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Les boulamat et les conflits fonciers en milieu urbain tchadien: cas du premier arrondissement de la ville de N'Djaména


par Lawane LOGAM
Université de Yaoundé 1 - Master en sociologie 2022
  

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III. LES MECANISMES MISE EN PLACE AFIN DE MIEUX APPREHENDER LES DIFFERENDS FONCIERS

Dans cette partie il est question des voies et pistes nécessaires pour mieux cerner le foncier dans le premier arrondissement de N'Djaména. A cet effet, il a été démontré les issues pouvant faire asseoir une paix foncière durable lesquelles interpellent toutes les souches sociales, et nécessitent les efforts multiples et communes. D'abord, en premier essor, l'urgence d'une révision, voir réactualisation du texte foncier du Tchad, et ensuite, la nécessité d'adopter un document unique sur toute étendue du territoire tchadien en rapport à la gestion foncière, enfin, le renforcement des acquis des chefs gérants qui ont la charge quelques fois d'arbitrer les litiges fonciers, et aussi de la vente des terres tant dans le milieu rural qu'urbain tchadien. Telles sont les perspectives soulevées dans ce chapitre.

170 Entretien avec monsieur SAHAD à Madjorio

103

1. Combler le vide juridique

La loi foncière tchadienne a été adoptée depuis les années 67 et jusque-là, le gouvernement n'a pas entrepris des initiatives locales de la gestion des terres au Tchad. Cette loi pendant son élaboration n'a pas impliqué directement les individus dans la gestion des terres. C'est ce qui explique la mal compréhension de ladite loi par la grande partie de la population tchadienne. Aussi, la loi foncière tchadienne semble être mal saisie, interprétée, comprise par les tchadiens lettrés que ceux illettrés. C'est ainsi que certains informateurs interrogés affirment que comment le Tchad est resté accroché sur les textes qui datent des années 1958 ; 1967 ; 1970, alors que les réalités au Tchad en sont autre chose. C'est dans cette optique que DJIKOLOUM BENJAMIN BENAN dans son article sur le foncier au Tchad a fait une analyse critique du droit foncier tchadien.171 Ainsi, les avis de quelques informateurs convergent dans la même lancée qui est la réactualisation de la loi foncière tchadienne. Nous avons retenu les déclarations de Justin HINBE :

je pense que la loi foncière tchadienne doit être réactualisée afin de prendre en compte les nouvelles thématiques qui émergent, notamment incluant l'accès de tous les acteurs facilement à la terre [...] ; aussi, il faut prendre en compte dans les législations les avis des acteurs concernés afin d'éviter les contestations récurrentes. L'Etat avant d'adopter les lois doit se renseigner sur les conditions de leur applicabilité effective. 172

Le manque d'une vision foncière adaptée au contexte des acteurs constitue un danger et aliment davantage les conflits fonciers en Afrique en général et au Tchad en particulier. A cet effet, le gouvernement tchadien doit « mettre à jour » sa loi foncière afin de répondre aux aspirations quotidiennes de ces acteurs qui, jusque-là sont victimes des spoliations ; déguerpissement et des accaparements excessifs des terres urbaines. Le tableau ci-dessus illustre les risques liés à la gestion non équitable des terres en milieu rural qu'urbain africain. Cette vision se veut optimale, car elle nous permet de mieux cerner le contour des problèmes fonciers rencontrés et/ou enregistrés et d'envisager des solutions durables. TCHAWA élabore ledit tableau pour mettre en lumière les dangers liés à la marginalisation des autres couches sociales.

171 DJIKOLOUM B.B. (2004). « Analyse critique du droit foncier tchadien » in La question foncière au Tchad ; acte du colloque scientifique de N'Djaména 28 Juin au 1er Juillet-septembre 2004, p.56

172 Entretien au quartier Madjorio en septembre 2021

104

Tableau 5: Etat de lieu de la gouvernance foncière en Afrique selon Paul TCHAWA

ROOT CAUSSE

EFFETS SUCCESSIFS

Politique foncière

inadéquate ou absente

1

2

3

4

Pas de vision

de l'Etat à

anticiper sur
le foncier

Spéculation foncière

Marginalisation des populations locales

Pauvreté et

conflits

Absence des

règles adéquates

d'accès et de

contrôle des
terres

Occupation

anarchique de
l'espace

Dégradation des espaces et ressources côtières

Source : TCHAWA, NELGA 2021

Ici, lorsque dans un pays la politique des gestions des terres n'est pas définie clairement, la spéculation foncière est d'une grande importance. Les Boulamat en tant que chefs traditionnels investies par le pouvoir traditionnel et politique jouent un rôle très dangereux dans la « vente », « revente » des terres aux individus « innocents ». Nous estimons que le manque d'une stratégie sérieuse permettant une attribution, vente des terres est la cause directe des différends fonciers au Tchad.

