Rivalité sino-américaine et son impact sur le nucléaire iranienpar William Lulonga Welongo Université de Lubumbashi - Licence en Relations Internationales 2021 |
§2. L'importance du programme nucléaire pour le régime iranienL'arrivée du « réformiste » Hassan Rohani au pouvoir a ouvert une nouvelle période dans la politique étrangère de l'Iran. Ses promesses, durant la campagne électorale, ont laissé entendre la survenue d'une nouvelle étape. Le programme nucléaire était l'une des priorités qu'Hassan Rohani a promis de réaliser à travers la conclusion d'un accord avec la communauté internationale. Une fois arrivé au pouvoir, le nouveau président a tenu sa promesse. Cependant, cette décision n'émane pas de la conviction personnelle du nouveau président. Si on analyse le système politique et le processus de prise de décision en Iran on observera que la décision dans cette affaire ne relève pas uniquement du président du gouvernement, dès lors qu'elle implique un certain nombre d'acteurs. Du coup, une décision de cette envergure ne peut être encouragée par un simple changement de gouvernement151(*). Pour autant, les décisions sur ces questions relèvent directement du Guide suprême, et d'une manière indirecte de l'influence qu'exercent les Gardiens de la Révolution, et dans une moindre mesure les deux fractions politiques, conservateurs et réformistes, et en dernier lieu, les scientifiques. Cela signifie que les politiques établies par les gouvernements en place incarnent la volonté de ces puissants appareils. Pour le président du gouvernement, le défi réside dans le pouvoir de concilier les intérêts de ces appareils avec sa vision et la politique qu'il veut établir. Le problème actuel c'est que vue l'importance du programme nucléaire pour le régime des ayatollahs, il est difficile d'imaginer que le Guide suprême et les Gardiens de la Révolution acceptent facilement de renoncer à un projet qui devrait leur garantit la survie, l'indépendance, et surtout la légitimité152(*). L'idée de développer la technologie nucléaire est partagée par toutes les élites iraniennes avant même la révolution de 1979. Cela étant, on peut expliquer la nouvelle politique d'ouverture qui vient d'établir Rohani par la volonté du régime iranien de sortir de la récession économique qui frappe le pays, affectant négativement le régime des ayatollahs et l'image du Guide suprême. En fait, les critiques formulées par Hassan Rohani durant la campagne électorale au gouvernement d'Ahmadinejad étaient autour de deux points essentiels; la viabilité de l'« économie de la résistance» qui a conduit le pays a l'abîme, et l'incapacité de ce dernier à arriver à conclure un accord sur le programme nucléaire pour la levée de sanctions internationales153(*). Convient-il de signaler dans ce sens qu'au cours de l'exercice économique de 2012/2013, les exportations de gaz et de pétrole ont chuté d'environ 50% affectant directement l'ensemble des exportations globales. En 2014, l'extraction du pétrole est passée à un minimum de 2 millions et demi de barils par jour, et en 2015 celui-ci est tombé à 2 millions de barils par jour. Les sanctions internationales ont donc eu un impact négatif sur les taux d'inflation et de chômage, accélérant, par ricochet, la détérioration du niveau de vie de la population. Pour faire face à cette situation, il semble que le Guide suprême a accepté la nouvelle stratégie proposée par les « réformistes » qui optent par la conclusion de l'accord sur le programme nucléaire. Pour y parvenir, il a mis en avant Hassan Rohani, un des responsables les plus proches des décideurs du régime et ancien chef du comité de négociation sur le programme nucléaire. L'objectif principal est de sauver le pays de la crise économique tout en renforçant la légitimité du régime154(*). * 151 Shahram CH., Iran's `Risk-Taking' in Perspective, in IFRI, 2008, p.12. * 152Montoya Cerio, F.,Irán y su estratégicoacuerdonuclear, Instituto Español de EstudiosEstratégicos, Documento de Opinión, 2016, p.2-4 * 153SmolarP, Nucléaire iranien : Benyamin Netanyahou dénonce « une erreur historique », Le monde, 14 juillet 2015, p. 65. * 154Cohen, S., Israël et Iran : La bombe ou le bombardement ? Centre d'Études et de Recherches International, Paris, Printemps 2010, p.116. |
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