui garantit une
sécurisation foncière durable des terres, demeure un luxe pour
les tchadiens en général et les habitants du premier
arrondissement en particulier.
De même, il faut que les décideurs publics et
privés accompagnent l'Etat dans ce processus très délicat
dans notre contexte où la tradition semble prendre le déçu
du moderne ; aussi, dans le contexte où le nombre de lettrés
n'excelle pas 60% de la population totale tchadienne.183 Aussi, il
faut que l'Etat mette sur pied des commissions de sensibilisation dans toutes
les 23 régions du Tchad afin d'impacter toutes les couches sociales par
la nécessité d'avoir un titre foncier.
Par ailleurs, il faut que l'Etat mette sur pieds dans chaque
arrondissement une agence pour recenser ; orienter ; former sur le foncier
urbain qui devient de plus en plus très complexe. C'est ainsi qu'un
informateur affirme :
182 Entretien avec Monsieur Nouradine à
Amsinéné, novembre 2021
183 Source rapport de la Banque Mondiale de 2020
115
l'Etat doit nous aider à connaître
l'importance de certaines choses dans ce pays. A l'école, l'Etat doit
nous instruire déjà sur tout ce qu'il faut faire pour avoir les
terres. Sinon, comment pourrions-nous connaître. On n'a jamais fait les
longues études pour connaître certaines choses, mais la moindre
des choses serait cette implication de toutes les souches sociales à une
décision. C'est même aujourd'hui que j'apprends que mes terres
seront peut-être un jour prises par l'Etat par manque d'un simple papier
[...J ; le titre foncier.184
L'Etat ne doit pas seulement appuyer les acteurs avec les
formations dans le domaine foncier, mais animé les émissions sur
l'importance de sécuriser ces terres et/ ou de la mise en valeur
effective de leurs terres. Cette phase cruciale doit au centre de ses
préoccupations afin d'impacter durablement toutes les couches sociales
par les informateurs. La communication joue un rôle très important
dans la réduction des litiges fonciers dans le monde en
général et en Afrique en particulier.
A cet effet, les acteurs impliqués dans les
transactions foncières doivent être informés, formés
de toutes les affaires qui sont en rapport aux terres afin de préparer
les préparer psychologiquement à une réaction
adéquate sans risque majeur. Car comme le mentionne Ulrich BECK, nous
sommes permanemment dans des situations des crises et qui nous laissent savoir
que nous vivons du jour aux jours dans « les sociétés
à risque » ; ces sociétés affectées non
seulement par les intempéries (inondations ; fortes pluviométries
; secousses violentes des terres ; l'avancée du désert ; le
terrorisme extrémiste ; et même les problèmes
omniprésents des litiges fonciers en Afrique). Selon plusieurs
informateurs, le problème crucial en Afrique est lié aux espaces
des terres pour les activités économiques. C'est ce qui
démontre davantage les conflits récurrents entre
agriculteurs-éleveurs en Afrique de l'Ouest notamment au Niger, Mali,
Burkina Faso, en Afrique de l'Est en Ethiopie et en Afrique Centrale au Tchad
et au nord Cameroun.
Aussi, l'implication des acteurs concernés par les
litiges dans le processus de prise des décisions formations et/ou leurs
informations contribuent à la maîtrise des problèmes «
cachés » ; « ignorés » ; « banalisés
» ; « négligés », mais qui constituent les nerfs
de tous les restes problèmes. Certaines tensions sociales
observées de nos jours dans le premier arrondissement de la ville de
N'Djaména expliquent tout simplement les crises foncières «
mal gérées » ; « négligées » par les
acteurs qui ont la charge de trancher les éventuels différends
liés aux terres et/ou à toute transaction concernant l'espace des
terres dans les milieux urbains tchadiens. Les crises actuelles
démontrent à suffisance que les acteurs chargés
184 Entretien avec un maître tailleur à
Djougoulié, Novembre 2021
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de gérer les terres sont soit juste des «
bureaucrates confirmés » ; soit ne sont pas assez pour mieux cerner
l'ampleur desdits problèmes.
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