A cet effet, la nécessité de mettre sur pied une législation foncière bien garnie prenant en compte les aspects socioéconomiques du pays ; politique et environnement s'impose comme une porte de sortie des « casse têtes fonciers » au Tchad. Selon BOAMAH, vice-président principal de la Banque Africain de Développement, 15% des problèmes liés aux terres sont causés par les chefs assurant la gestion. De même, il ajoute que, « la corruption qu'alimentent ces derniers au quotidien avec les acquéreurs des terres qu'en milieu rural qu'urbain en Afrique subsaharienne ».

2. Adopter un document harmonise d'acquisition des terres

Les litiges fonciers au regard de leurs ampleurs dans le premier arrondissement de la ville de N'Djaména, interpellent tous les acteurs quel que soit leur statut social, et matrimonial. Aussi, les différentes logiques de vente et de gestion des terres au Tchad

105

diffèrent selon les us, et coutumes de chaque région. Certains individus se réfèrent à leurs ancêtres pour réclamer les terres (les autochtones arabes de Djougoulié, Abcoma, Zaraf, Gilmey), Kotoko et Borno de Milezi, etc. C'est ce qui fait qu'il y a autant des contradictions dans la gestion des terres au Tchad. Il n'existe pas jusque-là un document harmonisé de vente des terres urbaines que rurales. D'où la nécessité de mettre sur pied un document harmonisé permettant l'acquisition des terres de la même manière au Tchad quel que soient les régions.

Nous estimons que ledit document qui contiendra toutes les données cadastrales en rapport aux lotissements ; aux tracés des rues ; à la restructuration des ilots d'une manière officielle. Ce document permettra aussi au gouvernement d'identifier tous les litiges fonciers existants au Tchad, les terres ayant déjà un titre de propriété provisoire ou définitif. Car depuis la loi du 27 juillet 1967, aucun autre document officiel ne permet aux individus de se référer d'une manière légale. Aussi, la loi foncière de 1967 définie tout simplement les différents domaines fonciers existant et met l'emphase sur le pouvoir de l'Etat en tant que garant de toutes les terres au Tchad. Or, la loi n° 23 reconnait le droit coutumier, elle précise cependant dans son article 7 que les « terres vacantes et sans maîtres appartiennent à l'Etat173. »

A cet effet, comment pourrions-nous comprendre cette complexité de ce droit positif qui, reconnait d'une part le rôle des autorités coutumières dans la gestion des terres au Tchad, mais concrètement ne le reconnait pas. Les terres des individus considérées par l'Etat comme « vacantes et sans maîtres » en réalité ne corrobore pas avec nos réalités. Les terres en Afrique en général et au Tchad en particulier sont mise en valeur par les activités quotidiennes des acteurs. Ces mises en valeurs varient d'une personne à une autre, d'une tribu à une autre, d'une zone à une autre, etc. C'est ainsi que les experts de Land Cam apportent une lumière sur les différends fonciers en ce terme : « Nous proposons que ces mécanismes de règlement amiable des différends fonciers, préalable à la saisine du juge, soient mis en place, pour offrir une justice de proximité, appuyée sur les mécanismes étatiques. »174

3. Réaménager le CATZU et réouvrir l'OFT

La commission d'Attribution des Terres en Zones Urbaines selon plusieurs informateurs n'accompagne pas tous les acteurs dans le processus d'acquisition des terres au Tchad. Les membres de cette commission (les maires ; les délégués ; les ministres en charge de la question foncière) usurpent de leur titre pour se « faire de gombo » dans le dos des

173 MAHAMAT A.B, idem p.74

174 Land Cam, idem, p.8

106

personnes vulnérables. Or, l'objectif premier du gouvernement tchadien était de lutter contre les inégalités dans l'acquisition des terres, mais le CATZU vient faire une sorte de malhonnêteté en attribuant les terres aux gens ayant des poches bien garnis. A cet effet, la nécessité de réaménager cette commission s'imposer dans la mesure où l'actuelle commission est dans une mouvante capitaliste, négligeant les prolétaires au profit des bourgeois.

Aussi, selon le CATZU, les individus acquièrent les terres dans le milieu urbain tchadien en déposant une copie de la pièce d'identité et adresser une demande au directeur général dudit secteur, or pour la plupart les demandent déposées par les demandeurs des terres n'aboutissement pas. Il faut forcément avoir une « relation sûre » au service du cadastre pour espérer avoir une parcelle de terre. L'objectif de cette commission sembler passer de côté et créant ainsi une injustice dans l'attribution des terres. Une telle posture devrait selon nous, interpeller les décideurs publics qui ont la charge de régler les conflits liés à la terre. Malheureusement, les décideurs publics en tant que « bons bureaucrates » ne contentent de leurs bureaux en laissant de côté les réalités sociales présentes sur le terrain.

De plus, le fait que, le CATZU ne dispose pas une liste exhaustive des terres non occupées constitue un risque majeur dans les futures attributions des terres et, c'est ce qui explique la double attribution des terres aux demandeurs. Or, si le CATZU disposait d'une base de données foncière (BDF) unique, il devrait repartir les terres équitablement aux demandeurs quel que soit leur statut social, politique, religion. Les inégalités dans la gestion des terres par le CATZU causent des frustrations et constituent un épicentre de l'insécurité au Tchad.

De même, vu la prépondérance des litiges fonciers au Tchad en général et dans le premier arrondissement de la ville de N'Djaména en particulier, nous estimons qu'il serait préférable de ré-ouvrir l'OFT afin de mieux cerner ces fléaux. Au regard des objectifs fixés par cet organe, le foncier devrait être appréhendé dans sa globalité par tous les acteurs sociaux. L'un des objectifs visés par cet organe était d'enseigner les acteurs impliqués dans la gestion foncière à travers les cours théoriques et aussi pratiques dans les universités, les télévisions et les radios. A notre avis, cette vision semble être une option porteuse dans la mesure où elle implique les acteurs concernés dans la gestion foncière.

107

Tableau 6: Appréciations des enquêtés de la gestion foncière

Nature d'appréciation

Effectif

Total ?

Satisfaisant

10

100

Pas satisfaisant

70

Malgré nous

20

Source : enquête de terrain, octobre 2021

Graphique 2: Appréciations des enquêtés de la gestion foncière

70

60

50

40

30

20

10

0

Satisfaisant

pas

satisfaisant malgré nous

Source : enquête de terrain, octobre 2021

Il se dégage de ce graphique que les individus sont insatisfaits non seulement de la gestion actuelle du foncier dans le premier arrondissement de la ville de N'Djaména, mais aussi, des textes fonciers.

De même, il ressort aussi que, les textes fonciers du Tchad hérités de l'époque coloniale ne cadrent pas avec les réalités tchadiennes et aussi, ne prennent pas en compte toutes les aspirations sociales des individus. Par ailleurs, ces textes protègent les individus instruits au détriment de ceux illettrés, qui ne maîtrisent pas les enjeux liés à la sécurisation formelle de leurs terres.

Il semble à cet effet que, la réactualisation, voir l'adoption des textes dans le contexte tchadien pourrait permettre un climat foncier apaisé, au regard des tensions sociales omniprésentes liées au foncier dans presque toutes les régions du pays.La balance ci-dessous représente une vision modérée pour une gestion durable des terres.

108

La gouvernance foncière selon TCHAWA sous-tend plusieurs séquences et prend en compte les questions liées à :

· administration foncière,

· l'arsenal règlementaire

· aux procédures d'attribution,

· au transfert de propriété,

· la régulation du marché foncier,

· prélèvements des droits,

· de sécurisation,

· des indemnisations,

· de contrôle de l'atteinte à la propriété foncière

· de gestion des conflits fonciers...

· Comprend aussi les outils cadastraux les systèmes d'information foncière et domaniale175.

Au regard de son caractère complexe, plusieurs entités entrent en jeu en vue d'une meilleure administration foncière. Nous estimons que cette illustration siège avec le cas du Tchad ou les différentes variables ne sont pas mises en exergue au point où, seuls les acteurs instruis bénéficient d'une faveur foncière considérable. De même, il faut organiser d'une manière équilibrée les terres en faisant une répartition objective des terres sans se baser sur les « poids lourds » présents dans l'administration, mais trouver des stratégies pouvant permettre de mieux cerner les conflits fonciers en Afrique Subsaharienne en général et dans les milieux urbains tchadiens en particulier.

A cet effet, il faut que la nouvelle commission d'attribution des terres en zones urbaines, du moins celle réaménagée assure une planification spatiale afin de connaitre les terres occupées et/ou les terres libres. TCHAWA nous propose aussi cette vision de structuration équilibrée des espaces en Afrique qui prendra en compte le volet juridique,

175 TCHAWA P. (2021). « Séminaire Méthodologique en Ligne et en Présentiel pour Chercheurs Juniors Travaillant sur LE Foncier ». Optimisation de la qualité de la recherche et de l'offre de formation sur le foncier en Afrique Centrale : Acquis, défis et perspectives, Yaoundé, 6 & 7 Avril 2021, Réseau NELGA Afrique Centrale, p.27

109

économique, politique, culturel, etc. Ainsi, la planification des terres s'articule selon lui

comme suit :

La planification spatiale : objectif principal :

· une affectation équilibrée et

· cohérente des terres

· dans leurs dimensions

· écologiques, économiques,

· Sociales et culturelles.

· Ceci dans le respect des

· articulations scalaires

· territoriales et au

· regard des engagements

· Internationaux et aux enjeux Transnationaux.176

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"Et il n'est rien de plus beau que l'instant qui précède le voyage, l'instant ou l'horizon de demain vient nous rendre visite et nous dire ses promesses"   Milan Kundera