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Rivalité sino-américaine et son impact sur le nucléaire iranien


par William Lulonga Welongo
Université de Lubumbashi - Licence en Relations Internationales 2021
  

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§2. La diplomatiediscrète de la Chine sur le nucléaire iranien

Alors que les négociations sur le nucléaire iranien ont atteint une phase délicate, la Chine, partenaire discrète de Téhéran, tente de se positionner comme un acteur clef. Et pour cause : elle a tout intérêt à une levée des sanctions américaines en Iran, pays avec lequel elle a scellé un accord de coopération historique. Dans les médias chinois, le diplomate au noeud papillon a plusieurs fois souligné le rôle « unique et constructif » de la Chine dans ces pourparlers et son travail avec toutes les parties pour encourager la reprise du processus de négociation entre les Américains et les Iraniens et ce, au plus vite. Ainsi, mettant de côté les tensions avec Washington sur les rivalités commerciales, ou encore les désaccords sur Taïwan et la mer de Chine, Wang Qun a négocié pendant des heures avec l'envoyé spécial américain pour l'Iran, Robert Malley, à Vienne, oeuvrant à sauver l'accord sur le nucléaire de 2015167(*).

La Chinenégociatrice de l'accord sur le nucléaire Iranien :Les négociations sur le nucléaire iranien  qui ont repris le 8 février 2015  à Vienne entre d'un côté, la France, le Royaume-Uni, la Russie, la Chine et l'Allemagne avec la participation indirecte des États-Unis et, de l'autre, l'Iran, seraient  sur le point d'aboutir à un accord. Bien que Washington et Téhéran partagent la volonté de parvenir à un deal, plusieurs facteurs ont, du côté américain, entravé au cours des derniers mois les progrès sur ce dossier. L'évolution récente du contexte international semble toutefois aujourd'hui de nature à surmonter les derniers obstacles. Mais la signature d'un accord n'impliquerait pas nécessairement une baisse des tensions au Moyen-Orient168(*).

Avec leur retrait de l'accord, les États-Unis ont versé dans un maximalisme qui leur a coûté leur avantage et entraîné un inévitable retour de bâton les empêchant aujourd'hui d'arracher des concessions majeures à l'Iran. Depuis avril 2021 et l'attaque  contre le site nucléaire de Natanz, imputée par Téhéran à Israël, l'Iran a  augmenté l'enrichissement de son uranium de 20 à 60 %, soit dans des quantités très supérieures à celles agrées par l'accord sur le nucléaire de 2015. Or,  comme l'a fait récemment remarquer Foreign Policy, « en 2015, quand les restrictions du JCPOA étaient en place, les États-Unis ont estimé qu'il faudrait 12 mois à l'Iran pour produire suffisamment de combustible nucléaire pour pouvoir fabriquer une bombe s'il décidait d'abandonner l'accord. Aujourd'hui, cette estimation s'est réduite à environ un mois. » Ce constat est largement relayé par les responsables politiques occidentaux, qui ont souligné le risque de voir l'Iran s'imposer comme un État du seuil.  De l'aveu même de Robert Malley, « un accord nucléaire aujourd'hui ne serait pas en mesure d'offrir les mêmes avantages en matière de non-prolifération nucléaire, car le breakout time de l'Iran les mois nécessaires pour acquérir suffisamment de matières fissiles nécessaires à la fabrication d'une bombe est nettement plus court ». Cette nouvelle réalité a donc brutalement accru la nécessité169(*).

Pékin s'oppose notamment aux sanctions imposées par les Etats-Unis contre l'Iran. Alors que Washington estime que c'est la principale arme dont ils disposent contre Téhéran, « la Chine estime qu'elles ne font qu'aggraver la situation », expliqueau Monde Wang Jin, directeur de l'institut d'études du Moyen-Orient à l'université du Nord-Ouest de la Chine située à Xiang. D'ailleurs, cet expert reconnaît que, malgré l'embargo, la Chine achète du pétrole iranien : « On ne peut pas faire autrement et d'ailleurs nous ne sommes pas les seuls. La Turquie et l'Inde aussi en achètent », pointe-il. Malgré tout, il juge que « la Chine n'a pas la capacité de faire pression sur l'Iran170(*) ».

