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Les boulamat et les conflits fonciers en milieu urbain tchadien: cas du premier arrondissement de la ville de N'Djaména


par Lawane LOGAM
Université de Yaoundé 1 - Master en sociologie 2022
  

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3. La complaisance des Boulamat

Les Boulamat en tant qu'auxiliaires coutumiers et politiques de l'Etat sont selon Monsieur MBAÏLASSEM impliqués dans « les différends fonciers ». La plupart des différends fonciers tranchés dans les juridictions ont pour cause les ventes multiples des terres par les Boulamat, soit 60? de tous les différends fonciers observés dans le premier arrondissement de la ville de N'Djaména. Ainsi, selon monsieur MBAÏLASSEM,

cette implication des Boulamat se justifie d'une part, par la gestion restreinte des terres, et d'autre part, dans les différentes attitudes liées à la production des documents administratifs attestant les ventes des terres à plusieurs acteurs. Les Boulamat usurpent de leur titre et de leur statut social pour « écraser » les classes sociales les plus vulnérables.129

la vente répétitive des rues destinées aux usages publics à des fins égoïstes des délégués et des Boulamat alimentent davantage les différends fonciers dans le premier arrondissement de la ville de N'Djaména. Ce phénomène de vente sacrifie les individus innocents, et qui ont occupés depuis plusieurs années des espaces des terres « dites réservées ». En vendant les rues destinées à la servitude, ces agents de l'Etat changent leurs trajectoires originaires des routes vers d'autres zones d'occupations qui, mettent les autres acteurs dans la rue sans abri. 130

En outre, selon le résultat obtenu auprès des enquêtés, 65? des litiges fonciers sont liés aux ventes multiples des terres, à la falsification des documents administratifs par les Boulamat, les morcellements des terres des particuliers par les Boulamat. Cette pratique semble une monnaie courante dans le premier arrondissement de N'Djaména, au regard du résultat. Elle est donc sous-jacente de tous les litiges fonciers observés. C'est ainsi que LE BRIS, LE ROY et CROUSSE estiment que, « la gestion des terres est tributaire de la bonne ou mauvaise foi des chefs gérants »131. Curieusement, l'expérience congolaise décrite par ces

129 Entretien avec monsieur MBAÏLASSEM à Farcha, octobre 2021

130 Entretien avec monsieur MBAÏLASSEM au quartier Farcha, octobre 2021

131 CROUSSE B et al. (1986). Espaces disputés en Afrique noire : pratiques foncières locales, Paris, Karthala, p.10;

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auteurs se rapproche de la gestion foncière dans le premier arrondissement de N'Djaména. Selon Monsieur OUAÏDOU,

les Boulamat décident de vendre les terres comme ils veulent sans vérifier ou faire recours aux « agents compétents » de l'Etat. De même, le manque de cadre de suivi de la gestion des terres par l'Etat favorise les acteurs influents de se positionner sur les autres acteurs, et aussi de se mettre dans les zones les plus stratégiques surtout en ce qui concerne les activités économiques, aussi pour l'habitation. La situation des habitants des quartiers tels que, Zaraf, Djougoulié, Gilmey sont ceux-là considérés comme les déviants, car ils occupent des espaces anarchiquement.

L'Etat n'a pas prévu un plan d'occupation des terres, ni une planification urbaine sérieuse. Souvent les acteurs s'achètent les terrains et après quoi se mobilisent en cotissant pour faire appel aux agents du cadastre de venir lotir leurs zones. Cette pratique se solde souvent par des rides conflits opposants les agents du cadastre, et les acteurs locaux d'une part, les Boulamat et les acteurs d'autre part.132

