5.2. L'impact économique de la dynamique urbaine
sur la gestion foncière dans les villages intégrés SAPIA,
TAGOURA et ZAKOUA
5.2.1. La spéculation foncière
Une spéculation foncière s'observe dans les
villages intégrés du fait de la valeur marchande désormais
acquise par la terre. La terre qui, autrefois, était cédée
et léguée, est aujourd'hui une source de profit à travers
la vente de terrain. L'on observe une course des propriétaires terriens
pour le lotissement de leurs parcelles, et l'afflux de géomètres
et agences immobilières dans les villages intégrés,
créant ainsi un marché bénéfique aux
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propriétaires terriens. Très souvent, les
propriétaires terriens n'ont pas les moyens de payer les
géomètres en espèces ; ils jouent donc sur les offres des
géomètres et agences immobilières qui les courtisent. La
vente de terrain urbain constitue le principal intérêt du
lotissement pour les propriétaires terriens. Cette réalité
est toutefois soumise à des contraintes car la terre est un
héritage que le chef de famille partage aux membres de la famille. Le
Secrétaire Général de Sapia explique cette
réalité en ces mots : « Les lots, on ne vend pas tout.
Après le lotissement, tu es obligé de payer en nature le
géomètre qui a fait le travail, puisque tu n'as pas d'argent en
espèce. Alors ce qui te revient, c'est pour ta famille. Tu réunis
la famille. Le géomètre a pris sa part, voilà ce qui
revient à la famille. Si vous êtes nombreux et que le terrain est
petit, vous êtes obligé de vous mettre ensemble. Nous deux par
exemple on peut nous donner un lot, les deux autres là aussi on peut
leur donner un lot, et puis ainsi de suite. Si le terrain est grand et que tu
es seul, tu es obligé de vendre une partie des lots, et tu mets en
valeur les autres lots pour l'avenir de tes enfants». Le graphique 27
présente la répartition des choix des propriétaires
terriens pour la mise en valeur de leurs terrains.
Source : Notre enquête, 2019
Figure 27 : Répartition des choix des
propriétaires terriens pour la mise en valeur de leurs lots
L'analyse de la figure 27 révèle que pour la
mise en valeur de leurs lots, la vente de terrain est le choix
privilégié de la majorité des propriétaires
terriens (80%), quand 15% préfèrent construire des maisons
d'habitation. En effet, face à la spéculation, les
propriétaires terriens préfèrent vendre une partie de
leurs lots afin d'utiliser les montants reçus pour construire des
maisons d'habitations pour leurs familles. Les sommes d'argent
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perçues de la vente des lots sont également
utilisés pour l'organisation de funérailles, le prestige social
ou pour l'achat d'intrant agricole. Pour les paysans qui n'ont pas de revenus
stables, `'vendre un lot» est une opportunité d'avoir de l'argent
pour faire face à leurs besoins. La construction de maison d'habitation
sur leurs parcelles est le choix des propriétaires terriens nantis
(15%). Une faible proportion de propriétaires terriens (5%) signe des
contrats de partenariat avec des sociétés immobilières qui
leur construisent des maisons d'habitations qu'ils mettent en location. Au
terme de la période indiquée pour l'amortissement, les
habitations reviennent de droit aux propriétaires des parcelles mises en
valeur. Il arrive malheureusement qu'un même lot soit vendu à
plusieurs personnes. La figure 28 montre les facteurs de la « vente
multiple de terrain ».
Figure 28 : Les facteurs de la vente multiple de
terrain
L'analyse du graphique révèle que les causes de
la « vente multiple de terrain » ou la vente d'un lot à
plusieurs personnes sont les pratiques spéculatives, l'urbanisation
accélérée et démesurée, le pluralisme
juridique, les pratiques d'accès au sol et l'insécurité
foncière. Lorsque les pratiques spéculatives sont à
l'origine de la vente multiple de terrain, cela met en jeu la cupidité
du vendeur ou l'ignorance de l'acquéreur. A Daloa, la spéculation
foncière est la principale cause de la « vente multiple » de
terrain.
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