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Les boulamat et les conflits fonciers en milieu urbain tchadien: cas du premier arrondissement de la ville de N'Djaména


par Lawane LOGAM
Université de Yaoundé 1 - Master en sociologie 2022
  

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II. LES RESPONSABILITES NON-ETATIQUES

L'Etat n'est pas la seule cause des conflits fonciers dans les milieux urbains tchadiens en général, et dans le premier arrondissement de la ville de N'Djaména en particulier. C'est ainsi que, les individus impliqués dans les transactions foncières jouent aussi un rôle non négligeable dans l'implémentation des conflits fonciers. Ces causes dépendent des mobiles entrepris par ces acteurs. Pour la plupart, ces causes se dégénèrent et créent des sérieuses crises sociales.

140 Entretien avec madame ASSOUM à Madjorio en novembre 2021

141 Entretien avec monsieur DJIMADOUM à Farcha en octobre 2021

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1. L'ignorance des textes fonciers

D'après le résultat obtenu durant dans ce travail démontre que, l'ignorance des textes fonciers fait partie des causes des litiges fonciers dans le 1er arrondissement de la ville de N'Djaména. Sur 14103, seulement 18? de ménage possède le titre foncier (n?14103). De même, selon certains informateurs, « ils ne connaissent pas l'importance des textes sur le foncier. La plupart des informateurs affirme avoir acheté leur terrain auprès de Boulamat ». Aussi, monsieur DJIMET affirme que,

je n'ai pas osé entamer la procédure pour obtenir le titre foncier. Mon voisin qui a l'attitude de faire ce papier m'a dit qu'il coûte très cher. Le jour où je vais construire une villa, c'est ce jour-là que je vais chercher ce document. Ma maison est en poto-poto et je fais quoi avec le document coûteux que mon terrain ?142

L'analyse sociologique qui ressort de ce propos est que, les acteurs habitants dans le 1er arrondissement de la ville de N'Djaména manque une information efficace en rapport au titre foncier, à la gestion des terres au Tchad. Or, durant notre exploration, nous avons découvert qu'il existe tout un ministère en charge des affaires foncières. De plus, madame ZARA affirme, « je n'ai jamais entendu parler des textes sur le foncier depuis que je vis. Sauf j'ai entendu parler de l'attestation de vente de terrain, du gré à gré. Mais je ne maîtrise plus rien dans ce domaine ».

En outre, certains Boulamat en dépit du poste qu'ils occupent en tant qu'auxiliaire de l'Etat, ne maîtrisent pas selon plusieurs informateurs interviewés. Ils estiment que, les Boulamat sont choisi juste sur la base de leur appartenance au parti au pouvoir, aussi de leurs liens sociaux avec les maires. Ainsi, monsieur MOUNGAR estime que,

la plupart des Boulamat n'a pas un niveau scolaire acceptable. Les Boulamat qui ont trop fréquenté ont la licence. Ils n'ont pas les notions de l'administration, pire encore de gestion des litiges fonciers qu'ils créent souvent. Normalement, les gens qui doivent gérer les terres doivent être les gens qui maîtrisent le pays, les lois du pays. Hum chez les Boulamat c'est le contraire. De pire, ils se livrent à une pratique dangereuse, l'arbitrage des conflits alors qu'ils n'ont pas une protection militaire.

Ainsi, il ressort clairement de ce propos que, l'Etat a laissé la gestion des terres aux individus qui ne maîtrisent pas les textes qui régissent les régimes dominicaux au Tchad. Rare sont d'ailleurs les Boulamat et les acteurs qui connaissent le bien-fondé de ces textes. A cet effet, monsieur SOUAVOURBE affirme que,

142 Entretien avec monsieur DJIMET à Abcoma en novembre 2021

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si je connaissais les textes sur le foncier, je n'allais acheter bêtement les terrains. Maintenant, je me trouve sans terrain, je suis déguerpi parce qu'ils m'ont dit que j'ai occupé le domaine de l'Etat. Mais je me demande comment pouvons-nous faire pour savoir que tel domaine est la propriété de l'Etat ? D'ailleurs c'est maintenant que je prends connaissance de ce document grâce à votre question.

Selon monsieur DATOLOUM, il faut au préalable que l'Etat sensibilise la population sur les textes fonciers afin de limiter les éventuels conflits.

2. Les poids des traditions tchadiennes

Le résultat obtenu lors de nos entretiens révèle que, 97? de ceux qui ont des parcelles de terre sont de sexe masculin, soit 03? seulement des femmes. Ces deux pourcentages montrent en réalité les inégalités dans les gestions des terres dans le premier arrondissement de la ville de N'Djaména. Ainsi, selon Madame MAÏMOUNA,

les cultures tchadiennes pour la plupart ne garantissent pas totalement une sécurité sociale de certains acteurs estimés inférieurs aux autres. Parmi ces acteurs, figurent nous, les femmes et les personnes étrangères, les orphelins, les veuves ; etc., qui, selon la grande partie des cultures locales n'ont aucun droit sur les terres. Cette attitude discriminatoire est souvent source des conflits fonciers observés dans le premier arrondissement.

De même, il ressort que ce phénomène discriminatoire s'observe dans presque tout le territoire tchadien. C'est ainsi que, Hélène LAMBATIM estime que, « l'acquisition discriminatoire des terres dans les sociétés africaines alimentent davantage les problèmes fonciers. L'exemple du Rwanda, Congo, Tchad montre plus clairement que certaines catégories sociales sur la base de leur statut social n'ont aucun droit sur les terres ». 143

143 LAMBATIM H. (2004). « Femme et foncier au Tchad » in La question foncière au Tchad, Acte du colloque scientifique de N'Djaména 28 juin au 1er juillet-septembre 2004, p.171-194

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Diagramme 1: Répartition des enquêtés selon le sexe

MASCULINS

FEMININS

7%

93%

Source : enquête de terrain, septembre 2021

Le présent diagramme montre à suffisance le faible taux de participation des femmes dans le processus d'acquisition des terres. Selon les acteurs interrogés, ce faible taux se justifie par les éléments culturels qui sont défavorable à l'épanouissement des femmes.

De plus, selon Madame ZARA, « la discrimination ne se limite pas seulement, dans le processus d'acquisition des terres, mais dans le processus des gestions de terre après le décès de leurs conjoints » 144. Ainsi, LAMBATIM estime que,

les femmes sont exclues de la gestion des terres par les coutumes locales d'une part et, d'autres part la méconnaissance de leur droit. Car, estime-t-elle que le fait que 95% des femmes tchadiennes sont illettrées les met dans des situations précaires et discriminatoires. C'est dans ce sens qu'une femme a affirmé ce qui suit : « je ne suis qu'une simple femme ! », « qu'est-ce que je peux dire ? », « ce n'est qu'une femme ». Telles sont les expressions qu'on entend à l'égard des femmes qu'elles soient du milieu rural qu'urbain. 145

Selon les enquêtées, « les hommes ont une perception péjorative » à l'égard des femmes Cette perception selon Madame DOUNIA, « relègue la femme tchadienne au second plan sur tous les domaines. Aussi, souvent dans nos familles, la place de la femme doit être garantie par sa capacité à « procréer ». En plus, Madame FANE ajoute que,

la femme dans le premier arrondissement de la ville de N'Djaména perd toute crédibilité si jamais elle ne donne pas « un héritier » à la famille. Son droit à la terre est lié à son mariage ; elle peut le perdre suite au divorce. Ici, l'on est appelé à voir volontiers que les

144 Entretien avec Mme ZARA au quartier Gilmey

145 LAMBATIM H. (2004), ibidem

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femmes tchadiennes ne sont pas prises en compte dans le processus

de la gestion foncière.

C'est d'ailleurs dans ce sens que cette illustre et populaire affirmation tchadienne fonde sa crédibilité : « la femme doit occuper le second rang ». Cependant, dans la constitution de 1969, tous les acteurs ont les mêmes droits devant la loi. Nous voyons ici, la difficulté liée à l'application des textes régissant les droits de l'Homme au Tchad, mais aussi l'inexistence des textes sanctionnant les acteurs qui tient des attitudes discriminatoires à l'égard des femmes. L'injustice bat le record dans cette situation.

Ainsi, selon Mme MAÏMOUNA, nous sommes dans « une séance de discrimination et d'exclusion des femmes par les sociétés patriarcales, appuyées par les coutumes locales » ; « quelques fois barbares » sont prises « pour argent comptant » car estime-t-on héritées de nos aïeux. Faut-il exclure au nom d'une culture les autres catégories sociales. Le rôle de la femme ne saurait se réduire à la satisfaction du « biologique » en ayant pour épicentre la « procréation ».146 Ne gagnerons-t-on pas à restaurer une gestion équitable des ressources naturelles pour la restauration d'une paix durable au Tchad. Le diagramme ci-dessous illustre cette situation discriminatoire.

3. la flexibilité lors de règlement des conflits

La flexibilité lors de règlement des conflits selon certains informateurs provient de l'arbitrage impartial des litiges fonciers observes. De même, selon ces informateurs ajoutent que les individus mettent leurs intérêts particuliers devant au détriment de l'intérêt de la communauté.

En outre, l'aspect informel de certains procès issus à la muable entre les différentes parties prenantes ne sont pas respectés par ce qu'ils sont établis de façon anarchique. Or, de telles décisions selon plusieurs informateurs doivent faire l'objet d'une formalisation en passant par « au-devant les notaires », matérialisés par la prise des décisions et la signature des pactes publiquement.

De plus, l'implication impartiale des agents de justice dans le processus d'arbitrage des différents fonciers ne garantis pas les pauvres citoyens. Aussi, certains individus estiment exprimer leur ras-le-bol par des violents affrontements aboutissant aux pertes en vies humaines et aussi, aux distorsions des tissus sociaux entre les différentes communautés. Ici, il

146 LAMBATIM H, idem, p.181

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se pose le problème de lutte de classe qui se matérialise par les places stratégiques qu'occupent certaines personnes dans les transactions floues de terre.

Par ailleurs, le manque de compétence des autorités administratives dans le domaine d'arbitrage des différentes poses un sérieux problème. Pour la plupart, ces autorités compétentes ne sont pas nommées selon un profil bien défini. Ils sont nommés selon certains informateurs par un décret présidentiel purement et simplement politique. Le statut politique de ces autorités administratives joue un rôle de premier plan dans le processus de leur nomination. C'est face à cette situation qu'un informateur affirme :

dans quel pays au monde, en dehors du Tchad, les autorités administratives telles que: les maires, les délégués départementaux, les députés, les sous-préfets, les préfets, les gouverneurs n'ont pas suivi une formation en administration? Les autorités sont juste récompensés parce qu'ils assurent une sale politique dans le compte du gouvernement. De même, on trouve pour la plupart les militaires qui occupant ces fonctions.147

Il se dégage de ces affirmations que, le clientélisme institutionnel dans les administrations tchadiennes en général, et dans la justice en particulier gangrènes le fonctionnement du système foncier tchadien. Notons aussi que, selon certains informateurs, les recrudescences des conflits fonciers, des conflits agriculteurs-éleveurs sont causés par le manqué des compétences des autorités compétentes.

III.LES CONSEQUENCES DES LITIGES FONCIERS DANS LE PREMIER ARRONDISSEMENT DE LA VILLE DE N'DJAMENA

Les conflits fonciers dans le premier arrondissement de la ville de N'Djaména ont eu plusieurs conséquences dans la vie des acteurs. Le différent affrontement entre les individus, les destructions des maisons lors des affrontements, les destructions des cultures ont des incidences sur la vie des individus dans le premier arrondissement de la ville de N'Djaména.

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