En plus, l'Etat laisse donc les individus déguerpis du premier arrondissement de la ville de N'Djaména sans abri Selon les individus enquêtés, les acteurs chassés de leurs terres se retrouvent sans habitations, ils dorment dans les lieux publics (écoles, zones vertes, mosquées, hôpitaux, etc.). Selon monsieur BOUMZINA,

cette situation précaire des habitants du premier arrondissement de la ville de N'Djaména, limite leurs mobilités quotidiennes. Car, ils ne parviennent pas à joindre les deux bouts, car nombreux d'entre eux sont très endettés, et ont plusieurs mois des arriérées liées à la location des maisons. Les individus déguerpis devaient en principe bénéficier de l'accompagnement des Etats concernés par les « drames sociaux.133

En réalité, cette situation semble se rapprocher de celle décrite par Karl Marx lorsqu'il estime que, « l'Etat entretien des relations discriminatoires, et se plaçant aux côtés des bourgeois, et qui, exclut les prolétaires ». Ainsi, selon les acteurs interviewés, « les morcellements des terres par les Boulamat est la cause première de tous les litiges fonciers dans le premier arrondissement de la ville de N'Djaména ».

De plus, selon certains informateurs, « une seule parcelle peut donc avoir plusieurs titres de propriétés, et dès lors, les acteurs se confrontent par des rides combats physiques, et quelque fois mystiques ». Ils estiment aussi que, « les individus se font « justice », avant

132 Entretien avec monsieur OUAÏDOU au quartier Djougoulié, septembre 2021

133 Entretien avec monsieur BOUMZINA à Milezi, octobre 2021

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d'atteindre les instances juridiques qui ne tranchent guère ces différends à cause de leurs liens avec ces chefs. » Par ailleurs, selon NAHOUNNAGR, « dans la pratique, nous apercevons certains chefs qui ont ce pouvoir de vente et ou des legs des terres aux individus, mais ces derniers vendent secrètement les terres des autres. C'est le cas des « Boulamat » dans le milieu rural et urbain tchadien ».134

En effet, le résultat obtenu de notre recherche révèle aussi que, dans le premier arrondissement de la ville de N'Djaména, les Boulamat ne se placent pas bien clairement dans leur posture de garants des terres. Selon monsieur DOURKAMLA,

cette mésaventure commence lorsque, les Boulamat ne possèdent plus assez des terres. De plus, certains informateurs estiment que, les Boulamat connaissent bien le plan d'occupation de sol, mais ferment les yeux sur ces réalités, et profitent des ventes non réglementées des terres aux individus qui, quelque fois ignorent le plan d'occupation du sol.135

Les informations recueillies confirment qu'en achetant les terrains avec les Boulamat, les acteurs participent à une sorte de « loterie de terre », parce qu'ils ne « savent pas, avec exactitude, si ces terres sont-elles réellement sécurisées, mais se disent qu'ils se confient à la bonne volonté de « dieu » au cas où, les routes ne passent à travers leurs portions des terres ». Aussi, le fait que, les Boulamat vendent clandestinement les terres des autres à leurs insu selon plusieurs informateurs, et cette situation constitue « un danger de premier ordre », et met en relief, « le rôle dangereux que le Boulamat joue dans l'alimentation des litiges fonciers dans le premier arrondissement. »136 Ainsi, Monsieur LAMINE note que,

les Boulamat vendent les terres des autres pendant la soirée et peuvent délivrer plusieurs attestations des ventes sur une seule parcelle des terres. Or, le danger surgit dans le fait que les terrains appartenant aux autres sont vendus par les chefs gérants. Les individus achètent ces terres parce qu'ils estiment que ces terres appartiennent aux chefs gérants. 137

134 NAHOUNNGAR B. (2004). « La décentralisation administrative, institutionnelle et la problématique foncière au Tchad » in La question foncière au Tchad, Acte du colloque scientifique de N'Djaména 28 juin au 1er juillet 2004 ; septembre 2004, p.171-194

135 Entretien avec monsieur DOURKAMLA à Zaraf en octobre 2021

136 Entretien avec Maître tailleur Djimadoumadji Bertrand

137 Entretien avec monsieur LAMINE à Karkandjeri en novembre 2021

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