Les Chinois ont tout intérêt à ce que l'accord soit signé au plus vite pour assurer la diversification de leur approvisionnement en pétrole, mais aussi parce que l'Iran est un partenaire géopolitique171(*). Les Chinois avaient déjà joué un rôle important lors des négociations ayant abouti à l'accord de 2015. C'est ce qu'a révélé l'ancien chef de la diplomatie iranienne de l'époque, Mohammad JavadZarif, dans un ouvrage publié juste avant de passer la main au  gouvernement de l'ultraconservateur EbrahimRaïssi, en août 2021. Dans ce long récit présentant les coulisses des deux années de négociations ayant abouti à l'accord de 2015, Mohammad JavadZarif écrit que chaque fois que celles-ci se trouvaient dans l'impasse, le ministre chinois des Affaires étrangères intervenait, présentait une initiative nouvelle et parvenait à relancer les pourparlers172(*).

Mais depuis quelques mois, les relations entre Pékin et Téhéran ont franchi une nouvelle étape avec la signature d'un partenariat historique de 25 ans couvrant des domaines aussi variés que l'énergie, la sécurité, les infrastructures et les communications. Outre la livraison de pétrole à prix réduit,  cet accord stratégique, dont la mise en oeuvre a débuté le 15 janvier 2021, prévoit aussi l'assistance sécuritaire de la Chine à l'Iran, notamment par le biais de livraisons de matériel militaire. « La Chine a signé très peu de partenariats de ce type. Il s'agit là d'une véritable alliance diplomatique », précise Jean-François Di Meglio173(*).

Pour Pékin,  qui continue d'importer du pétrole iranien malgré le risque de se voir infliger des amendes par le Trésor américain, une levée des sanctions de Washington sur les échanges commerciaux avec l'Iran constituerait une aubaine. Avant  le retrait américain de l'accord en 2018, la Chine importait près de 10 % de son pétrole depuis l'Iran et avait investi dans des infrastructures permettant d'acheter des volumes plus conséquents. Selon Jean-François Di Meglio, « les Chinois sont très intéressés par le brut iranien parce que leurs raffineries sont adaptées au traitement de ce pétrole lourd qui sert de fuel pour approvisionner leurs centrales électriques, leur chauffage ou pour faire rouler leurs camions »174(*).

À Pékin aussi, depuis quelques semaines, la diplomatie chinoise fonctionne à plein régime. Entre le 10 et le 14 janvier2021, le ministre des Affaires étrangères Wang Yi  a reçu pas moins de cinq de ses homologues dans la région. Les chefs de la diplomatie de l'Arabie saoudite, du Koweït, d'Oman, du Bahreïn et de l'Iran, mais aussi le ministre turc des Affaires étrangères et le secrétaire général du Conseil de coopération du Golfe (CCG), ont défilé tour à tour dans la capitale chinoise. Et ces visites ne sont pas sans lien avec la phase finale des négociations sur le nucléaire iranien puisqu'elles permettent de rassurer les pays du Golfe sur le dossier, tout en réaffirmant les alliances économiques. L'occasion également pour la Chine de montrer à Washington qu'elle joue désormais un rôle clef dans une région où les Américains sont en perte d'influence175(*).

Ce n'est pas forcément le point de vue des Occidentaux même si nul ne pense que Pékin peut dicter sa loi à Téhéran. Les deux pays rejettent l'impérialismeaméricain qu'ils jugent facteur de déstabilisation au Proche-Orient comme dans le reste du monde. Depuis 2009, la Chine est le principal partenaire commercial de l'Iran et les relations entre les deux pays ne cessent de se renforcer. Malgré l'embargo, les deux pays ont conclu, en mars 2021, un accord commercial d'une durée de vingt-cinq ans portant sur pas moins de 400 milliards de dollars176(*)

* 167 Mohammad-Reza Djalili, L'Iran dans son contexte régional, 2012, p.66.

* 168Thierry Kellner, « La Chine et l'Iran : une alliance en formation ? », inL'Iran en quête d'équilibre, 2020, p.43.

* 169 Le Monde, l'Iran accuse Israël d'une attaque contre un site nucléaire, 2021, p. 2.

* 170 Matthew Pottinger, « Chine/États-unis : les prémices d'une guerre froide » in Institut Montaigne, 2022, p.86.

* 171 Jean-François Di Meglio, spécialiste de la Chine et président d'Asia Centre sur France 24, Août 2015.

* 172Thierry Coville, spécialiste de l'Iran, contacté par France 24, Août 2015.

* 173Ibidem

* 174 Ibidem.

* 175Le ministre des Affaires étrangères iranien, Mohammad JavadZarif, et son homologue chinois, Wang Yi ont signé un « pacte de coopération stratégique de vingt-cinq ans » samedi 27 mars 2021, à Téhéran, FRANCE 24

* 176 Emmanuel Lincot Spécialiste de l'histoire politique et culturelle de la Chine contemporaine, Institut Catholique de Paris, 2021, p.103.

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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius