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La prostitution : stigmatisation du métier dans le milieu urbain ; le cas des prostituées à  ziguinchor dans le quartier de tiléne.


par Djibril Diagne MASSALY
Université Assane Seck de Ziguinchor - Licence en sociologie 2023
  

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Chapitre III : La Prostitution : un état de contrainte

Généralement à Tiléne dans le bar de « Dapokine », presque la totalité des personnes qui se prostituent font ce travail non pas librement par choix mais plutôt par contrainte. Les personnes se prostituent la plupart du temps par contrainte. Ainsi, dans ce contexte la notion de « contrainte » renvoie à une situation à laquelle les prostituent sont financièrement confrontées. Beaucoup de personnes se prostituent parce qu'elles n'ont pas les moyens pour satisfaire leurs besoins matériels, alimentaires etc.Quand on se trouve dans le besoin et les moyens nous font défaut, le choix va également faire défaut. Nombreuses sont devenues des prostituées parce que le fait qu'elles sont des soutiens de famille, leur famille compte sur elles. Du coup ce poids de responsabilité qu'elles endossent les obligent à vendre leurs corps pour venir en appuie à leurs familles.Voici quelques témoignages effectués au cours de mes entretiens :

« Mon père n'a jamais été là quand on a besoin de lui, il vit actuellement avec sa deuxième femme et depuis qu'il a divorcé avec ma mère, il ne s'inquiète plus de nous, il nous a abandonné et délaissé. Je suis l'ainée de ma famille et je ne pouvais pas laisser cette situation continuer comme ça. C'est la principale raison qui fait que je suis devenue prostituée » Naba DIAWARAguinéenne.

«  Ma mère était gravement malade, je n'avais pas d'argent et je n'ai personne pour lui acheter ses médicaments. Mon petit frère également ne pouvais pas aller à l'école par manque de moyen financier et j'étais totalement impuissante face à cette situation, J'avais du mal à digérer cela et c'est ainsi que je suis devenu prostituée » Salemata KOUYATÉ malienne.

La contrainte est généralement le facteur x qui pousse les gens à se prostituer rien que pour subvenir à leurs besoins et ceux de leurs familles. Ces personnes sont des soutiens de familles, elles ne voient pas le mal qui entoure ce travail. Se trouvant dans un état de contrainte, ceux qui leurs importent c'est seulement de soutenir leur entourage familialet d'améliorer leurs conditions de vie. Nous vivons actuellement dans un monde où le fait de manger, de s'habiller, de se soigner n'est pas gratuit. Et si la personne n'est pas en mesure de se procurer tout cela, la prostitution pourrait présentement être à la fois une contrainte mais à la fois un moyen qui va lui permettre également d'avoir la satisfaction de s'acquitter de ses besoins et rendre meilleure sa situation financière et celle de sa famille.

Chapitre IV : Le milieu urbain comme l'emplacement idéal de la prostitution

Le milieu urbain symbolise la ville. Comparé au milieu rural, la ville est un espace et un environnement social qui accueille le plus de personnes. Dans le milieu urbain, les activités sont plus en vue. Il est également un espace où les personnes qui y vivent sont plus autonomes c'est-à-dire personne ne se soucie de personne chacun vaque à ses occupations. Et en plus de cela,la ville incarne la liberté, elle ne prime pas sur l'individu. Sur le plan économique, la ville est le carrefour de plusieurs activités notamment celle de la prostitution car il y'a beaucoup de bars, de dancing, d'hôtels de restaurants pour accueillir des prostituées. Les normes et les règles du milieu urbain sont moins coercitives que celles appliquées dans la campagne, la pression sociale est moins imposante. Donc la ville représente plus d'avantages que la campagne.

Photo : Centre ville de Ziguinchor

Toutes ces raisons montrent que le milieu urbain est l'endroit idéal pour se prostituer. Socialementelles sont moins scruter. Les gens sont toujours occupés à travailler plutôt que de juger telle ou telle personne. Les interactions entre les individus sont très fréquentes. Économiquement, les prostituées gagnent beaucoup plus d'argent en ville car il y'a un nombre de population très importante mais la ville représente également le socle de l'économie à Ziguinchor.

« J'ai choisi deme prostituer en ville parce que je trouve que c'est plus favorable pour moi. Ici les gens ne me connaissent pas, ils ne s'intéressent pas trop à moi et financièrement je gagne beaucoup d'argent, je prends également soin de ma famille » Delphine PERREIRA Bissau-guinéenne.

« Je faisais de la prostitution dans une campagne du Nigéria mais je gagnais pas beaucoup d'argent mais depuis que je suis venu au Sénégal précisément à Ziguinchor dans le quartier de Tiléne, maintenant je satisfais mes besoins sans problème » Monopia NGUNOU.

Dans le quartier de Tiléne, les prostituées parviennent à gagner leur vie car dans cette quartier on note une population très nombreuse mais également il y'a des dancings et des maisons de plaisir comme le bar de « Dapokine ».

Photo 2 : Bar de « Dapokine » de Tiléne à Ziguinchor

Chapitre v : La prostitution un travail désapprouvé par la société« Tilénoise »

Visiblement comme dans toute société, la prostitution n'est pas un travail noble comme les autres. Dans le quartier de Tiléne, ce travail est perçu d'un mauvais oeil. Même si dans le milieu urbain personne ne se soucie de personne cependant les réalités du quartier de Tiléne sont un peu différentes des autres espaces urbains. Majoritairement peuplés par les mancagnes et les ndiagos, Tiléne protège sévèrement ses valeurs. Pour les habitants de Tiléne, la prostitution est un métier dangereux qui gangrène les traditions et les valeurs humaines. Elle peut même influer sur le comportement de la société.Pour eux, les prostituées doivent être mises à l'écart de la société car elles salissent sa réputation. Elles ne méritent pas de vivre avec la société, elles ne connaissent pas le sens de l'honneur mais plutôt le sens du déshonneur. Elles ne sont pas des personnes normales, elles sont considérées comme des personnes dépourvues d'humanité. Ils qualifient la prostitution comme le métier de la honte et de la pitié.

D'après le témoignage d'un habitant de Tiléne : « la prostitution est un travail vraiment indigne à l'Homme. Même si la personne à des problèmes financiers, elle ne doit pas entacher sa dignité car elle est sacrée ». Théodore MENDY habitant de Tiléne.

Toutefois, connaissons-nousréellement ces personnes prostituées avant de les juger ?

La majeur partie des prostituées ne sont pas originaires des terres sénégalaises. Sur les quatre personnes que nous avons interviewé, les trois (03) sont des étrangères et une (01) seule est sénégalaise. Cela signifie que la plupart des prostituées ne veulent pas montrer leur vraie identitéchez eux. Elles préfèrent aller ailleurs là où personne ne leur connaisse pour se prostituer.

Par ailleurs, les prostituées sont conscientes des représentations sociales que les habitants de Tiléneont sur elles, mais selon ces prostituées, ces habitants n'ont aucune idée de la situation dont elles vivent. Ils les jugent sans vraiment comprendre leur but.Elles ne veulent qu'aider leurs familles le plus rapidement possible. Avant de stigmatiser une personne, il faut essayer de la comprendre ou essayer de se mettre à sa place. Les prostituées sont marginalisées justement à cause de l'étiquette ou du regard que la société porte sur elles. Or, elles sont des personnes normales comme nous, elles sont issues d'une famille comme et elles doivent être respectées comme nous. Le fait de se prostituer n'est pas une crime donc pourquoi les rendre inférieures par rapport à nous. En aucun cas nous ne devrons les sous-estimer ou les stigmatiser. Ces attitudes pourraient être discriminatoires et inhumaines. La prostitution est un travail comme les autres donc la société doit apprendre à respecter le sien.

Ces propos sont justifiés à partir des témoignages suivants : « Quand je me prostitue, j'ai du mal à m'afficher publiquement car je me sens mal regardé par les habitants. Lorsque voit que je me prostitue, ils vont certainement me blâmer et me considérer comme une mauvaise personne et ça me rend vraiment incommodé » Nathalie GOMIS, sénégalaise.

« Je me sens vraiment écartée de la société car souvent j'entends les gens disent que nous les prostituées nous sommes des paresseuses, nous sommes des détracteurs de la société ; or, ces gens ne connaissent même pas que c'est moien personne qui subviens aux besoins de ma famille » Elvire KALINDA nigérienne.

« Parfois j'ai envie de me retirer dans cette vie de merde, je n'ai même pas de vie car on ne me respecte pas, je n'ai aucun crédit envers la société. La seule chose qui me retient est le fait que dans notre famille tout le monde compte sur moi ». Woury DIALLO, guinéenne.

Recommandation

La prostitution demeure toujours un travail qui recouvre d'innombrables dangers, de risques et de maladies. Nous ne conseillons à personne d'exercer ce genre de travail car l'individu vend son corps mais elle se fait également violence pour subvenir à ses besoins. Cependant, je pense que ces TDS ( Travailleurs Du Sexe) ne méritent pas d'être abandonné par la société. Elles ne doivent être stigmatisées car une telle discrimination risque de les rendre inférieures par rapport aux autres membres de la société. Malgré que leur travail est dévalorisé mais elles restent toujours des soutiens de famille. Nous ne cherchons pas à les défendre ou à prendre leur part mais avant de les juger, il faut essayer d'abord de comprendre leur situation familiale ou financière.

Personnellement, je suggère que l'Etat et les mouvements de luttes contre la stigmatisation mettent en avant une politique anti-discriminatoire pour permettre aux personnes qui vivent sous l'emprise des préjugés de la société, de ne pas se sentir inférieures. Les gens qui disent du n'importe quoi sur les personnes victimes de stigmatisation méritent d'être lourdement sanctionnés..

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