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Les boulamat et les conflits fonciers en milieu urbain tchadien: cas du premier arrondissement de la ville de N'Djaména


par Lawane LOGAM
Université de Yaoundé 1 - Master en sociologie 2022
  

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1. Les conséquences sociales

D'après les enquêtés, « les litiges fonciers ont eu des conséquences sociales considérables dans le premier arrondissement de la ville de N'Djaména ».Selon madame ASSOUM, « plusieurs individus déguerpis ceux qui ont perdus leurs terres injustement, et ceux qui ont été arnaqués par les agents de l'Etat, se retrouvent dans une crise profonde. Ainsi, certains individus ont eu des sérieux problèmes de santé juste après la perte de leurs

147 Entretien avec un informateur au quartier Zaraf en novembre 2021

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terres, d'autres les troubles mentaux et certains la mort ». Les litiges fonciers dans le premier arrondissement de la ville de N'Djaména sont selon plusieurs informateurs mal tranchés. Selon ces informateurs, les individus qui ont « un gros poids social » gagnent pour la plupart le procès en rapport aux litiges fonciers. C'est ainsi que monsieur SEMIDJIDA déclare en ce terme :

les litiges fonciers n'ont pas eu un arbitrage sérieux dans notre arrondissement. C'est ce qui explique les désordres qu'on observe sur la gestion des terres urbaines et rurales. J'ai perdu mes parents dans un affrontement sanglant à cause de nos terres arrachées, mais l'Etat n'a rien fait pour nous. Nous n'avons jamais eu la justice à nos côtés. Je ne sais quoi faire [...]. 148

Par ailleurs, l'arbitrage impartial des litiges fonciers engendrent selon les informateurs, les tensions dans la société, et aussi, dégradent le tissu social existant, créant le problème du vivre-ensemble et du bien-vivre dans le premier arrondissement de la ville de N'Djaména. Les acteurs ne se cohabitent plus comme avant, car ils ont perdu leurs parents à cause des terres, et ne pourrons facilement se réconcilier avec leurs « ennemis ». L'arbitrage floue des litiges fonciers a donc eu des incidences majeures dans le premier arrondissement de la ville de N'Djaména, les sociétés et les liens sociaux se disloquent de plus en plus. En analysant le propos de monsieur SEMIDJIDA. Ainsi, il se dégage, les nerfs des plusieurs différends fonciers dans le premier arrondissement de la ville de N'Djaména se trouvent dans le fait que, l'Etat abandonne délibérément les individus sans terre dans les rues. Cette situation a créé la désolidarisation sociale entre les acteurs.

De plus, les individus déguerpis du quartier Jardin Décès se

disent frustrés par les séances répétées d'injustice. Ils affirment que les agents de l'Etat les ont déguerpis sans une assistance sociale dans le cadre d'une insertion sociale adéquate. Ils ont été abandonnés dans les rues à leurs tristes sorts. Un informateur affirme avoir perdu la plupart de ses voisins de l'ancien quartier Jardin Décès à cause de ce problème opposant l'Etat aux individus. Les terres arrachées par l'Etat pour les constructions des bâtiments militaires ont laissé les pauvres. Jusque-là le gouvernement tchadien n'a pas entrepris de telles mesures dans le premier arrondissement de N'Djaména ; sauf dans le neuvième arrondissement de N'Djaména il a transféré les individus vers un autre site(TOUKRA).

Les problèmes rencontrés selon plusieurs informateurs sont liés à leurs exclusions brusques de leurs terres. Ils mentionnent aussi que, lorsque l'Etat déguerpi leurs parents, il les laisse sans abris. Or, le gouvernement sénégalais (pour trancher les litiges opposant trois

148 Entretien avec monsieur SEMIDJIDA à Amsinéné en septembre 2021

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communautés villageoises : les Diola Boulouf, Fogny, Diola Fogny Combo) a dû crée un nouveau site pour répondre aux exigences des villageois déguerpis.

De même, ceux ghanéens et ivoirien lorsqu'ils ont entrepris la construction des grands projets, ont essayé de trouver une issue. Lorsque le gouvernement ivoirien a initié la création d'un barrage artificiel, lequel a affecté une partie du peuple Boulé, et le gouvernement ghanéen a aussi entrepris des projets des constructions, mais en prenant en compte les individus affectés par les projets. C'est dans ce sens que deux sociétés d'Etat à vocation d'aménagement intégré, la V.R.A. (Volta River Autority) au Ghana ou A.V.B. (L'Autorité de l'Aménagement de la Valée de Bandama) en Côte d'Ivoire. Les deux dirigeants ont trouvé des nouveaux sites aux individus affectés par les projets149. Ces mesures constituent une sorte de compensation sociale150. Mais dans le premier arrondissement de la ville de N'Djaména, ces idées ne sont pas prises en compte. C'est ce qui est à la base de plusieurs crises sociales observées. Ces décisions jugées « antisociales » par les habitants du premier arrondissement du fait du non prise en compte de l'aspect « social » des individus seraient à la base des troubles dans les familles. Les parents déguerpis n'ont pas assez de moyen pour assurer la location des chambres à leurs familles, se sont endettés et ne parviennent pas à payer ces dettes.

Aussi, comme ils n'ont pas assez d'argent pour couvrir tous les besoins, certains de leurs enfants sont envoyés ailleurs, une sorte de solution adoptée. Mais à ce niveau, nous constatons qu'il y a la dislocation des familles à cause de leurs précarités sociales liées à leurs terres perdues. C'est ainsi qu'un informateur se confie à nous en ce terme :

walay Dieu doit agir contre cette injustice qu'on rencontre. Ce n'est pas du tout sérieux de la part de l'Etat en chassant les individus de leurs terres sans les trouver autres terres pour au moins mettre leurs têtes. Où irons-nous à présent sans terres ? Sommes-nous des étrangers ? Même les étrangers ne sont pas traités comme l'Etat nous traite aujourd'hui...Humm [...], mes enfants sont devenus des délinquants parce qu'ils ne dorment pas avec moi à la maison, par manque des places. Je ne peux payer la location, c'est très cher [...], voilà dans quel état le gouvernement nous a mis. 151

149 LASSAILLY V.J. (1986). « Les grands projets d'aménagement et de développement dans les domaines agricoles, forestiers, hydrauliques, miniers ou pastoraux : transformation « dirigée » de l'espace agraire et réponses paysannes à la périphérie des Lacs Volta(Ghana) et Kossou (Côte d'Ivoire) in Enjeux fonciers en Afrique noire, Paris, l'harmattan, p.280-281

150 MBAYE D. (1986). « Le projet de mise en valeur de la Valée de BAÏLA en basse Casamance(Sénégal) » in Enjeux fonciers en Afrique noire, p.228-239

151 Entretien avec un informateur qui a peur de donner son identité en Octobre 2020 au quartier Djougoulié

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Les informateurs interrogés voulaient en effet, un accompagnement de l'Etat après les séances de déguerpissement. L'Etat sur la base du texte hérité de la colonisation (la constitution) va donc prendre une place privilégiée en privant les individus de leurs terres. Ce phénomène de déguerpissement des individus sans recasement est monnaie courante dans le premier arrondissement de N'Djaména.

D'abord, les individus déguerpis de l'ancien site du marché de Farcha n'ont pas eu un accompagnement de l'Etat. Aussi, ils se trouvent selon-eux, dans les rues sans abri. C'est ainsi que plusieurs individus ont perdus leurs terres, laquelle a donc causé le décès très brusque de ces derniers. C'est ce qui pousse un informateur d'affirmer en ce terme :

Depuis quand le gouvernement tchadien s'inquiète des pauvres [...] ; les gens qui sont venu vingt ans après nous ont arrachés nos terres sur le regard de l'Etat et des agents du cadastre. Sans vous mentir, je ne me retrouve plus dans ce pays. Certains membres de ma famille se trouvent déjà dans d'autres cieux là où il fait bon vivre [...] ; oui, ailleurs au Cameroun et au Nigéria depuis que les problèmes de nos terres n'ont pas eu un arbitrage sérieux. On attend la justice peut être de Dieu, au Tchad non. La famille présidentielle nous a pris en otage en arrachant nos terres. 152

Il s'avère que, les litiges fonciers ont affecté durablement les couches sociales les plus vulnérables. Ces litiges ont entrainé une dégradation sans cesse du tissu social entre les individus et aussi, a causé une dislocation des familles

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"Ceux qui vivent sont ceux qui luttent"   Victor Hugo