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Les boulamat et les conflits fonciers en milieu urbain tchadien: cas du premier arrondissement de la ville de N'Djaména


par Lawane LOGAM
Université de Yaoundé 1 - Master en sociologie 2022
  

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2. Le désintérêt de l'Etat

Le gouvernement tchadien en tant que législateur des textes sur le foncier n'assure pas pleinement son rôle. Ainsi, le résultat obtenu durant notre recherche relève que, 70% des acteurs se disent insatisfait de la gestion actuelle des terres et de législation tchadienne sur les questions foncières. De même, sur 14103 ménages dans le 1er arrondissement de la ville de N'Djaména, seulement 18%(n?14103) possède le titre foncier. Selon monsieur

114 ABBA DANA, idem, p.125

115 Entretien avec le Délégué Provincial de la ville de N'Djaména, en septembre 2021

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NOURADINE, « le fait que l'Etat ait mis un accent sur les affinités politiques a donc creusé davantage les fosses entre les acteurs ». 116Allant dans la même lancée, selon Me NEMBE,

sur le papier, ils existent les textes qui semblent assurer la gestion harmonieuse des terres au Tchad. Mais paradoxalement, les agents de l'Etat sont toujours impliqués dans les corruptions qui se manifestent par les morcellements des terres des pauvres, les modifications du plan d'occupation du sol à leurs intérêts personnels. 117

De plus, selon madame MADJITA, « c'est l'Etat qui définit les modalités d'acquisition des terres qui se font par attribution sous le contrôle du CATZU (Comité d'Attribution des Terres en Zones Urbaines) et aussi quelque fois par achat auprès des Boulamat118. Mais, l'attribution des terres se fait de manière arbitraire, discriminatoire, voir exclusivement relationnelle ». De plus, Me NEMBE mentionne que, les terres concrètement ne font pas l'objet d'une attribution comme le définit CATZU, il existe ici les réseaux influents des acteurs qui appartiennent au clan du président DEBY, ainsi Me NEMBE ajoute que,

une seule parcelle des terres a souvent plusieurs titres fonciers. Aussi, certains agents de l'Etat en occurrence les agents du cadastre, les délégués communaux ; les chefs des quartiers falsifient les titres fonciers des terrains d'autrui à leur guise. Le véritable souci se situe dans le fait que l'Etat ne parvient pas à assurer la gestion contrôlée des terres dans les milieux urbains. C'est ainsi on constate son absence sur le terrain en ce qui concerne la gestion des terres. 119

Par ailleurs, selon monsieur HOUWE, l'Etat semble inactif dans le terrain en ce qui concerne la gestion des terres. Selon lui, le bâton de commandement que l'Etat accorde aux Boulamat dans la gestion des terres pose un sérieux problème du fait que, les Boulamat sont toujours impliqué dans les ventes multiples des terres, des ventes des réserves de l'Etat aux particuliers, des morcellements des terres des acteurs. Aussi, selon lui, les Boulamat vendent des terres issues des zones accidentelles aux acteurs, alors que l'Etat se dit « garants de toutes les terres » De plus, monsieur HOUWE poursuit son propos en disant que :

L'inefficacité de l'Etat dans les terrains est très bien visible et aussi, le manque d'un comité de suivi de la gestion des terres amplifie davantage les conflits fonciers dans le premier arrondissement de

116 Entretien avec monsieur NOURADINE au quartier Zaraf, octobre 2021

117 Entretien avec monsieur NEMBE au quartier Madjorio

118 Entre avec le délégué provincial de la ville de N'Djaména septembre 2021

119 Entretien avec NEMBE en octobre 2021

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N'Djaména. A ce problème s'ajoutent autres causes étatiques. Il s'agit de l'occupation anarchique des terres par les individus.120

De plus, selon monsieur ACHERIF MAHAMAT BACHAR, délégué provincial auprès de la commune de N'Djaména, « la part de l'Etat dans l'implémentation des litiges fonciers s'observe par l'occupation anarchique des terres dans le premier arrondissement de la ville de N'Djaména faute d'une politique d'urbanisation au préalable ». L'analyse sociologique de ce propos révèle une sorte de discrimination sociale dans les gestions des terres et aussi, une crise sociale marquée par la montée en puissance d'une élite politique méconnaissable. Ainsi, Monsieur ACHERIF MAHAMAT BACHAR estime que,

normalement le gouvernement tchadien doit au préalable définir clairement le plan d'occupation du sol et après que, mettre sur pied une mesure d'accompagnement visible afin d'éviter toute confusion en rapport aux ventes, aux occupations des espaces à N'Djaména et plus précisément dans le premier arrondissement de N'Djaména. L'Etat au lieu d'assurer le lotissement des terres au préalable, ne le fait pas toujours dans tous les cas, sauf dans certaines zones. Cette manière étatique crée des énormes désordres dans le milieu urbain en général, et dans le premier arrondissement de la ville de N'Djaména en particulier. 121

Aussi, le député TCHARI MADI MAÏNA oriente ses préoccupations sur la question de la double attribution qui est à l'origine de ces épineuses crises foncières. Selon le député, « l'Etat laisse les acteurs mal intentionnés malmenés les autres alors qu'il se dit garant de toutes les terres. Aussi, l'honorable TCHARI s'est penché sur la double attribution des terres. Selon TCHARI, « la double attribution des terres serait la cause imminente des différends fonciers au Tchad. Cette pratique est l'une des causes des différends fonciers dans le neuvième et le premier arrondissement de la ville de N'Djaména ». Aussi, il ajoute que,

L'occupation anarchique des terrains avant leur lotissement par les agents de l'Etat, alors que l'Etat a un arsenal juridique permettant le strict respect de ces textes ». Les terrains devraient être lotis bien avant leurs occupations par les individus. Il a aussi soulevé le fait que la décision d'immatriculation des terres et de production des documents dominicaux n'est pas très fluide.122 C'est ce qui expliquera selon lui, la prépondérance des litiges fonciers au Tchad.123

120 Entretien avec monsieur HOUWE à Karkandjeri, octobre 2021

121 Entretien avec le Délégué provincial auprès de la commune de N'Djaména, monsieur ACHERIF MAHAMAT BACHAR

122 « Presse écrite Hebdomadaire `'INFO» » Ibidem

123 Député TCHARI in Presse écrite Hebdomadaire `'INFO» » ibidem

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De même, selon les résultats obtenus, 85% des problèmes traités au tribunal sont liés à la terre et pour cause, le déguerpissement des acteurs par l'Etat d'une part, et la falsification des documents administratifs par les agents de l'Etat d'autre part. De même, les Boulamat vendent une seule portion de terre à plusieurs acteurs dans le premier arrondissement de la ville de N'Djaména. Cette situation est très délicate et préoccupante selon Mme ACHTA AHMAT BREME. C'est ainsi qu'elle note que :

les doubles attributions des terres deviennent de plus en plus récurrentes dans nos arrondissements. Du jour au lendemain on voit les personnes se plaindre de cette pratique. A mon avis, la justice doit s'impliquer à fond dans ce dossier afin de minimiser les dégâts causés. De même, il faut fusionner les forces pour espérer gagner ce pari. Cette situation rend tout lotissement problématique et les attributaires ont difficilement accès à leurs parcelles parce que d'autres personnes détiennent chacune une attestation de vente sur les mêmes parcelles.124

Par ailleurs, la patronne du MATUH estime que, « le fait que le ministre de la justice n'a pas pris part au congrès tenu ce jour du 13 au 16 septembre 2018 montre à quel point il semble sous-estimer l'épineuse préoccupation, le « foncier ». 125De même, elle ajoute que la justice est intimement liée avec le MATUH, à cet effet, elle (la justice) doit s'impliquer totalement dans le processus de résolution des litiges fonciers. Ainsi, « elle suggère au ministre en charge de la justice à se joindre à eux afin d'atteindre les objectifs escomptés ».126

Aussi, le rôle de l'Etat dans les causes des conflits fonciers se justifie par le fait que, le gouvernement tchadien n'a pas lotis au préalable les terres dans le premier arrondissement de N'Djaména. Selon monsieur TOK-ALLAH, « les individus construisent des maisons de façons anarchiques, ils n'ont pas les routes secondaires, ni principales, et aussi, les terres réservées pour les grands projets de l'Etat ne sont pas identifiables clairement ».127 L'Etat a laissé la gestion des terres aux Boulamat qui vendent les terres à leur guise. Aussi, il estime que, « les Boulamat ne connaissent pas forcément les terres réservées (celles du domaine public) et privée (appartenant aux individus ou industries) ».

124 Mme ACHTA AHMAT BREME, Ministre de l'Aménagement du Territoire, du Développement de l'Habitat et de l'Urbanisme in « Presse écrite Hebdomadaire INFO », p.3

125 Mme ACHTA AHMAT BREME in « Presse écrite Hebdomadaire INFO», ibidem

126 Mme ACHTA AHMAT BREME in « Presse écrite Hebdomadaire INFO », idem

127 Entretien avec monsieur TOK-ALLAH au quartier Zaraf, octobre 2021

128 CROUSSE B et al. (1986). Espaces disputés en Afrique noire : pratiques foncières locales, Karthala, Paris, p.141-142

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D'autres informateurs mentionnent aussi que, le « laissez-faire » étatique impacte négativement les activités des individus dans le premier arrondissement de la ville de N'Djaména. C'est dans cette lancée que CROUSSE, LE BRIS et LE ROY mentionnent que, « la plupart des conflits concernent le tracé des rues, et aussi la désignation des maisons à détruire, les conflits de désignation de l'occupant auquel on attribue le terrain. »128 L'analyse sociologique qui ressort de ce résultat est que, les habitants du premier arrondissement de la ville de N'Djaména sont marginalisé dans la gestion des terres. Cette situation se réfère en quelque sorte à une « discrimination des opprimés » au profit des « dominants ». L'Etat semble prendre le côté de ses agents en dépit des multiples crises causées par les Boulamat.

La photo ci-dessous illustre mieux le cas des maisons détruites par l'Etat sans une assistance morale et une insertion. (Voir la photo suivante).

Planche 5: Maisons détruites à Djougoulié

Source : enquête de terrain, octobre 2021

Les images ci-dessus illustrent les rôles joués par les Boulamat dans les transactions floues de terre. Ici, il est question des images des maisons déguerpies suite au changement des plans des routes ou des servitudes destinées à utilités publiques. Ainsi, les individus perdent de jour au jour leurs petites portions des terres au profit des Boulamat.

De plus, les individus chassés de leurs terres par les opérations semblables à une « chasse aux sorciers » se verront désormais sans abris. Le gouvernement tchadien en tant que garant et responsable de toutes les terres au Tchad ne les accompagne pratiquement pas. Ce gouvernement depuis plusieurs décennies a cédé son pouvoir de garant de terre « officiellement » aux Boulamat. C'est ce qui a donné le plein droit aux Boulamat de vendre les terres non sécurisées, les ruelles et/ou les terres issues du domaine national aux

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« innocents vulnérables ». Ledit gouvernement après avoir été absent vient juste procéder aux séances de restructuration des rues et des espaces, sans bien organisé les zones d'occupations.

Par ailleurs, même de nos jours, plusieurs quartiers de la périphérie ne sont pas sécurisés, à l'instar de : Gilmey, Madaga, Adré, Abcoma, Zaraf, Bouta wali (Kebir et Saker, Madjorio (les zones occupées par les arabes), Djougoulié (les zones occupées par les arabes)

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams